Sécurité des frontières et trafic d’armes

Photo de la Direction exécutive en visite d’évaluation au Canada

Agissant au nom du Comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité de l’ONU, la Direction exécutive (CTED) a effectué une visite d’évaluation au Canada du 6 au 10 février 2023. DECT/Mattias Sundholm

Une sécurité des frontières efficace et une diffusion opportune de renseignements aux niveaux national, régional et international sont essentielles si l’on veut empêcher les mouvements de terroristes et de groupes terroristes et mettre en œuvre efficacement des mesures de lutte antiterroriste conformément à la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité et aux autres résolutions pertinentes du Conseil. La sécurité des frontières est la première ligne de défense contre les mouvements transfrontaliers illicites de terroristes, y compris de combattants terroristes étrangers, de biens et de marchandises.

Préserver la sécurité des frontières aériennes, terrestres et maritimes constitue un défi auquel tous les États Membres doivent faire face. Pour protéger leurs frontières aériennes, de nombreux États s’efforcent de mettre en place des mesures essentielles en matière de sûreté aérienne, notamment le contrôle des marchandises et le recoupement des voyageurs avec les listes de personnes à surveiller et les bases de données nationales et internationales établies aux fins de la lutte antiterroriste. Pour ce faire, il faut pouvoir s’appuyer sur des ressources financières et humaines, du matériel, des réglementations précises et des compétences spécialisées ainsi que sur une coopération intra et interétatique. La résolution 2309 (2016) du Conseil de sécurité a été la première à porter expressément sur les menaces terroristes pesant sur l’aviation civile. La résolution met en lumière un certain nombre de mesures que les États Membres devraient prendre en priorité pour renforcer l’application des normes et pratiques recommandées de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) en matière de sécurité, notamment en assurant une meilleure coordination entre leurs services et organismes nationaux concernés. En 2017, le Conseil a adopté sa résolution 2396 (2017), dans laquelle il s’est félicité que l’OACI ait approuvé le plan pour la sûreté de l’aviation dans le monde.

Les frontières terrestres peuvent être très étendues et poreuses et, par conséquent, difficiles à surveiller. La sécurité des frontières implique le contrôle des mouvements de personnes et de biens de part et d’autre des frontières et la prévention des actes illicites contre la navigation maritime et le transport international de marchandises. Pour garantir la sécurité des frontières maritimes et préserver l’ordre dans les zones maritimes et côtières, il faut des capacités techniques et des ressources importantes si l’on veut patrouiller efficacement dans de vastes espaces marins et assurer une présence aux frontières physiques et aux points de contrôle. Des mesures spéciales visant à renforcer la sûreté maritime sont également énoncées dans le Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires (Code ISPS), instrument obligatoire pour les parties contractantes à la Convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (Convention SOLAS). Le Code ISPS a pour objet de garantir que les navires de haute mer et les installations portuaires des États membres de l’Organisation maritime internationale (OMI) appliquent les normes de sécurité les plus strictes possibles, selon un système de surveillance, de vérification et de contrôle.

Au vu de la menace que représentent les combattants terroristes étrangers, les États Membres et la communauté internationale demeurent contraints de renforcer la sécurité aux frontières et d’empêcher les déplacements de ces individus. Après l’adoption, par le Conseil de sécurité, des résolutions 2178 (2014) et 2396 (2017) visant à endiguer le flux de combattants terroristes étrangers, le Comité contre le terrorisme et sa Direction exécutive ont encore renforcé leur mobilisation et leur analyse des capacités de lutte antiterroriste des États, notamment en ce qui concerne la sécurité des frontières. L’analyse menée par la DECT a révélé, chez un certain nombre d’États, une mise en œuvre très lacunaire des exigences en matière de sécurité des frontières énoncées dans les résolutions 1373 (2001), 1624 (2005), 2178 (2014) et 2396 (2017), notamment en ce qui concerne l’analyse des données relatives aux passagers, le recoupement des voyageurs avec les listes de personnes à surveiller et les bases de données, et l’utilisation de la biométrie dans la lutte antiterroriste.

Un certain nombre d’États ont pris des mesures pour renforcer la sécurité aux frontières et empêcher les déplacements de combattants terroristes étrangers. Ils ont, notamment, pris des mesures telles que la confiscation des passeports, l’introduction d’une obligation de visa de transit et une utilisation plus efficace des bases de données de l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL) dans le but d’effectuer des contrôles permettant de détecter et d’identifier les combattants terroristes étrangers. Ainsi, certains États ont intégré le système mondial de communication policière I-24/7 d’INTERPOL dans leurs systèmes nationaux et élargi l’accès au système, au-delà des bureaux centraux nationaux, à d’autres organismes d’application de la loi se trouvant dans des lieux stratégiques, y compris les agents de première ligne. De plus en plus d’États alimentent le fichier d’analyse antiterroriste (CT CAF) d’INTERPOL. Pour autant, de nombreux États n’ont toujours pas accès aux bases de données pertinentes, notamment aux bases d’INTERPOL, ni aux listes relatives aux sanctions contre l’EIIL (Daech) et Al-Qaida.

Pour renforcer la sécurité des frontières, les systèmes de renseignements préalables concernant les voyageurs (RPCV) constituent un outil important. L’introduction de tels systèmes est requise au titre des résolutions 2178 (2014), 2396 (2017) et 2482 (2019) du Conseil et par les normes de l’OACI. Sous leur forme la plus simple, les RPCV sont exploités dans le cadre d’un système de communications électroniques qui recueille des données biographiques sur les voyageurs et des informations générales sur les vols auprès des compagnies aériennes, pour les transmettre, avant l’arrivée des avions, aux autorités chargées de la sécurité des frontières dans les pays de destination. Cela donne à ces autorités plus de temps pour effectuer des vérifications suffisantes sur tous les voyageurs à destination du territoire relevant de leur compétence, afin de déterminer si certains font l’objet de sanctions ou figurent sur des listes de personnes à surveiller, tout en réduisant à un minimum les retards dans le traitement des données relatives aux voyageurs à l’arrivée. En outre, dans ses résolutions 2396 (2017) et 2482 (2019), le Conseil de sécurité a décidé que les États Membres renforceraient leur capacité de collecter et de traiter les données des dossiers passagers et veiller à ce que ces données soient communiquées à toutes les autorités nationales compétentes et utilisées par celles-ci. Ces données peuvent servir à créer une capacité d’« analyse des liens » pouvant mettre en lumière des imbrications cachées pour détecter des risques auparavant inconnus.

Si de nombreux États ont commencé à mettre au point des capacités en matière de RPCV et de dossiers passagers, beaucoup ont toujours du mal à mettre en œuvre de manière cohérente ces systèmes et ces cadres extrêmement complexes et techniques. La DECT est un des partenaires du Programme des Nations Unies de lutte contre les déplacements des terroristes, qui aide les États Membres à mettre en œuvre de façon globale les systèmes relatifs aux RPCV et aux dossiers passagers. Ce programme permet d’apporter, grâce à la solution logicielle GoTravel, un soutien aux États Membres dans les domaines de l’entraide judiciaire et administrative, du renforcement de la capacité opérationnelle, de la mobilisation du secteur des transports et des moyens techniques.

L’aptitude à comparer les données biométriques recueillies au cours des enquêtes et des contrôles aux frontières et à l’immigration avec les données tirées de bases de données nationales et internationales plus larges, y compris les données biométriques, est essentielle si l’on veut détecter et identifier efficacement les terroristes, y compris les combattants terroristes étrangers. En adoptant sa résolution 2322 (2016), le Conseil a invité pour la première fois les États Membres à communiquer des données biométriques permettant de détecter et d’identifier des terroristes, y compris des combattants terroristes étrangers. Dans sa résolution 2396 (2017), le Conseil a fait de cet appel une exigence au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Le Recueil de l’Organisation des Nations Unies des pratiques recommandées applicables à l’utilisation et à l’échange responsables des données biométriques dans le contexte de la lutte contre le terrorisme[1] est une première ; il vise à aider les États non seulement à mettre en œuvre des systèmes biométriques, mais également à utiliser et à communiquer des données biométriques de manière responsable et appropriée, notamment en adoptant, pour l’utilisation de la technologie biométrique, des cadres clairs et fondés sur les droits humains qui prévoient l’utilisation de garanties procédurales, une protection des données et le respect de la sphère privée, conformément à la résolution 2396 (2017). Le renforcement du contrôle de la délivrance des papiers d’identité et des titres de voyage et l’introduction de mesures de prévention de la falsification, de la contrefaçon ou de l’utilisation frauduleuse de ces documents sont autant d’autres moyens permettant d’empêcher les mouvements de terroristes ou de groupes terroristes. Toutefois, nombreux sont les États qui ne disposent pas de politiques et de mesures claires permettant de garantir la sécurité et l’intégrité du processus de délivrance de papiers d’identité et de titres de voyage.

Dans sa résolution 1373 (2001), le Conseil de sécurité a décidé que les États devraient s’abstenir d’apporter quelque forme d’appui que ce soit aux entités ou personnes impliquées dans des actes de terrorisme, notamment en mettant fin à l’approvisionnement en armes des terroristes. Dans sa résolution 2370 (2017), il a exhorté les États à coopérer pour empêcher les terroristes d’acquérir des armes et leur a demandé de lutter contre les menaces que constituent les engins explosifs improvisés et de devenir parties aux instruments internationaux et régionaux y afférents. Or, en raison de l’évolution constante de l’environnement opérationnel relatif au terrorisme, empêcher les terroristes d’accéder à des armes représente un défi complexe et protéiforme. Le trafic d’armes est souvent associé à d’autres formes de criminalité organisée, dont le terrorisme, et facilité par celles-ci. Des armes peuvent tomber entre les mains de terroristes si certains stocks sont mal protégés ou en raison d’une mauvaise gestion du contrôle aux frontières. Les activités des combattants terroristes étrangers augmentent la probabilité que des armes et des munitions passent d’un pays à l’autre.

Les stratégies de gestion coordonnée et globale des frontières, qui exigent une coordination étroite entre les autorités compétentes, se sont révélées extrêmement efficaces pour l’administration concrète des frontières nationales. Ces stratégies prévoient la coordination des politiques, des programmes et des prestations entre les organismes de réglementation transfrontaliers dans le but de renforcer la régulation du commerce et des voyages, tout en répondant aux préoccupations en matière de sécurité. Dans les Principes directeurs de Madrid de 2015 (S/2015/939) du Conseil de sécurité, les États sont invités à envisager d’adopter les principes de la gestion coordonnée et globale des frontières pour que leurs systèmes de sécurité des frontières puissent endiguer plus efficacement le flux des combattants terroristes étrangers.

Assurer une sûreté efficace aux frontières fait partie intégrante de toute stratégie nationale globale et intégrée de lutte contre le terrorisme et nécessite une action collective des États et des organisations internationales et régionales compétentes. Le Comité et la DECT peuvent aider les États à recenser les lacunes, les besoins et les défis ainsi qu’à faciliter la mise en commun des bonnes pratiques dans ce domaine et faciliter la prestation d’activités d’assistance technique destinées à garantir la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil et des recommandations connexes du Comité.

Toutes les mesures de lutte contre le terrorisme, y compris dans le domaine de la gestion des frontières, doivent être adoptées en conformité avec le droit interne et les obligations internationales et dans le plein respect des droits humains et des libertés fondamentales. Tous les efforts liés à la gestion des frontières doivent être globaux, respectueux des droits humains et non discriminatoires et tenir compte des questions de genre et d’âge.

L’additif aux principes directeurs relatifs aux combattants terroristes étrangers (2018) (S/2018/1177) fournit d’autres éléments permettant aux États de renforcer la mise en œuvre des mesures relatives à la sécurité des frontières et à l’échange d’informations, notamment en assurant une utilisation efficace des RPCV et des dossiers passagers et en élaborant des listes de personnes à surveiller et des bases de données ainsi qu’en mettant au point des systèmes biométriques et en garantissant leur utilisation responsable. L’additif énonce également des principes directeurs sur la prévention et la répression du trafic d’armes légères et de petit calibre.

 

Téléchargez la fiche d’information de la DECT sur la gestion des frontières. (EN)

 

Ressources supplémentaires

Technical guidelines to facilitate the implementation of Security Council resolution 2370 (2017) and related international standards and good practices on preventing terrorists from acquiring weapons

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Publication Date: 
Vendredi, 18 March 2022
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2022