Le processus de négociation
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Le processus de négociation
La seule façon pour une délégation d’atteindre ses objectifs par la négociation est d’arriver à un accord avec les autres délégations. Cette section porte sur les stratégies et les tactiques permettant de parvenir à un texte de résolution.
Un processus répétitif
L’essentiel de la négociation à une conférence internationale est « textuel », c.à.d. décider sur les mots spécifiques qui vont être adoptés par la conférence. Le processus consiste à resserrer un large éventail de réponses ou formulations possibles pour les ramener à une seule que la conférence peut accepter. Cet éventail n’est pas infini : il exclut les formulations qui ne sont pas acceptables pour l’un des participants. Ceci délimite le « champ d’accord possible ».
Identifier cette solution est un processus répétitif et continu, qui démarre avec une discussion exploratoire, pour que chacun soit conscient des intérêts et préférences des autres. La discussion (habituellement appelée débat dans une conférence) s’oriente alors vers une réduction du champ d’accord possible et finalement une formulation de propositions spécifiques. Ces propositions sont alors discutées officieusement et deviennent les sujets de négociations officieuses.
A cette étape des travaux, les propositions de texte ont été déposées et sont examinées ligne par ligne dans une réunion officieuse conduite par un facilitateur. Ceci permet d’identifier où il y a un accord et où les délégations souhaitent modifier le texte du projet initial. Il peut y avoir plusieurs examens pour revoir les modifications proposées du texte jusqu’à ce qu’un accord soit atteint. Quand un accord sur le libellé d’un projet de proposition ne peut pas être atteint, le président peut intervenir pour aider les délégations à parvenir à un consensus. S’il n’y parvient pas, une délégation peut demander à la commission de voter sur le projet de proposition pour décider de son sort.
C’est une progression vers un résultat. C’est pourquoi le concept d’élan est pertinent et constitue un élément important pour les négociateurs qui recherchent un résultat. Les conférences peuvent perdre leur élan, être enlisées, ou même caler. Certaines négociations retournent en arrière sur une question, où elles étaient avant que la question ne soit réglée, et réouvrent le débat voire les négociations la concernant. Par la suite, la conférence doit retrouver la voie du progrès s’il elle veut finalement atteindre un accord.
Faire passer vos souhaits dans la proposition
Le dépôt officiel de propositions spécifiques est d’une importance cruciale : une conférence peut seulement se mettre d’accord sur quelque chose qui a été proposé. Il s’ensuit que si les souhaits d’une délégation ne sont pas reflétés dans la proposition formellement déposée devant la conférence, ils ne seront pas reflétés non plus dans la décision. Pour porter les objectifs d’une délégation, la proposition devrait reprendre certains éléments qui traduisent ses objectifs.
Au vu des sections précédentes, il y a clairement plusieurs façons de procéder :
- · Faites vous-mêmes une proposition (seul ou en association avec d’autres délégations)
- · Encouragez une autre délégation à formuler une proposition qui réponde à vos propres souhaits
- · Persuadez une autre délégation à revoir sa proposition, pour qu’elle tienne davantage compte de vos souhaits
- · Fusionnez votre proposition avec celle d’une autre délégation
- · Persuadez la conférence d’amender une proposition avancée par une autre délégation, de nouveau pour l’aligner davantage sur ce que vous souhaitez
Si, comme c’est souvent le cas, une délégation a déjà aligné sa proposition, alors appuyez la ou laissez la juste faire le travail
Solutions négociées et construites
Il y a essentiellement trois stratégies possibles qui peuvent appliquées séparément, successivement ou en combinaison pour atteindre le consensus :
- 1. « Diviser » les divergences (c.à.d. que vous répondez aux souhaits de délégations sur certains éléments pour qu’elles vous permettent en échange de progresser sur d’autres).
- 2. « Donner » à d’autres délégations quelque chose qu’elles souhaitent, pour que vous puissiez progresser sur les points contestés.
- 3. Trouver une solution créative, qui met de côté les divergences ou permet d’une certaine manière aux parties d’atteindre leurs objectifs respectifs.
Chacune de ces trois solutions peut être utilisée d’une ou de deux façons :
- 1. « La solution négociée » est élaborée par des délégations ayant des vues différentes, qui travaillent ensemble (au sein de la commission dans son ensemble ou dans un petit groupe en privé, qui fait rapport ensuite à la commission). Les délégations échangent des propositions et suggèrent des amendements à ces propositions jusqu’à ce que des solutions acceptables soient trouvées
- 2. « La solution construite », est proposée par le président ou un représentant ou parfois par un petit groupe de représentants travaillant ensemble. Les partisans des différentes positions ne participent pas directement dans sa rédaction, mais cette solution n’a aucune chance d’être acceptée si leurs vues ne sont pas bien comprises et prises en compte autant que soit possible par l’auteur. Il doit consulter largement et sur cette base, développer des propositions acceptables pour tous ou au moins pour la plupart des délégations
De l’une ou l’autre façon, une solution peut seulement émerger si les délégations ont un sens concret de ce que veulent les autres. Par conséquent, une façon de réaliser en partie les souhaits d’une délégation consiste à faire savoir aux autres délégations les intentions et préoccupations d’une délégation. La transparence et la diffusion de l’information sur ces objectifs sont toutes deux importantes pour leur réalisation.
Eliminer les textes en compétition
Quand deux ou plusieurs textes sont en compétition, il existe plusieurs stratégies pour amener leurs auteurs à les retirer :
- · Il peut être possible de les persuader que leur proposition ne sert pas réellement leurs objectifs, qu’elle n’est pas nécessaire car une autre proposition les sert également de façon efficace, ou encore qu’elle ne va pas être acceptée par la conférence (ces arguments peuvent être combinés)
- · Il peut être aussi possible de persuader d’autres délégations de faire pression pour qu’elles retirent leurs projets
- · Si nécessaire, il peut être possible d’avancer un amendement formel, qui change la signification de la proposition d’une autre délégation et l’amène à la retirer
- · Il peut être possible de négocier une fusion de deux propositions en une seule, que leurs auteurs peuvent appuyer
Il y a plusieurs raisons qui justifient normalement l’intérêt à avoir une seule proposition devant la conférence. Peut-être que la plus évidente est que l’appui apporté aux propositions en compétition est automatiquement dénié à votre proposition. Par ailleurs, des délégations peuvent appuyer un texte en compétition, non pour son mérite mais en raison de la qualité de ses auteurs. Inversement, si une proposition a le support de nombreuses autres délégations, elle attire davantage d’appuis qui suivent la majorité. Pour ces deux raisons, une position est plus forte s’il n’y a pas de compétition. Même si une délégation pense qu’elle va l’emporter, une division est rarement à son avantage. D’autres délégations, comme la vôtre, vont bénéficier du consensus et être prêtes par conséquent à vous satisfaire dans toute la mesure du possible.
Pause
Quand des conflits ou des vues opposées apparaissent durant une réunion officielle, le président ou l’une des délégations peut demander que la réunion soit suspendue pour un court moment. Une pause dans les travaux permet de :
- · Centrer l’attention des délégations sur la question
- · Donner du temps aux délégations pour analyser la situation et considérer la suite des travaux
- · Donner du temps pour recueillir davantage d’information ou d’appui
Une pause peut encourager les délégations dont les vues s’opposent à adopter une attitude plus constructive. Mais, il y a toujours un risque que ces délégations utilisent ce temps pour renforcer leur position et/ou que le temps accordé soit trop court pour résoudre le problème.
Deux erreurs courantes
Deux erreurs font souvent échouer les négociations :
- 1. Rejeter un accord qui a des bénéfices, mais moins qu’escomptés
- 2. Rejeter un accord qui a des bénéfices, parce que l’autre en aurait plus
Ces deux erreurs viennent d’une application erronée du principe de justice.
Médiation
Parfois, les négociateurs utilisent l’assistance de médiateurs.
Les caractéristiques essentielles des médiateurs sont les suivantes :
- · Ils ne sont pas parties à la négociation
- · Ils sont acceptés comme médiateurs par les parties
- · Leur rôle de médiateur est accepté par les parties
Leurs fonctions peuvent être de :
- · Porter des messages entre les parties
- · Donner aux parties une perception extérieure de leur position et de ses chances d’aboutir
- · Avancer de possibles solutions sur les questions divisant les négociateurs
- · Encourager les solutions du médiateur sur ce qui divise les négociateurs
Dans tous les cas, les parties elles-mêmes restent celles qui prennent la décision finale. Elles demeurent souveraines et responsables : elles n’ont pas d’excuse si le résultat est inacceptable pour ceux qu’ils représentent.
N’importe qui peut servir comme médiateur, pourvu que les parties soient d’accord. Le président de la conférence est souvent bien placé pour cela, bénéficiant d’une compréhension inégalée des questions et des positions des parties et du prestige de sa position. Mais le président manque souvent de temps pour agir comme médiateur ou ne veut pas prendre les risques que ça implique. Il peut nommer alors un facilitateur ou « ami du président » pour essayer de trouver une solution. Des délégations se proposent souvent comme médiateurs. A l’occasion, quelqu’un qui n’est pas un représentant peut accepter de servir comme médiateur.
La médiation peut sembler une option attractive dans un certain nombre de situations. Ainsi, une délégation peut désirer recourir à un médiateur si elle :
- · Estime qu’elle manque d’empathie, de connaissance, de temps ou d’intérêt nécessaires pour résoudre une question en négociant directement avec les autres parties
- · A une haute estime des qualités d’un médiateur particulier et est confiante qu’il va prendre comme il se doit en compte les préoccupations des différentes délégations et le mandat de la conférence
- · Est prête à faire certaines concessions mais pense qu’elles vont être plus facilement acceptées dans le pays si elles sont recommandées par un médiateur
- · Appartient à une culture qui a un haut degré de respect pour l’autorité
- · Se sent tenue de montrer sa forte antipathie envers certaines délégations en ne traitant pas directement avec elles
Le Mediateur Comme Formulateur
Dans la recherche d’une solution au problème posé par plusieurs délégations ayant des vues ou des objectifs différents, voire opposés, les pays ou les groupes de pays les plus puissants trouvent souvent difficiles de concevoir une solution. Leurs responsabilités sont lourdes et leurs systèmes de prise de décision sont lents et complexes. Les délégations de certains pays plus petits peuvent être plus agiles. Elles peuvent explorer des possibilités plus librement, sans exposer le statut de négociation de la puissance ou du groupe plus grand. Elles sont mieux placées pour aboutir à la solution acceptable pour la puissance ou le groupe plus grand. Elles sont souvent dans une position leur permettant de façonner le résultat de la conférence et de là, de promouvoir leurs propres intérêts.
Il y a une autre raison sensible concernant le choix du médiateur : un médiateur ne va probablement pas réussir - et n’est donc pas utile comme médiateur – s’il a des objectifs opposés à ceux d’une des parties à la négociation.
Négocier en groupes
Une pratique plus courante que la médiation est la négociation entre groupes. Dans des négociations complexes impliquant de grands nombres de délégations, les plus importantes négociations ont lieu entre représentants de groupes. Parfois, surtout en phase finale d’une conférence, ces représentants se rencontrent seuls ; mais il n’est pas inhabituel pour le groupe entier d’être présent aux côtés de son porte-parole, bien que cette personne soit la seule à parler.
Si les représentants de membres du groupe sont présents durant la négociation entre porte-paroles, les porte-paroles peuvent se consulter de façon officieuse, mais les bénéfices essentiels sont les suivants :
- · Les membres du groupe peuvent voir que leurs porte-paroles représentent les vues du groupe de façon appropriée et compétente. Dans le cas improbable où ils ne sont pas satisfaits, ils connaissent tous les détails des échanges
- · Ils peuvent voir tout ce qui est dit et fait dans les négociations et ils développent alors une compréhension qui serait difficile à acquérir seulement à partir de rapports
- · En suivant de cette façon les négociations finales, ils peuvent acquérir le sentiment que le résultat leur appartient et se sentir en conséquence plus confortables quand le moment vient pour eux de participer individuellement à une décision collective de la conférence
Négocier de cette façon offre plusieurs avantages évidents. L’un d’entre eux est que, spécialement dans une grande conférence, il est beaucoup plus simple et rapide que dans une négociation à laquelle tout le monde participe. En fait, de nombreuses conférences ne peuvent pas parvenir à un résultat dans le temps disponible si chaque délégation participe aux négociations finales. De plus, comme chaque groupe va sans doute choisir le négociateur le plus capable à sa disposition, chaque délégation sait que ses intérêts sont représentés de façon plus efficace que si elle les représentait elle-même.
Mais le développement d’objectifs, de positions et de stratégies de négociation en commun nécessite un haut niveau de consultations et souvent de négociation dans le groupe. Il est fréquent pour les groupes de tenir des réunions prolongées et parfois animées pour résoudre les divergences. Quand le groupe est grand, il charge souvent un comité de rédaction plus petit de faire le travail détaillé et de lui soumettre des propositions.
Malheureusement, du point de vue de ceux (spécialement les pays plus petits ou plus pauvres) qui attendent beaucoup de la coopération internationale, les positions de groupes tendent à être plus rigides que celles que des délégations individuelles. Ceci tient à deux facteurs. Le premier facteur est intrinsèque au processus de décision des commissions. Dans de nombreuses commissions, chaque participant trouve facile d’insister sur ce qu’il ne peut pas accepter et la commission n’a pas d’autre choix que d’accepter cette limitation. Inversement, si un participant souhaite faire une proposition, il fait face à la tâche énorme de convaincre les autres membres du groupe d’accepter cette proposition. Souvent, il faut des négociations dans le groupe et le résultat est un compromis qui réduit la liberté de négociation de ceux qui vont passer au stade suivant de négociation, à savoir avec les autres groupes.
Négocier dans ce système peut soulager les petites délégations de la charge qu’elles auraient autrement, mais ne les libère pas d’autres responsabilités. L’enjeu pour elles est de trouver un équilibre approprié entre leurs objectifs individuels ou nationaux sur des questions spécifiques et le désir de leurs gouvernements de faire preuve de solidarité avec le groupe. L’autre difficulté tient à ce qu’un négociateur pour un groupe est responsable vis-à-vis des membres individuels du groupe. Il peut être critiqué ou autrement entravé par les membres du groupe qui le jugent trop aventureux ou pas assez rapide à saisir les éventuelles possibilités, entre autres choses.
Le système assigne de lourdes responsabilités aux porte-paroles des groupes. Non seulement, ils portent les intérêts du groupe entier, les obligeant à négocier avec des enjeux élevés, mais ils doivent aussi s’assurer qu’ils représentent correctement les vues du groupe. Un des défis est de savoir jusqu’où aller tout en incarnant toujours le groupe qu’ils représentent.
La porte-parole d’un groupe doit avoir une façon rapide de communiquer avec les membres de son groupe au fur et à mesure que la situation progresse. Certains utilisent une équipe de messagers qui circulent entre les représentants.
Parfois, les groupes fonctionnent à deux niveaux, quand les groupes constitutifs (par exemple le Groupe arabe au sein du G77 ou le Groupe nordique au sein de l’UE) développent des positions et nomment quelquefois des représentants qui peuvent négocier en leur nom au sein du groupe plus large. Les groupes constitutifs peuvent aussi jouer un rôle en diffusant de l’information venant du porte-parole du groupe le plus large.
Dans les conférences Modèle ONU, les groupes de négociation sont rarement, voir jamais utilisés. La plupart des représentants sont tellement occupés à préparer la position de leur propre pays sur une question particulière qu’ils ont souvent peu de temps pour explorer la position qu’un groupe politique peut avoir sur la même question. Avec un nombre plus réduit de sujets couverts dans le temps limité de la conférence, davantage de temps pourrait être consacré au processus de négociation et à la découverte de la nature des groupes de négociation.