1 mars 2008

Un sixième de la population mondiale vit dans des États fragiles qui abritent aussi une personne sur trois vivant avec moins d'un dollar par jour. Dans ces pays, la moitié des enfants y meurt avant l'âge de cinq ans, une femme sur trois y meurt en couches. Alors que les autres pays en développement font des progrès pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), ces nations fragiles, allant de Haïti au Népal et du Burundi à l'Ouzbékistan, sont à la traíne. En 2006, leur produit national brut par habitant a augmenté en moyenne de 2 % seulement, par rapport à 6 % en moyenne dans les autres pays à faible revenu. L'écart avec les autres pays en développement s'est creusé depuis les années 1970.


Pourquoi ? Certains pays sont pris dans un cercle vicieux de conflits et de pauvreté dont ils ne peuvent sortir. D'autres souffrent du « fléau des ressources naturelles » où les ressources profitent seulement aux quelques personnes qui en contrôlent la gestion. D'autres encore souffrent d'une mauvaise gouvernance et ne sont pas en mesure de fournir les services les plus essentiels à leurs citoyens. Dans ces pays, ce sont les gens ordinaires qui souffrent le plus. L'État n'a pas la capacité d'assurer un développement équitable ou bien n'en assume pas la responsabilité. Cela ralentit et arrête même les progrès accomplis pour atteindre les OMD.


L'innovation, la détermination et une attention axée sur les résultats sont essentielles pour améliorer les conditions dans les pays fragiles. Pour aider le milliard de personnes situées au bas de l'échelle mondiale, le Comité d'aide au développement (CAD)* de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui regroupe les principaux donateurs au monde, a mis en place un cadre d'action destiné aux gouvernements des États fragiles et ceux des pays développés. En avril 2007, les ministres du développement de l'OCDE ont approuvé une série de Principes pour l'engagement international dans les États fragiles et les situations précaires, après les avoir testés pendant deux ans dans dix États. Ces Principes établissent des règles essentielles pour améliorer la gestion de l'aide et promouvoir l'engagement au-delà de l'aide dans des domaines comme la sécurité, la consolidation de la paix et le renforcement de l'État. Ils ont des conséquences politiques et opérationnelles importantes.


Comme le dit le proverbe burundais, « au début, la pluie tombe toujours au même endroit ». En ce qui concerne le flux de l'aide internationale, certains pays semblent profiter à peine de cette eau de pluie essentielle. En soulignant ces « orphelins de l'aide » dans ses analyses sur le flux de l'aide, le CAD attire l'attention sur les pays qui sont laissés pour compte des programmes d'aide internationale et sont loin d'atteindre les OMD. Nous espérons que ces données permettront aux pays de l'OCDE de mettre en œuvre un système mondial rationnel d'allocation de l'aide.


Un engagement international efficace dans les États fragiles nécessite des mécanismes de financement permettant d'intervenir vite et demande un engagement à long terme. La volatilité de l'aide est également deux fois plus forte dans les États fragiles que dans les autres États à faibles revenus. Trop souvent, l'aide tend à baisser brusquement dès que les médias portent leur attention ailleurs. Il faut parvenir à une plus grande cohérence dans le soutien au développement de ces pays, si nous voulons améliorer de manière significative la vie du milliard de personnes situées au bas de l'échelle mondiale.


Changer le comportement des donateurs signifie s'attaquer à une série de problèmes multidimensionnels. Dans les États fragiles, la gouvernance, la performance économique, l'insécurité et la pauvreté sont des défis immenses. Pour y répondre, une étroite coopération est nécessaire, d'une part, entre les différents organismes gouvernementaux, y compris ceux qui sont chargés de la défense, de la diplomatie et du développement, ainsi que de l'aide humanitaire et, d'autre part, entre les différents donateurs. Les rapports du CAD indiquent que des résultats positifs peuvent être obtenus en déployant des équipes compétentes et en assurant le partage de l'analyse, la mise en commun des ressources et l'intégration d'instruments de planification simples, comme ceux qui sont utilisés en Haïti, au Liberia et au Timor-Leste.Mais un grand nombre d'États fragiles ne disposent pas des conditions préalables qui permettraient de réduire la pauvreté et d'augmenter la croissance à long terme. Sans stabilité, sans paix, sans sécurité et sans infrastructures institutionnelles et de gouvernance minimales, leurs citoyens ont peu de chances de profiter de la mondialisation. Il faut que le CAD rappelle constamment aux donateurs d'investir dans ces domaines. À court terme, la consolidation de la paix et le renforcement de l'État peuvent permettre de jeter les bases nécessaires à la réalisation des OMD.


Un engagement soutenu doit être renforcé sur le long terme dans les États fragiles si nous voulons améliorer la vie des citoyens. En nous attaquant à ces défis, nous travaillons avec une diversité d'acteurs, y compris des donateurs émergents, la société civile et le secteur privé des États fragiles. Nous explorons aussi des formules innovantes, comme le Partenariat pour la gouvernance démocratique qui a été récemment lancé, afin d'inverser la tendance et de réduire de manière significative d'ici à 2015 les obstacles qui empêchent le milliard de personnes situées en bas de l'échelle d'atteindre les OMD.


Ce Partenariat, lancé par l'OCDE et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pendant l'Assemblée générale en octobre 2007, est une initiative importante. Afin d'aider les pays les plus pauvres à assurer une meilleure gouvernance et une plus grande responsabilité et à mettre en place les services essentiels, ce Partenariat s'attache à améliorer la fourniture des services et des fonctions principales gouvernementaux en fournissant une expertise internationale pertinente ponctuelle. Organisé par l'OCDE, avec le PNUD comme partenaire principal ainsi que les gouvernements membres et non-membres de l'OCDE, il représente un instrument essentiel du dynamisme international pour aider les pays les plus pauvres à réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement.
*Le Comité d'aide au développement de l'OCDE (CAD) est une instance regroupant les gouvernements qui fournissent plus de 90 % de l'aide publique au développement à travers le monde avec des organisations multilatérales, comme le Programme des Nations Unies pour le développement, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, afin d'améliorer la manière dont l'aide est distribuée et de coordonner leurs efforts de développement. D'autres initiatives de l'OCDE visent à ce que les questions sociales et économiques dans les pays les plus pauvres soient prises en compte. Elles comprennent le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest, le Groupe d'appui au Forum pour le Partenariat avec l'Afrique, le Centre de développement, l'Initiative MENA-OCDE sur la gouvernance et l'investissement dans les régions Moyen-Orient et Afrique du Nord, et plus récemment le Partenariat pour la gouvernance démocratique. Pour plus d'information, veuillez consulter les sites suivants : (www.oecd.org) et (www.oecd.org/dac/fragilestates).

 

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