Préambule
Nous, chefs d’État et de gouvernement et hauts représentants, réunis à l’occasion du Sommet de l’avenir, au Siège de l’Organisation des Nations Unies, les 22 et 23 septembre 2024,
Réaffirmant notre attachement aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et à la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi que nos obligations respectives découlant du droit international,
Réaffirmant également notre attachement au Programme de développement durable à l’horizon 2030, y compris à la Déclaration politique adoptée à l’issue du Sommet sur les objectifs de développement durable, qui s’est tenu en 2023, et notre engagement envers les générations futures, tel qu’énoncé, entre autres, dans la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement,
Sachant que les générations futures sont toutes les générations qui n’existent pas encore, qui sont à venir et qui hériteront un jour de cette planète,
Constatant que de nombreuses juridictions nationales ainsi que certaines cultures et religions s’efforcent de tenir compte des besoins et de préserver les intérêts des générations futures et de promouvoir la solidarité, la justice et l’équité entre les générations,
Conscients que les décisions, l’action et l’inaction des générations actuelles ont un effet multiplicateur à travers les générations, et déterminés par conséquent à faire en sorte que les générations actuelles agissent de manière responsable pour tenir compte des besoins et de préserver les intérêts des générations futures,
Déclarant que nous devons tirer les leçons de nos réalisations et de nos échecs passés et de leurs conséquences, afin de parvenir à un monde plus durable, plus juste et plus équitable pour les générations actuelles et futures, et sachant que le passé, le présent et l’avenir sont indissociables,
Affirmant que les enfants et les jeunes sont des agents de changement et que les relations et le dialogue entre les générations, y compris avec et entre les enfants, les jeunes et les personnes âgées, doivent être pris en considération dans l’élaboration de nos politiques et dans nos prises de décision afin de tenir compte des besoins et de préserver les intérêts des générations futures,
Sachant que le moyen le plus efficace de tenir compte des besoins et de préserver les intérêts des générations futures est de s’employer à ancrer solidement une paix et une sécurité internationales durables, le développement durable, le respect universel et la réalisation des droits humains et des libertés fondamentales pour toutes et tous et la défense de l’état de droit,
Constatant la complexité et l’interdépendance des perspectives, défis et risques que connaissent les générations actuelles, ainsi que des effets des tendances démographiques mondiales prévisibles,
Affirmant une fois de plus notre détermination à construire un système multilatéral plus fort, plus efficace et plus résistant, fondé sur le droit international, avec l’ONU en son centre, reposant sur la transparence et la confiance, dans l’intérêt des générations actuelles et futures,
Déclarons ce qui suit :
Principes directeurs
Afin que les générations actuelles saisissent cette chance qui leur est offerte de laisser un avenir meilleur aux générations futures et que nous respections l’engagement que nous avons pris de répondre aux exigences du présent tout en tenant compte des besoins et en préservant les intérêts des générations futures et en ne laissant personne de côté, nous observerons les principes directeurs suivants :
- Le maintien de la paix et de la sécurité internationales ainsi que le plein respect du droit international doivent être promus conformément aux objectifs et aux principes de la Charte des Nations Unies.
- La quête et la jouissance des droits humains et des libertés fondamentales pour toutes et tous, dont les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement, doivent être respectées, protégées et promues, sans distinction ni discrimination d’aucune sorte.
- Les générations futures doivent pouvoir prospérer et parvenir à un développement durable. Pour ce faire, il faudra, notamment, éliminer la transmission intergénérationnelle de la pauvreté et de la faim, de l’inégalité et de l’injustice, et tenir compte des défis particuliers que doivent relever les pays les plus vulnérables, en particulier les pays africains, les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement.
- La solidarité et le dialogue entre les générations ainsi que la cohésion sociale doivent absolument être encouragés si l’on veut établir les bases de la prospérité des générations futures et, à cet égard, le rôle des familles et des politiques favorables à la famille et axées sur la famille, qui contribuent au développement durable, doit être reconnu.
- Un environnement propre, sain et durable, où l’humanité vit en harmonie avec la nature, doit être créé et préservé en s’attaquant d’urgence aux causes et aux effets néfastes des changements climatiques et en intensifiant l’action collective en faveur de la protection de l’environnement.
- Promouvoir le recours responsable et éthique à la science, à la technologie et à l’innovation, en suivant les principes d’équité et de solidarité, est nécessaire pour créer un climat ouvert, juste et inclusif à l’appui des innovations scientifiques et techniques et de la coopération numérique, tout en comblant les fossés dans les domaines de la science, de la technologie et de l’innovation, y compris la fracture numérique, à l’intérieur des pays et entre eux.
- Réaliser l’égalité des genres, autonomiser toutes les femmes et toutes les filles et leur permettre la pleine jouissance de leurs droits humains et de leurs libertés fondamentales, sans discrimination d’aucune sorte, sont des conditions nécessaires à un avenir durable.
- Faire participer de manière pleine et égale à la société les personnes handicapées appartenant aux générations actuelles et futures, y compris leur donner la possibilité d’être activement associées à la prise de décision, est essentielle pour garantir que personne n’est laissé de côté.
- Un avenir prospère et durable est impossible si le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée ne sont pas éliminées et que l’égalité raciale et l’autonomisation de toutes les personnes ne sont pas réalisées.
- Un système multilatéral ouvert, transparent et efficace est essentiel pour renforcer la solidarité et la coopération internationales, rétablir la confiance et créer un monde sûr, juste et durable, où la dignité humaine est garantie.
Engagements
Guidés par ces principes, nous nous engageons à :
- Promouvoir la stabilité, la paix et la sécurité internationales, en réglant pacifiquement les conflits et les crises.
- Garantir des sociétés pacifiques, inclusives et justes, tout en tenant compte des inégalités dans les pays et entre eux ainsi que des besoins propres aux pays en développement et aux personnes en situation de vulnérabilité.
- Mettre en œuvre des politiques et des programmes visant à réaliser l’égalité des genres et l’autonomisation de toutes les femmes et de toutes les filles, éliminer toutes les formes de discrimination et de violence, de harcèlement et d’abus à l’encontre des femmes et des filles, y compris la violence sexuelle et fondée sur le genre, et garantir la participation pleine, effective et en toute égalité des femmes et l’égalité des chances en matière de leadership à tous les niveaux de la prise de décision, dans toutes les sphères de la société.
- Éliminer tous les vestiges des inégalités historiques et structurelles, notamment en reconnaissant et en prenant en compte les tragédies du passé et leurs conséquences, prévoyant des mesures de réparation efficaces, et éliminer toutes les formes de discrimination.
- Honorer, promouvoir et sauvegarder la diversité culturelle et le patrimoine culturel, ainsi que les langues, les systèmes de connaissance et les traditions, et favoriser le dialogue interculturel et interreligieux, notamment en encourageant la coopération internationale pour le retour ou la restitution de biens culturels ayant une valeur spirituelle, ancestrale historique et culturelle pour les pays d’origine, qu’il s’agisse d’objets d’art, de monuments, de pièces de musée, de manuscrits, de documents ou autres et exhorter les entités privées à faire de même, notamment par le dialogue bilatéral et avec l’aide de mécanismes multilatéraux, selon le cas.
- Prendre en compte, respecter, promouvoir et protéger les droits des peuples autochtones, leurs territoires, leurs terres et leurs écosystèmes, tout en préservant leurs traditions, leurs croyances spirituelles et leurs connaissances ancestrales, renforcer leurs institutions politiques, juridiques, économiques, sociales et culturelles distinctes, tout en conservant le droit, si tel est leur choix, de participer pleinement à la vie politique, économique, sociale et culturelle de l’État ; et garantir leur droit de participer à la prise de décision sur des questions qui peuvent avoir une incidence sur leurs droits, en fonction du droit applicable et conformément aux obligations internationales en matière de droits humains.
- Appliquer des stratégies globales et ciblées pour parvenir à une croissance économique et à un développement durable sans exclusive, à la sécurité alimentaire et à l’élimination de la pauvreté sous toutes ses formes et dans toutes ses dimensions, y compris l’extrême pauvreté, et pour lutter contre la féminisation de la pauvreté, afin de répondre aux besoins des générations actuelles, de parvenir à une résilience mondiale et d’établir une base plus prospère pour les générations futures.
- Agir de toute urgence pour remédier aux grands problèmes environnementaux et appliquer des mesures visant à réduire les risques de catastrophe et à renforcer la résilience, à inverser la dégradation des écosystèmes et à garantir un environnement propre, sain et durable ; et réaffirmer qu’il importe d’accélérer les mesures visant à lutter contre les changements climatiques et ses effets néfastes, conformément au principe des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives, eu égard aux contextes nationaux différents, en notant l’importance, pour certains, de la notion de « justice climatique »..
- Tirer parti des avantages des technologies existantes, nouvelles et émergentes et atténuer les risques connexes grâce à une gouvernance efficace, inclusive et équitable à tous les niveaux, en intensifiant la collaboration pour réduire la fracture numérique à l’intérieur des pays développés et des pays en développement et entre eux, en augmentant les efforts de renforcement des capacités dans le domaine de la science, de la technologie et de l’innovation et en encourageant le transfert de technologies selon des modalités arrêtées d’un commun accord.
- Renforcer la coopération entre les États dans le cadre des mesures adoptées face aux tendances et aux réalités démographiques, telles que la croissance rapide de la population, la baisse des taux de natalité et le vieillissement des populations, et compte tenu des liens entre les questions de population et le développement dans toutes les régions, en tenant compte des besoins et en préservant les intérêts des générations actuelles et futures, notamment des enfants et des jeunes, et des contributions substantielles des personnes âgées aux efforts de développement durable.
- Renforcer la coopération entre les États pour que les migrations se déroulent en toute régularité, dans la sécurité, en bon ordre entre les pays d’origine, les pays de transit et les pays de destination, notamment en prévoyant des filières de migration régulière qui soient plus diversifiées, accessibles et souples, tout en reconnaissant les contributions positives des migrants à une croissance inclusive et au développement durable.
- Investir dans un enseignement de qualité accessible, sûr, inclusif et équitable pour toutes et tous, y compris l’éducation physique et le sport, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie, la formation technique et professionnelle et l’habileté numérique, en permettant l’acquisition et le transfert intergénérationnels de connaissances et de compétences afin d’améliorer les perspectives des générations futures.
- Protéger le droit de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, grâce à une couverture sanitaire universelle et à des systèmes de santé renforcés et résilients, ainsi qu’à un accès équitable à des médicaments, vaccins, traitements et autres produits de santé sûrs, abordables, efficaces et de qualité, pour que les générations actuelles et futures aient une vie saine et que leur bien-être soit garanti.
Mesures
Conscients que c’est aux gouvernements, à tous les niveaux, qu’il revient en premier lieu, eu égard à leurs cadres constitutionnels respectifs, de tenir compte des besoins et de préserver les intérêts des générations futures, nous prendrons les mesures suivantes pour réaliser, institutionnaliser et suivre les engagements susmentionnés dans les politiques nationales, régionales et mondiales :
- Tirer parti de la science, des données, des statistiques et de la prospective stratégique pour assurer une réflexion et une planification à long terme, élaborer et adopter des pratiques durables et engager les réformes institutionnelles nécessaires pour garantir une prise de décision fondée sur des données probantes, tout en faisant en sorte que la gouvernance soit plus dynamique, plus souple et plus sensible aux perspectives, risques et défis futurs.
- Garantir un accès inclusif et équitable à la connaissance, à la science et à l’information, tout en promouvant l’innovation, la pensée critique et les compétences nécessaires à la vie courante, afin de créer des générations de citoyens qui soient des agents de changement et de transformation positifs.
- Renforcer nos systèmes de comptabilité nationale et mondiale, notamment en favorisant le recours à des études d’impact prospectives et fondées sur des données probantes, en développant des analyses de risque anticipatives plus solides et en encourageant l’utilisation d’un ensemble de critères permettant de mesurer les progrès accomplis en matière de développement durable qui complètent le produit intérieur brut ou ne se limitent pas à celui-ci.
- Investir dans les capacités pour mieux se préparer et répondre aux chocs, crises et défis mondiaux futurs, et adopter une planification et une prospective fondées sur des données probantes pour éviter et atténuer les risques, tout en veillant à ce que le s plus pauvres et les plus vulnérables ne subissent pas des coûts et des charges disproportionnés en matière d’atténuation, d’adaptation, de restauration ou de renforcement de la résilience.
- Assurer la coordination à tous les niveaux de l’administration, y compris aux niveaux national et local, pour l’évaluation, l’élaboration et l’application de politiques qui tiennent compte des besoins et préservent les intérêts des générations futures.
- Renforcer la coopération avec les parties prenantes, telles que la société civile, les universités, la communauté scientifique et technologique et le secteur privé, et encourager les partenariats entre les générations, en favorisant une approche associant l’ensemble de la société, pour mettre en commun les meilleures pratiques et développer des idées innovantes et tournées vers l’avenir, afin de tenir compte des besoins et de préserver les intérêts des générations futures.
- Doter le système multilatéral, y compris l’Organisation des Nations Unies, des moyens nécessaires pour aider les États qui le demandent à mettre en œuvre la présente déclaration et à intégrer les besoins et les intérêts des générations futures et la réflexion à long terme dans l’élaboration des politiques en encourageant la coopération et en facilitant un plus grand recours à la planification par anticipation et à la prospective, reposant sur la science, les données et les statistiques, et en ayant un rôle de sensibilisation et de conseil pour ce qui est des incidences intergénérationnelles ou futures probables des politiques et des programmes.
- Favoriser une culture institutionnelle dans l’ensemble du système des Nations Unies, tournée vers l’avenir, afin de faciliter la prise de décision fondée sur des données scientifiques et probantes en développant diverses capacités, notamment la planification par anticipation, la prospective et les connaissances prospectives stratégiques, et en encourageant systématiquement la réflexion à long terme et intergénérationnelle à tous les niveaux.
- Conscients de l’importance du rôle de conseil et de sensibilisation que l’ONU devrait jouer auprès des générations futures, nous :
a) Prenons note de la proposition du Secrétaire général de nommer une envoyée spéciale ou un envoyé spécial pour les générations futures afin d’aider à mettre en œuvre la présente déclaration ;
b) Décidons de convoquer une réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale sur les générations futures pour examiner la mise en œuvre de la présente déclaration à sa quatre-vingt-troisième session et faire le point sur les mesures prises pour tenir compte des besoins et préserver les intérêts des générations futures ;
c) Demandons au Secrétaire général de présenter un rapport à l’Assemblée générale sur la mise en œuvre de la présente déclaration pour examen à la réunion plénière de haut niveau qui se tiendra à sa quatre-vingt-troisième session.