17 mars 2020 — Au moment où, partout dans le monde, à commencer par l’Europe, des mesures d’exception sont prises pour tenter de contenir l’expansion du coronavirus, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) évoque désormais la « crise sanitaire mondiale la plus importante de notre époque ».

Fer de lance de la lutte contre la maladie, l’institution onusienne basée à Genève continue de suivre au plus près du terrain l’évolution de la pandémie, tout en dispensant ses recommandations, et ses appels à la solidarité. Mais l’urgence est à la maîtrise des chaînes de transmission et donc au dépistage de tous les cas suspects.

Seule, la distanciation sociale ne suffit pas

« S’ils sont positifs, isolez-les et découvrez avec qui ils ont été en contact étroit jusqu’à deux jours avant l’apparition des symptômes et testez également ces personnes », a plaidé lundi le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, lors d’une conférence de presse, ajoutant que nul ne peut « combattre un incendie les yeux bandés ».

De nouveaux tests sont produits quotidiennement pour répondre à la demande mondiale et l’OMS précise en avoir expédié quelque 1,5 million d’unités dans 120 pays. « Nous travaillons avec des entreprises pour augmenter la disponibilité des tests pour ceux qui en ont le plus besoin », a expliqué le Dr Tedros.

Toutefois, a-t-il regretté, en dépit des mesures de distanciation sociale - fermeture d'écoles, annulation d'événements sportifs et d'autres rassemblements - prises par un nombre croissant de pays, « nous n'avons pas vu d'escalade assez urgente dans le dépistage, l'isolement et la recherche des contacts, qui sont le pilier de la riposte ». Or, à elles seules, toutes ces actions ne peuvent suffire à éteindre la pandémie. « C’est la combinaison qui fait la différence ».

Le coronavirus a déjà tué plus de 7 160 personnes dans le monde et le nombre de cas de contamination s’établissait mardi à 183 356 cas recensés à travers les continents.

Faire barrage à la propagation

Si la Chine, point de départ de l’épidémie, reste le pays ayant enregistré le plus grand nombre de décès, c’est à présent en Europe, épicentre de la maladie, que le coronavirus progresse le plus vite, avec notamment plus de 2 500 décès en Italie. Pour faire face à la montée en flèche des cas d’infection, les frontières à l’entrée de l’Union européenne et de l’espace Schengen devaient fermer mardi pour 30 jours, plusieurs pays prenant en outre des mesures de confinement de leur population.

Intervenant mardi devant la presse en vidéoconférence depuis les locaux de l’OMS à Copenhague, au Danemark, le Dr Hans Kluge, directeur régional de l’Organisation pour l’Europe, a parlé d’une « nouvelle réalité ». Quel que soit le scénario, a-t-il dit, chaque pays doit répondre à quatre impératifs : « se préparer et être prêt ; dépister, protéger et soigner ; réduire la transmission ; innover et apprendre, tout en protégeant les personnes vulnérables ». Ces actions doivent être menées simultanément et non séparément, a-t-il insisté. 

Ses propos font écho au succès de la campagne de distanciation sociale lancée en Chine, sur les réseaux sociaux, conjointement par l’OMS et le Coordonnateur résident. Une campagne qui a enregistré plus de 51 millions de vues et la participation de plus de 540 000 personnes aux discussions en ligne.

Une enquête en ligne, réalisée au début du mois de mars dans ce pays, a d’autre part fait apparaître une augmentation de 34% des personnes qui maintiennent une distance sociale depuis l'épidémie. Selon l’OMS, plus de 90% des répondants au sondage ont correctement identifié l'hygiène des mains, l'étiquette respiratoire et la distance sociale parmi les quatre principales recommandations de l'Organisation.

 « L’expérience de la Chine et d’autres pays a prouvé que le dépistage et le contrôle des contacts, combinés avec des mesures de distanciation sociale et une mobilisation multipartite, peuvent permettre, s’ils sont mis en place rapidement et effectivement, de prévenir l’infection et de sauver des vies », a encore souligné le Dr Kluge, avant d’assurer que le coronarivus peut être « vaincu grâce à la solidarité à l’intérieur des communautés, des nations et de toutes les régions, ainsi qu’avec une résilience psychologique individuelle ».

La solidarité, nouveau mot d’ordre

C’est dans cet esprit qu’a été lancé, le 13 mars, le Fonds de solidarité pour la lutte contre la maladie à COVID-19. Objectif : lever des capitaux auprès d’un vaste ensemble de donateurs afin de financer l’aide que l’Organisation mondiale de la Santé et ses partenaires apportent aux pays pour faire face à la pandémie.

Premier en son genre, ce fonds créé par la Fondation pour les Nations Unies et la Swiss Philanthropy Foundation, de concert avec l’OMS, doit permettre à des particuliers, à des sociétés et à des institutions partout dans le monde de s’unir pour contribuer directement à la riposte mondiale.

Depuis son lancement, « plus de 110 000 personnes ont fait une contribution, pour un montant s'élevant à près de 19 millions de dollars », s’est félicité le Dr Tedros. Concrètement, cet argent aidera à l’achat de tests de diagnostic et de fournitures pour les personnels de santé, dans le cadre du Plan stratégique de riposte à la COVID-19, tout en apportant un soutien à la recherche et au développement.

« Nous travaillons avec des entreprises pour augmenter la disponibilité des tests pour ceux qui en ont le plus besoin. »

La création de ce nouveau fonds s’inscrit dans la droite ligne d’autres actions menées contre la propagation du coronavirus grâce au rapprochement de différents secteurs de la société, à l’instar du défi « SafeHands Challenge », qui a attiré des célébrités et des dirigeants mondiaux autour d’une recommandation fondamentale : bien se laver les mains.

La dernière initiative en date impliquant le secteur privé a pris la forme d’un appel commun, lancé lundi à la communauté des entreprises par l'OMS et la Chambre de commerce internationale (CCI). Pour contribuer à cet effort collectif, la CCI enverra régulièrement des conseils actualisés à son réseau de plus de 45 millions d’entreprises, afin que celles-ci, partout dans le monde, puissent prendre des décisions éclairées face à la pandémie. Il s’agit non seulement de protéger leurs travailleurs, les clients et les communautés locales mais aussi de contribuer à la production et à la distribution des fournitures essentielles.

« Cet incroyable esprit de solidarité humaine doit devenir encore plus contagieux que le virus lui-même », a applaudi le directeur général de l’OMS. « Bien que nous devions être physiquement séparés les uns des autres pendant un certain temps, nous pouvons nous rassembler comme jamais auparavant ».