8978e séance – matin
CS/14807

Syrie: 14,6 millions de Syriens dépendent de l’aide humanitaire, indique l’Envoyé spécial alors qu’il cherche à dynamiser le processus politique

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie a de nouveau insisté, ce matin devant le Conseil de sécurité, sur son approche « pas à pas » pour un règlement du conflit syrien, dans le cadre de la résolution 2254 (2015) et dans un contexte marqué par une détérioration de la situation humanitaire, comme est venue en témoigner la nouvelle Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, Mme Joyce Msuya.  Compte tenu des souffrances que vivent les Syriens, M. Geir Pedersen a plaidé pour la mise en œuvre complète de la résolution 2585 (2021), non seulement sur le plan humanitaire mais aussi dans l’objectif d’instaurer la confiance. 

Il a annoncé la date de la septième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle, dirigée par des Syriens et facilitée par l’ONU, qui aura lieu à Genève le 21 mars.   Alors que les positions des parties sont toujours substantiellement éloignées, il a dit faire du rapprochement l’une de ses priorités.  Conformément aux termes de référence et aux règles fondamentales de procédure, il a demandé à toutes les délégations d’avoir un sens du compromis et de l’engagement, afin de permettre à la Commission de travailler rapidement et de produire des résultats, sans interférences ou délais imposés de l’extérieur.  Il a fait savoir que les coprésidents de la Commission ont d’ores et déjà convenu de futures sessions en mai et juin 2022 et qu’ils sont prêts à discuter d’un plan de travail. 

L’Envoyé spécial a dit qu’il continue entre temps à travailler sur d’autres éléments de la résolution 2254, en menant un processus continu de consultations avec les parties syriennes.  Il a rencontré le Gouvernement à Damas et la Commission syrienne des négociations à Istanbul et Genève.   Il a également eu des discussions approfondies ce mois-ci avec les Ministres des affaires étrangères de la Jordanie, de la Turquie et de la Russie, dans leurs capitales.   Sa démarche, a-t-il expliqué, consiste à demander à ses interlocuteurs non seulement ce qu’ils exigeraient, mais aussi ce qu’ils pourraient mettre sur la table, l’objectif étant d’avancer, pas à pas, sur différents sujets, à travers des engagements précis et vérifiables. 

Sur le volet humanitaire, Mme Msuya a avancé le chiffre alarmant de 14,6 millions de Syriens qui dépendront de l’aide humanitaire en 2022.   « Le monde laisse tomber le peuple syrien », s’est-elle alarmée en s’inquiétant que les hostilités, principalement le long des lignes de front, continuent de faire des morts et des dégâts parmi les civils et les infrastructures civiles essentielles telles que les hôpitaux, les écoles et les installations d’approvisionnement en eau.  La Syrie se classe désormais parmi les 10 pays les plus touchés par l’insécurité alimentaire dans le monde, avec 12 millions de personnes qui en souffrent, et son économie poursuit sa spirale descendante.  « Les gens ont faim », a tonné la haute responsable, préoccupée également de voir de plus en plus d’enfants abandonner l’école et être mariés de manière précoce. 

Le plan de réponse humanitaire 2022 de l’ONU est en voie de finalisation et prévoit d’allouer un quart de ses ressources au renforcement de la résilience et à l’accès aux services de base comme l’eau, a expliqué la Sous-Secrétaire générale en indiquant que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a besoin d’un plus grand soutien.  Elle a souligné la transparence dans laquelle se déroulent les opérations transfrontalières de l’ONU et rappelé que OCHA avait élargi, l’année dernière, l’accès au nord-ouest de la Syrie en redémarrant les opérations à travers les lignes de front. 

Si tous les membres du Conseil ont insisté sur les impératifs de progresser sur la voie d’un règlement politique, de lutter contre la menace terroriste en Syrie et d’améliorer la réponse humanitaire, certaines divergences de points de vue ont persisté.  La France, le Royaume-Uni, l’Irlande et les États-Unis, d’avis que l’aide humanitaire à travers les lignes de front ne saurait satisfaire autant de besoins que les opérations transfrontalières, ont défendu l’idée qu’il n’existe pas d’alternative à de telles opérations.  Le Royaume-Uni a donc estimé essentiel le renouvellement du mandat du mécanisme transfrontalier de l’ONU lorsqu’il prendra fin en juillet.  La Fédération de Russie a, au contraire, jugé inacceptable de donner la priorité à l’aide humanitaire transfrontalière au détriment de l’aide au travers des lignes de front.  La Syrie, elle, a pointé du doigt les pays occidentaux, le « régime turc » et les organisations terroristes qui entravent selon elle les convois humanitaires.    De son côté, la Turquie a accusé le « régime syrien » de détourner l’aide humanitaire, à l’instar du Groupe A3 (Gabon, Ghana et Kenya) qui a demandé des normes claires de contrôle et de transparence de l’aide, quel que soit son point d’entrée.

Sur le volet politique, le Brésil a résumé le sentiment de la majorité dans la salle en affirmant à nouveau qu’il n’existe pas de solution militaire à ce conflit et que les acteurs syriens doivent faire avancer le processus politique. La Commission constitutionnelle ne peut aboutir à de véritables progrès sans un réel engagement des autorités syriennes, a souligné l’Irlande, tandis que l’Albanie a reproché au « régime syrien » d’être responsable de la perpétuation de ce « statu quo mortifère », en lui demandant d’assumer la responsabilité première du processus politique.   Sans solution politique, a tranché la France, les positions françaises, comme européennes, sur la levée des sanctions et la reconstruction demeureront inchangées.  Le délégué syrien a, lui aussi, insisté sur l’importance d’une solution politique fondée sur le dialogue national mené et dirigé par les Syriens et sans ingérence étrangère, y compris dans le travail de la Commission constitutionnelle.   La Syrie a également exigé la fin de l’occupation des États-Unis et d’autres pays d’une partie de son territoire et la fin des sanctions unilatérales qui la visent toujours.   Quant à l’Iran, elle a assuré que le format d’Astana poursuivra ses efforts pour mettre fin à la crise et atténuer les souffrances du peuple syrien. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2022/50)

Déclarations

M. GEIR O. PEDERSEN, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a insisté d’emblée sur la pauvreté et les souffrances que vivent les Syriens, en soulignant l’importance de la mise en œuvre complète de la résolution 2585 (2021) non seulement sur le plan humanitaire mais aussi dans le contexte de l’instauration de la confiance.  Il s’est engagé à s’acquitter de son mandat à savoir convoquer les parties syriennes à un processus formel et promouvoir la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) d’une manière qui réponde aux besoins légitimes et aux aspirations du peuple syrien et qui rétablisse la pleine souveraineté, l’unité, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Il a fait état d’incidents le long des lignes de front dans le nord-ouest, nord-est et sud-ouest ainsi que d’une montée des violences sur les frontières internationales, y compris celles avec la Jordanie où ces incidents seraient liés au trafic de stupéfiants selon Amman.  « Il est clair que nous sommes dans l’impasse et que les gens souffrent », s’est désolé M. Pedersen, ajoutant qu’une solution politique est la seule issue viable.  Il a appelé les membres du Conseil à soutenir cette option. 

L’Envoyé spécial a annoncé la date pour la convocation de la septième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle, dirigée par des Syriens et facilitée par l’ONU, qui aura lieu à Genève, le 21 mars.  Il a jugé important que le travail de l’organe restreint se poursuive, ce qui contribue au renforcement de la confiance.  Les positions des parties sont substantiellement éloignées et la réduction de leurs différences est une priorité pour M. Pedersen.  Il a fait valoir que, conformément aux termes de référence et aux règles fondamentales de procédure, il faut que toutes les délégations aient un sens du compromis et de l’engagement, afin que la Commission puisse travailler rapidement et produire des résultats, sans interférences ou délais imposés de l’extérieur. Les coprésidents ont convenu de futures sessions en mai et juin 2022 et ils sont prêts à discuter d’un plan de travail, ce qui est une nécessité, a souligné l’Envoyé spécial. 

Il a dit qu’il continuerait entre temps à travailler sur le processus de mise en œuvre d’autres éléments de la résolution 2254 qui se trouvent en dehors du volet constitutionnel.  À cet effet, M. Pedersen a dit mener un processus continu de consultations pour déterminer et de dialoguer avec les parties syriennes, rencontrant le Gouvernement à Damas et la Commission syrienne des négociations à Istanbul et Genève.  Il a également eu des discussions approfondies avec les Ministres des affaires étrangères de la Jordanie, de la Turquie et de la Russie, dans leurs capitales ce mois-ci.  Sa démarche, a-t-il expliqué, consiste à demander à ses interlocuteurs non seulement ce qu’ils exigeraient, mais aussi ce qu’ils pourraient mettre sur la table, l’objectif étant d’avancer, pas à pas, sur différents sujets, à travers des engagements précis, vérifiables et qui sont mis en œuvre en parallèle.  M. Pedersen a assuré qu’il écoute attentivement tous ses interlocuteurs sur la manière dont ils pensent qu’il est possible de progresser, saisissant cette occasion pour remercier ceux qui se sont engagés jusqu’à présent, et invitant les autres à le faire. 

À la suite de son dernier exposé au Conseil, il a rencontré le conseil consultatif de l’organisation « Women’s » en Norvège et se réjouit de les accueillir en Suisse du 14 au 21 mars.  Ce dimanche, l’Envoyé spécial va rencontrer une série de représentants de la société civile syrienne dans le cadre de consultations par le biais de la « Civil Society Support Room » à Genève.  Il s’est dit convaincu que l’écrasante majorité des Syriens souhaite désespérément que ce conflit se termine pour que leurs vies brisées puissent s’améliorer et qu’ils puissent vivre dans la sécurité et la dignité.  Ils attendent aussi des avancées sur le dossier des détenus, enlevés et disparus, a indiqué M. Pedersen. 

L’Envoyé spécial a dit qu’il avait espéré qu’à travers les dernières consultations il aurait été possible de commencer à trouver une voie vers un processus politique fonctionnel pour mettre en œuvre la résolution 2254.  Il s’est dit très préoccupé que la diplomatie internationale nécessaire pour donner cet élan risque de s’avérer encore plus difficile maintenant, avec la crise en Ukraine.  Pour sa part, il a dit vouloir garder le cap en se concentrant sur l’engagement des parties et la convocation de larges consultations, dont une série de réunions constitutionnelles en mars, mai et juin. 

Mme JOYCE MSUYA, Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, a relevé, dans son tout premier exposé devant le Conseil de sécurité, que la dernière évaluation factuelle des besoins humanitaires en République arabe syrienne pour l’année à venir brosse un tableau très sombre: un total de 14,6 millions de personnes dépendront de l’aide humanitaire, soit 9% de plus que l’an dernier et 32% de plus que l’année précédente.  « Le monde laisse tomber le peuple syrien. » 

Mme Msuya a relevé que les hostilités, principalement le long des lignes de front, continuent de faire des morts et des dégâts parmi les civils et conduisent à la destruction d’infrastructures civiles essentielles telles que les hôpitaux, les écoles et les installations d’approvisionnement en eau.  Environ 40 civils ont été tués ce mois de janvier, a-t-elle noté, alors que les mines et les engins explosifs font d’autres morts, y compris chez des enfants.  Les hostilités restreignent également la liberté de mouvement, et cela augmente le risque de maltraitance des femmes et des enfants, a-t-elle ajouté. 

La Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence a rappelé l’attaque d’une prison à Hassaké le mois dernier, évoquant une situation incroyablement précaire pour des centaines d’enfants qui restent dans des centres de détention et des camps.  Ils n’auraient jamais dû y être, s’est-elle offusquée en indiquant qu’ils ont besoin de protection, de services, et d’espoir pour l’avenir.  Elle a relevé que la Syrie se classe désormais parmi les 10 pays les plus touchés par l’insécurité alimentaire dans le monde, avec 12 millions de personnes considérées comme souffrant d’insécurité alimentaire. 

Elle a aussi fait savoir que l’économie syrienne poursuit sa spirale descendante et la nourriture devient de plus en plus chère.  « Les gens ont faim. »  Au cours de la dernière année, le coût pour nourrir une famille de cinq personnes pendant un mois avec des articles de base a presque doublé, a—t-elle expliqué.  Elle a indiqué qu’un ménage dépense en moyenne aujourd’hui 50% de plus qu’il ne gagne.  Les familles doivent emprunter de l’argent sans grand espoir de rembourser ces prêts, et cela les oblige à faire des choix insupportables, a-t-elle aussi relevé.  Mme Msuya s’est aussi inquiétée de voir les enfants, et plus encore les filles, retirés de l’école, tandis que les mariages d’enfants sont en hausse. 

La Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires a dit que le plan de réponse humanitaire 2022 de l’ONU est en voie de finalisation, dont un quart sera orienté vers le renforcement de la résilience et l’accès aux services de base.  Elle a précisé que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) entend se concentrer en partie sur la revitalisation de l’accès à certains services de base comme l’eau.  « Nous avons besoin de plus de soutien et nous comptons sur la générosité des donateurs pour y parvenir. »  Elle a expliqué que des millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie dépendent du soutien onusien pour survivre et que l’hiver a aggravé la souffrance des gens, en particulier les millions de personnes vivant dans des tentes.  Rappelant que grâce aux opérations transfrontalières, l’ONU fournit de la nourriture, des médicaments et d’autres articles essentiels ainsi que des services essentiels, elle a précisé que l’ONU fait tout cela de manière transparente et dans le respect de ses principes. 

Elle a rappelé que l’année dernière, OCHA a élargi l’accès au nord-ouest de la Syrie en redémarrant les opérations à travers les lignes de front.  Parlant du plan en place pour des livraisons supplémentaires, elle a exprimé le besoin de soutien de toutes les parties concernées pour permettre à ces missions de continuer à passer à travers les lignes de front.  Elle a néanmoins rappelé qu’il n’y a pas d’alternative en place pouvant correspondre à l’ampleur et la portée des opérations transfrontalières massives des Nations Unies pour fournir de la nourriture, des vaccins et d’autres aides vitales à 2,4 millions de personnes.  En conclusion, Mme Msuya a plaidé pour un accès durable et fiable, et plus de financement.  De même, elle a demandé l’intensification de programmes de relèvement précoce parallèlement aux efforts d’assistance vitale.  Mais surtout, les Syriens ont besoin de paix, a-t-elle dit. 

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a mis l’accent sur les impératifs de progresser sur la voie d’un règlement politique, lutter contre la menace de Daech et améliorer la réponse humanitaire.  Il a réaffirmé son soutien à l’Envoyé spécial Pedersen pour avancer sur la voie d’un règlement politique conformément à la résolution 2254 2015).  Le représentant s’est ensuite dit vivement préoccupé par l’absence de progrès dans la libération des personnes détenues arbitrairement avant d’exhorter « le régime d’Assad » à communiquer des informations sur les dizaines de milliers de personnes disparues. 

Par ailleurs, il a dit que la récente attaque de la prison de Hassaké démontre que Daech continue de poser un problème grave à la sécurité internationale.  Il a demandé aux États Membres de prendre les mesures nécessaires pour rapatrier leurs ressortissants qui demeurent dans le nord-est de la Syrie afin que ces personnes soient retirées du champ de bataille. 

En outre, le représentant des États-Unis a estimé que la situation humanitaire catastrophique démontre que l’aide n’est pas suffisante.  Il a souligné que les perspectives d’OCHA pour 2022 montrent que le nombre de personnes ayant besoins d’aide n’aura jamais été aussi élevé depuis le début du conflit en 2011.  Il a remercié tous les États qui ont apporté une assistance dans la gestion de la pandémie de COVID-19, dont le récent don important de vaccins de l’Italie.  Tout en reconnaissant que l’accès humanitaire à travers les lignes reste vital, le représentant des États-Unis a prévenu que cette aide « à travers les lignes » ne saurait satisfaire autant de besoin que l’aide transfrontalière.  Il a appelé à rester vigilant face aux tentatives du « régime d’Assad » de manipuler l’aide humanitaire en assurant que cette aide soit distribuée sans ingérence « sur la base des besoins et des besoins seuls ». 

M. JIM KELLY (Irlande) a exhorté toutes les parties à respecter les droits humains et le droit international humanitaire, y compris en protégeant les civils et les infrastructures civiles lors de la conduite d’opérations militaires.  Il s’est dit vivement préoccupé par la détérioration de la sécurité dans le camp de Hol, théâtre de quatre meurtres pour le seul mois de janvier.  Il est crucial de protéger les civils et les travailleurs humanitaires dans ces camps, sans entraver l’accès humanitaire, a enjoint le représentant.  Il a rappelé que les opérations humanitaires transfrontalières continuent d’apporter une aide vitale à des millions de personnes dans le nord-ouest syrien.  Il n’y a pas d’alternative à de telles opérations, a-t-il dit, en appuyant toutes les modalités d’aide humanitaire en Syrie.  Le délégué s’est dit « déçu » par le manque de livraisons d’aide au travers des lignes de front jusqu’à présent en 2022, en demandant l’octroi des autorisations et garanties sécuritaires nécessaires.

S’agissant de la situation politique, le représentant a déclaré que la Commission constitutionnelle ne peut aboutir à de véritables progrès sans un réel engagement des autorités syriennes.  Il a aussi jugé essentiel que ladite Commission ait une bonne compréhension de la dynamique de genre en Syrie.  L’égalité entre les genres doit être une priorité, a déclaré le délégué irlandais.  Enfin, il a appuyé les efforts de l’Envoyé spécial pour aboutir à une solution politique pour tous les Syriens et dit attendre avec intérêt le développement de son initiative « étape par étape ».  L’application de la résolution 2254 (2015) doit demeurer la boussole de nos efforts en Syrie, a conclu le représentant de l’Irlande.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a demandé qu’il soit répondu de toute urgence aux besoins humanitaires du peuple syrien.  Les positions politiques doivent être abordées de manière distincte des questions humanitaires, lesquelles devraient faire l’objet d’un consensus, a dit le représentant, pour qui la crise de l’eau aura de graves répercussions sur les nécessiteux.  Les parties en Syrie doivent coopérer pour que l’aide humanitaire parvienne à tous ceux qui en ont besoin, a exhorté l’intervenant.  S’agissant de la situation politique, il a salué la convocation du septième cycle de négociations de la Commission constitutionnelle le 21 mars.  Ces mesures contribueront à renforcer la confiance entre les parties, en vue de relever des défis plus complexes, a-t-il espéré, encourageant les parties à poursuivre le dialogue pour tirer parti de ces développements positifs. 

Le représentant a souligné l’importance de la participation active des femmes syriennes à la Commission constitutionnelle.  Il a rejeté l’ingérence étrangère dans les affaires syriennes et exhorté un rôle accru des pays arabes car cette approche est la plus viable pour soutenir les efforts de médiation sous les auspices de l’ONU dans le but de résoudre la crise et de préserver la sécurité de la région.  M. Abushahab a demandé en outre des mesures de désescalade et d’un cessez-le-feu à l’échelle nationale craignant notamment les répercussions de l’insécurité en Jordanie.  Il a dénoncé les récents affrontements à la frontière jordano-syrienne entre les forces armées jordaniennes et plusieurs groupes qui veulent faire passer illégalement de la drogue sur le territoire jordanien et dans les pays voisins. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déploré les souffrances insoutenables infligées au peuple syrien.  « Combien de millions de Syriens devront encore mourir de faim ou de froid avant que le Conseil n’agisse et ne garantisse l’accès transfrontière pour l’assistance humanitaire? »  Il a jugé essentiel que cet accès soit élargi pour que, dans les mois à venir, le mépris flagrant des besoins humains cesse.  Il faut améliorer la situation humanitaire parallèlement à l’application de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, a exigé le représentant.  Le « régime syrien » est responsable de la perpétuation de ce statu quo mortifère, s’est-il emporté, en lui demandant d’assumer la responsabilité première du processus politique.  Toutefois, les efforts pour sortir de l’impasse actuelle doivent permettre une transition réelle en Syrie, a souligné le représentant, en encourageant pour cela à travailler de bonne foi avec l’opposition syrienne pour ne pas permettre l’impunité.  Il faut ouvrir la voie vers une Syrie libre et démocratique, a martelé le représentant, soulignant que cela passe par des élections libres et équitables ancrées dans une nouvelle constitution syrienne. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a estimé que c’est aux Syriens de déterminer et décider ce qui est le mieux pour leur propre avenir.  Il a dit soutenir les actions de l’Envoyé spécial qui a déployé des efforts constants pour faciliter le dialogue politique, conformément à la résolution 2254 (2015).  Le délégué a estimé que les acteurs régionaux et les voisins de la Syrie ont un rôle important à jouer dans la résolution pacifique du conflit.  Sur le front de la sécurité, il a marqué sa préoccupation devant la situation globale en Syrie, y compris les incidents de violations du cessez-le-feu dans le nord-ouest.  Il a appelé toutes les parties à s’abstenir d’actions qui pourraient détériorer davantage la situation.  La réapparition de Daech en Syrie et en Iraq appelle à une action urgente de la communauté internationale, a-t-il plaidé.  L’Inde a réitéré le fait que la lutte mondiale contre le terrorisme ne peut et ne doit pas être remise en cause sous prétexte d’engranger des gains politiques limités. 

Constatant que la crise humanitaire en Syrie n’a pas connu d’amélioration ces derniers mois, la délégation a plaidé en faveur d’une action à l’échelle nationale et d’un cessez-le-feu global.  Cela contribuera également à étendre les opérations d’aide humanitaire transfrontalières, a-t-il argué.  Il a noté que certains progrès avaient été accomplis pour renforcer la réponse humanitaire et faciliter l’accès à travers les lignes de front.  Dans le nord-ouest cependant, nous croyons qu’il existe des possibilités considérables pour l’expansion de ces opérations, a-t-il dit.  Le représentant a encouragé l’OCHA et les autres agences des Nations Unies à poursuivre les efforts pour améliorer les opérations à travers les lignes de front, le passage au travers des frontières continue d’impacter négativement la souveraineté de la Syrie.  Pour sa part, l’Inde a continué d’étendre son aide au développement et à l’appui au développement des ressources humaines en Syrie. 

Au nom du Groupe A3 (Gabon, Ghana et Kenya), M. MARTIN KIMANI (Kenya) a fait valoir que les efforts régionaux jouent un rôle crucial dans le soutien aux populations de Syrie.  « Notre expérience en Afrique est que l’engagement positif actif des pays voisins et de proximité, en agissant de manière coordonnée, est essentiel pour le règlement de crises politiques et sécuritaires difficiles », a-t-il expliqué pour encourager le soutien régional.  Il a invité à garder à l’esprit la résolution 2254 (2015) qui reste la principale feuille de route pour atteindre les objectifs politiques souhaités et une solution à la crise. 

Sur la situation sécuritaire, le représentant a dénoncé les violences persistantes le long des lignes de contact dans le nord-ouest de la Syrie et à Deraa par des frappes aériennes, des frappes au sol, des engins explosifs improvisés ainsi que des restes explosifs de guerre.  Face à l’ampleur des destructions, il a plaidé pour que le cessez-le-feu national soit respecté par toutes les parties concernées.  M. Kimani s’est aussi inquiété de la capacité de nuisance des groupes terroristes Daech et Hayat Tahrir el-Cham avant d’appeler à des actions collectives pour lutter contre ces groupes et garantir que les victimes obtiennent justice. 

S’agissant de la situation humanitaire, il a regretté que 14,6 millions de personnes soient toujours dans le besoin.  « Le mécanisme d’aide transfrontalière, complété par des livraisons à travers les lignes de front, demeure une voie cruciale pour l’aide humanitaire et doit être soutenue dans l’intérêt de la population », a insisté M. Kimani qui a salué la poursuite des livraisons d’aides à travers les lignes dans le nord-ouest conformément au plan de six mois.  Enfin, il a appelé à mettre en garde contre la politisation ou le détournement de l’aide et demandé des normes claires de contrôle et de transparence de l’aide qui passe par le mécanisme transfrontalier ainsi que pour les livraisons à travers les lignes de front, tout en assurant la protection des personnels et convois. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a, une nouvelle fois, déploré l’absence de développements positifs en Syrie et « l’inacceptable statu quo » qui continue de prévaloir.  Il a exhorté toutes les parties à respecter les droits humains et le droit international humanitaire, y compris en évitant de cibler les civils et les infrastructures civiles.  Le délégué a appelé à la poursuite des livraisons humanitaires pour la population syrienne, en particulier pour les personnes qui vivent dans des camps.  Les opérations humanitaires transfrontalières demeurent vitales pour l’apport d’une telle aide.  Il a aussi rappelé que ces opérations sont très surveillées et des plus transparentes.  Il est crucial de continuer de surveiller ces opérations transfrontalières, a dit le délégué, tout en appelant à une expansion « sûre et efficace » des opérations humanitaires au travers des lignes de front.

Le délégué a ensuite exprimé sa conviction que seul un processus politique dirigé et contrôlé par les Syriens, sous les auspices de l’ONU, permettra l’instauration d’une paix durable.  Il a donc appuyé les efforts de l’Envoyé spécial visant à réengager les acteurs clefs et à explorer de nouvelles pistes pour restaurer la confiance en vue de la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Le Brésil salue la tenue d’une septième session de la Commission constitutionnelle le mois prochain et demeure optimiste quant à l’adoption d’une nouvelle méthodologie en son sein, a conclu le délégué.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a regretté qu’après 11 ans de conflit en Syrie, il n’y ait pas d’améliorations en vue.  Le nombre de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire s’élève désormais à 14,6 millions.  Il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, a déploré la représentante demandant aux acteurs syriens de faire preuve de volonté politique, de respecter le cessez-le-feu national et de faire avancer le processus politique, conformément à la résolution 2254 (2015).  Elle a salué l’accord de tenir la septième session de la Commission constitutionnelle en mars.  La libération de cinq détenus et la délivrance de 40 certificats de décès dans la Goutha orientale constituent une étape positive, mais ces décisions ne répondent pas à l’ampleur du problème car des milliers de personnes sont toujours portées disparues ou détenues.  Mme Buenrostro Massieu a appelé à leur remise en liberté immédiate et à faciliter l’accès des organisations humanitaires aux centres de détention. 

La représentante a réitéré l’importance d’un accès humanitaire sûr, durable et sans entrave pour répondre aux besoins fondamentaux de la population et atténuer les effets d’une décennie de conflit.  Saluant les progrès réalisés dans les opérations dans le nord-ouest, cela ne remplace pas les plus de 1 000 camions d’aide humanitaire qui passent par Bab el-Haoua chaque mois, a-t-elle prévenu.  Mme Buenrostro a enfin salué l’importance des projets de relèvement exigeant la mise en œuvre de la résolution 2585 (2021). 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a tout d’abord réaffirmé que le règlement durable du conflit syrien ne peut être que de nature politique.  Condamnant le récent bombardement des forces du régime syrien dans la province d’Edleb, qui a coûté la vie à de nombreux civils, dont des enfants, il a rappelé que le Conseil a adopté à l’unanimité la résolution 2254 (2015), qui demeure la feuille de route commune aux membres du Conseil pour aboutir à une solution politique au conflit. « Sans sa pleine mise en œuvre, il n’y aura pas de paix durable en Syrie », a-t-il soutenu, appelant tous les acteurs concernés à prendre leurs responsabilités, à commencer par le régime syrien, « qui ne consent toujours pas à faire le moindre geste ».  De même, alors que les besoins humanitaires n’ont jamais été aussi élevés en Syrie, il importe que toutes les parties au conflit, « en particulier le régime syrien », respectent leurs obligations internationales, a poursuivi le représentant, pour qui le mécanisme humanitaire transfrontalier reste indispensable.  Si les progrès en matière d’accès « crossline » doivent se poursuivre, tant au nord-ouest qu’au nord-est, le mécanisme transfrontalier sera nécessaire aussi longtemps que l’aide ne parviendra pas à toutes les populations dans le besoin sur l’ensemble du territoire, a-t-il fait valoir. 

Le délégué a ensuite jugé qu’en l’absence de solution politique, « il n’y a pas lieu de normaliser les relations avec le régime syrien ».  Sans solution politique, a-t-il souligné, les positions françaises, comme européennes, sur la levée des sanctions et la reconstruction demeureront inchangées.  « La reconstruction ne pourra débuter que lorsqu’un processus politique sera solidement enclenché », a maintenu M. de Rivière, répétant que le régime syrien doit prendre ses responsabilités.  Cela vaut aussi, selon lui, pour les conditions d’un retour volontaire, sûr et digne des réfugiés, alors que l’on constate des violations systématiques par le régime des droits des réfugiés rentrés en Syrie.  Enfin, a-t-il conclu, la France continuera son combat sans relâche contre l’impunité des auteurs de crimes commis en Syrie.  « Les responsables de ces crimes doivent répondre de leurs actes ». 

M. BING DAI (Chine) a salué les efforts de l’ONU pour promouvoir le processus politique en Syrie et alléger les souffrances du peuple syrien.  La Chine a dit qu’elle appuyait ce processus politique dirigé et contrôlé par les Syriens eux-mêmes, appelant les parties à dépasser leurs divergences et à progresser sur la voie de la Commission constitutionnelle.  Le représentant a espéré que le prochain tour de négociations de la Commission pourrait avoir lieu en mars et sans aucune interférence étrangère.  En outre, la Chine a insisté pour que la lutte contre le terrorisme en Syrie se poursuive, en rappelant la récente évasion de la prison de Hassaké, qui est une autre preuve de la présence de l’EILL dans le pays.  Il faut également redoubler d’efforts pour améliorer la situation socioéconomique de la Syrie et, pour cela, la Chine a dit qu’elle souhaitait voir la communauté internationale accompagner la Syrie dans la mise en œuvre de la résolution 2585 afin de faciliter la relève et la reconstruction du pays. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a souligné que la destruction des infrastructures civiles a laissé 76% de la population incapable de répondre à ses besoins les plus élémentaires.  Cela signifie malnutrition chronique, hausse du prix du pain, des familles qui campent dans des conditions de froid glacial et le retard de croissance des jeunes enfants, a-t-elle décrit.  « Alors que nous regardons avec horreur la situation qui se déroule en Ukraine, les luttes quotidiennes des hommes, femmes et enfants en Syrie doivent servir de terrible avertissement à la communauté internationale. » 

La représentante s’est désolée des souffrances indicibles de millions de personnes, qui entraînent des déplacements massifs, l’instabilité et le choc économique, avant d’appeler à apporter une réponse humanitaire cohérente en Syrie. De son avis, l’assistance doit être fournie par toutes les modalités possibles. Elle a jugé à cet égard essentiel le renouvellement du mandat du mécanisme transfrontalier de l’ONU, lorsqu’il prendra fin en juillet.  Le Royaume-Uni soutient tous les efforts pour améliorer l’accès transfrontalier et les efforts de relèvement rapide, a assuré la représentante.  Mais pour mettre fin au conflit et apporter une paix durable en Syrie, un processus politique dirigé par l’ONU, comme énoncé dans la résolution 2254 (2015), demeure essentiel, a-t-elle ajouté.  Enfin, elle a appelé le « régime syrien » à s’engager de manière significative dans le processus de la Commission constitutionnelle. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a jugé indispensable que toutes les parties s’évertuent à mettre en œuvre la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité qui avait été adoptée par consensus.  Elle a ensuite appuyé les efforts de l’Envoyé spécial Pedersen pour poursuivre une approche pas à pas et obtenir des progrès politiques dans l’optique de la prochaine réunion de la Commission constitutionnelle fin mars.  Elle a mis l’accent sur les aspects les plus importants de la résolution 2254 en citant la libération des détenus, les informations sur le sort des personnes disparues et le retour en toute dignité des réfugiés.  Par ailleurs, la représentante a souligné l’importance du rôle du Comité consultatif des femmes syriennes convoqué en janvier 2022, en soulignant la valeur ajoutée de la contribution des femmes et de la société civile dans son ensemble pour faire avancer le processus politique.  « Bien que les lignes de front soient stables depuis un moment, les combats se poursuivent et des civils continuent d’être tués », a regretté la représentante avant d’appeler à un cessez-le feu.  Enfin, elle a rappelé la nécessité de lutter contre la menace que fait peser le groupe terroriste Daech. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a plaidé pour un dialogue intrasyrien constructif au sein de la Commission constitutionnelle, sous les auspices de l’ONU, avant de mettre en garde contre toute imposition de délais artificiels.  Il a salué la convocation d’une septième session de la Commission constitutionnelle le mois prochain et mentionné les efforts de son pays en vue d’une bonne application de la résolution 2254 (2015).  Le délégué russe a ensuite espéré que l’Envoyé spécial « ne se perdra pas dans des initiatives qui ne sont appuyées ni par le Gouvernement syrien ni par l’opposition ».  Il a aussi estimé que lesdites initiatives ne doivent pas se substituer à un dialogue intrasyrien. 

Ces efforts politiques sont cruciaux, alors que la situation reste tendue dans les régions qui ne sont pas contrôlées par les autorités syriennes, a déclaré le délégué, en appelant à poursuivre sans relâche la lutte antiterroriste.  Il a aussi mentionné les efforts de son pays pour rapatrier les enfants russes de Syrie, notamment des camps de déplacés.  « Nous avons jusqu’à présent rapatrié 364 enfants russes », a-t-il affirmé, en précisant que le rapatriement de 128 autres était en cours.  M. Nebenzia a rappelé que 14 millions de Syriens ont besoin d’une aide, alors que la situation humanitaire est aggravée par les « sanctions aux effets étouffants ».  Enfin, il a jugé inacceptable de donner la priorité à l’aide humanitaire transfrontalière au détriment de l’aide au travers des lignes de front. 

M. BASSAM SABBAGH (Syrie) a dénoncé les sanctions unilatérales des États-Unis et de l’Union européenne, les accusant de violer le droit international et la Charte des Nations Unies.  Il a énuméré les conséquences de ces mesures comme la baisse de la production agricole et l’obligation pour la Syrie d’importer 1,5 million de tonnes de blé par an pour fournir du pain aux Syriens « parce que les forces américaines et les groupes séparatistes contrôlent illégalement le nord et l’est du pays ».  Il a mis sur le dos de la Turquie la pénurie d’eau d’irrigation et d’eau potable. 

Le représentant a mentionné également la baisse de la production d’électricité, passée de 9500 MW à 2600 MW, accusant les forces d’occupation des États-Unis de piller la capacité de production syrienne.  En outre, il a dit que l’industrie pharmaceutique syrienne subit les conséquences de l’embargo, ce qui aggrave les effets néfastes de la pandémie de COVID-19.  L’intervenant a ajouté que les mesures coercitives unilatérales imposées ont touché les secteurs de la banque, de l’énergie, des télécommunications ainsi que le transport aérien et maritime, et ont aggravé les souffrances humaines.  Les progrès économiques accomplis par les Syriens avant 2011 ont été réduits à néant à cause notamment de la volatilité des taux de change de la monnaie nationale, a-t-il aussi regretté. 

Le délégué a demandé la mise en œuvre rapide de la résolution 2585 (2021) afin d’appuyer les projets de relèvement, dénonçant au passage l’augmentation par cinq du coût du panier alimentaire.  Il a pointé du doigt les pays occidentaux, le « régime turc » et les organisations terroristes qui entravent les convois humanitaires. 

S’agissant des questions politiques, le délégué syrien a insisté sur l’importance d’une solution politique fondée sur le dialogue national mené et dirigé par les Syriens et sans ingérence étrangère, y compris dans le travail de la Commission constitutionnelle.  Il a terminé en exigeant la fin de l’occupation des États-Unis et d’autres pays d’une partie de la Syrie et la fin des sanctions unilatérales contre son pays. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a regretté la détérioration de la situation humanitaire en Syrie avec 14,6 millions de personnes qui dépendent de l’assistance humanitaire et des conditions de vie insoutenables pour les personnes déplacées à cause de l’hiver rigoureux.  Pour la Turquie, il n’existe pas d’alternative au mécanisme humanitaire transfrontalier de l’ONU, parallèlement à l’acheminement de l’aide au-delà des lignes de front.  « Mais comment le faire alors que le régime syrien persiste à cibler les civils et les infrastructures, ce qui doit cesser pour que ce mécanisme par-delà les lignes puisse être efficace », a demandé le représentant accusant aussi le régime syrien de détourner l’aide humanitaire et invitant les bailleurs de fonds à suivre de près cette situation.  Par ailleurs, les retards du processus politique prolongent les souffrances du peuple syrien, a estimé le représentant en assurant à l’Envoyé spécial le soutien de son pays.  Il a reproché au régime syrien de vouloir freiner le processus politique, voire de l’entraver, en citant notamment le cas des négociations autour de la Commission constitutionnelle.  La Turquie a également assuré qu’elle soutient tout effort en faveur de la désescalade en Syrie afin de créer des conditions propices à un règlement politique.  S’adressant aux pays souhaitant normaliser leurs relations avec la Syrie, le délégué leur a dit de ne pas confondre « normalisation avec légitimation de ce régime », en martelant qu’il faut normaliser l’application du droit international en Syrie et poursuivre la lutte contre Daech sur le terrain. Avant de conclure, le délégué a dit ne pas vouloir répondre aux accusations fallacieuses du représentant du « régime criminel syrien » au Conseil de sécurité, dont la « présence est un affront pour des millions de Syriens ». 

M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a relevé que rien n’est plus important ou urgent que de mettre fin aux mesures coercitives unilatérales qui ont nui au peuple syrien au point qu’il a été privé de ses droits humains fondamentaux, y compris le droit à la santé, à la nourriture, à l’eau, à l’électricité et aux communications.  Ces mesures illégales ont un impact négatif sur l’acheminement de l’aide humanitaire vitale, a-t-il souligné.  Devant l’étendue de la destruction des infrastructures en Syrie, le délégué a appelé le Conseil de sécurité à travailler avec diligence pour veiller à ce que la résolution 2585 (2021) soit pleinement mise en œuvre, de manière équilibrée et efficace, notamment en termes de projets de relèvement rapide et de levée des sanctions. 

M. Ravanchi a estimé particulièrement décourageant qu’en raison du manque de collaboration de certaines parties, les progrès des opérations transversales dans les zones non contrôlées par le Gouvernement aient été moins importants que ce qui était prévu.  Il a condamné le pillage des ressources naturelles du peuple syrien dans les zones contrôlées par des forces étrangères, en particulier le pétrole et les produits agricoles.  Il a reconnu le droit légitime du Gouvernement syrien de combattre de tels actes criminels.  Plus important encore, la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie continuent d’être gravement violées par la présence illégale de forces étrangères, y compris celles des États-Unis, a dénoncé le représentant de l’Iran.  Il a aussi fermement condamné les violations répétées de la souveraineté de la Syrie par le « régime israélien ».  Les récentes attaques israéliennes en Syrie, qui visaient des civils et des infrastructures civiles, constituent des violations flagrantes du droit humanitaire, a-t-il indiqué.  Il a appelé le Conseil de sécurité à lui demander des comptes à « ce régime » pour de tels actes d’agression et pour ses activités malveillantes, ainsi que ses menaces ouvertes d’utiliser la force contre d’autres pays de la région qui compromettent la paix et la sécurité régionales.

En outre, le représentant a assuré que le format d’Astana poursuivra ses efforts pour mettre fin à la crise et atténuer les souffrances du peuple syrien.  C’est dans ce cadre que les ministres des affaires étrangères des pays garants d’Astana se réuniront à Antalya le 10 mars.  Il a rappelé que la Commission constitutionnelle syrienne doit travailler en stricte conformité avec son mandat et son règlement intérieur, sans aucune influence ou pression ni délais artificiels.  Il a précisé qu’il doit s’agir d’une entreprise véritablement menée et dirigée par les Syriens, le rôle de l’ONU se limitant à faciliter ce processus. 

Le délégué iranien a dit que la paix et la sécurité régionales et internationales sont mises en danger par la libre circulation des groupes terroristes, dont Daech, sur le territoire syrien où on note la présence illégale de forces étrangères, ainsi que par leur transfert vers d’autres pays.  Selon lui, la lutte contre le terrorisme ne peut servir d’excuse pour saper la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Il a plaidé pour que cesse immédiatement la présence illégale de forces étrangères dans certaines régions de la Syrie, arguant que cela a créé des conditions favorables aux activités terroristes dans le pays.  Pour sa part, l’Iran continue de soutenir les efforts de la Syrie pour lutter contre les menaces terroristes et préserver son unité et son intégrité territoriale, a-t-il conclu. 

Le représentant de la République arabe syrienne a repris la parole pour indiquer que le chef de Daech a été assassiné par les États-Unis à « quelques mètres » des zones syriennes illégalement occupées par les forces turques.  Et le chef du front el-Nosra se déplace librement grâce à la protection des forces turques, a aussi accusé le délégué syrien. 

Le représentant de la Turquie a jugé honteux les commentaires faits par la délégation syrienne.

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