Accès préférentiel aux marchés pour les marchandises

Privilégier certains pays au détriment d’autres étant contraire au principe de la nation la plus favorisée qui sous-tend le système commercial multilatéral, des dispositions spécifiques ont été prises au sein de l´Organisation Mondiale du Commerce, telles que la clause d´habilitation de 1979, pour offrir la possibilité de donner de telles préférences aux pays en développement, un traitement particulier étant réservé aux PMA (pour plus de détails, veuillez consulter le Manuel sur la catégorie des PMA, 5e édition, encadré II.1). Les PMA ne doivent pas être membres de l’OMC pour bénéficier de l’accès préférentiel aux marchés accordé par d’autres pays.

L’accès préférentiel des PMA aux marchés est assuré principalement en accordant un accès aux marchés en franchise de droits et hors contingent, des tarifs préférentiels et des règles d´origine préférentielles.

Accès en franchise de droits et hors contingent et tarifs préférentiels: La plupart des pays développés accordent aux PMA un accès total ou presque total aux marchés en franchise de droits et hors contingent. Plusieurs pays développement ont également étendu l’accès au marché en franchise de droits et hors contingent à un nombre important de produits en provenance des PMA. Dans certains cas, l’accès à ces dispositifs est subordonné au respect de certaines conditions supplémentaires au statut de PMA. Par exemple, dans le cas de l’initiative « Tout sauf les armes » de l’Union européenne, la non-violation des principes énoncés dans des conventions relatives aux droits de l’homme et aux droits du travail. 

En outre, la zone de libre-échange d’Asie du Sud (SAFTA) et l’accord commercial Asie-Pacifique (APTA) accordent une plus grande préférence (couverture et marges tarifaires) aux PMA (voir la page sur le traitement spécial dans le cadre des accords régionaux).

L’importance pratique des régimes d’accès préférentiel au marché dépend des capacités de production du pays, du type de produits exportés et de l’existence d’autres accords commerciaux préférentiels. Plusieurs raisons expliquent que toutes les importations en provenance des PMA n’entrent pas dans le cadre de régimes préférentiels spécifiques aux PMA.  Certains produits d’exportation des PMA sont déjà soumis à des droits nuls sur les marchés les plus importants en application du régime de la nation la plus favorisée, ou le pays exportateur peut avoir accès à d’autres régimes de préférences non spécifiques aux PMA, tels que la loi sur la croissance et les perspectives économiques de l’Afrique des États-Unis, les accords de partenariat économique avec l’Union européenne ou le Royaume-Uni, ou les accords commerciaux régionaux tels que la zone de libre-échange de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Les exportateurs des PMA peuvent également éprouver des difficultés à remplir les conditions requises pour déterminer la conformité avec les règles d’origine préférentielles.

Règles d´origine préférentielles: Les règles d’origine sont les critères utilisés pour définir si un produit est considéré comme originaire d’un certain pays et s’il peut par conséquent bénéficier d’un accès préférentiel au marché. Si, pour certains produits, la détermination de l’origine est simple, pour d’autres, notamment ceux qui sont produits dans le cadre de chaînes de valeur mondiales, il n’est pas aussi simple de déterminer où le produit a été fabriqué. 

Les membres de l’OMC ont adopté deux séries de lignes directrices sur les règles d’origine lors des Conférences ministérielles de l’OMC qui se sont tenues à Bali et à Nairobi en 2013 et 2015, respectivement, en vue de rendre les règles d’origine simples et transparentes. Voici quelques exemples de programmes de préférences qui incluent des règles d’origine préférentielles :

  • Dans l’Union européenne, depuis 2011, le seuil général pour les matières non originaires est de 70 % pour les PMA et de 50 % pour les autres bénéficiaires du système généralisé de préférences ; les exigences d’origine spécifiques aux produits sont plus souples. Dans le domaine des produits textiles et de l’habillement, les règles d’origine autorisent une transformation en une seule étape pour les PMA, alors qu’elles exigent une double transformation pour les pays en développement.
  • Aux États-Unis, un article produit dans un PMA bénéficiaire du système généralisé de préférence peut inclure provenant des pays les moins avancés et d’autres pays bénéficiaires de leur association régionale dans le calcul des 35 % de contenu national exigés pour satisfaire aux règles d’origine de certains articles.
  • Au Canada, jusqu’à 60 % du contenu importé est autorisé pour que le produit bénéficie du tarif préférentiel pour les PMA, contre 40 % pour les produits qui ne proviennent pas de PMA et bénéficient du tarif préférentiel général. En outre, tous les bénéficiaires du tarif préférentiel pour les PMA sont considérés comme une seule zone à des fins de cumul, tandis que les bénéficiaires du tarif préférentiel général constituent chacun une zone distincte. Il existe des règles spéciales pour les PMA en ce qui concerne les textiles et l’habillement.
  • Le Programme commercial en faveur des pays en développement (Developing Countries Trading Scheme) du Royaume-Uni autorise un contenu non originaire de 75 % dans environ la moitié des chapitres du HS2 ; des règles alternatives (par exemple, une modification de la sous-position tarifaire ou un plafond de 75 % de contenu non originaire pour presque toutes les règles spécifiques aux produits) ; une règle unique pour des chapitres entiers dans le cas de la plupart des chapitres ; et un cumul étendu.

Il existe également des règles d’origine spécifiques aux PMA dans le cadre d’accords régionaux. Par exemple, dans le cadre de la zone de libre-échange de l’Asie du Sud, les critères généraux sont le changement de position tarifaire plus 30 % pour les PMA contre 40 % pour les non-PMA. Dans le cadre de l’accord commercial Asie-Pacifique, le seuil de valeur ajoutée pour les PMA est de 35 % contre 45 % pour les non-PMA, et le cumul régional est autorisé lorsque la valeur ajoutée régionale est de 50 % pour les PMA, contre 60 % pour les non-PMA.

Après le reclassement:

Certains régimes préférentiels spécifiques aux PMA contiennent des dispositions qui prolongent l’éligibilité au-delà de la date de reclassement. Par exemple, les pays sortant de la catégorie des PMA conservent automatiquement leur éligibilité à l’initiative « Tout sauf les armes » de l’Union européenne pour une période de trois ans. La Chine, la Türkiye et le Royaume-Uni prolongent également la période d’éligibilité de trois ans après le reclassement. Sur d’autres marchés, certains pays reclassés ont conservé un traitement préférentiel pendant une certaine période après la date de leur reclassement, soit parce qu’il n’existe pas de procédures automatiques de retrait de la liste des bénéficiaires, soit en raison d’un décalage administratif, soit pour une combinaison de raisons.

Dans sa résolution 67/221, l’Assemblée générale a invité les partenaires commerciaux qui n’ont pas établi de procédures pour prolonger ou supprimer progressivement l’accès préférentiel aux marchés, et notamment les mesures d’accès au marché en franchise de droits et hors contingent, à clarifier de manière prévisible, en tant que mesure générale ou dans le cadre du mécanisme de consultation, leur position concernant la prolongation des préférences spécifiques aux PMA, le nombre d’années de la prolongation ou les détails concernant la suppression progressive des mesures. En octobre 2023, les membres de l’OMC ont adopté une décision encourageant les États membres accordant des préférences à assurer une transition sans heurt et durable avant de retirer l’accès au marché en franchise de droits et hors contingent après le reclassement.

Une fois que les pays sont sortis de la catégorie et ne bénéficient plus des régimes spécifiques aux PMA, ils peuvent, en fonction des critères d’éligibilité, continuer à avoir accès aux régimes d’accès préférentiel au marché dans le cadre des régimes standards relatifs au système généralisé de préférences standard, le cas échéant, à d’autres régimes non réciproques applicables, à des accords régionaux ou à des accords bilatéraux, y compris des accords de partenariat économique.

L’Union européenne, le Royaume-Uni et la Norvège disposent de régimes d’accès préférentiel au marché non réciproques qui se situent, en matière de couverture, entre les régimes spécifiques aux PMA et le système généralisé de préférences standard. Le régime spécial pour le développement durable et la bonne gouvernance de l’Union européenne, dans le cadre de la réglementation actuelle, accorde un accès en franchise de droits à la plupart des produits couverts par le système généralisé de préférences standard. L’éligibilité à ce régime spécial exige la ratification et la mise en œuvre de 27 conventions sur les droits de l’homme, les droits du travail, la protection de l’environnement et la bonne gouvernance, ainsi que le respect de certains critères de vulnérabilité. Au Royaume-Uni, les pays à faible revenu et à revenu moyen inférieur qui répondent à certains critères de vulnérabilité peuvent bénéficier de préférences accrues dans le cadre du Programme commercial en faveur des pays en développement, qui accorde un accès au marché en franchise de droits pour 85 % des lignes tarifaires. Dans le cadre du régime spécial pour le développement durable et la bonne gouvernance de la Norvège, les bénéficiaires se voient accorder un accès en franchise de droits pour les vêtements et les produits textiles et certains produits agricoles, ainsi que des droits de douane inférieurs pour d’autres produits par rapport aux bénéficiaires du système généralisé de préférences standard. Tous les pays à revenu moyen inférieur dont la population est inférieure à 75 millions d’habitants et les pays à faible revenu sont éligibles au régime spécial pour le développement durable et la bonne gouvernance. En 2023, le Canada a modifié sa législation sur les tarifs douaniers, prolongeant le mandat des programmes Tarif de préférence général (TPG) et Tarif des pays les moins développés jusqu’à la fin de 2034 et créant l’autorité pour un nouveau programme, le Tarif de préférence général plus (TPG+) qui, une fois opérationnel, est destiné à fournir des avantages tarifaires au-delà de ceux du programme TPG aux pays qui se conforment aux normes internationales relatives au développement durable, au travail et aux droits de l’homme.

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