Les vagues de chaleur liées aux changements climatiques qui ont frappé une grande partie de l’Europe en juin et en juillet 2009 rappellent opportunément qu’une action mondiale concertée est nécessaire pour lutter contre les changements climatiques qui affectent toutes les régions du monde. Les phénomènes météorologiques extrêmes, comme les périodes de sécheresse de plus en plus fréquentes et intenses, les vagues de chaleur ainsi que d’autres phénomènes causés par les changements climatiques, y compris l’accélération de la désertification, l’érosion des côtes, l’extinction des espèces et la perte de l’habitat, ont des effets dévastateurs sur les économies africaines. Ces effets se font sentir sur l’ensemble du continent, comme l’ont montré récemment les cyclones tropicaux Idai et Kenneth, qui ont causé des dégâts importants au Malawi, au Mozambique et au Zimbabwe, faisant plus de 1 000 morts, des centaines de milliers de personnes nécessitant une aide humanitaire et engendrant une perte importante d’infrastructures. Pourtant, l’Afrique a le moins contribué aux émissions cumulées de gaz à effet de serre (moins de 4 % des émissions mondiales). À 0,8 tonne équivalent CO2 par an, par exemple, les émissions par habitant sont inférieures à la moyenne mondiale annuelle, qui est de 5 tonnes équivalent CO2, et très inférieures à celles dans d’autres régions comme l'Europe et l'Asie.

Les mesures prises à l’échelle mondiale sont insuffisantes. Les contributions déterminées au niveau national (CDN) pour la protection du climat dans le cadre de l’Accord de Paris sont loin d’être suffisantes pour limiter la hausse de la température afin d’assurer une croissance plus durable. À moins que des mesures ambitieuses ne soient prises, la crise climatique actuelle constituera une menace existentielle imminente. Si aucune action n’est menée, l’Afrique ne sera pas en mesure de réaliser les objectifs de développement durable (ODD) ni d’obtenir les résultats envisagés dans l’Agenda 2063 et inscrits dans les plans nationaux de développement.

Le leadership visionnaire de l’Afrique pour faire face aux changements climatiques

En 2006, La Commission économique pour l’Afrique (CEA) a lancé un processus visant à créer le Centre africain pour la politique en matière de climat (CAPC). Cette initiative a été lancée suite au mandat donné en 1988 au Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) par l’Assemblée générale des Nations Unies « afin qu’il fournisse des évaluations scientifiques, coordonnées à l’échelle internationale, de l’ampleur, de la chronologie et des effets potentiels de l’évolution du climat sur l’environnement et les conditions socio-économiques et [formule] des stratégies réalistes pour agir sur ces effets », face aux craintes de la CEA qui considérait que le changement climatique posait déjà des risques sérieux au programme de développement de l’Afrique, en particulier concernant la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, et suite à la reconnaissance que les pays africains pourraient tirer avantage des défis liés au changement climatique et saisir les opportunités pour atteindre un développement durable et rendre les économies résilientes.

Le soutien à la création du Centre a trouvé un écho dans plusieurs forums de haut niveau, comme la huitième Session du Sommet de l’Union africaine (UA) en janvier 2007, et a abouti à sa création l’année suivante, lors de la Première réunion annuelle conjointe de la Conférence des Ministres africains de l’économie et des finances de l’UA et de la Conférence des Ministres africains des finances, de la planification et du développement économique de la CEA. Le Centre a reçu pour double mandat de fournir des directives aux pays membres et de servir de secrétariat au programme ClimDev-Afrique. Les directives visaient à réduire la pauvreté par l’adaptation aux effets du changement climatique et leur atténuation en Afrique et à améliorer les capacités des pays africains à participer efficacement aux négociations multilatérales sur le climat. Cette réunion a également approuvé le programme ClimDev-Africa comme initiative conjointe de la CEA, de la Commission de l’Union africaine (CUA) et de la Banque africaine de développement (BAD), aidant ainsi ces trois institutions africaines à centrer leurs efforts collectifs pour encourager une approche commune et coordonnée au changement climatique sur l’ensemble du continent.  

Soutenir les États membres dans une situation d’évolution du changement climatique

Depuis qu’il est devenu opérationnel en 2011, avec l’appui financier du Ministère britannique du développement international (DFID), de l’Union européenne, de la France, du Fonds nordique de développement (NDF), de la Norvège, de la Suède et de l’USAID, le Centre a apporté son soutien aux initiatives panafricaines et travaillé avec les institutions panafricaines, les États membres, les universités et les institutions de recherche et de politique ainsi qu’avec les partenaires du développement et d’autres partenaires de mise en œuvre et au sein de la CEA en vue de l’exécution de ses principaux programmes prescrits.  À ce jour, les principales réalisations du Centre sont les suivantes :

  • Soutien à la participation effective de l’Afrique aux négociations multilatérales sur le climat. Par le biais de ses activités dans le cadre du programme ClimDev-Africa, le CAPC a amélioré la visibilité des pays africains dans les négociations mondiales sur le changement climatique en soutenant le Comité des chefs d’États et de gouvernement africains sur les changements climatiques et la Conférence ministérielle africaine sur l’environnement ainsi qu’en apportant un appui technique et en consolidant les capacités afin de renforcer le Groupe africain de négociateurs (AGN) sur le climat pour mieux tenir compte des intérêts africains et mieux les défendre dans le processus de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Par exemple, en collaboration avec l’AGN, le CAPC a publié un rapport historique sur les pertes et les dégâts en Afrique dus aux incidences du changement climatique. À son tour, lors de la dix-neuvième session de la Conférence des parties à la CCNUCC, l’AGN a contribué activement à la décision concernant le Mécanisme international de Varsovie relatif aux pertes et aux préjudices liés aux incidences des changements climatiques. 
  • Journée de l’Afrique et Pavillon Afrique lors de la Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Au nom de la CEA et en collaboration avec la CUA, la BAD et le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique, le CAPC offre un espace, une représentation et une voix pour promouvoir la participation effective de l’Afrique aux négociations sur le climat, un processus qui a débuté lors de la dix-septième session de la Conférence des parties à la CCNUCC en 2011.
  • Plaider en faveur des services d’informations climatologiques (CIC). Les CIC sont essentiels pour atténuer les effets du changement climatique et, par conséquent, pour soutenir les efforts menés pour réduire la pauvreté. Privée d’informations plus précises sur la variabilité et le changement climatiques, l’Afrique ne sera pas en mesure de mener une action énergique. Cependant, par le biais du programme ClimDev-Africa, le CAPC a considérablement investi dans le renforcement et la modernisation des réseaux d’observations météorologiques et hydrologiques.
  • Conférence sur les changements climatiques et le développement en Afrique (CCDA). Aujourd’hui dans sa huitième année consécutive, la CCDA est une plate-forme de dialogue établie et reconnue qui réunit chaque année de nombreuses parties prenantes et institutions africaines, y compris des spécialistes, des universitaires et des représentants de la société civile, pour discuter de questions contemporaines sur le changement climatique et le développement en Afrique, partager les connaissances scientifiques, trouver des solutions innovantes aux défis et parvenir à un consensus avec la Conférence annuelle des parties à la CCNUCC.
  • Services d’informations météorologiques et climatologiques pour l’Afrique (WISER). Des informations météorologiques et climatologiques de qualité fournies en temps opportun contribuent à améliorer les prévisions saisonnières qui peuvent aider les utilisateurs de ces services comme les agriculteurs, les responsables de la planification et les fournisseurs d’énergie et, par conséquent, augmenter la productivité et contribuer au développement économique. Ces informations permettent d’obtenir des prévisions météorologiques à long terme de meilleure qualité, ce qui est essentiel pour améliorer la résistance des infrastructures, accroître la résilience économique et assurer un développement économique durable. En collaboration avec le Met Office (le service national britannique de météorologie), le CAPC met en œuvre le programme WISER fondé par le DFID en vue de soutenir la gestion des risques météorologiques et climatologiques et d’améliorer la résistance économique des Africains et des économies africaines aux chocs liés aux conditions climatiques.
  • Mécanisme d’investissement dans les projets de résilience aux changements climatiques en Afrique (AFRI-RES). Pour promouvoir l’accès aux services dans les secteurs clés et favoriser la transformation économique, des centaines de milliards de dollars devront être investis chaque année dans les secteurs sensibles au climat (y compris les infrastructures, l’agriculture et l’eau). Il est important de veiller à ce que les risques financiers liés à ces investissements soient limités. À cette fin, le CAPC a rendu le Mécanisme en collaboration opérationnel avec la CUA, la Banque mondiale et la BAD ainsi qu'avec l’appui financier initial du NDF afin de développer les capacités des institutions africaines et du secteur privé à concevoir, à planifier et à mettre en œuvre les investissements dans le but de renforcer la résilience aux variations et aux changements climatiques. 
  • Recherche sur le climat pour le développement en Afrique (CR4D). La contribution de l’Afrique aux recherches en climatologie, y compris à l’évaluation des rapports du GIEC, est, jusqu'à présent, très limitée. Pour améliorer cette situation, le CAPC, en collaboration avec l’Organisation météorologique mondiale et avec l’appui financier initial du DFID, a mis en place le programme CR4D qui soutient les recherches en climatologie et contribue à catalyser l’adoption et l’utilisation des services d’informations sur le climat pour planifier le développement sur le continent.

Vers une Afrique prospère et résiliente aux changements climatiques

Regardant vers l’avenir, et tenant compte de la complexité croissante des défis posés par les changements climatiques, il est important pour le CAPC de continuer à fournir une analyse des politiques pour aider les responsables africains à élaborer des stratégies d’adaptation qui favorisent le développement durable. Le CAPC s’acquittera de cette tâche en fournissant un espace de dialogue sur les questions climatiques et de développement en Afrique et en aidant à renforcer les capacités des États Membres à explorer, à analyser et à mettre en œuvre de meilleurs moyens et des investissements pour exploiter efficacement les ressources naturelles dans le but de construire des économies résilientes et inclusives. À cet égard, il considère que les CDN sont des mesures concrètes à prendre pour réaliser les ODD et obtenir les résultats transformateurs envisagés dans l’Agenda 2063

La nouvelle stratégie du Centre vise à servir de plate-forme pour générer des idées et prendre des mesures qui favorisent la transition vers une Afrique résiliente aux changements climatiques et prospère par la mise en place de politiques, de plans et de programmes appropriés. À cette fin, il s’attachera à :

  • Continuer de mener des recherches et des analyses en soutien au développement social et économique en Afrique;
  • Fournir des services consultatifs et une assistance technique pour mettre en œuvre l’Accord de Paris;
  • Renforcer et développer les capacités humaines et institutionnelles des États Membres à élaborer des plans, des politiques et des pratiques de développement résilients aux changements climatiques;
  • Créer des espaces et engager un dialogue afin de favoriser des alliances et des partenariats stratégiques et de prendre des mesures efficaces pour lutter contre les changements climatiques et stimuler le développement ainsi que de développer les positions communes africaines;
  • Produire, gérer et adapter des supports de connaissances multilingues afin de communiquer efficacement les solutions climatiques aux parties prenantes clés; et
  • Assurer la rentabilité de la gestion des programmes ainsi que de leur mise en œuvre, de leur suivi, de leur évaluation et tirer les enseignements. 

La CEA continue de forger des partenariats et de mobiliser des ressources afin de mettre en œuvre la nouvelle stratégie du Centre. Associés à cette formidable initiative, par exemple, le DFID et l’Ambassade de Suède en Éthiopie apportent leur appui au Centre en exécutant des programmes aidant les gouvernements africains, les entités régionales, le secteur privé et les communautés à s’adapter aux effets du changement climatique et à améliorer la mise en œuvre intégrée des CDN, des ODD et de l’Agenda 2063.

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