La pandémie de COVID-19 peut être considérée comme un « test de résistance » pour la société mondiale, emportant des répercussions considérables sur l'éducation, l'économie, la santé, l'agriculture, les transports, et bien d'autres secteurs encore. Des experts de l'Université de Zurich (Suisse), une institution membre de l'Impact Universitaire des Nations Unies (UNAI) qui sert de Centre pour l'Objectif de développement durable (ODD) 13 : Lutte contre les changements climatiques, ont étudié ces impacts dans une perspective de durabilité afin d’identifier les leçons que nous pouvons tirer de la pandémie, et comment celles-ci peuvent être appliquées pour faire face au changement climatique.
Jan R. Baiker, Nadia Castro, Veruska Muccione, Christian Huggel, Simon Allen et Fabian Drenkhan, du Groupe de recherche sur l'environnement et le climat (Eclim) du Département de géographie, ont synthétisé les effets de la pandémie en utilisant les trois piliers du développement durable : l’environnement, le social et l’économie.
En ce qui concerne le pilier environnemental, la pandémie a contribué à une réduction de la surveillance environnementale menée par les pouvoirs publics, entraînant une augmentation de la déforestation illégale et du braconnage, ainsi qu’un manque de données en raison de l'interruption des projets de surveillance environnementale.
De plus, l'élaboration, l'évaluation et l'examen des politiques liées aux négociations multilatérales en cours sur le changement climatique ainsi que les échéances de présentation des rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) ont été reportés.
D'autre part, il a été également constaté une diminution du trafic routier au niveau local, une réduction des émissions de gaz à effet de serre, une amélioration de la qualité de l'air, ainsi qu’un rétablissement des espèces et des écosystèmes dans différentes parties du monde en raison du ralentissement mondial provoqué par la pandémie.
Pour ce qui est du pilier social, les experts ont noté qu'il y avait un niveau élevé de sensibilisation aux mesures nécessaires pour lutter contre la pandémie, ce qui indique que les campagnes de communication et de sensibilisation peuvent être efficaces pour inculquer les gestes barrières aux populations afin d’endiguer la pandémie. Ceci constitue aussi un enseignement clé pour lutter contre le changement climatique. Dans le même temps, la pandémie a entraîné une augmentation significative des taux de chômage, une modification des schémas de migration intérieure avec des déplacements de populations des zones urbaines vers les zones rurales, une modification des conditions de travail, mais aussi des conséquences colossales sur l'économie mondiale dans tous les secteurs, y compris le tourisme et les chaînes d'approvisionnement. La pandémie touche tout le monde, bien qu'à des niveaux, rythmes et ampleurs différents. De fait, les gouvernements ont été contraints d'imposer certaines mesures impopulaires décidées d'en haut, mais néanmoins acceptées, qui peuvent toutes offrir des enseignements en matière de lutte contre le changement climatique.
En dépit de l'urgence de la crise climatique et de la menace fondamentale qu'elle représente pour l'humanité, celle-ci n'a pas été traitée avec la même énergie que la pandémie de COVID-19.
Dans l’ensemble, nous pouvons présenter les interactions entre la pandémie de COVID-19 et la crise climatique comme des effets cumulés. Le pire scénario serait celui où les deux effets, pandémie et changement climatique, se développent en même temps. Les populations humaines, dont les ressources et les capacités sont limitées, ont tendance à être plus vulnérables aux crises exceptionnelles. Par conséquent, cette crise sanitaire mondiale exacerbe les inégalités déjà existantes. La perception et l'expérience de vulnérabilités plus importantes dans les zones urbaines pourraient potentiellement déclencher une migration vers les zones rurales et entraîner des pressions plus fortes ainsi qu’ une accélération de la dynamique de changements d’usage des sols, ce qui aggraverait très probablement la crise climatique.
Un risque d'intensification des activités minières ou extractives industrielles existe également en raison de la réduction des réglementations environnementales faisant suite au remboursement de l’endettement dû par certains pays. D'autres exigences relatives aux coupes budgétaires pourraient entraîner le report de projets durables et respectueux de l’environnement, ainsi que des mesures de lutte contre le changement climatique. Bon nombre de ces risques peuvent être transformés en opportunités, notamment dans les pays disposant d'une planification stratégique à long terme fondée sur des preuves scientifiques en matière d'adaptation et d’atténuation aux changements climatiques.
Ces opportunités comprennent une prise en compte sérieuse des solutions fondées sur la nature pour accroître la résilience des écosystèmes, modifier les conditions de travail, utiliser des solutions virtuelles pour réduire les déplacements, augmenter la durabilité dans le secteur du tourisme ainsi que les politiques en faveur de solutions plus durables telles que les journées sans voiture, l'amélioration de l’efficacité énergétique des matériaux et des chaînes d'approvisionnement alimentaires, ainsi que la production agroécologique.
D'importantes leçons à tirer de la crise liée à la pandémie de COVID-19 existent et peuvent être appliquées au changement climatique, y compris sur l'interdépendance des systèmes sociaux, environnementaux et économiques qui doivent être abordés selon une approche holistique et socio-écologique. Sous le slogan « Reconstruire en mieux », les plans de relance post-pandémie sont l'occasion de restructurer ces systèmes dans leur ensemble, en visant un changement profond dans le cadre d'un effort coordonné à l’échelle mondiale et basé sur le Programme de développement durable à l'horizon 2030 et l'Accord de Paris sur le climat.
Vous pouvez en savoir plus ici sur les travaux menés par l'Université de Zurich en tant que Centre de l’UNAI pour l'ODD 13, et aussi consulter ici la liste complète des Centres de l’UNAI pour les ODD.