31 décembre 2013

En 2010, plus de 4 millions d’étudiants poursuivaient leurs études en dehors de leur pays d’origine. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, ce chiffre pourrait atteindre 8 millions d’étudiants internationaux d’ici à 2025. Cette population mobile composée principalement de jeunes souhaitant étudier à l’étranger représente un investissement important pour les pays d’origine, ce qui est essentiel pour le développement, la prospérité et le bien-être futurs, car les étudiants qui retournent dans leur pays ont des connaissances poussées et sont préparés à la citoyenneté mondiale. Pour les pays destinataires, ces étudiants apportent une diversité culturelle et intellectuelle aux établissements et aux pays qu’ils visitent, représentant souvent une source de revenus pour ces établissements et ces communautés et, dans d’autres cas, une source de travail qualifié dans l’économie actuelle fondée sur les connaissances. Pour les pays d’origine, toutefois, cela peut provoquer une fuite des cerveaux et une plus grande dépendance.

La mobilité des étudiants n’est qu’un aspect de l’internationalisation de l’enseignement supérieur moderne : la mobilité des établissements (les campus à l’étranger), des programmes (franchises), des chercheurs et du corps enseignant en sont d’autres. Le développement d’une éducation interculturelle et internationale ainsi que l’internationalisation des programmes, de l’enseignement et de l’apprentissage sont d’autres exemples, décrits également comme l’internationalisation chez soi ou l’éducation de professionnels mondiaux et de citoyens du monde. La stratégie d’image des établissements, leur réputation et leur classement sont encore d’autres aspects.

Les établissements d’enseignement supérieur, les gouvernements et d’autres organisations investissent massivement dans l’internationalisation de l’enseignement supérieur pour renforcer les capacités de recherche, améliorer la qualité de l’éducation de leurs étudiants et former une main-d’œuvre pour un marché du travail en évolution. La demande de connaissances est mondiale.

Un domaine encore peu développé est celui de l’étude de l’internationalisation de l’enseignement supérieur : la recherche et l’analyse des tendances, » des critères, des développements comparatifs à l’échelle régionale et mondiale ainsi que des résultats et des impacts de l’internationalisation. Dans de nombreux cas, les politiques sont mises en œuvre par des établissements et des gouvernements qui ne connaissent pas ou ne comprennent pas bien les conséquences de ces actions et de ces politiques. Des recherches universitaires plus poussées sur l’effet du processus d’internationalisation sont nécessaires. De nombreuses questions doivent être examinées et tranchées. Les étudiants internationaux améliorent-ils la qualité des programmes des établissements d’accueil ? Le programme éducatif est-il de meilleure qualité lorsqu’il est internationalisé ? Quel effet l’enseignement et l’apprentissage en anglais a-t-il sur les étudiants non anglophones ? Dans quelle mesure l’étude des langues étrangères et des compétences interculturelles et internationales est-elle importante dans la société mondiale du savoir où nous vivons ? Quel impact les études à l’étranger ont-elles sur les étudiants au niveau personnel et universitaire ? Un programme d’échange ou un programme internationalisé augmente-t-il les chances d’emploi des étudiants diplômés et les aide-t-il à mieux comprendre les questions sociales mondiales auxquels ils sont confrontés, en particulier les huit Objectifs du Millénaire pour le développement ?

Nous devons visualiser la contribution de l’internationalisation au cœur de la mission et des valeurs de l’enseignement supérieur. L’évaluation des résultats étant, toutefois, très complexe, il nous faut partager et comparer les recherches effectuées dans divers pays, échanger les connaissances, réaliser un projet de méta-analyse transfrontalière des résultats et créer des projets de collaboration et de recherche transfrontaliers afin de mieux comprendre les effets de l’internationalisation de l’enseignement supérieur. Un aspect important est l’échéance. Les gouvernements ont tendance à voir les choses sur un laps de temps bref alors que les recherches menées par les établissements sur les effets de la stratégie de leur internationalisation et de leur mise en œuvre se font sur le long terme.

Responsabilité de l’internationalisation de l’enseignement supérieur

L’internationalisation n’est pas sur le point de disparaître et est résolument prise en compte dans le programme d’action de l’enseignement supérieur dans le monde. Même à l’heure où les gouvernements réduisent les dépenses, les établissements de l’enseignement supérieur doivent investir dans l’internationalisation à tous les niveaux de l’établissement, de l’éducation et de l’apprentissage, dans la mobilité, la recherche et les partenariats ou même dans l’enseignement transnational.

De plus en plus d’établissements comprennent qu’ils doivent être responsables de leurs investissements et de leurs activités – les universités ne peuvent plus être des tours d’ivoire, déconnectées des réalités du monde qui les entoure. Elles ont une responsabilité envers les parties prenantes internes comme les étudiants « internationaux », l’encadrement institutionnel, le personnel administratif et les enseignants, voire même plus envers les parties prenantes externes comme les organismes de financement, les communautés locales, les contribuables et le gouvernement.

Pour que cette responsabilité puisse être mise en œuvre, les recherches doivent se concentrer sur les intrants et les sortants les extrants et même sur les résultats de l’internationalisation, mesurés sur une échelle longitudinale. Une plus grande responsabilité de toutes les parties prenantes est essentielle dans ce domaine.

L’eaie et son rôle dans Les recherches sur l’internationalisation

L’European Association for International Education (EAIE) est le centre européen pour l’expertise, le travail en réseau et les ressources en internationalisation de l’enseignement supérieur. Cette organisation à but non lucratif, dirigée par ses membres, est au service de ceux qui sont activement engagés dans l’internationalisation de leurs établissements et encourage les connaissances fondées sur les politiques et les recherches dans ce domaine.

L’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) comprend 6 000 établissements d’enseignement supérieur. Au total, 60 000 personnes travaillent sur des questions portant sur l’internationalisation ou sur des questions connexes. L’EEES a pour mission d’aider à professionnaliser ses membres et à servir la cause de ceux qui sont activement engagés dans l’internationalisation de l’enseignement supérieur. L’association leur apporte un appui au moyen de conférences annuelles, de cours de formation et de publications. Cette assistance est renforcée par un engagement fondamental, dynamisant : utiliser notre position respectée dans le domaine pour créer un changement positif et promouvoir une collaboration dynamique dans la sphère de l’enseignement supérieur européen.

Forte de ses 25 ans d’expérience, l’Association s’appuie sur sa base solide et son important réseau d’expertise et de ressources pour aider à forger l’avenir de l’enseignement supérieur. Elle prend des dispositions en faveur du changement en fournissant des conseils professionnels dans les discussions stratégiques avec les parties prenantes européennes essentielles, en cherchant à renforcer les capacités des pays en développement et en proposant un vaste éventail de meilleures pratiques dans tous les aspects de l’internationalisation par le biais de ses communautés d’experts.

L’une de ces communautés est celle de chercheurs, un groupe d’experts qui associent leur expérience professionnelle et l’intérêt qu’ils portent à l’étude de l’internationalisation. L’EAIE est également activement engagée dans plusieurs études portant sur les aspects internationaux et européens de l’enseignement supérieur qui sont financées par l’Union européenne. Elle travaille à l’étude de l’enseignement international avec plusieurs organisations et associations, comme l’Association internationale des Universités qui réalise et analyse régulièrement une enquête sur le développement de l’internationalisation dans l’enseignement supérieur. Un autre exemple est l’étude récente réalisée en collaboration avec l’International Education Association d’Australie afin de définir les capacités générales et spécifiques des dirigeants requises par les éducateurs internationaux en Australie et en Europe en vue de créer des activités appropriées dans leur formation à l’aide de la recherche. Le rapport sera lancé fin 2013. L’EAIE établit aussi des relations de travail avec des instituts de recherche spécialisés dans l’enseignement supérieur international, comme le Centre d’internationalisation de l’enseignement supérieur à l’Università Cattolica Sacro Cuore à Milan (Italie) et le Centre international d’enseignement supérieur au Boston College (États-Unis).

L’EAIE participe à la diffusion de la recherche et de son application liée à l’internationalisation. Sa conférence annuelle, à laquelle assistent plus de 4 500 professionnels de l’enseignement supérieur, offre une excellente plateforme pour diffuser la recherche (et son application) dans plus de 150 sessions et ateliers. Au moyen de ses manuels, de ses outils et de son bulletin d’information, elle fournit des renseignements sur la façon dont l’internationalisation sert différents objectifs pour ses membres et la communauté plus large.  Dans son Académie, elle fournit, tous les six mois, des modules de formation à ses membres. Grâce à sa coopération avec l’éditeur Raabe, elle publie régulièrement dans son Manuel sur l’internationalisation de l’enseignement supérieur en Europe des études de recherche appliquée portant sur une vaste gamme de sujets. De plus, par son engagement dans l’Association for Studies in International Education et la coopération avec l’éditeur SAGE, elle contribue à l’étude universitaire de l’internationalisation via Le Journal of Studies in International Education évalué par des pairs.

La recherche actuelle et les besoins pour l’avenir

En 2013, à l’occasion de sa vingt-cinquième conférence, l’EAIE a publié un ouvrage intitulé « Possible Futures, the next 25 years of the l’internationalization of higher education1 » dans lequel des experts internationaux discutent de l’avenir de l’internationalisation. Les sujets de recherche comprennent, notamment, le rôle de l’apprentissage collaboratif international en ligne, la mobilité virtuelle et les cours en ligne ouverts à tous pour forger l’avenir de l’enseignement supérieur international et assurer le développement qualitatif plutôt que quantitatif de l’internationalisation de l’enseignement supérieur.

En même temps, des questions actuelles, comme la mobilité des diplômés, la gestion stratégique de l’internationalisation, les politiques nationales et régionales dans des perspectives comparatives, continueront de faire partie des programmes de recherche. En plus des avantages de l’internationalisation, les risques et les conséquences non prévues, comme la fuite des cerveaux, la commercialisation et les « usines à diplômes » nécessitent aussi une étude plus détaillée.

Une plus grande coopération avec les organisations sœurs et les instituts de recherche est nécessaire afin de mettre en place une recherche conjointe qui puisse valider ce que nous essayons d’accomplir avec les autres établissements. L’EAIE se voit également jouer un rôle dans la diffusion de la recherche liée à ce domaine, divulguant le plus de connaissances possibles afin que nous puissions apprendre les uns des autres sur la voie de l’internationalisation de l’enseignement supérieur.   ❖

Notes

1    de Wit, Hans, Fiona Hunter, Linda Johnson et Hans-Georg van Liempd, éd. Possible Futures, the next 25 Years of the internationalization of higher education (Amsterdam, European Association For International Education, 2013).

 

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