« Alors que le monde est confronté à des niveaux d’inégalité insoutenables, nous avons plus que jamais besoin de l’éducation, grand facteur d’égalité. »
– António Guterres, Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU)
« Ces enfants sont comme tous les enfants du monde : ils rêvent de devenir enseignants, médecins, avocats, ingénieurs... La différence est que la plupart d’entre eux sont déplacés de force et luttent ne serait-ce que pour rester en sécurité et pour survivre. Avec les bons outils et le bon type de soutien, nous pouvons les aider à réaliser leurs rêves. »
– Amina J. Mohamed,
Vice-Secrétaire générale de l’ONU
« Ces photographies mettent en évidence le rôle crucial que joue l’éducation des enfants dans les crises humanitaires. Elles montrent que, même dans les situations les plus désespérées du monde, les enfants ont l’espoir, la force et la détermination nécessaires pour apporter des changements. Il est de notre devoir de les protéger et de les soutenir. Pour ce faire, il importe aujourd’hui plus que jamais de mettre l’accent sur la solidarité mondiale. »
– Mark Lowcock, Secrétaire général adjoint
aux affaires humanitaires de l’ONU et Coordonnateur des secours d’urgence
Une personne sur 18 est actuellement touchée par une crise humanitaire. Ces crises peuvent être dues à des conflits, à des catastrophes naturelles ou, comme c’est le cas actuellement, à une pandémie mondiale. Dans le monde, plus de 258 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire pour survivre.
Cette exposition met en lumière les espoirs et les rêves des enfants touchés par des crises. Tous âgés de 6 à 18 ans, les jeunes présentés ici se sont déguisés pour nous montrer qui ils veulent devenir en grandissant et ont, pour ce faire, déniché des costumes et des accessoires dans leur environnement proche. En capturant la vision de l’avenir de chaque enfant, le photographe Vincent Tremeau nous donne un aperçu unique de leur situation et de leurs défis actuels.
République démocratique du Congo
La crise en République démocratique du Congo est l’une des situations d’urgence humanitaire les plus considérables et les plus complexes du monde. Les besoins humanitaires dépendent largement des conflits armés, de la pauvreté et des catastrophes naturelles, y compris les inondations. Il existe plus de 100 factions armées et milices différentes dans le pays.
D’après les estimations, 25,6 millions de Congolais ont besoin d’une aide humanitaire et d’une protection en 2020. Ils sont confrontés à des violations persistantes des droits humains, à des déplacements, à une grave insécurité alimentaire, à une malnutrition chronique et à des épidémies de maladies, telles que le choléra, la rougeole et la maladie à virus Ebola. Les niveaux de violences sexuelles liées au conflit sont alarmants.
Lorsque des personnes fuient la violence en quête de sécurité, elles se retrouvent souvent dans des endroits isolés, perdant ainsi l’accès à des biens et services essentiels tels que les soins de santé, l’eau potable et l’assainissement, et l’éducation.
Camp pour personnes déplacées dans le Nord-Kivu (République démocratique du Congo). Les déplacements et la violence ont empoisonné la vie de centaines de milliers de personnes dans cette région. Certaines familles ont été déplacées plus de dix fois au cours de la dernière décennie seulement. [Crédit photo : OCHA/Giles Clarke]
Crise des Rohingya
L’extrême violence qui frappe l’État rakhine (Myanmar) a forcé des centaines de milliers de Rohingya à traverser la frontière pour se rendre à Cox’s Bazar fin 2017, en faisant ainsi le plus grand camp de réfugiés de la planète. Environ 860 000 Rohingya y vivent aujourd’hui en tant que réfugiés. Le Gouvernement et les agences humanitaires fournissent une assistance aux réfugiés et aux communautés d’accueil qui ont généreusement contribué à soutenir les personnes les plus démunies. La prévention de la COVID-19 dans des conditions de forte densité complique encore la vie quotidienne.
La plupart des réfugiés ont été témoins ou ont enduré des horreurs indicibles au Myanmar. Des villages entiers ont été brûlés, des familles ont été séparées et tuées, des femmes et des filles ont été violées. Les causes profondes de la détresse que ces personnes ont vécue au Myanmar n’ont pas encore été traitées et leur avenir demeure incertain. Une telle situation génère une anxiété et une détresse considérables, qui viennent s’ajouter aux conditions de vie déjà difficiles.
On estime que 600 000 Rohingya sont restés au Myanmar. Parmi eux, environ 130 000 sont déplacés dans le centre de l’État rakhine, et si la plupart sont confinés dans des camps, tous sont confrontés à des restrictions de liberté de mouvement et d’accès aux services. Le conflit en cours dans l’État rakhine continue de les mettre en danger, ainsi que d’autres civils, et entrave leur accès à l’aide humanitaire.
Les familles rohingya fuient pour se réfugier au Bangladesh, à Cox’s Bazar ou dans ses environs. La plupart de ces familles ont quitté leurs villages au Myanmar à pied et en bateau ; leur voyage a duré plusieurs jours, voire plusieurs semaines. [Crédit photo : OCHA/David Dare Parker]
Bassin du lac Tchad
Négligées et affectées par les changements climatiques et par les conflits, des millions de personnes mènent une bataille quotidienne pour survivre dans le bassin du lac Tchad, région qui couvre le Nord-Est du Nigéria, le Niger, le Cameroun et le Tchad.
Ce conflit brutal a déraciné environ 2,8 millions de personnes et a laissé près de 5,2 millions de personnes en situation de grave insécurité alimentaire. La malnutrition dans les zones touchées par le conflit risque de s’aggraver rapidement. De fait, 500 000 enfants sont menacés de malnutrition aiguë sévère. En outre, des enlèvements massifs d’enfants, en particulier de filles, ont eu lieu, tout comme des violences sexuelles, le recrutement forcé d’enfants et d’autres violations des droits humains.
La violence et les combats ont également détruit les cultures vivrières, les économies locales et l’infrastructure. Un demi-million d’enfants souffrent de malnutrition aiguë sévère.
Les secours d’urgence sont essentiels pour sauver des vies et pour éviter la famine dans la région. Toutefois, la situation en matière de sécurité entrave l’accès à tous ceux qui ont besoin d’aide. D’après les estimations, dans le seul Nord-Est du Nigéria, des centaines de milliers de personnes sont coupées de l’aide extérieure. Selon les plans d’intervention humanitaire révisés dans les trois pays, 12,5 millions de personnes dans les régions touchées ont maintenant besoin d’une aide d’urgence, soit 1,7 million de plus qu’au début de l’année.
Des enfants jouent dans un camp pour personnes déplacées à l’intérieur du pays à Rann, au Nord-Est du Nigéria. Environ 50 000 personnes vivent ici et ne peuvent pas rentrer chez elles en raison de la violence et de l’insécurité. Sur la photo, Serah, 7 ans, l’une des personnes déplacées vivant à Rann, dans l’État de Borno (Nigéria). [Crédit photo : OCHA/Yasmina Guerda]
Népal
Dans les zones rurales du Népal, du fait de la pauvreté et de l’inégalité de genre, les filles sont souvent mariées avant de fêter leur 18ème anniversaire. Plus de 48 % des femmes adultes déclarent avoir été mariées avant l’âge de 18 ans.
Le Népal est très vulnérable aux risques naturels, en particulier aux tremblements de terre et aux inondations. Le terrain montagneux du pays pose d’importants défis logistiques pour accéder aux zones reculées et y acheminer les secours.
Nirmala, 26 ans, vit avec ses beaux-parents et sa fille de 3 ans dans un abri temporaire construit après le tremblement de terre qui a frappé le pays en 2015. Leur maison ayant été complètement détruite pendant le tremblement de terre, ils sont dans l’incapacité de rentrer chez eux. Nirmala et sa belle-famille travaillent dans les champs pour gagner leur vie, tandis que son mari est parti à l’étranger pour gagner de l’argent et subvenir aux besoins de sa famille. [Crédit photo : OCHA/Anthony Burke]
Sierra Leone
La Sierra Leone a été le pays le plus durement touché par l’épidémie d’Ebola, avec plus de 14 000 cas, plus de 3 500 décès et 4 000 survivants.
Le premier cas a été détecté en Guinée en mars 2014. Le virus s’est ensuite propagé dans les pays voisins, dont la Sierra Leone.
Plus de 10 000 personnes en Afrique de l’Ouest sont mortes de la maladie à virus Ebola lors de la dernière épidémie.
Garçon sur le chemin de l’école à Moyamba Junction (Sierra Leone). [Crédit photo : Vincent Tremeau]
Iraq
Près de trois ans après la fin des opérations militaires de l’Iraq contre l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL), les tensions sociales, ethniques et sectaires persistent. Les intervenants humanitaires mènent leurs opérations dans des contextes politiques et sécuritaires de plus en plus instables.
Environ 1,4 million de personnes sont toujours déplacées à l’intérieur de l’Iraq, et le pays accueille également plus de 250 000 réfugiés syriens. Parmi ces personnes, plus de la moitié sont déplacées depuis plus de quatre ans. L’insécurité, le manque de perspectives d’emploi et la destruction ou l’endommagement des logements et des infrastructures entravent la capacité des gens à rentrer chez eux. La transition de cette population vers des solutions durables reste au premier rang des priorités de l’ONU.
Syrie
Alors que la crise syrienne entre dans sa dixième année, l’ampleur, la gravité et la complexité des besoins humanitaires restent considérables. Plus de 11 millions de personnes sont dans le besoin, dont 9,3 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire. La crise a fait plus de 6,7 millions de réfugiés et déplacé 6,7 millions de Syriens supplémentaires à l’intérieur du pays. Si le conflit armé dans certaines parties de la Syrie continue de causer des souffrances, la situation a été encore exacerbée par la crise économique actuelle et par la COVID-19.
L’année dernière, le prix des denrées alimentaires de base a augmenté de près de 250 %. En Syrie, huit personnes sur dix vivent en dessous du seuil de pauvreté. Les familles sont confrontées à des choix difficiles : soit mettre de la nourriture sur la table ou un toit au-dessus de leur tête, soit garder leurs enfants au chaud ou les envoyer à l’école.
Grâce aux structures de soutien familial et communautaire, aux organisations humanitaires non gouvernementales et aux institutions publiques, les Syriens eux-mêmes continuent d’être les intervenants principaux de la crise. En complément de leurs efforts, les organisations humanitaires ont mis en place l’une des plus grandes opérations du monde.
15 septembre 2014, Dahouk (Iraq) : L’hiver approche désormais à grands pas, menaçant d’aggraver une situation déjà désastreuse. D’après les estimations, 600 000 personnes ont un besoin immédiat d’aide pour passer l’hiver, notamment de couvertures thermiques, de chauffage et de carburant. [Crédit photo : OCHA/Iason Athanasiadis]
Sahel central
Le Sahel central est l’épicentre d’une des crises humanitaires les plus graves du monde.
Plus de 13 millions de personnes, dont 7 millions d’enfants, ont besoin d’une aide humanitaire urgente au Burkina Faso, au Mali et au Niger, soit cinq millions de plus que ce que prévoyaient les estimations au début de l’année 2020.
En moins de deux ans, la violence et l’insécurité ont poussé 7,4 millions de personnes au Sahel central vers des niveaux de faim aiguë, soit trois fois plus qu’il y a un an, et 1,5 million de personnes ont été contraintes de quitter leur foyer par la violence, soit une multiplication par vingt en deux ans.
La violence fondée sur le genre a atteint des sommets, des millions d’enfants ne sont pas scolarisés et les services sanitaires et sociaux de base font défaut. Les confinements et les autres mesures de prévention de la COVID-19 ont fait basculer 6 millions de personnes supplémentaires de la région dans l’extrême pauvreté.
L’année dernière, 81 travailleurs humanitaires ont été blessés, kidnappés ou tués au Burkina Faso, au Mali et au Niger, selon la base de données sur la sécurité du personnel humanitaire. En 2019, le nombre d’attaques contre les travailleurs humanitaires au Mali a doublé par rapport à 2018.
Des femmes traversent la route à côté d’un camp de personnes déplacées à Diffa, dans le Sud-Est du Niger. La violence au Nigéria, pays voisin, a forcé des millions de personnes à fuir leurs foyers. [Crédit photo : Vincent Tremeau]
République centrafricaine
Bien que la crise en République centrafricaine soit l’une des pires crises du monde, elle reste largement ignorée. Plus de la moitié de la population a désespérément besoin d’une aide humanitaire et un Centrafricain sur quatre est déplacé, soit à l’intérieur du pays soit en dehors.
L’augmentation continue des activités des groupes armés, des conflits intercommunautaires et des affrontements violents pour le contrôle des ressources naturelles a encore réduit la capacité de la population à supporter les chocs.
En septembre 2020, près de 641 000 personnes étaient déplacées à l’intérieur du pays, soit une augmentation de 8 % par rapport à la même période en 2019. En outre, la COVID-19 a porté un coup dévastateur au secteur économique. La fermeture des écoles a exposé des centaines de milliers d’enfants à des risques supplémentaires de recrutement dans des groupes armés et aux pires formes de travail, notamment dans les mines. Un cas de violence fondée sur le genre est enregistré toutes les heures, et le nombre de cas enregistrés a doublé à Bangui, la capitale du pays. L’insécurité alimentaire et la malnutrition se sont étendues au centre urbain. Seul un Centrafricain sur trois a accès à l’eau potable et aux installations sanitaires.
La République centrafricaine est également l’un des pays les plus dangereux pour les travailleurs humanitaires, avec plus d’un incident contre les travailleurs humanitaires enregistré chaque jour.
Bangui (République centrafricaine) - 27 février 2014. Un enfant déplacé à la base aérienne de M’Poko où des milliers de familles se sont réfugiées pour fuir la violence qui a largement divisé les communautés sur la base de considérations religieuses. [Crédit photo : OCHA/Phil Moore]
Photographie de Vincent Tremeau présentée par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires
Né en 1984, Vincent Tremeau est un photographe français basé à Dakar (Sénégal). Diplômé en droit de l’Université de Toulouse, il a effectué plusieurs missions en tant que travailleur humanitaire dans des pays en crise, autant d’expériences qui ont renforcé son intérêt pour la photographie qu’il considère être un outil de témoignage et de sensibilisation à la situation des populations en période de troubles. À partir de 2014, il a poursuivi son engagement en tant que photographe indépendant et a commencé à documenter plusieurs crises humanitaires en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud. Témoin des difficultés que rencontrent les enfants pour accéder à l’éducation, il a lancé le projet « Un jour, je serai » sur la jeunesse en novembre 2014. Combinant une approche artistique avec un objectif documentaire, Vincent Tremeau dépeint les espoirs et les perspectives de la génération future en Afrique.