Soixante et onzième session,
75e séance plénière – matin 
AG/11903

Assemblée générale: les délégations dessinent les contours des futurs pactes mondiaux pour les réfugiés et les migrations

Une vingtaine de délégations a profité de la réunion que l’Assemblée générale a tenue aujourd’hui sur « le drame des migrants en situation irrégulière, en particulier les demandeurs d’asile syriens, dans le bassin méditerranéen » pour dessiner les contours des deux pactes mondiaux pour les réfugiés et les migrations qui devraient être adoptées en 2018.  La réunion a eu lieu dans une ambiance particulière, au lendemain des frappes aériennes américaines sur des bases syriennes, en réponse aux attaques à l’arme chimique du 4 avril contre des civils à Khan Cheikhoun. 

Les attaques aveugles contre les civils, comme on l’a vu avec les informations faisant état d’attaques à l’arme chimique en Syrie, nous rappellent à tous la peur qui pousse les gens à fuir et le caractère « essentiel » des discussions comme celles d’aujourd’hui qui cherchent à sensibiliser l’opinion publique aux tragédies qui se déroulent dans le bassin méditerranéen, a déclaré d’emblée le Vice-Président de l’Assemblée générale. 

Le recours aux armes chimiques est un crime de guerre, un crime contre l’humanité et une violation du droit international, a tonné le représentant de la Turquie.  C’est une grave violation du cessez-le-feu dont l’érosion risque de jeter sur les routes plus de monde encore, a dit le représentant d’un pays qui a dépensé 26 milliards de dollars pour 2,9 millions de réfugiés syriens et pour lequel la communauté internationale, en particulier l’Union européenne, a « raté lamentablement » le test du partage des responsabilités.

Pourtant « sous le choc » de l’attaque chimique, l’Union européenne vient, au cours d’une conférence ministérielle à Bruxelles sur l’appui au futur de la Syrie et de la région, de réitérer son engagement à travailler ensemble à un avenir pacifique de la Syrie, a souligné son représentant.  Après avoir condamné l’action du Gouvernement américain et martelé que son pays n’a aucune arme chimique, le représentant syrien a critiqué la réunion de l’Assemblée générale qui, en mettant l’accent sur les demandeurs d’asile syriens, créé un « précédent politique dangereux ». 

Les Syriens ne représentent que 20% des réfugiés et des migrants qui se dirigent vers l’Europe, a-t-il souligné.  Dans la seule année 2015, a voulu préciser le Haut-Commissaire adjoint des Nations Unies pour les réfugiés, plus d’un million de réfugiés ont traversé la Méditerranée, principalement en provenance de la Syrie où près de la moitié de la population a fui dans d’autres parties du pays.  L’année dernière, plus de gens sont morts en traversant la Méditerranée qu’en 2015, au pic du mouvement.  Cette année, 905 personnes ont déjà perdu la vie. 

Attirant l’attention sur les propositions intitulées « Mieux protéger les réfugiés dans l’Union européenne et dans le monde », le Haut-Commissaire adjoint a estimé qu’il est grand temps d’explorer l’idée d’une approche régionale globale pour la Méditerranée par laquelle sont passés en 2017, 77% des nouveaux arrivants en Europe.  Pour être efficace, l’approche régionale doit viser la réinstallation et le regroupement familial.  Le représentant de l’Union européenne a d’ailleurs fait part des discussions en cours pour établir un cadre permanent de réinstallation et d’admission humanitaire.  L’Union européenne vient déjà d’adopter, ce 3 avril, une stratégie pour la Syrie afin d’endiguer les flux de migration irrégulière, dans le plein respect des droits fondamentaux.

Tous les États des deux côtés de la Méditerranée, a poursuivi le Haut-Commissaire adjoint, peuvent faire leur part en rendant opérationnel un mécanisme régional de recherche et de secours qui pourrait inclure la responsabilité partagée de déployer des navires et d’accepter les personnes secourues. 

L’Assemblée générale ayant adopté hier la résolution sur les modalités des négociations liées aux pactes mondiaux pour les réfugiés et pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, les États entameront bientôt leur travail pour pouvoir adopter ces textes en 2018, a annoncé le Vice-Président de l’Assemblée.  Les pactes avaient été demandés dans la Déclaration de New York que les 193 États Membres des Nations Unies ont approuvée en septembre dernier. 

Forte de sa vaste expérience, le représentant de la Turquie a mis en avant quatre impératifs: sauver des vies et offrir une protection à ceux qui ont en besoin; partager les responsabilités et le fardeau; éliminer les « moteurs » que sont la guerre, les conflits, les violations des droits de l’homme, la misère économique et les effets négatifs des changements climatiques; ouvrir des canaux plus réguliers et plus sûrs comme alternatives viables à la migration illégale; et enfin, s’abstenir des rhétoriques et approches empoisonnées à l’égard des migrants et des réfugiés. 

Les deux pactes mondiaux, a renchéri le délégué du Brésil, doivent avoir en leur cœur la promotion d’une intégration sociale fondée sur le rejet des pratiques discriminatoires, du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance religieuse.  Ces pactes doivent être « juridiquement non contraignants », a estimé son homologue de l’Australie, et servir de guide pratique de la gouvernance mondiale des migrations, tout en établissant une distinction claire entre les réfugiés et les migrants. 

Il nous faut une réponse soucieuse du droit des États de gérer et de contrôler leurs frontières, a insisté le représentant d’Israël.  Les deux pactes mondiaux, a ajouté celui de la Suisse, sont « une opportunité unique de travailler ensemble » pour « élaborer un cadre solide qui prenne en compte les causes profondes de la migration et des déplacements forcés ».  Son homologue du Canada a plaidé pour des systèmes nationaux mieux planifiés et plus étoffés, qui pourraient prévoir une diversification des modes d’immigration légale, pouvant aider à préserver un capital humain gaspillé et même perdu.

Le système des Nations Unies, a dit la Chef de cabinet du Secrétaire général, est prêt à aider les États à parvenir à un monde où les mouvements humains sont un choix et non un impératif de survie.  En attendant, elle a rappelé la campagne des Nations Unies « Ensemble » pour le respect, la sécurité et la dignité de ceux qui fuient de chez eux à la recherche d’un avenir meilleur.

SENSIBILISATION DE L’OPINION MONDIALE AU DRAME DES MIGRANTS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE, EN PARTICULIER LES DEMANDEURS D’ASILE SYRIENS, DANS LE BASSIN MÉDITERRANÉEN

Déclarations

M. ELLISTON RAHMING (Bahamas), Vice-Président de l’Assemblée générale, a souligné que depuis que l’Assemblée a examiné pour la première fois cette question « cruciale », le flux des migrants cherchant à traverser la Méditerranée n’a jamais cessé.  Des milliers de personnes ont fait ces voyages périlleux et des centaines d’entre elles ont perdu la vie, en tentant de le faire.  Les moteurs de ces fuites sont restés les mêmes: les conflits, les persécutions et la pauvreté endémique.  En effet, les attaques aveugles contre les civils, comme on l’a vu avec les informations faisant état d’attaques à l’arme chimique au début de la semaine en Syrie, nous rappellent à tous la peur qui pousse les gens à fuir.  Dans ce contexte, les discussions comme celles-ci qui cherchent à sensibiliser l’opinion publique aux tragédies qui se déroulent dans le bassin méditerranéen sont « essentielles ».

Le Vice-Président a voulu saluer le leadership de la Turquie qui a proposé d’inscrire cette question à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Cette même question, qui a lancé le processus intergouvernemental, a abouti, en septembre dernier, à l’adoption de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, dans laquelle les États Membres ont décidé d’élaborer un pacte mondial pour les réfugiés et un autre pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.  Maintenant que l’Assemblée générale a adopté hier la résolution sur les modalités des négociations sur ces pactes, les États Membres entameront bientôt leur travail pour adopter le pacte mondial en 2018. 

Je demande aux délégations, a conclu le Vice-Président, de se rappeler « pourquoi » nous entamons ce processus.  Je leur demande de penser aux Syriens et au-delà, de se remémorer les évènements tragiques qui ont poussé tant de gens à fuir, d’en comprendre l’impact sur les pays voisins qui ont assumé tant de responsabilités, et en conséquence, d’apporter aux consultations l’esprit d’humanité, de solidarité et, avant toute chose, de respect pour tous les droits des migrants.

Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI, Chef de Cabinet du Secrétaire général, s’est dite honorée de parler au nom d’un Secrétaire général de l’ONU qui a passé une décennie entière en première ligne de la crise mondiale des réfugiés.  Pas plus tard que la semaine dernière, le Secrétaire général a rencontré des réfugiés syriens en Jordanie et en Iraq où il a non seulement appelé la communauté internationale à renforcer son appui humanitaire mais où il a aussi veillé à ce que l’on donne plus d’opportunités aux réfugiés. 

L’Assemblée générale, a poursuivi Mme Viotti, a attiré à juste titre l’attention sur cette question lors de sa Réunion de haut niveau qu’elle a tenue  à la fin de l’année 2015.  Malheureusement depuis lors, des millions de personnes sont toujours en fuite.  Des dizaines de millions de femmes, d’hommes et d’enfants sont toujours déracinés, forcés de risquer leur vie en traversant la Méditerranée pour échapper à la violence, aux intimidations et à la discrimination.

Les tragédies et les morts continuent jour après jour, s’est alarmée une Chef de Cabinet, particulièrement « horrifiée » par les souffrances du peuple syrien et une guerre qui en est désormais à sa septième année.  Quelque 11 millions de Syriens ont fui leur pays et plus de 6 millions, dans d’autres parties de la Syrie.  Des millions de personnes ont perdu leur vie, leurs proches et leur espoir.  Le désespoir est « immense » mais il y a aussi des signes d’humanité et de solidarité. 

La Turquie, le Liban et la Jordanie accueillent le plus grand nombre de réfugiés syriens et leurs communautés ont pris des mesures « extraordinaires » pour offrir assistance et protection à des centaines de milliers de gens.  D’autres parties du monde ont aussi ouvert leurs portes.

La Chef de Cabinet a vu là des lueurs d’espoir dans un climat marqué par une rhétorique xénophobe de plus en plus affirmée et des politiques restrictives qui alimentent la violence et la discrimination à l’égard des réfugiés et des migrants.  En tant que représentants de la communauté internationale, a-t-elle estimé, nous devons condamner avec la plus grande fermeté tout acte de violence et de discrimination.  Nous devons comprendre pourquoi les plus vulnérables deviennent des boucs émissaires et lutter contre les causes de ce phénomène.

La Chef de Cabinet a fait valoir que les réfugiés et les migrants compensent largement leur indigence par leur énergie, leur intelligence, leurs compétences et leur culture.  Il nous appartient, a-t-elle dit, d’inciter les citoyens de nos pays à adopter et à promouvoir les valeurs communes de tolérance et de respect de la dignité humaine.  Il est de l’intérêt de chacun d’apprendre des autres, de faire preuve de dignité et de célébrer la diversité. 

La Chef de Cabinet a rappelé la campagne des Nations Unies « Together » pour le respect, la sécurité et la dignité de ceux qui fuient de chez eux à la recherche d’un avenir meilleur.  Comme l’a dit le Secrétaire général « aucun pays ne peut le faire seul et aucun pays ne peut refuser de faire sa part ».  La promesse « ambitieuse » des États d’adopter deux pactes en 2018 représente notre meilleure chance d’améliorer la vie de millions de gens en fuite, a estimé la Chef de Cabinet. 

Le système des Nations Unies est prêt à aider les États Membres à parvenir à un monde où les mouvements humains sont un choix et non un impératif de survie.  Nous devons investir dans l’intégration et la cohésion, faire du développement une priorité, protéger les droits de l’homme et permettre aux gens de réaliser leur potentiel.  C’est notre responsabilité commune, qui exige la connexion des efforts de médiation, de paix et de sécurité et des investissements dans le développement durable et les droits de l’homme, dont le droit à l’asile et au non-refoulement pour contrer la haine, le racisme et la xénophobie et s’engager en faveur de la tolérance, l’inclusion et l’humanité.

M. ASHRAF EL NOUR, Organisation internationale pour les migrations (OIM), a déclaré que les mouvements de population dans le monde ont atteint des records, ces trois dernières années; la Méditerranée devenant une place tournante.  En 2015, plus d’un million de migrants ont traversé cette mer et en 2016, 360 000 personnes sont arrivées par cette route et déjà 31 000, en 2017.  La migration irrégulière est un mouvement « invisible, difficile à quantifier », le seul indicateur étant le nombre de détentions aux frontières.  C’est donc un indicateur qui ne donne aucun tableau global de la situation, en particulier celle des enfants. 

Le dixième objectif de développement durable, a rappelé l’orateur, demande aux États Membres de « réduire les inégalités dans les pays et d’un pays à l’autre ».  L’OIM est prête à travailler avec les gouvernements pour intégrer la migration dans leurs stratégies nationales de développement.  Se félicitant de la Déclaration de New York et des futurs pactes mondiaux, l’orateur a tout de même estimé qu’en dépit des efforts, la traite demeure un problème mondial qui exige des efforts de prévention.  Nous demandons aux bailleurs de contribuer à cette lutte avant, pendant et après les crises, a-t-il conclu.

M. VOLKER TÜRK, Haut-Commissaire adjoint pour les réfugiés (HCR), a indiqué qu’en la seule année 2015, plus d’un million de réfugiés ont traversé la Méditerranée, principalement en provenance de la Syrie où près de la moitié de la population a fui dans d’autres parties du pays.  L’année dernière, plus de gens sont morts en traversant la Méditerranée qu’en 2015, au pic du mouvement.  Cette année, 905 personnes ont déjà perdu la vie.  Il est temps, s’est impatienté l’intervenant, de contrer le discours des crises ingérables et la rhétorique de l’isolationnisme et de recadrer notre compréhension de la situation en Méditerranée. 

En décembre dernier, le HCR a présenté des propositions « Better protecting refugees in the EU and globally », a-t-il rappelé, en saluant aussi le fait que les 193 États Membres des Nations Unies aient adopté, en septembre dernier, la Déclaration de New York.  Il est peut-être temps maintenant d’explorer l’idée de développer une approche régionale globale pour la Méditerranée par laquelle sont passés en 2017, 77% des nouveaux arrivants en Europe.  Quelque 31 000 migrants et réfugiés sont déjà arrivés par mer en Europe au cours de ce premier trimestre, soit plus que l’année dernière en Italie et en Espagne même si les chiffres ont beaucoup baissé en Grèce.

Pour être efficace, l’approche régionale doit viser la réinstallation et le regroupement familial.  Elle nécessitera l’implication des pays hôtes, de transit et de destination et l’intégration des éléments clefs de la Déclaration de New York.

Il faudra aussi stabiliser la situation dans les pays où les réfugiés cherchent d’abord la protection et par où ils essaient de passer, comme la Libye où les réfugiés et les migrants seraient kidnappés, détenus, exploités ou vendus à des réseaux criminels avant d’être embarqués dans la Méditerranée.  Les capacités d’accueil devront aussi être renforcées et des formes alternatives de détention, recherchées.  Les réfugiés devront aussi avoir accès à de bons systèmes d’asile.  Sans sécurité, accès aux droits fondamentaux et régularisation de leur statut, ils seront obligés de partir ailleurs.  Ils doivent être capables de supporter leur famille. 

L’intervenant a voulu que l’on n’oublie pas que de nombreux pays hôtes, en particulier au Moyen-Orient, ont besoin d’un appui constant.  C’est à travers un appui financier en temps voulu et une coopération renforcée entre les acteurs du développement et humanitaires que la communauté internationale peut veiller à ce que les besoins essentiels des réfugiés et des communautés d’accueil soient satisfaits. 

Enfin, tous les États des deux côtés de la Méditerranée peuvent faire leur part en rendant opérationnel un mécanisme régional de recherche et de secours qui pourrait inclure la responsabilité partagée de déployer des navires et d’accepter les personnes secourues.  On peut trouver des arrangements pour une meilleure répartition des responsabilités.  Par exemple, là où les pays ont de moindres capacités d’accueil, on pourrait concevoir un séjour temporaire et une possible réinstallation des réfugiés les plus menacés et un retour volontaire assisté des migrants, a conclu l’intervenant.

M. ANTONIO PARENTI, de l’Union européenne, a indiqué que l’UE vient tout juste d’adopter ce 3 avril, une stratégie pour la Syrie afin d’endiguer les flux de migration irrégulière, dans le plein respect des droits fondamentaux.  Il a rappelé que l’UE a apporté un soutien financier important à la Turquie, au Liban et à la Jordanie.  Notre coopération avec la Turquie, sur le plan juridique et sur la réduction de la migration illégale, se poursuit conformément à la Déclaration UE-Turquie, a souligné le représentant. 

Dès juillet 2015, a-t-il indiqué, l’UE a commencé à mettre en œuvre son premier plan de réinstallation qui offre 22 504 places.  Les discussions sont en cours pour établir un cadre permanent de réinstallation et d’admission humanitaire.  Cette semaine, a poursuivi le représentant, l’Union européenne organise une Conférence ministérielle à Bruxelles sur l’appui au futur de la Syrie et de la région.  « Sous le choc » de l’attaque chimique à Edleb, la communauté internationale a profité de la conférence pour envoyer un signal fort sur son engagement à travailler ensemble à un avenir pacifique de la Syrie. 

Les défis dépassant la seule question des réfugiés syriens, le représentant a invité à s’attaquer aux causes profondes des migrations irrégulières et des déplacements forcés.  C’est ce que l’UE fait avec le cadre de partenariat sur la migration, adopté en juin 2016, a-t-il rappelé.  L’UE renforce encore ses mesures pour s’attaquer aux migrations irrégulières en Méditerranée, comme en témoigne la communication de sa commission de janvier dernier et la Déclaration de Malte de février.  Sur le terrain, l’UE travaille en étroite collaboration avec des partenaires internationaux comme le HCR et l’OIM, afin d’améliorer les conditions de vie des réfugiés et des migrants et assurer leur protection, conformément à ses obligations en vertu du droit international.

Le représentant a réitéré l’adhésion de l’UE à la Déclaration de New York et son engagement à conclure les pactes mondiaux.  Il n’a pas oublié de mentionner le Groupe de haut niveau de l’UE sur la lutte contre le racisme, la xénophobie et autres formes d’intolérance ou encore la diffusion d’un guide de formation sur les crimes de haine à l’intention des agents de l’ordre et des autorités judiciaires.

M. CIHAD ERGINAY (Turquie) a d’emblée condamné l’attaque chimique perpétrée le 4 avril dernier à Khan Cheïkhoun par le régime syrien.  Le recours aux armes chimiques est un crime de guerre, un crime contre l’humanité et une violation du droit international, a tonné le représentant.  C’est une violation de la Convention sur les armes chimiques à laquelle la Syrie est partie, c’est un défi aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, c’est une grave violation du cessez-le-feu dont l’érosion risque de jeter sur les routes plus de monde encore. 

La Turquie, a-t-il souligné, accueille aujourd’hui le plus grand nombre de réfugiés au monde, soit près de 3,2 millions de personnes.  Ces 10 dernières années, le nombre de migrants illégaux appréhendés en Turquie s’élève à 850 000.  Au cours de la seule année 2016, plus de 170 000 personnes, qui tentaient de traverser le pays ont été appréhendées.  La même année, les gardes côtes turcs ont secouru quelque 40 000 migrants dans les mers Méditerrané et Égée.  Le représentant a donc souligné « la nécessité et l’importance » de l’Accord du 18 mars signé entre son pays et l’UE.

Il a estimé que la situation en Syrie et celle des réfugiés syriens est la question la plus pressante pour une Turquie qui maintient sa politique de « portes ouvertes » malgré l’impact sur sa sécurité, son économie et son tissu social.  Les chiffres sont plus parlants que les mots: la Turquie accueille aujourd’hui plus de 2,9 millions de Syriens ce qui correspond à 15% de la population syrienne avant la guerre, soit plus que la population de 100 États dans le monde.  Chaque syrien vit sous le régime de protection du Gouvernement, a affirmé le représentant, donnant les chiffres de l’accès à l’éducation et à la santé et de l’intégration économique qui ont coûté la somme de 26 milliards au Gouvernement turc, soit près du budget annuel de 150 États dans le monde. 

Je dois dire, a poursuivi le représentant, que la communauté internationale, en particulier l’Union européenne, a « raté misérablement » le test du partage des responsabilités, se positionnant loin derrière une Turquie qui continue en plus d’appuyer l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA). 

Compte tenu de sa vaste expérience s’agissant des migrants et des réfugiés, la Turquie est prête à faire sa contribution aux deux pactes mondiaux.  Elle s’est d’ailleurs portée candidate pour faciliter au moins une des tables rondes prévues dans le processus de consultations.  Nous avons besoin, a insisté le représentant, d’une politique globale et viable, comprenant quatre impératifs: sauver les vies et fournir une protection à ceux qui ont en besoin; partager les responsabilités et le fardeau; éliminer les « moteurs » de la guerre, des conflits, des violations des droits de l’homme, de la misère économique et des effets négatifs des changements climatiques; ouvrir des canaux plus réguliers et plus sûrs comme alternatives viables à la migration illégale; et enfin, s’abstenir des rhétoriques et approches empoisonnées à l’égard des migrants et des réfugiés. 

La peur et le rejet des réfugiés, en particulier les réfugiés musulmans, sont justement la mauvaise réponse aux menaces extrémistes car il s’agit avant tout d’une bataille des valeurs que nous risquons de perdre si nous renonçons à nos valeurs, a conclu le représentant, en réaffirmant son appui à l’Alliance des civilisations que son pays coparraine avec l’Espagne, et à la campagne « Together ».

Mme ROUA SHURBAJI (République arabe syrienne) a condamné dans les termes les plus forts l’action du Gouvernement américain, une attaque flagrante en violation de la Charte de l’ONU et de son rôle au Conseil de sécurité.  Cette attaque contre une base aérienne syrienne est « le fait de Washington, de Doha et d’autres encore ».  La Syrie, a martelé la représentante, n’a aucune arme chimique et n’en a utilisée aucune contre des groupes armés.  Elle a d’ailleurs condamné l’emploi de ces armes en tout temps et en toutes circonstances.  Les agressions dont mon pays est victime, a-t-elle prévenu, pourraient entraîner le chaos partout dans le monde et faire prévaloir la loi de la jungle.  La représentante a remercié ceux qui s’emploient à trouver des solutions, en particulier des solutions réalistes à la crise des réfugiés et des migrants.

Elle a critiqué cette réunion sur « les migrants en situation irrégulière, en particulier les demandeurs d’asile syriens, dans le bassin méditerranéen », estimant qu’elle constitue un « précédent politique dangereux » à l’Assemblée générale.  Les Syriens ne représentent que 20% des réfugiés et des migrants qui se dirigent vers l’Europe en passant par la Turquie, a-t-elle argué, notant que beaucoup sont africains et asiatiques.  Elle a donc accusé certains États de vouloir prolonger la crise politique et d’exagérer le nombre de réfugiés.  La Turquie, a-t-elle taclé, coopère avec « la mafia des passeurs » et veut « forcer » la main des États européens par le biais de son Accord avec l’UE.  La représentante a dit voir une contradiction chez les États qui s’inquiètent du sort des Syriens, tout en appuyant les terroristes ou en menant d’actions musclées. 

La communauté internationale doit s’attaquer aux facteurs qui poussent à ces mouvements de population, le premier étant la guerre, a poursuivi la représentante syrienne.  Elle a assuré que son gouvernement assure la protection de ses citoyens et leur garantit des conditions de vie décentes.  « Nous souhaitons que tous les Syriens qui ont fui à cause de la situation difficile puissent revenir », a-t-elle dit.  Se plaignant de ne plus avoir suffisamment accès aux ressources de base, elle a appelé à une aide à la reconstruction des régions détruites par les groupes terroristes.  La Syrie, a-t-elle affirmé, est prête à coopérer avec les pays d’accueil pour obtenir le retour des réfugiés.  Elle n’a pas manqué de demander à la communauté internationale d’endiguer le flux des combattants étrangers et d’obtenir la levée des sanctions unilatérales.

M. HIROSHI MINAMI (Japon) a estimé qu’en plus de s’attaquer aux causes de la migration forcée, il faut s’efforcer d’apaiser les souffrances et les risques encourus par des migrants vulnérables.  Les États doivent honorer leurs obligations en vertu du principe de non-refoulement et de la Convention sur le statut des réfugiés.  Ils doivent assurer l’aide humanitaire à ceux qui souffrent d’un déplacement forcé et la coopération au développement avec les communautés d’accueil est tout aussi cruciale.

L’année dernière, le Japon s’est engagé à débloquer près de 2,8 milliards de dollars américains entre 2016 et 2018 pour l’aide humanitaire et l’autosuffisance des réfugiés, des migrants et des communautés d’accueil.  Au premier trimestre de cette année, le Japon a versé 500 millions de dollars à diverses agences humanitaires et de développement.  N’oublions pas, a mis en garde le représentant, les personnes déplacées.  La communauté internationale doit, de manière coordonnée, faire en sorte que chaque personne forcée de fuir puisse jouir d’une protection et ait la possibilité de commencer une nouvelle vie dans la dignité, qu’elle soit réfugiée ou migrante.

M. MAURO VIEIRA (Brésil) a voulu que les deux pactes mondiaux aient en leur cœur les droits des réfugiés et des migrants et la promotion d’une intégration sociale fondée sur le rejet des pratiques discriminatoires, du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance religieuse.  Le représentant a estimé que l’on peut encore avancer sur la question de la détention des enfants et qu’il faut aussi donner la priorité à l’élargissement des canaux légaux de la migration.  Un pacte robuste doit envisager la promotion et l’accès des migrants aux services publics et conformément à la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés, il faut interdire les politiques restrictives d’admission des réfugiés et des migrants ou de leurs droits, en ce qu’elles encouragent la traite et le trafic des personnes.  Le représentant a rappelé que l’année dernière, son pays s’était engagé à accueillir 3 000 réfugiés syriens en plus des 2 500 qu’il avait déjà reçus. 

Mme GILLIAN BIRD (Australie) a indiqué que les politiques de son pays ont été élaborées pour envoyer un message sans équivoque aux passeurs, le message selon lequel les portes de l’Australie leur sont fermées.  La manière dont le Gouvernement a agi a été importante pour assurer la confiance des citoyens dans la politique migratoire.  Une migration et une réinstallation à grande échelle ne sont possibles que si la communauté voit qu’elles se font de manière ordonnée, contrôlée et au bénéfice de tous, et plus important encore, qu’elles assurent la sûreté et la dignité des migrants.

La confiance du public à la gestion de la migration ne saurait être surestimée, a expliqué la représentante.  En septembre 2015, l’Australie a pu ainsi promettre de réinstaller 12 000 autres syriens et iraquiens qui ont tous reçu leur visa, le 21 mars dernier.  Pour 2018-2019, l’Australie compte ouvrir 18 750 places supplémentaires.  L’Australie a mis aussi en œuvre un train de mesures pluriannuel de 220 millions de dollars pour l’aide humanitaire et la protection des populations en Syrie et dans les pays voisins.  Il s’agit aussi d’appuyer les Gouvernements de la Jordanie et du Liban dans les domaines de l’accès à l’éducation et aux opportunités économiques pour les réfugiés et les populations locales.  L’Australie, a conclu la représentante, tient aux deux pactes mondiaux qui, « juridiquement non contraignants » doivent prendre la forme d’un guide pratique de la gouvernance mondiale des migrations et qui doivent établir une distinction claire entre les réfugiés et les migrants. 

M. MICHAEL GRANT (Canada) a demandé que l’on imagine le courage de ces individus se lançant dans un voyage aussi périlleux à travers les mers.  « Imaginez ce qu’ils auraient pu réaliser s’ils n’étaient pas morts en mer. »  Le représentant a souligné, en premier lieu, la nécessité d’une plus grande ambition et d’un meilleur sens des responsabilités s’agissant du drame des migrants irréguliers.  Il a invité les dirigeants des secteurs privé et public à mettre au défi les vues polarisées sur les migrations et à promouvoir un récit plus constructif.  Il a demandé un engagement collectif accru au sein de la campagne de l’ONU « Ensemble ».  En second lieu, le délégué a plaidé pour des systèmes nationaux mieux planifiés et plus étoffés, qui pourraient prévoir une diversification des modes d’immigration légale, y compris une réinstallation des réfugiés.  Ces voies régulières, loin d’être une panacée, peuvent aider à diminuer le nombre de ces tragédies et à préserver un capital humain gaspillé et même perdu, a-t-il dit.  À l’aune de l’expérience de son pays, il a indiqué que l’un des éléments clefs était l’engagement des différents acteurs dans les différentes phases du processus d’immigration.

Troisièmement, M. Grant a demandé l’élaboration de réponses plus complètes pour les réfugiés et les personnes déplacées, appelant à traduire les engagements pris, notamment lors du Sommet humanitaire mondial, dans les faits afin d’améliorer leurs conditions de vie.  Enfin, conscient de l’emplacement géographique unique du Canada, ainsi que de son passé d’immigration, le délégué a reconnu les défis significatifs que les pays d’origine, de transit et de destination doivent relever, en particulier sur le pourtour méditerranéen.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a exprimé ses profondes préoccupations face à la situation humanitaire en Syrie, rappelant avoir, au cours des cinq dernières années, toujours soutenu la recherche d’une solution politique au conflit.  Il a salué les efforts des pays voisins comme le Liban, la Jordanie et la Turquie, dont la capacité d’accueil est dépassée.  L’Argentine s’est engagée, a-t-il dit, à partager la responsabilité internationale, en accueillant des réfugiés syriens, en vertu de son programme spécial.  Le représentant a aussi mentionné un groupe de travail interministériel créé en 2015 dont le mandat est d’élaborer des directives générales pour l’admission humanitaire des déplacés forcés.  L’objectif est d’assurer la pleine intégration de la population réfugiée dans la communauté, avec la participation active des autorités nationales.  Le représentant a, enfin, signalé le travail qu’accomplissent les Casques blancs pour soulager les souffrances des personnes en situation d’urgence. 

M. GEORG SPARBER (Liechtenstein) a plaidé pour que les auteurs de crimes commis en Syrie soient traduits en justice.  Il s’est désolé que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure de répondre aux attentes des signataires du Code de conduite ACT (Accountability, Cohenrence, Transparency), soit une grande majorité des États Membres.  La lutte contre l’impunité et contre les violations du droit humanitaire international sont des priorités, selon lui.  L’établissement des responsabilités apporte la justice, mais c’est aussi un facteur de dissuasion, a-t-il argué.  Il a souhaité soutenir le mécanisme qui vise à assurer cette reddition des comptes en Syrie. 

Le représentant s’est ensuite montré reconnaissant à l’égard des pays qui accueillent le plus de réfugiés syriens.  Il a demandé aux États Membres de participer aux programmes de réinstallation de l’UE et du HCR, auxquels le Liechtenstein apporte son soutien, en plus de son aide financière.  Il a signalé les projets de scolarisation de 20 000 réfugiés syriens en Jordanie et au Liban que son pays soutient.  Il a aussi attiré l’attention sur un programme novateur de langues permettant aux réfugiés et aux migrants d’apprendre les bases de l’allemand en quelques semaines.  Enfin, il a demandé une lutte plus efficace contre l’esclavage, signalant à ce sujet que son pays vient d’organiser un atelier sur le traçage des flux financiers qui favorisent l’esclavage.

La Syrie continue à saigner, s’est alarmé M. NIZAR AMER (Israël) devant la violence infligée par le « régime d’Assad » qui attaque brutalement son propre peuple, utilisant des armes classiques et non conventionnelles et plongeant le pays dans la pire crise humanitaire de l’histoire du Moyen-Orient.  Le massacre de Khan Cheikhoun, a poursuivi le représentant, nous rappelle que la communauté internationale a une nouvelle fois échoué à empêcher ce régime de laisser libre cours à sa brutalité.  Malheureusement, s’est désespéré le représentant, ce n’est pas la première fois que des armes chimiques sont utilisées contre le peuple syrien: le régime syrien en est à son troisième exploit alors que Daech en a utilisées une fois.  Nous ne pouvons rester les bras croisés, a estimé le représentant, priant la communauté internationale de retirer ces armes « horribles » de la Syrie. 

Il a conclu en faisant part des efforts de son pays dont la création du programme « Réponse à la crise mondiale de des demandeurs d’asile » pour aider les réfugiés qui fuient vers l’Europe.  Comme Jamal, ce garçon syrien de 7 ans qui est resté plongé dans le coma pendant 20 jours dans un hôpital israélien après avoir subi un tir de roquette sur sa jambe, des milliers d’enfants syriens se réveillent dans la violence et ne connaissent que la peur.  Les vastes mouvements de réfugiés et de migrants exigent une réponse internationale humaine, efficace et respectueuse, une réponse soucieuse du droit des États de gérer et de contrôler leurs frontières et de veiller en leur sein, à la sécurité, à la prospérité et à la stabilité.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) s’est placé en défenseur des droits des personnes migrantes, en tant que ressortissant d’un pays de transit, d’accueil et de retour.  Les gens continuent à appeler à une solution politique en Syrie mais la crise se poursuit, s’est-il alarmé.  Le représentant a salué les gouvernements et leur société civile qui ont sauvé des vies.  Nous avons aujourd’hui, a-t-il estimé, une occasion unique de progresser vers une migration à visage humain.  Parlant des deux pactes mondiaux à venir, il a voulu mobiliser une véritable volonté politique, dans le cadre d’un dialogue transparent.  Il a dénoncé le racisme et la xénophobie qui poussent les gens à voir les migrants comme un facteur de chômage alors qu’ils sont en réalité un facteur de développement socioéconomique et culturel.  Le Mexique a dûment adhéré à la campagne « Ensemble » du Secrétaire général.

M. GILLES CERUTTI (Suisse) a exprimé sa détermination à contribuer à trouver des solutions durables aux défis complexes posés par ce phénomène des migrations irrégulières Il a proposé d’agir sur deux plans: « trouver des moyens de prévenir de futurs drames et améliorer le destin de ceux qui ont été forcés de quitter leur pays ».  La prévention devrait être au cœur de nos préoccupations, a-t-il dit en appelant notamment à agir sur les violations du droit international humanitaire en Syrie.  Il faut trouver des solutions politiques aux conflits armés et mettre fin aux violations du droit international, a-t-il insisté. 

Au titre de la deuxième priorité, le représentant de la Suisse a rappelé la nécessité que le droit international soit respecté aussi dans les pays de premier accueil et dans les pays de transit des migrants et des réfugiés.  À son avis, l’élaboration des deux pactes mondiaux sur ce sujet est « une opportunité unique de travailler ensemble » pour « élaborer un cadre solide qui prenne en compte les causes profondes de la migration et des déplacements forcés », et ce, en tenant compte de la vulnérabilité des personnes concernées.

C’est une crise mondiale qui requiert une réponse mondiale, a estimé M. REINHARD KRAPP (Allemagne) qui s’est réjoui des futurs pactes mondiaux.  En 2016, près de 600 000 réfugiés sont arrivés en Allemagne et depuis 2012, elle a dépensé 2,2 milliards d’euros pour la Syrie et les pays voisins.  Mardi dernier, l’Allemagne s’est engagée à verser 1,5 milliard d’euros supplémentaires à la Syrie et à la région.  Le représentant a demandé un accès humanitaire aux zones syriennes isolées et à une protection des agents humanitaires en Syrie.  Il faut faire en sorte que les réfugiés puissent se rendre dans les zones sûres.  L’Allemagne ne veut pas laisser la région seule face à ces difficultés.  Elle a axé son appui sur trois secteurs: l’éducation des enfants, la formation professionnelle des jeunes et l’emploi.  Le pays a investi 240 millions d’euros pour l’éducation et la formation des enfants et des jeunes syriens.  Elle a octroyé 142 millions d’euros au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) pour son programme au Liban qui bénéficie à 200 000 enfants syriens.  Le représentant a voulu que l’on s’attaque aux causes profondes de ces crises dans les pays d’origine, la guerre civile en Syrie.  Il faut poursuivre les pourparlers de Genève et rechercher une solution politique.  Le représentant a exhorté toutes les parties à déployer tous les efforts nécessaires à une paix pérenne en Syrie.  Il faut une solution politique au conflit sinon les réfugiés ne pourront pas rentrer chez eux, a-t-il averti.

Mme MACHARIA KAMAU (Kenya) a réaffirmé son adhésion à la Déclaration de New York et placé beaucoup d’espoir dans les deux futurs pactes mondiaux.  Nous avons l’occasion, a-t-il dit, de faire face à la question des migrations irrégulières dans le bassin méditerranéen en s’attaquant aux facteurs qui créent et exacerbent ces migrations, en créant les conditions qui permettent aux communautés de vivre en paix, en luttant contre l’exploitation, les abus et la discrimination dont souffrent les migrants, en mettant en œuvre le Programme 2030 dont l’objectif est d’éliminer l’extrême pauvreté et les inégalités et en combattant la traite des personnes, le trafic des migrants et les autres formes modernes d’esclavage.   En tant que pays d’origine, de transit et de destination, le Kenya estime que la création d’un système efficace et humain d’asile est essentielle pour résoudre le problème des migrants et des demandeurs d’asile dans le bassin méditerranéen, qu’ils viennent de Syrie ou d’ailleurs.

M. WU HAITAO (Chine) a appelé tous les pays à adhérer aux principes de la Charte des Nations Unies et à régler leurs différends par la voie politique, en se servant des mécanismes de bons office et de médiation.  Il a défendu le règlement politique de la crise syrienne. Il faut aussi, a-t-il poursuivi, aider les pays en développement à parvenir au développement, en améliorant l’environnement international.  Ces pays en développement doivent pouvoir faire entendre leur voix sur la scène internationale.  Le représentant a également prôné le renforcement de la coopération internationale sur la question des réfugiés et des migrants.  Il a prôné pour ces personnes un esprit d’ouverture et a recommandé de renforcer la gouvernance mondiale dans ce domaine, en demandant au HCR et à l’OIM d’y jouer un rôle majeur.  Il a cité le Président chinois qui a déclaré, à Genève, le 18 janvier dernier, qu’il fallait « arriver à une communauté de partage pour arriver à un monde plus juste ».  Il a ensuite mentionné l’ampleur de l’aide humanitaire qu’offre la Chine.

M. DATO’ MUHAMMAD SHAHRUL IKRAM BIN YAAKOB (Malaisie) a demandé une enquête rapide pour déterminer les responsabilités dans l’attaque chimique de lundi dernier en Syrie et pour que les autres répondent de leurs actes devant la justice.  Dans la crise des réfugiés et des migrants, a-t-il poursuivi, il faut s’attaquer au racisme, à la xénophobie et au profilage ethnique.  Ces actes « régressifs » menacent l’intégrité des conventions internationales des droits de l’homme.  Il a appelé à mettre un terme à la traite et au trafic des migrants et s’agissant de la crise dans le bassin méditerranée, il a estimé que le Plan d’action de la Valette est une base solide.  Il a conclu en réitérant l’engagement de son pays à accueillir 3 000 réfugiés syriens.

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) a souligné que les réfugiés relèvent de la responsabilité commune de la communauté internationale qui doit faire tout son possible pour les protéger.  Mais en réalité ce sont des petits pays qui en portent le fardeau.  L’Iran, a-t-il dit, a accueilli des millions de réfugiés afghans et iraquiens depuis des décennies, avec peu voire pas de soutien international.  Toutes les crises de réfugiés devraient être traitées par la communauté internationale sur un pied d’égalité, a-t-il dit, soulignant que le phénomène n’est pas nouveau dans la région, comme en témoignent les millions de réfugiés palestiniens.

Le représentant iranien a appelé la communauté internationale à s’attaquer aux causes fondamentales du phénomène, en combattant l’interventionnisme et l’occupation, de même que le terroriste et l’extrémisme violent.  Il a qualifié d’« irresponsables » les frappes aériennes d’hier soir, voyant là « un acte unilatéral qui constitue une violation grave des principes de la Charte des Nations Unies » et qui « sape les initiatives internationales comme celle menée par les Nations Unies pour mettre un terme à l’extrémisme violent ».  Il a condamné toute utilisation d’armes chimiques mais tout aussi condamnable, a-t-il ajouté, est l’attaque des États-Unis contre une base syrienne pour une utilisation « supposée » d’armes chimiques.  « C’est une violation claire du droit international », a-t-il martelé. 

M. CARLOS ARTURO MORALES LÓPEZ (Colombie) a dit que la protection des réfugiés et des migrants relève de la responsabilité des États.  Seule une approche axée sur la personne peut garantir cette protection, a précisé le représentant qui a appelé à la fin de la discrimination et demandé la mise en œuvre de la Déclaration de New York.  Dans ce cadre, il a qualifié « d’atteinte à la souveraineté des États » la traite de migrants, estimant que pour combattre ce fléau, il faut s’attaquer aux réseaux criminels et promouvoir le respect des droits des migrants et des réfugiés. 

Mme STEFANIE AMADEO, (États-Unis) a dit vouloir poursuivre l’élaboration des deux pactes mondiaux, avant de juger « inacceptable » que le régime syrien continue à bloquer l’acheminement des convois humanitaires.  Toutes les parties qui ont une influence sur ce régime doivent faire le nécessaire pour que soient respectées les normes humanitaires, a-t-elle demandé.  Se disant « horrifiée » par les attaques chimiques du régime syrien, elle a plaidé pour que les criminels soient traduits en justice.  « Après ce qui vient de se passer, a-t-elle expliqué, nous avons lancé une attaque contre une base aérienne sur un site associé à cette horrible attaque chimique. »

La représentante a ensuite parlé de la conférence tenue à Bruxelles cette semaine où les États-Unis ont annoncé les montants débloqués pour venir en aide aux migrants.  Son pays a déjà consacré 6,5 milliards de dollars en assistance humanitaire depuis le début de la crise syrienne, a-t-elle souligné, « ce qui reflète la compassion et le leadership des États-Unis dans cette crise ».  Elle a assuré que son pays continuerait à soutenir le processus de paix mené par les Nations Unies et demandé à toutes les nations « civilisées » de se joindre à ces efforts.

M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) s’est dit préoccupé par l’urgence humanitaire résultant des conflits au Moyen-Orient et de la déstabilisation économique des pays africains.  Mais concentrer la question de la crise des migrants en Méditerranée sur la Syrie participe d’une certaine « sélectivité », a dénoncé le représentant, considérant que ce n’est pas une bonne façon d’aborder ce « drame ».  Les réfugiés syriens ne représentent que 21% des migrants et des réfugiés passant par le bassin méditerranéen, a-t-il souligné.  La route de la Méditerranée n’est pas « l’apanage » des Syriens.  Non, le représentant a plutôt conseillé de réagir à la crise humanitaire syrienne en Syrie et n’a pas manqué de dénoncer les intérêts géopolitiques de certains pays qui encouragent en « sous-main » le conflit et qui, ce faisant, « politisent » à souhait la crise humanitaire.  Il faut une solution pacifique sans exclusive qui respecte la souveraineté et l’indépendance du pays, a conclu le représentant, sans oublier de condamner le bombardement américain d’une base aérienne syrienne lequel éloigne la possibilité d’une solution politique.

M. DIONYSSIS KALAMVREZOS (Grèce) a indiqué que 23% des demandeurs d’asile en Grèce sont des Syriens.  Face au flux d’immigrés, le Gouvernement a amélioré son système de traitement des demandes.  Mais, a souligné le représentant, le problème des migrants dans le bassin méditerranéen ne concerne pas seulement les Syriens.  Il a aussi soulevé la question de la traite des personnes dont la solution réside dans une migration légale qui donnerait le coup de grâce aux réseaux de passeurs.  Une coopération internationale étroite devrait guider nos actions, a-t-il conclu.

Droits de réponse

La représentante de la République arabe syrienne a dénoncé « les tentatives de la déléguée américaine d’utiliser cette tribune pour tenter de justifier son agression contre la Syrie ».  C’est un « acte irresponsable », a-t-elle affirmé, et de la « pure propagande ».   En réalité, a-t-elle dit, ces agressions profitent d’abord et avant tout aux groupes terroristes.  « La Syrie n’a jamais utilisé d’armes chimiques », a-t-elle réaffirmé, s’élevant contre la déformation des faits à ce sujet.  Mon pays veut continuer à s’acquitter de toutes ses obligations internationales, sans céder au chantage, a-t-elle martelé avant de répondre au représentant israélien et de faire état d’« actes criminels » commis par Israël, pays qui a causé le déplacement de centaines de réfugiés.  « Ceux qui ont commis les attaques chimiques sont des groupes terroristes soutenus par Israël », a-t-elle affirmé, estimant que son homologue avait versé « des larmes de crocodile ».

Le représentant de la Fédération de Russie a dit vouloir « répondre aux propos inquiétants de la déléguée américaine ».  Qualifiant l’attaque des États-Unis d’« agression ouverte contre un État souverain », il a dit: « Nous avons une position très claire: l’emploi d’armes chimiques est inacceptable » mais la tragédie doit faire l’objet d’une enquête rigoureuse et fouillée.  Le représentant a reproché aux États-Unis de s’être lancés sans attendre dans cette agression.  La Fédération de Russie, a-t-il dit, aide la Syrie dans sa lutte contre le terrorisme alors que les États-Unis ont fermé les yeux sur l’utilisation d’armes chimiques en Iraq.

Le représentant d’Israël a répondu à son homologue de la Syrie en soulignant que ce pays affame son peuple et se spécialise dans le largage de barils d’explosifs contre son peuple.  Aujourd’hui, je ne vais pas défendre l’État d’Israël mais les millions de gens qui ont besoin d’être défendus en Syrie, a-t-il dit.  Invoquant les millions de déplacés, il a demandé: quand cela cessera-t-il?

Israël est une Puissance occupante qui commet quotidiennement des crimes, a rétorqué la représentante de la Syrie. Ce sont des faits connus qui ne réclament aucune confirmation.  Elle a demandé à la communauté internationale d’obtenir d’Israël qu’il respecte le droit international et les résolutions du Conseil de sécurité.

 

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