Dans le Quatrième Rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), qui a été terminé en 2007, il est dit que « le réchauffement du système climatique est sans équivoque. On note déjà, à l'échelle du globe, une hausse des températures moyennes de l'atmosphère et de l'océan, une fonte massive de la neige et de la glace et une élévation du niveau moyen de la mer ». Il y est aussi dit que les observations effectuées sur tous les continents et dans la plupart des océans montrent qu'une multitude de systèmes naturels sont touchés par les changements limatiques régionaux, en particulier par la hausse des températures. Toujours selon ce Rapport, la hausse des températures moyennes enregistrée au niveau mondial depuis le milieu du XXe siècle est très probablement due à l'augmentation constatée des concentrations de gaz à effet de serre produits par l'homme. Dans ce contexte, les termes « très probablement » désignent un niveau de probabilité de 90 % ou plus.

Du fait de ces observations et des changements climatiques prévus, certains systèmes, secteurs et régions seront probablement touchés par ces changements. Cela comprend certains écosystèmes comme la toundra, la forêt boréale et les régions montagneuses, qui sont sensibles au réchauffement, ainsi que les écosystèmes de type méditerranéen, à cause de la diminution des précipitations, et les forêts pluviales tropicales, dans les zones où la pluviosité diminue. En outre, dans les régions côtières, les mangroves et les marais salants seront soumis à de multiples contraintes, ce qui sera également le cas pour les écosystèmes marins, notamment les récifs coralliens. Les effets des changements climatiques seront aussi importants pour les ressources en eau dans des régions arides à des latitudes moyennes et dans les zones tropicales sèches à cause de la modification de la pluviosité et de l'évapotranspiration, ainsi que dans les zones tributaires de la fonte de la neige et de la glace. Ils seront probablement importants dans l'agriculture aux basses alti- tudes sous l'effet de la raréfaction des ressources en eau, dans les basses terres littorales, par suite de la menace d'une élévation du niveau de la mer et du risque accru de phénomènes météoro- logiques extrêmes, ainsi que sur la santé des populations dispo- sant d'une faible capacité d'adaptation. Certaines régions seront directement menacées, comme l'Arctique, à cause de la vitesse du réchauffement et de ses incidences sur les systèmes naturels et les collectivités humaines. L'Afrique sera touchée, vu la faible capacité d'adaptation et les effets projetés. Les grands deltas asiatiques et africains seront aussi vulnérables étant donné la densité de population, la forte exposition à l'élévation du niveau de la mer, les ondes de tempête et les inondations fluviales. Une autre source majeure qui est affectée par les changements climatiques est les océans où la fixation du carbone anthropique émis depuis 1750 a baissé le pH des océans de 0,1 unité en moyenne. Les projections indiquent une aggravation de cette situation, et cette acidification progressive des océans aura une incidence néfaste sur les testacés et les crustacés marins, comme les coraux et les espèces qui en sont tributaires.

RÉSULTATS PLUS CIBLÉS

En plus de ces effets des changements climatiques, le GIEC vient de publier une série de résultats plus ciblés dans son Rapport spécial sur la gestion des risques de catastrophes et de phénomènes extrêmes pour les besoins de l'adaptation au changement climatique (SREX). La nature et la gravité des effets des phénomènes extrêmes dépendent non seulement du phénomène lui-même, mais aussi de l'exposition et de la vulnérabilité. On parle de catastrophe lorsque les effets indésirables produisent des dommages de grande ampleur et perturbent gravement la vie quotidienne d'une population ou le fonctionnement d'une société. Les phénomènes extrêmes climatiques, l'exposition et la vulnérabilité sont fonction d'un grand nombre de facteurs, dont le changement climatique d'origine anthropique, la variabilité naturelle du climat et le développement socio-économique. La gestion des risques de catastrophes et l'adaptation à l'évolution du climat visent à réduire l'exposition et la vulnérabilité tout en augmentant la résilience à l'égard des répercussions que pourraient avoir les phénomènes extrêmes climatiques, sachant qu'il est impossible d'éliminer tout risque. L'exposition et la vulnérabilité sont dynamiques, variant selon les échelles temporelles et spatiales en fonction de facteurs économiques, sociaux, géo- graphiques, démographiques, culturels, institutionnels, politiques et environnementaux. Le type d'habitat, l'urbanisation et l'évolution des conditions socio-économiques ont contribué aux tendances observées de l'exposition et de la vulnérabilité aux phénomènes extrêmes climatiques. Par exemple, les établissements humains implantés sur le littoral, y compris dans les petites íles et les grands deltas ou dans les montagnes, sont exposés et vulnérables face à ces phénomènes extrêmes, dans les pays développés et les pays en développement, bien qu'à des degrés divers d'une région et d'un pays à l'autre. L'urbanisation rapide et l'expansion des mégapoles, dans les pays en développement notamment, ont créé des groupes extrêmement vulnérables, en particulier en raison d'un habitat non structuré et d'une gestion des terres inadéquate. Parmi les populations vulnérables figurent aussi les réfugiés, les personnes déplacéesà l'intérieur de leur pays et les habitants de zones marginales.

Selon le Rapport, les observations effectuées depuis 1950 indiquent que certaines valeurs extrêmes ont changé. Il est probable que le nombre de journées et de nuits froides a globalement diminué et que le nombre de journées et de nuits chaudes a globalement augmenté à l'échelle de la planète, c'est-à-dire sur la plupart des terres émergées pour lesquelles on détient suffisamment de données. Il est probable que ces changements sont également survenus à l'échelle continentale en Amérique du Nord, en Europe et en Australie. La tendance à la hausse des températures quotidiennes extrêmes bénéficie d'un degré de confiance moyen pour une grande partie de l'Asie. Des tendances statistiquement significatives quant au nombre d'épisodes de fortes précipitations existent dans certaines régions. Il est probable que davantage de régions ont connu des augmentations plutôt que des diminutions, bien que les tendances divergent fortement d'une région et d'une sous-région à l'autre. On a des raisons de penser que certains phénomènes extrêmes ont varié sous l'effet des activités humaines, notamment en raison de la hausse des concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.

DES PERTES DIFFICILES À CHIFFRER

Les pertes imputables ces dernières décennies aux conditions météorologiques et climatiques se répartissent de manière inégale et correspondent essentiellement à la valeur des biens directement endommagés. Les dommages annuels estimés depuis 1980 vont de quelques milliards de dollars à plus de200 milliards en 2010, les dégâts les plus lourds ayant été déplorés en 2005, année de l'ouragan Katrina. Ces estimations se situent à la limite inférieure car il est difficile de chiffrer, d'assortir d'une valeur monétaire et, par conséquent, de prendre en compte de nombreux impacts, telle la perte de vies humaines, de patrimoine culturel ou de services procurés par les écosystèmes. Les répercussions sur l'économie parallèle ou souter- raine et les effets économiques indirects sont considérables à certains endroits et dans certains secteurs, mais ils sont rarement inclus dans les estimations officielles. C'est pourquoi les pertes économiques, assurées ou non, dues aux catastrophes d'origine météorologique, climatique et géophysique sont plus vastes dans les pays développés. Les taux de mortalité et les pertes économiques en proportion du produit intérieur brut sont plus élevés dans les pays en développement. Entre 1970 et 2008, plus de 95 % des décès provoqués par les catastrophes naturelles sont survenus dans le monde en développement. Ce sont les pays à revenu intermédiaire dont la base d'actifs s'étend rapidement qui ont payé le plus lourd tribut. Au cours de la période 2001-2006, les pays à revenu intermédiaire ont subi des pertes de l'ordre de 1 % de leur PIB, chiffre qui s'établissait à0,3 % environ pour les pays à faible revenu et à moins de 0,1% pour les pays à revenu élevé (faible degré d'évidence). Les petits pays exposés, en particulier les petits États insulaires en développement, ont éprouvé des pertes massives en proportion de leur PIB; la moyenne de la période 1970-2010, incluant les années où il n'y a pas eu de catastrophe, excédait souvent 1 % et atteignait 8 % dans les pires cas.

DES VAGUES DE CHALEUR ET DES PRÉCIPITATIONS PLUS FRÉQUENTES

Les modèles prévoient une élévation prononcée des températures extrêmes d'ici à la fin du XXIe siècle. Il est très probable que la durée, la fréquence et/ou l'intensité des périodes chaudes ou des vagues de chaleur s'accroítront sur la majeure partie des terres émergées. Selon des scénarios d'émissions spécifiques, il est probable qu'une journée extrêmement chaude qui revient tous les 20 ans se répétera tous les 2 ans d'ici à la fin du siècle dans la plupart des régions, à l'exception des hautes latitudes de l'hémisphère Nord où elle se reproduira probablement tous les 5 ans. Il est probable que la valeur extrême de la tempéra- ture maximale quotidienne dont la période de retour est de20 ans (autrement dit, qui n'a été dépassée qu'une fois en moyenne entre 1981 et 2000) s'élèvera de 1 à 3 °C d'ici au milieu du XXIe siècle et de 2 à 5 °C d'ici à la fin du XXIe siècle, selon la région et le scénario d'émission considérés. Il est aussi probable que la fréquence de fortes précipitations ou la part de ces dernières dans la pluviosité totale augmentera au XXIe siècle dans de nombreuses régions du globe. Selon divers scénarios d'émissions, il est probable que les précipitations maximales quotidiennes qui reviennent tous les 20 ans se répéteront tous les 5 à15 ans d'ici à la fin du XXIe siècle dans de nombreuses régions et avec les scénarios d'émissions élevés du GIEC, le raccourcissement de la période de retour est encore plus marqué dans la plupart des régions. De plus, l'élévation du niveau moyen de la mer tendra très probablement à augmenter les valeurs extrêmes des hautes eaux côtières.

GESTiON DES RISQUES DE CATASTROPHES

Une multitude de stratégies complémentaires peuventêtre adoptées pour s'adapter au changement climatique et faire face aux risques d'extrêmes climatiques et de catastrophes. Les mesures bénéfiques dans le climat actuel et pour divers scénarios d'évolution du climat sont dites « quasi sans regrets »; elles constituent des points de départ pour répondre aux tendances attendues en matière d'exposition, de vulnérabilité et d'extrêmes climatiques. Nombre de ces stratégies ont des effets bénéfiques additionnels, concourent à plusieurs objectifs de développement, telle l'amélioration des moyens de subsistance, du bien-être des populations et de la conservation de la biodiversité, et réduisent l'ampleur des problèmes d'adaptation. Les mesures quasi sans regrets peuvent porter sur les systèmes d'alerte précoce, la communication des risques entre les organes de décision et la population locale, la gestion durable des terres, y compris l'aménagement du territoire, et la gestion et la remise en état des écosystèmes. Ces mesures comprennent également les améliorations de la surveillance sanitaire, de l'approvisionnement en eau, de l'assainissement et des systèmes d'irrigation et de drainage, la protection des infrastructures contre les risques climatiques, l'élaboration et l'application des normes de construction, et une éducation et une sensibilisation améliorées.

Le Rapport SREX fournit aussi une évaluation d'études de cas spécifiques, qui comprennent les vagues de chaleur en Europe en 2003 et 2006, les cyclones au Myanmar et au Bangladesh, les fortes pluies à Mumbai en 2005 et plusieursautres études. Ces études sont particulièrement utiles parce qu'elles donnent un aperçu des insuffisances observées pendant ces phénomènes ainsi que les mesures appropriées qui, par exemple, ont été davantage mises en évidence pendant la vague de chaleur de 2006 en Europe que pendant celle de 2003. La préparation appropriée pour minimiser les risques de catastrophes et de phénomènes extrêmes nécessite une amélioration des systèmes de gouvernance, l'établissement de systèmes d'alerte rapide, une sensibilisation aux effets des changements climatiques ainsi que des mesures pour protéger la vie et les biens. Il faut, toutefois, souligner, comme le fait le quatrième rapport, que « ni l'adaptation, ni l'atténuation ne permettront,à elles seules, de prévenir les changements climatiques », elles« peuvent toutefois se compléter et réduire sensiblement les risques encourus ». En fait, il est possible de diminuer, de différer ou d'éviter de nombreux effets grâce aux mesures d'atténuation. Les efforts et les investissements qui seront réalisés dans les vingt à trente prochaines années auront une incidence notable sur la possibilité de stabiliser les concentrations à un niveau relativement bas.

Le rapport SREX a conclu que les limites à la résilience sont atteintes lorsque les seuils ou les points de basculement associés aux systèmes sociaux et/ou naturels sont franchis, posant des problèmes sérieux en matière d'adaptation. Alors que les mesures d'adaptation au niveau local pourraient permettre de faire face aux risques de catastrophes et de phénomènes extrêmes dus au changement climatique, les mesures d'atténuation au niveau mondial seraient donc une part essentielle de la gestion des risques.