AG/1042

LE SOMMET DU MILLENAIRE OUVRE SES TRAVAUX SUR L'AVENIR ET LE ROLE DES NATIONS UNIES AU XXIE SIECLE

6 septembre 2000


Communiqué de Presse
AG/1042


LE SOMMET DU MILLENAIRE OUVRE SES TRAVAUX SUR L'AVENIR ET LE ROLE DES NATIONS UNIES AU XXIE SIECLE

20000906

Les dirigeants du monde abordent les questions du développement et du maintien de la paix

Plus de 150 chefs d’Etat et de Gouvernement ont ouvert, ce matin, au Siège des Nations Unies à New York, le Sommet du millénaire, le plus grand rassemblement de dirigeants du monde jamais organisé.

Comment adapter le rôle de l’ONU au XXIe siècle ? C’est à cette question que les dirigeants de la planète ont à répondre au cours des trois jours du Sommet, placé sous la Coprésidence de la Présidente de la Finlande, Mme Tarja Halonen et du Président de la Namibie, M. Sam Nujoma. Le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan a suggéré ce matin aux participants de ”décider d’abord des priorités et d’adapter l’ONU de façon que ces priorités donnent lieu à des décisions claires et rapides, se traduisant par des changements réels dans l’existence de tous.” Le Secrétaire général s’est d’ailleurs félicité que les Etats Membres se soient fondés sur son Rapport du millénaire pour rédiger la Déclaration politique, qui sera adoptée, à l’issue du Sommet. "Traitez votre déclaration en plan d’action et assurez-vous qu’il y sera pleinement donné suite", a dit le Secrétaire général. En écho à cet appel, le Premier Ministre d’Antigua- et-Barbuda a donné pour tâche aux dirigeants du monde de surprendre "les millions de personnes qui vivent dans une pauvreté abjecte et les pays qui ploient sous le fardeau de la dette.”

Si la question du développement humain a été confirmée comme une priorité, le maintien de la paix et de la sécurité, et ses composantes que sont les opérations de maintien de la paix, la prévention des conflits et le règlement pacifique des conflits a également été identifié comme un domaine d’action prioritaire. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont fait des propositions concrètes à partir des recommandations contenues dans le rapport du Groupe d’experts indépendants sur la réforme des opérations de maintien de la paix. Ainsi le Président des Etats-Unis, M. Bill Clinton, a reconnu que certaines circonstances exigent de la communauté internationale qu’elle ne se contente plus de s’interposer entre les belligérants mais qu’elle prenne parti. Le Président Clinton a plaidé pour que des Casques bleus aient la formation et l’équipement requis. En appui à ces propos, le Premier Ministre du Royaume-Uni, M. Tony Blair a prôné un nouveau “contrat” entre les Nations Unies et les Etats Membres. Il ne suffit plus de concevoir des opérations de maintien de la paix avec comme préalables la signature d’un cessez-le-feu et l’accord des belligérants. Les soldats de la paix doivent opérer dans le cadre d’une système mieux adapté et de missions plus énergiques. Les opérations de maintien de la paix des Nations Unies n’ont pas été le seul aspect évoqué dans le cadre de la question de la paix et de la sécurité. L’aspect de la prévention a également été évoqué notamment par le Vice-Premier Ministre de l’Arabie saoudite, M. Abdullah Bin Abdul Aziz Al-Saud qui a annoncé l’intention de son Gouvernement d’assurer 30 % du budget du Fonds d’action préventive créé à l’initiative du Secrétaire général. Cet aspect a été lié au désarmement nucléaire par le Président de la Fédération de Russie, M. Vladimir Poutine qui a proposé l’élaboration d’un mécanisme pertinent avec la coopération de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Il a aussi proposé l’organisation à Moscou, sous l’égide des Nations Unies, d’une conférence internationale sur la prévention de la militarisation de l'espace extra- atmosphérique.

L’aspect du règlement pacifique des conflits a été au centre des interventions du Premier Ministre d’Israël, M. Ehud Barak et du Président de l’Autorité palestinienne, M. Yasser Arafat. Le Premier Ministre israélien a estimé que l’opportunité d’une paix au Moyen-Orient est bien là tout en prévenant qu’aucune partie ne pourra voir se réaliser la totalité de ses rêves. Il a appelé le Président Arafat à se joindre à lui dans cette transition historique. Lui rendant son invitation, le Président de l’Autorité palestinienne a répondu que sa partie a fait des concessions significatives en renonçant à plus des trois-quarts du territoire palestinien historique et en acceptant de partager Jérusalem. Rappelant les retards intervenus dans le processus de paix, il a annoncé que le Conseil central de la Palestine se prononcera dans les jours à venir sur les décisions à prendre quant à la proclamation d’un Etat palestinien Les deux parties ont reconnu le rôle des Nations Unies dans la recherche d’une paix juste et équitable.

Forte d’un demi-siècle d’existence, universelle, démocratique, l’ONU est irremplaçable, a déclaré pour sa part, le Président de la France, M. Jacques Chirac qui a estimé que l’adaptation de l’Organisation au monde d’aujourd’hui passe par la modernisation des méthodes de travail de l’Assemblée Générale, l’appui aux réformes engagées par le Secrétaire général et la mobilisation des ressources nécessaires à son fonctionnement.

Les chefs d’Etat et de gouvernement des pays suivants ont également pris la parole : Guinée équatoriale, Guatemala, République islamique d'Iran, Nicaragua, Maldives, Namibie, Jordanie, Yémen, Kenya, Honduras, Chili, Micronésie, Guyana, Chine, Islande, Belize, Irlande, Liechtenstein, Allemagne, Panama, Syrie et Oman.

Le Sommet a commencé par une minute de silence pour la prière ou la méditation suivie d’une autre minute de silence demandée par le Secrétaire général en l’honneur des trois membres du personnel du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés tués aujourd’hui à Atambua au Timor occidental en Indonésie.

Le Sommet poursuivra son débat à 15 heures. Déclarations des deux Coprésidents du Sommet

Mme TARJA HALONEN, Vice-Présidente du Sommet du millénaire et Présidente de la Finlande : Nous sommes réunis aujourd'hui aux Nations Unies pour célébrer le millénaire et faire part de notre vision de l'avenir. Notre tâche se compose de trois éléments. Nous devons répondre aux besoins du monde extérieur, nous devons clarifier le rôle des Nations Unies dans le monde des affaires et nous devons en faire une organisation moderne. Le monde à l'extérieur de ce bâtiment change de plus en plus rapidement. L'humanité est confrontée à la fois à des défis considérables mais également à des opportunités sans précédent. Nous devons exploiter les opportunités qui s'offrent à nous et répondre aux défis avec sagesse, justice et courage. Il est de notre responsabilité de protéger l'environnement, notre héritage commun, pour les générations futures. L'être humain est au centre du travail qui nous attend. Nous devons travailler ensemble comme citoyens et partenaires.

Je vous rends hommage, M. le Secrétaire général, pour votre rapport qui a largement inspiré la Déclaration du Sommet. Le thème principal en est la mondialisation qui, en elle-même, est une incarnation des défis, opportunités et des mutations rapides. Nous en connaissons les causes et certaines des nombreuses conséquences, ce qui nous permet de pouvoir influer positivement sur les changements que connaît le monde. Ceci est au coeur de votre rapport et constitue le message de la Déclaration. Notre planète est devenue un village planétaire dans lequel toutes les maisons ne sont pas semblables. Pour éliminer la pauvreté, la solidarité est indispensable. Le multilatéralisme est nécessaire. Dans un monde interdépendant, aucune nation n'est une île. L'avenir de chacun est lié. Les Nations Unies sont le bastion du multilatéralisme et doivent continuer de l'être.

Le Sommet du millénaire nous offre l'occasion de réfléchir sur l'avenir des Nations Unies, bien souvent la seule entité à intervenir sur le terrain pour aider, conseiller et contribuer à la mise en place d'institutions. Il est par conséquent impératif que les Etats Membres lui accordent les moyens et les ressources nécessaires à la réalisation de son mandat. Nous ne pouvons pas attendre de l'Organisation qu'elle accomplisse tout à elle seule. Pour être crédible, elle doit travailler en partenariat avec d'autres organisations et avec la société civile. Nous devons faire en sorte que l'Organisation reflète le monde tel qu'il se présente aujourd'hui.

M. SAM NUJOMA, Vice-Président du Sommet du millénaire : Les peuples du monde ont de grands espoirs de voir s'opérer un changement social, pour que les hommes et les femmes soient égaux devant la loi, pour qu'ils n'aient plus peur et pour que la pauvreté et l’aliénation soient vaincues au sein de la société, et pour que la science et la technologie soient utilisées aux fins de la paix, de la sécurité, de l’éradication de la pauvreté et du développement durable.

Nous sommes rassemblés ici parce que nous croyons aux Nations Unies, à sa Charte ainsi qu’aux objectifs et aux principes que cette Organisation indispensable défend. Aujourd’hui est le moment de donner un nouvel élan à la paix, à la coopération, au développement, à la sécurité et à la stabilité dans le monde. Les conflits armés, les guerres civiles ainsi que les actes destructeurs et vicieux de terrorisme doivent être condamnés. C’est pourquoi la récente publication du Rapport Brahimi sur les opérations de maintien de la paix des Nations Unies est si important et vient en temps opportun. En tant que chefs de gouvernement et éminentes personnalités, nous devons joindre nos voix à l’appel pour le respect de la trêve olympique au cours des prochains jeux. Notre message en faveur de la solidarité mondiale, de la bonne volonté et de la fraternité entre les hommes doit être clair et solennel.

Déclaration du Secrétaire général des Nations Unies

M. KOFI ANNAN, Secrétaire général des Nations Unies : Je regrette d’avoir à commencer par une sombre nouvelle. Il y a quelques heures auTimor occidental, le Bureau du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a été attaqué par des milices armées opposées à l’indépendance du territoire. Trois membres du personnel international ont été tués et les autres membres sont en cours d’évacuation. Cette tragédie souligne les dangers que connaissent les travailleurs humanitaires non armés dans les situations de conflit ou d’après- conflit. Le Conseil de sécurité et moi-même avons exprimé notre préoccupation quant à la sécurité du personnel sur le terrain qu’il s’agisse de civils ou de militaires. Je viens saisir le Gouvernement indonésien de la question et je vous invite à observer une minute de silence en l’honneur de ces collègues courageux qui ont perdu la vie.

L’occasion qu’offre le Sommet du millénaire nous confère une formidable responsabilité. C’est aux dirigeants que vous êtes que les peuples du monde ont confié leur destinée. Vos peuples attendent de vous que vous conjuguiez vos efforts pour résoudre leurs problèmes. Ils attendent des gouvernements que vous dirigez qu’ils oeuvrent dans la concertation. Ils attendent d’eux aussi qu’ils travaillent avec toutes les autres institutions – publiques et privées, à but lucratif et non lucratif - dans le cadre desquelles des êtres humains s’associent pour promouvoir leurs idées et leurs intérêts. Les grands défis de l’heure étant d’ordre mondial, ils attendent avant tout de chacun d’entre nous que nous conjuguions nos efforts à l’échelon international dans le cadre des Nations Unies. Nous sommes ici pour renforcer et adapter cette grande institution pour qu’elle puisse faire ce qui est attendu d’elle à l’ère nouvelle qui s’ouvre devant nous et où devra prévaloir l’état de droit.

Un rapport préparé par un groupe d’experts indépendants contient des propositions détaillées concernant le renforcement de l’ONU dans le domaine crucial de la paix et de la sécurité. Cependant ce n’est pas dans ce domaine-là seulement qu’il importe de renforcer l’ONU mais bien plutôt dans toute la gamme de nos activités. Ainsi le Rapport du millénaire présente certains moyens de faire de l’ONU un outil plus efficace mieux à même d’améliorer l’existence de chacun où qu’il se trouve. Il est heureux que les Etats membres aient jugé utile de s’appuyer sur ce rapport pour établir la déclaration politique qui sera adoptée à l’issue du Sommet. Je vous conjure de ne pas vous satisfaire d’intentions mais de traiter la déclaration en plan d’action et de s’assurer qu’il y sera pleinement donné suite. Il nous faut décider de nos priorités. Il nous faut aussi adapter l’ONU de telle façon que ces priorités donnent lieu à des décisions claires et rapides, se traduisant elles-mêmes par des changements réels dans l’existence de tous. Allocutions

M. WILLIAM JEFFERSON CLINTON, Président des Etats-Unis d'Amérique : Le Secrétaire général dans son Rapport du millénaire nous rappelle que les plus grands défis qui nous attendent n'ont pas été relevés, à savoir : libérer l'humanité de la pauvreté, des maladies et de la guerre; mettre un terme à la dégradation de l'environnement et faire de l'Organisation des Nations Unies un instrument plus efficace dans la poursuite de ces objectifs. Aujourd'hui, je souhaiterais évoquer un aspect particulier de ces défis qui est l'instauration et le maintien de la paix. Le monde connaît de moins en moins de guerres entre Etats mais plus de conflits internes qui ont causé la mort de 5 millions de personnes dans les années 1990. Cette tendance constitue pour nous un défi collectif considérable. Nous devons respecter la souveraineté et l'intégrité territoriale des Etats mais que ce soit par la diplomatie, l'imposition de sanctions, ou l'usage collectif de la force, nous devons trouver les moyens de protéger les peuples tout comme les frontières. Comment devons-nous procéder ? L'une des leçons essentielles de ce siècle est la suivante : Certaines circonstances exigent que la communauté internationale prenne parti et non pas qu'elle s'interpose entre les belligérants.

Nous avons affronté une telle épreuve avec succès lorsque Slobodan Milosevic a tenté d'écrire le dernier chapitre du siècle passé avec le sang d'un massacre ethnique. Nous affrontons une telle épreuve depuis 10 ans en Iraq et nous devons soutenir la mise en oeuvre des mesures préconisées par les Nations Unies. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à une autre épreuve au Myanmar où un dirigeant populaire qui lutte pacifiquement en faveur du dialogue a été à nouveau placé en résidence surveillée tandis que ses partisans ont été emprisonnés, en violation flagrante des résolutions des Nations Unies. Aujourd'hui, du Burundi au Moyen- Orient, du Congo à l'Asie du Sud, les dirigeants sont placés devant une alternative : la confrontation ou le compromis. Le Président Arafat et le Premier Ministre M. Ehud Barak font partie de ces dirigeants qui sont avec nous aujourd'hui. Ils ont promis de résoudre leurs différences cette année. Il est temps d'aider les deux parties à prendre des risques pour obtenir la paix.

Quand les dirigeants du monde saisissent l'occasion de faire la paix, nous devons les aider. Les Nations Unies sont de plus en plus appelées à intervenir dans des situations imprévisibles où des dirigeants courageux cherchent la réconciliation mais où les ennemis de la paix tentent de la saper. Nous ne devons pas demander aux Nations Unies de remplir un mandat lorsqu'elles n'ont pas les moyens de le remplir. Nous devons permettre le déploiement rapide des Casques bleus qui doivent bénéficier de la formation et des équipements adéquats. Nous devons avoir la capacité de déployer des forces crédibles et des missions clairement définies par des structures efficaces au Siège. Pour relever ces défis, nous devons également déployer des forces de police civile dans le cadre des opérations de maintien de la paix. Nous devons également travailler à la prévention des conflits en reconnaissant le lien entre la pauvreté et les conflits. Il nous faut fournir des repas gratuits à neuf millions d'enfants dans le monde, encourager les familles à envoyer leurs garçons et leurs filles à l'école, accroître nos efforts avec le G7 et autres créditeurs pour réduire la dette des pays en développement qui investissent dans les besoins de base, intensifier notre travail de prévention des maladies infectieuses et promouvoir la

mise au point de vaccins et de médicaments. Nous devons également mettre un terme à la tendance qui fait que les conflits sont plus rentables que la paix. Ces efforts ont un prix. Toutes les nations, y compris la mienne, doivent remplir leurs obligations au regard de l'Organisation. Il faut procéder à la réforme des structures financières de l'Organisation si nous voulons que celle-ci réponde à nos attentes. Ceux qui, dans mon pays ou ailleurs pensent que nous pouvons nous passer des Nations Unies, que nous pouvons imposer notre volonté à l'Organisation n'ont pas tiré les leçons de l'histoire et ne comprennent pas le futur.

M. TEODORO OBIANG NGUEMA MBASOGO, Président de la République de Guinée équatoriale : Comme jamais auparavant, avec le Sommet du millénaire, les peuples de la terre placent toutes leurs attentes dans les Nations Unies. S'il est vrai que la science et la technique ont grandement progressé, que des solutions ont été trouvées à certains conflits dans le monde, et que des victoires ont été remportées pour la démocratie et le respect des droits de l’homme, il n'en demeure pas moins que le siècle qui prend fin révèle les caractéristiques d’un monde menacé. Nous n’avons pas réussi à faire de l’homme le principal bénéficiaire de tous les efforts de développement dans le monde.

Si la croissance de certaines nations ne peut se faire qu'avec l’appauvrissement d’autres, nous obtiendrons alors un monde dominé par l’injustice et l’intolérance. L’immense majorité de la population dans le monde est victime de la misère, de crises économiques, et ploie sous le fardeau de l'endettement tout en subissant les effets catastrophiques des maladies et des catastrophes naturelles. La structure actuelle des Nations Unies est inadaptée pour surmonter ces graves problèmes et satisfaire aux exigences du XXIème siècle. L’Organisation se doit d'évoluer au même rythme que l’humanité et s’adapter aux moments historiques. Si les Nations Unies ne s’universalisent pas et n’écoutent pas de la même manière toutes les nations, l’Organisation répondra alors avec difficulté au rôle qui lui incombe. La mondialisation offre de grandes possibilités, mais ses bénéfices sont actuellement répartis de manière inégale. Nous devons mieux gouverner et nous devons apprendre à mieux gouverner ensemble.

M. ALFONSO PORTILLO CABRERA, Président constitutionnel de la République du Guatemala : En tant que l’un des 51 membres fondateurs des Nations Unies, le Guatemala souscrit sans réserve aux objectifs, aux principes et aux valeurs de la Charte de l’Organisation. Nous croyons fermement au multilatéralisme et nous estimons que l’ONU en est le meilleur garant. Le Guatemala participe activement aux diverses instances intergouvernementales de l’Organisation. Notre pays, qui sort d’un conflit de quatre décennies, et qui a bénéficié des activités de l’Organisation, est convaincu que l’ONU peut jouer un rôle plus éminent dans un monde de plus en plus transnational. Pour ce faire, l’Organisation devra s’adapter aux réalités du XXIe siècle.

A notre avis, le rapport “Nous, les Peuples” préparé par le Secrétaire général sur le rôle des Nations Unies au XXIe siècle, constitue une base intéressante pour nos débats. Par exemple, la distinction qui y est faite, entre le “système multilatéral” mis en place après la guerre et la “mondialisation”, déjà en plein essor, est juste. Il y a en effet un besoin de renforcement des Etats, pour que ceux-ci assument pleinement leurs responsabilités, notamment vis- à-vis du citoyen. Ceci se fera surtout dans le cadre des Nations Unies. Je voudrais, un moment, m’arrêter sur les priorités; l’élimination de la pauvreté constitue l’une des grandes tâches inachevées du XXe siècle. Pour les habitants de la planète, c’est la plus grande priorité. Mais sans paix et sécurité, il ne saurait y avoir de développement, première préoccupation de l’ONU. Au Guatemala, nous avons parié sur la paix. Nous avons beaucoup appris de la guerre. Nous devons renforcer notre capacité collective de prévention et de résolution des conflits. Nous devrons aussi prendre plus sérieusement en considération les engagements que nous avons souscrits à Rio et à Kyoto, pour que le développement ne se fasse pas au détriment de l’environnement. Par ailleurs, les Nations Unies doivent continuer, voire approfondir leur travail remarquable dans le domaine de l’assistance humanitaire, notamment en faveur des enfants.

Voici les points essentiels à l’adaptation des Nations Unies aux réalités du XXIe siècle : l’accent doit être mis sur un système légal international; la structure intergouvernementale des Nations Unies doit être adaptée au nouvel environnement international, le point de départ le plus important de cette démarche étant une réforme du Conseil de sécurité; nous devons mettre fin à la consigne doctrinaire de geler le budget de l’Organisation. Finalement, considérant que le Guatemala est une société pluriculturelle, multiethnique et multilingue, je ne saurais être davantage d’accord pour dire que la diversité culturelle est un atout inestimable pour la communauté internationale. Les différences entre nous constituent notre force, pas notre faiblesse. Nous proposons de répondre aux défis de ce nouveau millénaire avec des idées, et non pas avec croyances.

M. SEYED MOHAMMAD KHATAMI, Président de la République d’Iran : En cet âge de prise de conscience des nations et des individus, les forces au pouvoir ne doivent plus considérer cette seule valeur, mais permettre aussi aux hommes de réaliser leur besoin de liberté, de spiritualité et de dignité. Le droit de l’homme à déterminer son destin et la délégation de l’autorité politique constituent les principales caractéristiques de la démocratie. Aucune forme particulière de démocratie ne peut être prescrite comme la seule forme possible. Les principes démocratiques sont progressivement devenus les critères de bonne gouvernance au plan national et méritent de le devenir au plan international. La structure du pouvoir au sein de notre monde contemporain doit être réformée. Diverses cultures et civilisations peuvent et doivent travailler collectivement pour bâtir un monde moral et humain. La question fondamentale est de savoir si l’ONU est capable de revoir et de reconstruire son activité sur la base de ces principes.

Au niveau mondial, la préservation et le renforcement du pouvoir constituent le discours et le paradigme dominant de la vie politique. Etre à l’abri du besoin et de la peur, avoir un avenir prometteur, comme le souligne le rapport du Secrétaire général, ne peut se faire qu’en définissant de nouvelles relations internationales à travers un dialogue ouvert et équilibré. J’ai proposé de proclamer 2001 “Année internationale du dialogue entre les civilisations”.

La mondialisation a ouvert de nouveaux horizons, mais il ne faudrait pas qu’elle permette à quelques-uns de s’approprier de nouveaux marchés ni d’éroder les cultures nationales des autres. Je déclare devant cette Assemblée que les nations ne peuvent plus être marginalisées pour des prétextes économiques, politiques ou culturels. Notre tâche est de transformer la logique des relations internationales en l’écartant de la logique du pouvoir. Aujourd’hui plus que jamais les Nations Unies doivent démontrer leur autorité et leur efficacité.

M. ARNOLDO ALEMAN LACAYO, Président du Nicaragua : La Déclaration politique qui doit être adoptée à l’issue du Sommet doit tenir compte de la nécessité de renforcer la Cour internationale de justice pour offrir aux Etats la possibilité de régler leurs différends de manière pacifique. Il est également important de préserver et de renforcer le caractère universel des Nations Unies afin de s’assurer que tous les peuples du monde soient équitablement représentés. Partant, il faut réaffirmer le droit de la République de Chine de participer comme Etat Membre aux travaux des Nations Unies. Compte tenu des réalités et des défis actuels, le Nicaragua attache une grande importance à la mise en place de politiques et de stratégies de développement humain. Ce nouveau siècle étant le témoin d’un processus spectaculaire de mondialisation, nous avons aujourd’hui l’énorme responsabilité de conjuguer nos efforts pour assurer le minimum requis en matière de transfert des sciences et des technologies vers les pays en développement.

Nous sommes heureux de noter l’intérêt des pays développés et des institutions financières internationales pour la recherche de solutions alternatives à la question de la dette des pays pauvres les plus endettés. Il faut espérer que cet intérêt se traduira en mesures concrètes pour que des pays comme le Nicaragua puissent briser le cercle vicieux de la pauvreté et envisager un avenir fait d’opportunités plus grandes et d’espoirs de progrès. Un autre problème important est celui de la préservation et de l’utilisation durables des ressources naturelles qu’il faut mettre en parallèle avec la question de la protection de l’environnement. Dans ce contexte, la prévention et la réponse aux catastrophes naturelles revêtent une importance capitale. Il est heureux que dans un rapport soumis par le Secrétaire général au Conseil économique et social, le Nicaragua ait été classé en troisième position parmi les pays d’Amérique latine disposant d’un système de prévention et d’atténuation des catastrophes naturelles.

M. VLADIMIR POUTINE, Président de la Fédération de Russie : Le XXe siècle restera dans l'histoire comme un siècle de contradications. Il a été caractérisé par des réalisations grandioses mais également par des guerres terribles. Il a été un siècle d'avancées extraordinaires et de désillusions profondes. Mais nos pays et nos peuples ont été en mesure de rejeter la haine et de vaincre la guerre froide. Ceci est une réalisation des Nations Unies. Les générations précédentes nous ont laissé l'Organisation comme héritage unique. Les Nations Unies ont appris à résoudre et elles ont résolu les problèmes les plus compliqués du monde. C'est aux Nations Unies qu'est né le régime international des droits de l'homme, la caractéristique la plus marquante du monde moderne. La Déclaration universelle des droits de l'homme a été bien plus qu'une déclaration. Jusqu'à ce jour, nos vies s’en ressentent. Nous sommes convaincus de la nécessité de rénover et d'améliorer les mécanismes des Nations Unies. Mais aucune réforme ne saurait affaiblir ses principes fondamentaux.

Aujourd'hui, nous avons réussi à créer un mécanisme efficace de désarmement. Ce mécanisme repose sur le Traité ABM de 1972, sur les régimes de non- prolifération des armes de destruction massive et leurs vecteurs et sur des dizaines d'accords d'une importance considérable sur la limitation et la réduction des armements. Nous devons ériger un barrage à la prolifération des armes nucléaires. Pour cela, nous devons exclure l'emploi de l'uranium enrichi et du plutonium pur dans le cadre de la production mondiale d'énergie atomique. Techniquement nous en avons les moyens. L'incinération du plutonium et d'autres éléments radioactifs est une précondition à une solution définitive au problème des résidus radioactifs. Ceci ouvre d'autres horizons pour une vie sans danger sur la planète. Dans ce contexte, la Russie propose d'élaborer un mécanisme pertinent avec la coopération de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Les programmes de militarisation de l'expace extra-atmosphérique sont particulièrement préoccupants. Nous suggérons, à l'occasion du 40e anniversaire du premier homme dans l'espace, d'organiser sous l'égide des Nations Unies une conférence internationale sur la prévention de la militarisation de l'espace extra-atmosphérique. Nous pensons que l'endroit idéal pour accueillir une telle manifestation serait Moscou.

Nous considérons également le terrorisme comme le phénomène le plus dangereux et le plus traître. Notre objectif commun doit être de dresser un barrage devant ce fléau. Nous devons obtenir la paix, la stabilité et la prospérité dans le respect des traditions et cultures. La démocratie dans les relations internationales signifie la compréhension de la diversité des civilisations du monde.

M. MAUMOON ABDUL GAYOON, Président de la République des Maldives : A travers le monde, de nombreuses voix s’élèvent pour se demander si cinquante-cinq ans après la création des Nations Unies, le monde est devenu meilleur. La réponse est “oui”. La décolonisation est presqu’achevée. L’apartheid a été démantelé, et dans plusieurs parties du monde, les conditions de santé se sont améliorées. Les droits de l’homme sont aujourd’hui plus largement respectés, et la démocratie a quasiment remplacé le despotisme. Nous nous réjouirions de ces réussites, si seulement l’horreur de certains échecs n’existait pas. Souvenez-vous des millions d’enfants qui meurent de faim. Souvenez-vous des tueries du Moyen-Orient, d’Asie et d’Afrique. Pensez aux souffrances de la Bosnie, et à la face diabolique du terrorisme. Et aux trillions dépensés dans la course aux armements. Les Nations Unies sont au plus, un modeste succès.

Les Nations Unies doivent devenir plus démocratiques et servir de la même manière tous les Etats. Le mot clef de la Charte, est “Nous les Peuples”. Nous devons mettre fin aux divisions de l’humanité, et rejeter toutes les formes de discrimination et d’exploitation. Le développement doit devenir plus inclusif. La pauvreté est un crime contre l’humanité perpétré par ceux qui peuvent la soulager mais ne le font pas, et les dépenses d’armements devraient être arrêtées pour, au contraire, nourrir les bouches affamées et sauver des enfants. La démocratie, le développement et la paix sont des facettes d’une même réalité. La mondialisation doit être transformée en une force positive au bénéfice de tous. Elle doit unir et non diviser, et apporter des bienfaits au lieu de démunir les peuples.

Les pays les moins développés ont besoin de plus de traitements préférentiels. Les femmes doivent pouvoir prendre leur avenir en mains, partout dans le monde. Les jeunes doivent avoir une chance de réaliser leur plein potentiel. Des familles fortes doivent être les pierres angulaires de la société. Les valeurs morales sont indispensables pour construire un ordre mondial plus sensible aux êtres humains, et notre quête du progrès doit bénéficier d’un environnement durable. Nous n’avons pas le droit de détruire la Terre. Les dommages à l’environnement doivent prendre fin et le réchauffement de la planète arrêté. Tous les pays dont les territoires sont menacés par la montée des eaux doivent être sauvés. Pour toutes ces raisons, nous avons besoin d’une

Organisation des Nations Unies plus forte et plus juste. Quand notre Organisation se réunira de nouveau dans 100 ans, les Maldives et les autres nations insulaires existeront-elles toujours? Il serait pitoyable de partir de ce Sommet sans prendre d’engagements fermes pour sauver la Terre. Mais le monde se préoccupe-t- il vraiment de nous ? Pouvons-nous croire que l’humanité est réellement “une”?

M. SAM NUJOMA, Président de la République de Namibie : Il y a 50 ans, les fondateurs des Nations Unies avaient décidé, ensemble, de “sauver les générations futures du fléau de la guerre”. Nous avons fait des progrès significatifs dans notre effort commun pour mettre fin aux systèmes colonialistes déshumanisants, au racisme et à la tyrannie de l’apartheid. Toutefois, nous devons encore faire en sorte que les peuples de Palestine et du Sahara occidental regagnent leur dignité et leur droit inaliénable à l’auto-détermination.

Au cours de la dernière décennie du siècle, les Nations Unies ont sponsorisé de nombreuses conférences importantes où nous avons déclaré solennellement que le sous-développement et la pauvreté qui en découlent constituaient des insultes à l’humanité. La question est aujourd’hui : Avons-nous la volonté politique nécessaire, la morale, le courage et les stratégies appropriées pour combattre la pauvreté. Nous ne pouvons célébrer nos réalisations dans les domaines de la science et de la technologie alors que des millions de nos frères humains continuent de vivre dans le dénuement et la famine. La disparité flagrante entre le nord et le sud est la question la plus pressante de notre époque.

Au seuil du nouveau millénaire, les Nations Unies doivent mener une réflexion critique et sobre sur leurs capacités et leur niveau de préparation pour maintenir la paix et la sécurité. Les Etats Membres des Nations Unies ne peuvent et ne doivent pas abdiquer leur responsabilité dans le maintien de la sécurité collective. Le succès dans la lutte contre la pandémie de VIH-SIDA nécessite, d’une part, des efforts rapides et coordonnés de la part des dirigeants politiques, spirituels et des dirigeants d’entreprises. D’autre part, les entreprises pharmaceutiques doivent instamment fournir à ces millions de personnes atteintes du Sida des médicaments à un prix abordable.

Sa Majesté, le ROI ABDULLAH II de Jordanie : Le Sommet du millénaire est l’occasion de déclarer notre engagement à adhérer à une nouvelle vision d’un ordre qui recherche la justice et la protège, qui crée des opportunités et les saisit, et d’abord et avant tout qui prône des valeurs morales universelles et les défend. Un tel ordre conduirait à un nouveau code de conduite propre à prévenir les conflits et à établir des mécanismes pratiques de coopération. Un tel ordre tirerait aussi les leçons du passé pour donner un nouveau souffle à la responsabilité internationale, une responsabilité qui réponde aux besoins futurs. Il s’agit, en fait, d’une vision du monde qui nous permettra de relever ce qui apparaît comme le défi le plus important du nouveau millénaire, à savoir la consolidation des droits de l’homme et du développement humain des peuples du monde.

Les sacrifices de la Jordanie dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU en Sierra Leone, au Timor oriental et dans d’autres régions, témoignent de son engagement en faveur des nobles objectifs des Nations Unies. C’est dans cet esprit que la Jordanie accueille avec satisfaction les recommandations contenues dans le rapport du groupe d’experts sur le maintien de la paix et attend avec impatience leur adoption et leur mise en oeuvre. La préservation du caractère juste et pacifique de ce siècle passe par la mise en oeuvre de toutes les résolutions des Nations Unies, y compris les résolutions 194, 242 et 338 concernant la question de Palestine. Le Sommet du millénaire doit chercher à imposer la vision d’une humanité tolérante et pacifique qui protège la vie et l’améliore pour tous. Dans un monde de plus en plus étroit, il faut faire taire les conflits et les rivalités et coopérer à la recherche de l’excellence.

M. TRANS DUC LUONG, Président de la République socialiste du Viet Nam : Il est clair que tous les pays ne bénéficient pas des mêmes possibilités pour leur développement. L'écart entre pays pauvres et pays riches, se creuse davantage à cause de l'imposition de politiques unilatérales dans les relations internationales. La pollution, la dégradation de l'environnement, la hausse de la criminalité et la propagation des épidémies, en particulier de la pandémie du VIH/sida, continuent de menacer le développement de tous les pays. En ce moment historique, les Nations Unies doivent répondre aux besoins urgents du développement afin d'éliminer la pauvreté qui afflige les 5/6 des habitants de la planète, impulser une coopération bénéfique pour tous, développer des relations économiques et financières justes, accroître l'aide publique au développement pour la porter à 0,7 % du produit national brut, renforcer et consolider la paix ainsi que la souveraineté nationales. La communauté internationale doit également encourager le désarmement nucléaire, le règlement des conflits par des moyens pacifiques et promouvoir une plus grande démocratisation et une plus grande efficacité des Nations Unies.

Nous souscrivons aux recommandations du Secrétaire général présentées dans son Rapport du Millénaire et notamment celle visant à accorder la priorité à l'élimination de la pauvreté, la prévention du VIH/sida, l’intégration des pays en développement à l'économie mondiale. Je propose que les Nations Unies accordent un plus grand soutien à la promotion de la coopération entre les pays du Sud et du Nord. Le Viet Nam a joué et continuera de jouer un rôle actif en faveur de la paix et du développement et nous proposons de faire de la première décennie de ce siècle la Décennie des efforts mondiaux pour éliminer la pauvreté.

M. ALI ABDULLAH SALEH, Président de la République du Yémen : La convocation du Sommet du millénaire n’aurait pas eu lieu sans les grands défis qui ont marqué les relations internationales à la fin du XXème siècle. L’humanité a souffert pendant la guerre froide de conflits sanglants qui étaient préjudiciables à la liberté de l’homme et à sa dignité et qui ont dilapidé ses ressources économiques, imposant la pauvreté à des millions de personnes. Le répit intervient lorsque la démocratie et la liberté prennent le dessus et les dictatures s’effondrent et qu’une ère nouvelle commence, celle de la mondialisation, de la démocratie et du respect des droits de l’homme, une ère d’économie libre et prospère et une ère de partenariat, de coopération et de paix. Au cours de la dernière décennie du XXe siècle, le Yémen a réalisé la réunification et instauré la démocratie. Il jouit de la liberté de presse et encourage la participation des femmes à la vie publique. Maintenant, au seuil du XXIe siècle, le Yémen est en paix avec lui-même et avec ses voisins. La paix dans le pays et dans la région constitue un objectif de la politique du Yémen. Celle-ci vise essentiellement à régler les problèmes frontaliers avec ses voisins grâce au dialogue, la compréhension ou l’arbitrage, notamment avec le Sultanat d’Oman, l’Erythrée et l’Arabie Saoudite. Le Yémen souhaite développer une ère nouvelle de coopération dans la région et dans le monde, qui permettrait la libre circulation des biens, des capitaux et des personnes. Pour le Yémen, le terrorisme – phénomène international – doit être distinct de la lutte des peuples pour la reconnaissance de leurs droits et de l’indépendance. Il existe encore des peuples privés de leur liberté et de l’indépendance, notamment le peuple palestinien qui continue de vivre sous l’occupation israélienne en dépit de l’appui de la communauté internationale. A cet égard, le Yémen forme le voeu qu’une paix juste et globale soit réalisée dans la région. Tout en respectant la valeur juridique des résolutions des Nations Unies, le Yémen souligne la nécessité de mettre fin à la situation tragique du peuple iraquien et de lever les sanctions imposées contre l’Iraq depuis dix ans.

En cette occasion historique, les grandes puissances et les pays riches doivent jouer un rôle positif en contribuant au développement des pays pauvres et en les exemptant du paiement de leur dette afin de renforcer les chances de paix et de stabilité dans le monde. La paix et le développement sont interdépendants et constituent une condition sine qua non du développement humain et des civilisations. Les Nations Unies devraient aussi jouer un rôle décisif afin que les pays en développement puissent tirer profit de la mondialisation.

M. JACQUES CHIRAC, Président de la République française : Une génération a suffi pour qu’apparaisse un monde nouveau. Un monde qui garde les cicatrices du passé et où perdurent les crises et les conflits. Un monde ouvert dont les frontières s’estompent, un monde imprégné d’une culture globale inédite, celle des technologies de la communication. Un monde riche de promesses et d’avancées fulgurantes mais un monde qui invente de nouvelles exclusions. Il s’agit de faire vivre une éthique pour le XXIe siècle. Ce combat pour l’éthique est d’abord un combat pour la paix et la démocratie. La paix qui doit sans cesse être consolidée par des efforts redoublés en faveur de la non-prolifération et du désarmement, qui appelle la réforme de l’ONU chargée de son maintien et notamment l’élargissement, dans ses deux catégories de membres, du Conseil de sécurité. La démocratie parce que seule elle assure le respect des droits de l’homme et de sa dignité, parce qu’elle est le chemin le plus sûr vers la stabilité, le développement et le progrès partagés. Ce combat pour l’éthique doit être mené par les Etats mais aussi les associations, les entreprises, les médias, nouveaux acteurs qui s’affirment sur la scène internationale. Parce qu’il est global, notre monde a besoin d’instances qui travaillent ensemble pour mieux le maîtriser, pour faire progresser nos idéaux.

La richesse créée par la mondialisation doit se traduire par davantage de solidarité. Ensuite, le combat pour un meilleur environnement et pour la sauvegarde des richesses de notre planète. Des politiques concertées pour préserver la diversité des cultures et des langues, qui fondent l’identité des peuples. La volonté sans relâche d’agir contre l’insécurité et de lutter contre les grandes pandémies.

Forte d’un demi-siècle d’existence, universelle, démocratique, l’ONU est irremplaçable. Permettons-lui de s’adapter au monde d’aujourd’hui. En modernisant les méthodes de l’Assemblée Générale, en appuyant les réformes engagées par notre Secrétaire Général, en tirant profit de la révolution de l’information, en apportant les ressources nécessaires comme le font d’ailleurs les pays de l’Union européenne. En ce qui la concerne, l’Union européenne a la ferme intention d’assumer toujours mieux ses responsabilités au service de la paix.

M. DANIEL TOROITICH ARAP MOI, Président du Kenya : En Afrique, ce sont les défis à la paix et à la sécurité qui ont prédominé les débats tenus ou prévus du Sommet du millénaire. L’Afrique est confiante que le processus, initié par le Secrétaire général, lui permettra de faire entendre sa voix plus clairement et, il faut l’espérer, de faire comprendre l’urgence de la question. La réponse de la communauté internationale aux problèmes de l’Afrique, généreuse par le passé, a eu tendance à changer récemment. Les crises se succédant, l’Afrique comprend l’ampleur des demandes adressées à la communauté internationale et les dangers découlant de la lassitude des donateurs. Devant ces crises, qu’elles soient dues aux catastrophes naturelles ou aux conflits, la réaction globale de la communauté internationale a été inévitablement celle d’une perte de confiance dans l’Afrique. Il faut, de manière urgente, s’attaquer au pessimisme ambiant, croissant et dangereux.

Il faut s’attaquer au pessimisme des prétendus commentateurs qui s’emploient à ignorer que l’Afrique est un continent de taille, divisé en 54 Etats souverains et autant de cultures, de coutumes et de systèmes de gouvernement. Peut-être faudrait-il faire comprendre à ces commentateurs que les frontières africaines ont été créées artificiellement par les puissances coloniales, sans tenir compte des vœux des populations concernées, et qu’elles sont naturellement une des causes principales des conflits actuels. Il faut saisir l’occasion unique de cette réunion historique pour trouver des solutions à ces conflits futiles et sans fin. Des ressources plus importantes doivent être mobilisées par les Nations Unies pour financer les besoins en matière de prévention et de règlement des conflits. Il faut diriger nos efforts vers la prévention, idée chère au Secrétaire général des Nations Unies. Je déclare ici la confiance des Africains dans l’avenir de leur continent et espère vous la faire partager. Nos peuples, notre plus grande ressource, ne méritent pas moins.

M. CARLOS ROBERTO FLORES, Président constitutionnel de la République du Honduras : Le Livre d'Or de la Paix que j'ai eu l'honneur de remettre au Secrétaire général il y a quelques instants, contient la signature de centaines de mes compatriotes qui, par ce geste, ont souhaité exprimer par "leur poing et leur écriture" les plus purs sentiments du Honduras et de son peuple en faveur de la paix et l'amitié entre tous les peuples de la terre. Les signatures que contient ce livre, plus que l'expression de nos privations, peurs, plaintes et revendications, sont l'expression de notre foi en ce qui peut et doit être. C'est-à-dire, la paix. Elle dépendra en grande partie de nos succès dans la lutte contre la faim, la pauvreté, la malnutrition, l'ignorance, la marginalisation, l'exclusion, les préjudices et les dettes écrasantes. La paix, c'est un effort honnête pour réduire la distance qui sépare les plus démunis des plus nantis, pour combler l'abîme des odieuses inégalités et écarts qui séparent les personnes et les pays, et donner valeur universelle à la justice sociale et économique entre les peuples et les nations. Au lieu d'être angoissé par la pauvreté et l'inégalité dans son immense majorité, le monde devrait représenter une somme de peuples satisfaits, tout au moins en ce qui concerne leurs besoins essentiels.

Il ne s'agit pas là d'altruisme, de philanthropie ou de miséricorde. Il s'agit de sauver la paix et la concorde dans chaque coin de notre planète. Les Nations Unies peuvent et doivent œuvrer en faveur de la coexistence nécessaire entre pauvres et riches, petits et grands, sur la base de l'égalité souveraine et de la solidarité humaine. Pour commencer, avec tout le respect dû à cette Organisation, celle-ci doit veiller à établir un équilibre plus conforme aux réalités actuelles au sein du Conseil de sécurité. Le Livre d'Or de la Paix par lequel le Honduras salue les Nations Unies rassemble, en outre, les sentiments les plus vifs de notre nationalité et le plus fervent désir que l'on ne verse plus de sang sur la terre, plus de terrorisme, plus de violences raciales, ethniques ou religieuses; pour que la liberté durement conquise à la fin du siècle continue d'être consolidée de toutes parts et soit la fondation de systèmes de vie et de gouvernement démocratiques. Ce Livre d'Or contient de nombreuses aspirations qui nous sont propres mais ne doivent pas pour autant être différentes de celles des autres ou leur être étrangères. Cependant, même si elles l'étaient, la paix est également une tolérance qui permet de coexister dans la différence. Une tolérance qui nous permet de coexister en paix, en tant que personnes et nations de religions, couleurs et croyances différentes.

M. RICARDO LAGOS, Président de la République du Chili : “Je viens d’un pays situé à la pointe extrême des Amériques, un endroit que l’on a appelé le bout du monde. Et parce que nous appartenons à un pays éloigné géographiquement du reste du monde, nous embrassons avec enthousiasme et optimisme le phénomène de la mondialisation qui nous permet à tous de partager le temps et l’espace. En un peu plus de dix ans, nous avons réussi à multiplier par deux le poids de notre économie, à réduire drastiquement la pauvreté, à renforcer notre démocratie et à créer une culture de respect des droits de l’homme.

Acccepter la mondialisation ne veut cependant pas dire accepter la loi de la jungle ou l’anarchie. La mondialisation n’aura un visage humain que si nous mettons en place les normes internationales et les institutions visant à la réguler, notamment dans les domaines financier, technologique, juridique, environnemental et commercial. Aucun mécanisme automatique ne viendra réduire les inégalités, l’instabilité et les crises qui vont de pair avec la mondialisation. Une volonté politique qui ne peut venir que des Etats rassemblés ici, est nécessaire. Et permettez-moi d’ajouter que les populations doivent être au coeur des préoccupations fondant cette démarche.

Venant d’un petit pays situé à la périphérie du pouvoir mondial, il me faut évoquer une autre erreur. La mise en place des normes et des institutions ne doit pas être l’apanage d’une petite élite de nations, les autres pays étant laissés à l’écart de ces divisions. Nos peuples veulent être les citoyens du monde et non simples spectateurs. La société civile voudra de plus en plus jouer un rôle important dans un monde qui se globalise. C’est pour cette raison qu’au Chili, nous avons consulté la société civile pour préparer ce Sommet du millénaire. Et c’est pour cela que nous cherchons à créer des espaces dan s lesquels nous puissions tous participer à une redéfinition du monde en train d’émerger avec le nouveau millénaire. Les Nations Unies sont le meilleur forum au monde où exprimer cette préoccupation fondamentale et entreprendre cette tâche.”

M. LEO A. FALCAM, Président de la Micronésie : Malgré les progrès accomplis au cours du dernier millénaire, nous nous trouvons de nouveau aujourd’hui dans un monde où quelques privilégiés jouissent des bienfaits des ressources de la planète et des fruits du développement moderne. A l’aube du nouveau millénaire, nous attendons tous beaucoup des promesses de la “mondialisation”. Mais pour plus de la moitié des peuples du monde, qui vivent dans le besoin et sous la menace constante de maladies dévastatrices comme la tuberculose et le VIH/sida, il convient de se poser la question de savoir si la mondialisation offre réellement une véritable chance de sortir du cycle de la pauvreté. En fait, il y a de fortes inquiétudes que la mondialisation pourrait au contraire élargir davantage l’écart entre les nations développées et en développement. Nous disons aux Nations Unies que si l’objectif de la sécurité humaine doit être atteint, et si l’écart entre riches et pauvres doit être réduit, de nouveaux mécanismes plus pertinents d’évaluation des besoins sociaux et de développement, comme les index de vulnérabilité, doivent être appliqués.

Au cours des siècles écoulés, l’industrialisation et les avancées technologiques ont engendré un appétit insatiable du luxe et de la consommation. Mais l’évidence scientifique nous montre aujourd’hui que cette course, si elle n’est pas modérée au cours du XXIe siècle, menace la vie de nos descendants et l’habitabilité même de la planète. Dans mon pays, par exemple, qui est un petit Etat insulaire, nous sommes de plus en plus alarmés par le manque de progrès de la communauté internationale en ce qui concerne les solutions aux menaces indiscutables créées par le réchauffement de la planète causé par l’homme et la montée du niveau des eaux qui en résulte.

Le monde reste un endroit dangereux, et les efforts de maintien de la paix de l’ONU ont eu un succès mitigé. Le moment est venu de reconnaître que d’autres composantes de l’Agenda de l’Organisation, comme le développement durable, l’éradication de la pauvreté, le développement social, la bonne gouvernance et les droits de l’homme, sont aussi indispensables à l’objectif de la sécurité à long terme que le contrôle de l’agression armée quand elle se produit. Si nous continuons à nous faire la guerre, cela signifiera beaucoup plus que l’échec de cette seule Organisation. Cela signifiera que nous avons manqué à notre responsabilité de corriger les déséquilibres injustes de la société mondiale.

M. BORIS TRAJKOVSKI, Président de l'ex-République yougoslave de Macédoine : Dans ce nouveau millénaire, alors que les pays et les peuples sont amenés rapidement à vivre ensemble du fait de la mondialisation, les Nations Unies ont la responsabilité de promouvoir une intégration efficace au monde et d'encourager l'interdépendance. Pour que l'Organisation puisse travailler avec succès au XXIe siècle, tous ses membres doivent s'engager pleinement à respecter ses principes fondateurs, de même qu'à relever les nouveaux défis auxquels elle est confrontée y compris sa propre réforme. La Ex-République yougoslave de Macédoine est particulièrement fière de son rôle et de sa contribution à la réalisation de la mission des Nations Unies.

Quel peut être le rôle d'un Etat de la taille de la Macédoine en ce qui concerne le soutien que peut apporter cette Organisation au XXI e siècle ? Premièrement, l'Ex-République yougoslave de Macédoine continuera de préserver sa dignité, son indépendance, sa souveraineté et son intégrité territoriale. Elle s'engage, en second lieu, à continuer de renforcer sa démocratie, en ne laissant pas des dirigeants autoritaires l'étrangler en attisant les flammes du nationalisme et en entravant les réformes politiques et économiques. Nous devons continuer à développer une société civile solide, base de la prospérité. Troisièmement, l'Ex-République yougoslave de Macédoine poursuivra son combat en faveur des droits de l'homme. Elle a déjà prouvé son attachement à cette noble cause en abritant 360 000 réfugiés durant la crise du Kosovo. Seuls des Etats démocratiques forts, qui garantissent à tous les membres des minorités un statut de citoyens à part entière, peuvent parvenir à une parfaite intégration sociale. En quatrième lieu, l'Ex-République yougoslave de Macédoine s'engage à continuer de lutter contre le trafic de femmes, d'armes et de stupéfiants. Elle s'engage, en cinquième lieu, à avancer plus avant vers l'économie de marché et offrir ainsi un meilleur niveau de vie à chacun. Cela revient, plus précisément, à ce que tout le monde ait accès aux ressources financières, à la technologie et au savoir. Notre contribution la plus importante aux Nations Unies s'est traduite par notre soutien sans faille aux mesures relatives à la prévention des conflits. Cette contribution de la Macédoine date de 1993, lorsque la première force préventive a été déployée dans mon pays et, par la suite, par une collaboration étroite avec les institutions spécialisées des Nations Unies impliquées dans la crise au Kosovo. De plus, l'Ex-République yougoslave de Macédoine a toujours soutenu les sanctions de l'ONU. Sanctions qui ont pu quelquefois lui être nuisibles mais qui sont justifiées par la stabilité à long terme qu'elles apportent aujourd'hui. Enfin, la Macédoine s'engage à être une force positive de la reconstruction et de l'unification de l'Europe du Sud-est. Cette tâche nécessitera un renforcement de la règle du droit, la création de démocraties fortes, la reconstruction des infrastructures, l'incitation au libre échange et le renforcement des économies. Notre objectif final est simple -- entrer dans les structures Euro-Atlantique -- et occuper la place qui nous revient en Europe.

M. BHARRAT JAGDEO, Président de la République du Guyana : Si l’on doit survivre en tant que civilisation et même en tant qu’espèce, nous devons apprendre les vertus de l’interdépendance et de la coopération internationale. La survie ne doit pas nécessairement consister en un meilleur ajustement, mais dépendre plutôt de la vigueur et de la fermeté de la volonté générale. Elle dépendra également de notre capacité de créer un nouvel ordre humain global par lequel tout homme, toute femme et tout enfant peut bénéficier de conditions de vie décentes. Finalement, elle dépendra de la disposition des dirigeants du Nord et du Sud à souscrire et à soutenir des valeurs et principes tels que la gouvernance démocratique, le respect des droits de l’homme et le droit international, la justice et l’égalité.

En tant que démocratie nouvellement rétablie, le Gouvernement guyanien a placé la population au centre du développement. Il a cherché à la faire participer pleinement au processus de prise de décision. Le Gouvernement a également impliqué le secteur privé et la société civile dans son ensemble afin qu’ils puissent à la fois devenir des bénéficiaires et des contributeurs du développement. Convaincu de la nécessité de renforcer ses capacités nationales, le Gouvernement continue de consacrer une fraction importante de son budget annuel à l’amélioration du secteur social, en particulier dans les domaines de la santé, du logement, de l’éducation et de la formation. Toutefois, le manque de ressources limite sensiblement ces efforts. Bien qu’il ait été atténué par l’initiative en faveur des pays pauvres les plus endettés et par d’autres mesures, le fardeau de la dette continue d'être un obstacle majeur à tout progrès au Guyana. Il est urgent d’assister de manière efficace les petits pays, comme le Guyana, pour leur permettre de concourir sur le marché mondial. De même, les pays en développement doivent bénéficier d’une assistance pour le développement plus importante, d’investissements accrus et de l’expansion du commerce pour qu’ils puissent profiter des avantages de la mondialisation. A cet égard, les pays développés sont invités à répondre de manière positive, en particulier, aux besoins des petits pays en développement.

Le modèle de développement qui prévaut doit être remplacé par un autre paradigme qui permette aux pays en développement de participer à l’économie mondiale tout en les protégeant contre sa volatilité. Tout en explorant ce nouveau modèle, on ne peut ignorer les violations à la paix et à la stabilité internationales qui rendent plus difficile le développement, sinon impossible. C’est pourquoi, la communauté internationale doit faire face rapidement aux conflits futiles et exiger que tous les Etats respectent pleinement la Charte des Nations Unies et les normes du droit international. Un Conseil de sécurité élargi et plus démocratique pourrait contribuer à préserver la sécurité mondiale.

M. JIANG ZEMIN, Président de la République populaire de Chine : Il est d’une importance capitale pour le maintien de la paix mondiale que tous les pays respectent mutuellement l’indépendance et la souveraineté. Tous les litiges internationaux et tous les conflits locaux doivent être réglés pacifiquement. Faire évoluer la conjecture internationale vers la multipolarité est un impératif de notre époque. Notre monde est un monde de diversité où chaque pays apporte une contribution. La destinée du monde devrait être entre les mains de tous les peuples et les Nations Unies devraient être un lieu où tous les Etats Membres traitent des affaires internationales de façon démocratique.

Il faut respecter pleinement le droit de chaque peuple de choisir librement son système social et sa voie de développement. Il convient de donner un élan au dialogue Nord-Sud sur la base de l’égalité et en même temps de mettre sur pied une vaste coopération Sud-Sud. La communauté internationale doit en outre aider les pays en développement à se doter d’une capacité d’auto-développement et à la renforcer. Il faut préconiser et mettre en oeuvre les principes de la démocratie dans les affaires internationales.

Il importe que l’ONU et son Conseil de sécurité suivent le cours de l’histoire et entreprennent, à la lumière du principe de l’équilibre géographique, une réforme nécessaire et appropriée, de nature à refléter la volonté de tous les Etats Membres. La Chine a toujours soutenu les Nations Unies et s’est toujours acquittée de ses devoirs et obligations. Le peuple chinois milite résolument en faveur du maintien de la paix et de la stabilité internationales. La Chine ne prétendra jamais à l’hégémonie, c’est là un engagement solennel que le peuple chinois prend devant le monde entier.

Son Altesse Royale, le Prince ABDULLAH BIN ABDUL AZIZ AL-SAUD, Vice-Premier Ministre d’Arabie saoudite : Le Sommet du millénaire se doit de répondre aux aspirations des six milliards d’habitants de la planète car l’Arabie saoudite est d'avis que les Nations Unies demeurent le seul espoir de l’humanité pour ce qui est de préserver les générations futures du fléau de la guerre. Il faut être franc et se poser la question de savoir si nous sommes parvenus à réaliser les nobles objectifs pour lesquels les Nations Unies ont été créées et au nombre desquels la question de la paix vient en bonne place. Je crains qu'il faille répondre à cette question. C’est pourquoi, l’Arabie saoudite entend assurer 30 % du budget prévu pour le Fonds d’action préventive institué sur l'initiative du Secrétaire général. L’Arabie saoudite tient aussi à mettre l’accent sur le concept de tolérance et continue de plaider pour que les lieux saints de la foi musulmane à Al Qods relèvent de la souveraineté palestinienne qui continue d’être bafouée. Il faut rappeler ici que le conflit au Moyen-Orient a éclaté à la suite d’une décision du Conseil de sécurité et qu’en dépit des résolutions adoptées depuis lors, la tension persiste dans la région. A propos des droits de l’homme, l’Arabie rejette l’idée selon laquelle seuls certains auraient le droit de donner des certificats de bonne conduite. Les droits de l'homme sont des droits universels et leur interprétation doit être laissée à la discrétion de chaque culture. A cet égard, l’Arabie saoudite se félicite, de ce que les Nations Unies aient proclamé l’an 2001, Année du dialogue entre les civilisations.

M. DAVID ODDSSON, Premier Ministre de la République d’Islande : Les Nations Unies sont éminemment aptes à relever les multiples défis globaux auxquels le monde est confronté aujourd’hui. Avec la mondialisation croissante, le monde a besoin des Nations Unies plus que par le passé. En même temps, l’ONU doit répondre à un nombre plus important d’attentes. Grâce à l’essor de la mondialisation, les idées et l’information sont plus accessibles au monde entier. Ainsi, les gens, dans diverses régions du monde, sont plus que jamais sensibilisés aux droits fondamentaux de la démocratie et à la séparation constitutionnelle de la justice et du pouvoir. Les sondages d’opinion montrent en effet que de par le monde, les droits de l’homme, tel que l’a relevé le Secrétaire général dans son Rapport sur le millénaire, constituent une préoccupation centrale dans les attentes que les gens ont des Nations Unies. L’Organisation devra répondre à ces attentes qui ne manqueront pas de croître.

Face à un nouvel environnement et confronté à de plus grandes attentes, l’Organisation est appelée à effectuer des changements aussi bien dans ses structures que dans son travail. Ainsi, la réforme du Conseil de sécurité, instance d’un autre temps, doit être accélérée. Par ailleurs, la performance des Nations Unies dans les opérations de maintien de la paix a été irrégulière dans la décennie écoulée. Mais grâce à son inestimable expérience dans ce domaine, l’ONU dispose d’un grand potentiel pour promouvoir la paix dans les régions en conflit. L’initiative du Secrétaire général, en commanditant un rapport spécial sur les opérations de maintien de la paix mérite d’être applaudie. Ledit rapport facilitera l’esquisse d’une stratégie claire sur cette question importante.

Même si l’Islande n’a qu’une petite population et ne dispose pas de ses propres forces armées, nous avons contribué en envoyant du personnel médical et des officiers de police dans les opérations de maintien de la paix dans les Balkans. Le Gouvernement islandais est actuellement en train d’étudier des propositions visant à accroître et à élargir notre participation à la partie civile des opérations de maintien de la paix. C’est pour cela que nous avons particulièrement pris bonne note de l’emphase mise par le Secrétaire général dans son rapport sur le déploiement rapide du personnel civil, tels que les policiers, les avocats et les experts, dans les opérations de maintien de la paix, dans le but d’accélérer une réconciliation et une paix durables entre les parties en conflit.

M. SAID.W. MUSA, Premier Ministre et Ministre des finances et des affaires étrangères de Belize : Dans le passé, nous nous sommes tournés vers les Etats pour trouver des solutions à la pauvreté, aux inégalités, à l'injustice, à la violence et à la haine. Mais aujourd'hui, ce sont les organisations transnationales et multilatérales qui contrôlent nos vies. Ce sont ces institutions qui constituent réellement les gouvernements du monde. Cette forme de gouvernance est puissante et elle dirige le monde entier. Mais elle n'est pas démocratique, elle n'est pas juste et n'est pas redevable. Un nombre relativement peu élevé en effet d'institutions internationales contrôlent réellement le sort des habitants de la planète alors qu'elles sont entre les mains d'une minorité et servent les intérêts d'une minorité. Par exemple, les membres du G7 qui représentent 12 % de la population, contrôlent 57 % des votes au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale. Les pays de l'OCDE, qui constituent 19 % de la population mondiale, contrôlent 70 % du commerce mondial. Et personne n'est dupe des prétendues pratiques démocratiques de l'Organisation mondiale du commerce.

Si nous voulons que l’Organisation des Nations Unies atteigne ses nobles idéaux et si nous voulons qu'elle conserve toute sa raison d'être au XXIe siècle, nous devons faire en sorte qu'elle mette un terme au monopole qu'exerce une minorité sur la gouvernance mondiale et qu'elle démocratise ce phénomène. Le Conseil de sécurité doit être réformé. Sa légitimité et son efficacité en sortiraient grandies si l'on mettait un terme au droit de veto et si l'on élargissait sa composition. Nous devons faire de l'Assemblée générale et des autres organes des Nations Unies des entités plus puissantes et plus redevables. Nous devons également demander au Secrétaire général de suivre de près les activités des centaines d'autres institutions et organisations qui président aux aspects fondamentaux de la vie de tous les jours et de nous présenter un projet de code de conduite pour plus de transparence et de redevabilité. Les Nations Unies elles-mêmes devraient être en mesure de mettre en place des mécanismes d'évaluation des institutions mondiales et disposer de moyens de vérification de leurs activités qui doivent accorder une place centrale à l'être humain. Nous devons trouver les moyens d'intégrer plus directement les peuples qui sont concernés par nos décisions. L'ampleur de la tâche qui nous attend exige des efforts concertés. Les Nations Unies doivent être l'organe de coordination de nos actions. La mondialisation offre de grandes possibilités à condition qu'elle devienne la mondialisation de la solidarité.

M. EHUD BARAK, Premier Ministre et Ministre de la défense de l’Etat d’Israël : L’opportunité d’une paix au Moyen-Orient est là et ne doit pas être manquée. Nous envisageons une paix qui préservera les intérêts vitaux et la dignité de toutes les parties. Mais, si nous voulons réussir, aucune partie ne pourra voir se réaliser la totalité de ses rêves. Dans les négociations avec la Syrie et avec le peuple palestinien comme dans la pleine mise en oeuvre de la résolution 425 du Conseil de sécurité, mon Gouvernement a montré qu’il pouvait prendre des décisions difficiles, et ce pour le bien de la paix. Il reste à savoir si les autres parties sont capables de profiter de cette conjoncture propice. Les Etats Membres des Nations Unies peuvent jouer un rôle central en encourageant le difficile processus de réconciliation et en empêchant toute mesure unilatérale. J’appelle le Président Arafat à se joindre à moi dans cette transition historique.

Plus que jamais, les frontières de la foi et de la culture ont reculé nous montrant à quel point sont proches nos espoirs et nos peurs, nous montrant le peu de temps que chacun de nous ait sur cette terre et combien pourtant nous avons à réparer et soigner.

M. BERTIE AHERN, T.D., Premier Ministre de l'Irlande : Tandis que la moitié de la population mondiale dispose d'un revenu de moins de deux dollars par jour et que plus d'un million de personnes ne bénéficient que d’un dollar par jour, la mondialisation a la capacité de transformer nos économies et nos sociétés. Néanmoins, elle implique qu'un engagement sincère pour une mondialisation juste soit pris et qu'il se traduise dans tous les domaines de la formulation des politiques, que se soit en matière de commerce, d'investissements, de réduction de la dette, mais également en matière de santé, de travail, de sexospécificité. Si nous appelons les Nations Unies à définir des objectifs précis et des politiques cohérentes, nous devons, individuellement, nous préparer à adopter la même discipline. A cet égard, l'Irlande, qui est une des économies prospères et à croissance rapide du monde, a une responsabilité particulière et c'est dans ce sens, qu'au nom du Gouvernement et du peuple d'Irlande, je souhaite prendre devant ce forum l'engagement d'atteindre le but fixé par les Nations Unies de consacrer 0,7 % du produit national brut (PNB) à l'aide publique au développement. A cette fin, nous nous fixons comme but intermédiaire, d'ici à 2002, d'accroître de 0,45% du PNB la part de notre aide publique au développement et d'atteindre le but fixé par l'ONU d'ici 2007. Nos programmes continueront d'être concentrés sur la réduction de la pauvreté et de refléter le lien fondamental entre les droits de l'homme et le développement humain, et à l'avenir, ils mettront également l'accent sur l'éducation primaire, la réduction de l'épidémie de sida, et l'amélioration de la condition des groupes vulnérables.

Nous sommes très préoccupés par le fait que toutes les opportunités de l'après-guerre froide en matière de désarmement ne soient pas saisies et nous continuerons à saisir toutes les occasions de faire des progrès en la matière. Le succès de notre processus de paix a renforcé notre engagement pour la résolution des conflits à travers le monde. Les conclusions du rapport du Groupe d'étude sur les opérations de paix des Nations Unies selon lesquelles sans un engagement renouvelé de la part des Etats Membres, des changements institutionnels significatifs et le renforcement du soutien financier, l'ONU ne sera pas en mesure de remplir son mandat, doivent amener les Etats Membres, et notamment le Conseil de sécurité, à prendre des mesures de manière urgente et à faire preuve d'une large volonté politique. L'Irlande s'engage pleinement à maintenir sa contribution aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies mais souhaite le faire dans un contexte de planification réaliste, d'objectifs clarifiés, d'organisation cohérente et de ressources adéquates.

Des réformes ont déjà été mises en œuvre en matière de réforme de l'Organisation, néanmoins il reste encore beaucoup à faire pour renforcer et revitaliser l'ONU. Il convient de redoubler d'efforts afin de rendre le Conseil de sécurité plus représentatif du monde moderne et plus équitable en matière de représentation géographique. C'est dans ce sens que l'Irlande, pour la troisième fois, est candidate à un siège au Conseil de sécurité lors des élections qui se tiendront le mois prochain.

M. MARIO FRICK, Premier Ministre du Liechtenstein : La mondialisation nous apporte profits et opportunités, mais elle est aussi porteuse de risques, particulièrement pour ceux qui sont déjà dans une situation instable. Nous considérons les Nations Unies comme l'unique forum de dimension réellement mondiale; elle est par conséquent la seule instance qualifiée pour traiter de la question. Notre monde, hautement interdépendant, est malade. Les menaces à notre bien-être commun et à notre devenir revêtent des formes multiples. Bien qu=ðil nous soit possible d=ðen éliminer certaines au niveau local, il n=ðen demeure pas moins que les problèmes graves que sont le réchauffement climatique, la croissance démographique, la dégradation de l'environnement, le fossé grandissant entre le Nord et le Sud, le commerce illégal des drogues et le crime organisé, doivent être abordés avant tout au niveau mondial. Et le système des Nations Unies offre le seul ensemble évident de mécanismes institutionnels pour les traiter.

Le Sommet du millénaire coïncide avec le dixième anniversaire de l'entrée du Lichtenstein aux Nations Unies, à la fin de la Guerre froide, lorsque nombre de contraintes subies par les Nations Unies depuis leur création avaient pu être levées. Mais cette évolution n'a pas rendu la solution aux problèmes plus aisée, car les Nations Unies ne sont pas convenablement équipées pour faire face aux

défis. Aujourd'hui, à l'aube du nouveau millénaire, nous, les Etats Membres, devrions démontrer notre volonté de donner aux Nations Unies le pouvoir d'agir en notre nom. Nous devrions donc fournir à l'Organisation les ressources nécessaires et tout en acceptant des limites à notre liberté d'action.

Le respect et la promotion des droits de l'homme, ainsi que le règne du droit ont constitué une des priorités pour l'engagement du Lichtenstein au sein des Nations Unies. Le Lichtenstein a participé activement aux travaux de création de la Cour pénale internationale, une des grandes réalisations dans le domaine du droit international, et nous espérons que la Cour sera rapidement opérationnelle. Dans ce contexte, nous remercions le Secrétaire général pour son rapport AðNous, les peuples : le rôle des Nations Unies au XXIe siècle@ð. Je suis d'accord avec le Secrétaire général quand il affirme que la prévention, est avant tout une question de leadership politique, et que nous devons avoir une compréhension claire des causes de conflits afin de les prévenir. Nous soutenons la création d'une culture de prévention, mais ce processus requerra un effort concerté de la part des Etats Membres, et un changement dans notre perception collective, qui est imprégnée d'une approche réactive à la gestion des crises.

M. LESTER B. BIRD, Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda : Beaucoup d’entre nous doutons déjà que les mots contenus dans la Déclaration politique soient assortis des moyens nécessaires à les traduire en réalité. Alors, je vous dis : Surprenez-moi et surprenez aussi les millions de personnes qui vivent dans une pauvreté abjecte. Surprenez les enfants qui souffrent de malnutrition et à qui même l'éducation la plus rudimentaire est déniée. Surprenez ceux qui sont nés avec pour seul espoir une vie courte et misérable. Surprenez des pays comme Antigua-et-Barbuda et montrez-leur que même la voix des petits et des faibles parvient aux oreilles des riches et des puissants. Surprenez les pays qui ploient sous le fardeau d’une dette remboursée, dans la misère et le désespoir, par des peuples qui remplissent les coffres-forts des riches. Le monde actuel n'apporte décidément aucun réconfort aux pauvres et aux faibles. Même les Nations Unies se retrouvent marginalisées par les diktats des heureux élus du G-7 qui s’est désigné comme instance de prise et de mise en oeuvre de décisions mondiales. En confisquant ce rôle, le G-7 a privilégié ses intérêts étroits de politique nationale au dépens des intérêts généraux de croissance économique mondiale et de stabilité politique internationale.

En violation flagrante des règles du droit reconnu par l’Assemblée générale et la Cour internationale de justice, l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), création du G7, a établi, de manière unilatérale, un ensemble de normes de taxation qu’il entend imposer aux autres juridictions. L’OCDE exige ainsi des Etats une modification de leur législation nationale afin d'ouvrir à ses autorités fiscales un accès inconditionnel aux informations bancaires. La menace de sanctions pèse sur tout pays qui aurait des réticences à se plier à ces ordres. Voilà que la loi de la jungle fait son entrée sur la scène internationale. Rien de ceci n’a le moindre rapport avec la lutte contre le blanchiment d’argent et les crimes financiers qui relèvent de la compétence d’un autre organe lequel a reconnu le succès d’Antigua-et-Barbuda en la matière. Si la Charte de l’ONU a encore un sens, l’OCDE doit cesser d'obliger les pays concernés à entrer dans des négociations bilatérales. L’OCED doit mettre fin à ce processus insidieux et soumettre la question des taxes à un forum multilatéral.

M. TONY BLAIR, Premier Ministre, Premier Lord du Trésor et Ministre de la fonction publique du Royaume-Uni : Les Nations Unies doivent devenir plus organisées, être mieux gérées et disposer de la vision nécessaire permettant de relever les défis immenses qui nous attendent. Dans le domaine des opérations de maintien de la paix, les Nations Unies sont en prise à de nouvelles modalités. Il ne suffit plus d'organiser des opérations de maintien de la paix reposant comme préalable sur la signature d'un cessez-le-feu avec l'accord des belligérants. La situation actuelle en effet est extrêmement instable comme en témoignent les agressions dont sont la cible le personnel de maintien de la paix des Nations Unies, notamment au Timor oriental. Les soldats des Nations Unies doivent opérer au sein d'un système mieux adapté et dans le cadre de missions de maintien de la paix plus énergique. Cela signifie qu'il faut un nouveau contrat entre les Nations Unies et ses Etats Membres. Les Nations Unies doivent disposer d'un personnel militaire professionnel plus consistant et le Rapport sur le maintien de la paix doit être appliqué à échéance de 12 mois.

En Afrique, la liste d'échecs que nous connaissons fait honte à notre civilisation. Pourtant, le changement est possible pour l'Afrique qui dispose de capacités politiques et commerciales. Nous devons être partenaires dans la recherche de ce changement. Le budget d'assistance du Royaume-Uni a fortement augmenté mais ce n'est pas suffisant. Je vous demande instamment de réfléchir à ce que nous pouvons faire pour l'Afrique. Nous devons élaborer un nouveau partenariat pour l'Afrique. Le moment est venu de réformer les Nations Unies. Malgré toutes ses imperfections, les Nations Unies sont une force de bien et si l'Organisation n'existait pas, nous serions forcés de l'inventer. Par ailleurs, je ne saurais achever mon discours sans dénoncer le traitement infligé à la militante birmane Aung San Suu Kyi. Je propose aux dirigeants du monde que nous lancions un appel pour que cette situation inacceptable cesse.

M. GERHARD SCHROEDER, Chancelier de la République d’Allemagne : “Les objectifs formulés dans la Charte des Nations Unies sont tout aussi pertinents aujourd’hui que par le passé. Cependant, avec le nouveau millénaire qui commence, ils doivent être poursuivis en tenant compte des caractéristiques d’un monde qui a radicalement changé. Le Secrétaire général a soumis un rapport qui renferme des propositions importantes et fournit matière à réflexion. L’aube du nouveau millénaire est certainement le moment approprié pour dresser un inventaire et rechercher ensemble les moyens de renforcer les Nations Unies dans leur rôle d’organisation centrale pour le maintien de la paix internationale et la sécurité.

Pour les Allemands, c’est un jour de joie toute particulière cette année. Dans quelques semaines, le 3 octobre, nous célèbrerons le dixième anniversaire du rétablissement de notre unité. Je saisis cette opportunité pour remercier les nombreuses nations et en particulier les peuples à l’Est et à l’Ouest qui ont soutenu l’Allemagne dans sa démarche. Je voudrais également souligner l’engagement sans défaillance de mon pays auprès de l’organisation mondiale. Il a été donné à l’Allemagne une nouvelle chance après la Seconde Guerre mondiale. Une démocratie stable fondée sur la règle du droit dont le libéralisme, la tolérance et la justice sociale ont gagné le respect de la communauté internationale, a émergé après 1945 dans ce qui devait devenir la République fédérale d’Allemagne. Grâce à l’engagement et au courage exemplaire dont ont fait preuve de nombreux citoyens de l’ancienne République démocratique d’Allemagne, la dictature communiste a finalement été renversée à l’automne 1989. Enfin, l’aspiration du peuple à la démocratie et à la liberté a mis à bas le mur. Consciente de sa responsabilité historique, l’Allemagne réunifiée est déterminée à saisir l’occasion qui lui est fournie de repartir sur de nouvelles bases. Nous voulons nous montrer dignes de cette opportunité en faisant la démonstration de notre engagement résolu en faveur de la démocratie et des droits de l’homme, d’une plus grande intégration européenne et du renforcement des Nations Unies.

Les défis auxquels sont confrontées les Nations Unies sont énormes. Guerres et oppression, pauvreté et maladies n’ont en aucune façon disparu. Les Nations Unies ne pourront relever ces défis qu’en utilisant efficacement leurs ressources et en se fixant des priorités. L’Allemagne va annuler entièrement la dette bilatérale des pays les plus lourdement endettés. Une telle initiative ne sera toutefois pleinement efficace que si elle est appuyée par la communauté internationale et les Nations Unies. Concentrer le travail de l’ONU dans un nombre limité de domaines devrait amener l’Assemblée générale à réduire son calendrier annuel à quelques sujets-clés. Les chances de succès des opérations de maintien de la paix ne s’amélioreront pas si des Etats importants, politiquement et économiquement, ne sont pas impliqués dans les décisions du Conseil de sécurité. Dans le cas où le nombre des membres permanents du Conseil de sécurité augmenterait, je souhaite redire que l’Allemagne est prête à endosser cette responsabilité."

M. JOHN HOWARD, Premier Ministre de l’Australie : En Australie, il est de notoriété que tous les hommes et toutes les femmes, et par extension, toutes les nations, méritent d’être traités en toute équité. Pour les Australiens, ce concept d’équité porte en lui la liberté, droit universel pour la recherche de la prospérité et la réalisation de l’autosuffisance et du respect de soi. Et à l’aube d’un nouveau siècle, il est normal que l’on reconnaisse les efforts et les réussites des Nations Unies dans la poursuite de ces objectifs. L’Australie est l’un des membres fondateurs de l’ONU. Depuis lors, l’Australie a toujours fourni une aide pratique aux pays en détresse, et promu les droits de l’homme, tout en apportant une aide aux besoins économiques urgents des pays en voie de développement. Nous sommes, et nous serons toujours, fidèles à l’Organisation des Nations Unies et les principes de soutien mutuel sur lesquels elle fut fondée.

L’Australie, pays doté de ressources naturelles et animés par la créativité d’une population issue de tous les points du globe, reconnaît volontiers, tout en clamant sa souveraineté, la contribution qu'elle doit faire au monde. Depuis 1948, l’Australie a accepté de participer à plus de 30 opérations de maintien et d’observation de la paix de l’ONU, y compris en Corée, dans le Proche-Orient et au Cambodge. Plus récemment, nous avons répondu à la requête spécifique du Conseil de sécurité pour restaurer la sécurité au Timor Oriental. Le succès de l’opération de la Force multinationale INTERFET est évident et je voudrais reconnaître le professionnalisme et le dévouement de chacun des membres des forces internationales. La paix et la prospérité du Timor Oriental ne s’obtiendront pas facilement, et les incidents tragiques de cette nuit à Atambua, près de la frontière du Timor Oriental, illustrent les difficultés et les menaces de la milice. Votre soutien continu sera vital, pour que le Timor Oriental parvienne à une indépendance réelle et à l’autonomie pour son peuple, parachevant ainsi le travail commencé il y a un an par les Nations Unies.

Finalement, l’Australie est convaincue que cette Organisation, que nous voulons tous mieux armée pour relever les défis futurs, doit se concentrer sur ses principales forces et responsabilités. Nous estimons aussi que les structures de l’ONU doivent être réformées. Par ailleurs, l’Australie endosse les demandes faites pour un élargissement du nombre des membres permanents et non permanents du Conseil de sécurité, dans le but d’accroître l’efficacité et l’autorité de cette instance, qui a besoin d’une meilleure représentation géographique. Plus particulièrement, l’Australie a depuis longtemps milité pour que le Japon occupe un siège permanent au Conseil de sécurité. Finalement, dans les prochaines semaines, l’Australie aura l’honneur d’accueillir les Jeux Olympiques. Nous espérons que ce Sommet, et ces Jeux, contribueront à renforcer la paix à travers le monde.

M. Arturo Vallarino, Vice-Président du Panama : Il y a beaucoup de choses à reprocher et à corriger aux Nations Unies. Toutefois, il serait injuste de ne pas proclamer ici comme partout que les réalisations de l'ONU l'emportent sur ses échecs et ses erreurs. Dans son évolution impressionnante, l'Organisation des Nations Unies est devenue le grand dépositaire de la confiance et des espérances d'un monde qui aspire à la paix et la prospérité.

Le Panama souhaite que cette réunion de haut niveau permette de concrétiser les déclarations faites dans d'autres forums concernant la prévention des conflits. Il est temps de transformer les opérations de maintien de la paix en mesures de prévention, plutôt que de continuer à les considérer comme des mesures imposées, parfois tardivement, par le Conseil de sécurité. Il faut à tout prix différencier les opérations de maintien de la paix conformes à la Charte des Nations Unies et les interventions dans des conflits internes qui ne constituent pas nécessairement une menace pour la paix dans la région. Il faut également que la Cinquième Commission discute en profondeur non seulement de l'augmentation des contributions et des retards de paiement, mais aussi de la forme dans laquelle ces opérations sont planifiées, conduites et financées.

Il est évident que la réforme des Nations Unies souhaitée par le Secrétaire Général impliquera des changements importants. Nous ne pouvons pas nous cantonner à des idées et à des structures obsolètes. Mais ces changements doivent s'opérer de manière formelle et non pas seulement conformément aux initiatives de ceux qui détiennent le pouvoir d'agir au nom d'une majorité qui n'est peut-être pas d'accord.

De même, nous devons trouver un compromis pour modifier la composition du Conseil de sécurité en l'adaptant aux exigences du monde d'aujourd'hui. Panama a, par le passé, soutenu qu'il est temps d'en revenir à l'esprit de la Charte, qui impose aux membres du Conseil d'agir au nom des intérêts de la communauté internationale et non en fonction de leurs seuls intérêts stratégiques, politiques ou militaires. Le Panama soutient les initiatives tendant à réduire l'utilisation du droit de véto. De même, toute réforme de la Charte doit s'inspirer des principes de démocratie et de représentation géographiquement équitable. Son processus d'approbation et de ratification devra faire l'objet du plus grand consensus possible. Panama est favorable au souhait d'augmenter le nombre de membres permanents et non permanents du Conseil de sécurité. Il est, enfin, indispensable que certains Etats Membres cessent d'utiliser les retards de paiement comme un instrument de pression pour atteindre des objectifs particuliers.

M. JULES RATTANKOEMAR AJODHIA, Vice-Président de la République du Suriname : Le Gouvernement et le peuple de Suriname réaffirment leur engagement aux valeurs et aux principes inscrits dans la Charte des Nations Unies. La double présidence du Sommet du millénaire est un reflet symbolique de la prise de conscience que le succès du Sommet à définir le rôle des Nations Unies au XXIe siècle dépendra largement de la capacité du Nord et du Sud à atteindre un consensus dans la formulation du rôle futur de l'Organisation, et de leur accord sur la manière de rendre les Nations Unies plus efficaces, aux mains des peuples du monde et au service des pauvres. Le Gouvernement du Suriname a déjà, en application des recommandations du Secrétaire général, donné la priorité à la réalisation des objectifs en matière d'éducation, de santé publique, de réduction de la pauvreté, dans les délais fixés par le Rapport du millénaire.

Les problèmes financiers auxquels le système des Nations Unies est confronté affectent particulièrement le Programme des Nations Unies pour le développement. Par conséquent, nous appelons la communauté internationale à renverser cette tendance négative et à assurer les ressources dont le système des Nations Unies a besoin pour la réalisation de ses mandats tels que convenus par les Etats Membres.

Afin de renforcer le rôle des Nations Unies, il convient également de restaurer la place centrale de l'Assemblée générale en tant qu'unique organe représentatif de la communauté internationale. En outre, il est important de revitaliser le rôle du Conseil économique et social en matière de gouvernance mondiale des questions économiques, financières et de sécurité, et d'établir, à cette fin, une relation de travail plus étroite entre l'ECOSOC, le Conseil de sécurité, les institutions de Bretton Woods, l'Organisation mondiale du commerce et les autres organisations multilatérales. Mon Gouvernement attache une grande importance à l'élargissement du nombre des membres du Conseil de sécurité afin de renforcer la légitimité et l'efficacité de cet organe au XXIe siècle. Nous réitérons notre appel pour l'interdiction totale des armes nucléaires tel que promise lors de la Conférence d'examen 2000 du Traité de non-prolifération nucléaire. Nous demandons également aux Etats Membres de renforcer la mise en œuvre du Programme d'action de la Barbade et de veiller à la mise au point d'un indice de vulnérabilité pour les petits Etats insulaires en développement, sans le limiter aux Etats insulaires. La coopération internationale doit assurer l'équité, la transparence et surtout la participation de tous, afin de permettre aux voix des petits et des grands Etats de participer à la gestion des affaires du monde. En matière de protection des forêts tropicales, mon pays a déclaré 15 zones de divers écosystèmes zones protégées.

M. YASSER ARAFAT, Président de l’Autorité nationale palestinienne : Les Nations Unies sont contemporaines de la question de la Palestine et demeurent responsables dans la mise en oeuvre et l’obtention d’une solution juste. Le peuple de Palestine où qu’il se trouve se tourne vers la communauté internationale en lui lançant un appel collectif né de souffrances vieilles de 52 ans. Faisons de ce sommet le début de la fin de la plus importante et la plus difficile tragédie de réfugiés. Puisse-t-il être le début de la fin de l’oppression historique qu’a connu le peuple palestinien et marquer une nouvelle chance pour ce peuple et tous les peuples du Moyen-Orient. Nous, le peuple palestinien, avons pris une décision stratégique nous engageant dans le processus de paix, faisant des concessions significatives et difficiles dans le but d’atteindre un compromis acceptable pour les deux parties. Nous avons accepté un Etat palestinien de moins d’un quart du territoire historique de la Palestine, nous avons accepté de partager Jerusalem tout en restant attachés à notre droit national sur Jerusalem Est, capitale de notre Etat et hôte de nos sites sacrés. Nous devons faire de notre mieux au cours du peu de temps qui nous reste pour parvenir à un règlement final entre la Palestine et Israël, et nous invitons le Gouvernement israëlien à faire de même.

Les parties participant au processus de paix se sont mises d’accord pour obtenir un règlement final au plus tard le 13 septembre de cette année. La période intérimaire de cinq ans a déjà expiré le 4 mai 1999, et les dirigeants internationaux nous ont demandé de reporter toute décision relative à la déclaration d’un Etat après les élections israéliennes. Ces faits nous ont obligé à prendre certaines mesures pour sauvegarder le droit de notre peuple. En même temps, certains de nos amis ont considéré que pour atteindre un règlement final, il faut offrir une chance supplémentaire au processus de paix. Le Conseil central de la Palestine se prononcera sur cette question dans les jours à venir. Nous coopèrerons avec les Nations Unies et les autres parties participant à cette 55e session de l’Assemblée générale.

M. FAROUK AL-SHARA, Ministre des affaires étrangères de la République arabe syrienne : Les guerres du siècle passé ont heureusement été accompagnées de grands progrès dans les domaines de la science, des technologies et des télécommunications. La question qui se pose aujourd'hui est de savoir comment dissocier les moyens de destruction et les outils de développement pour que les progrès techniques enrichissent la vie matérielle et spirituelle des peuples et ne soient plus la cause de leur destruction. Un autre défi à relever est celui de la mondialisation que l'on ne peut pas ignorer au risque de voir ses aspects négatifs se propager dans divers aspects de notre vie.

Par ailleurs, le Sommet du millénaire devrait se pencher sur deux questions sérieuses. La première a trait à toute occupation étrangère, au retour des réfugiés dans leur foyer et au rejet de tout prétexte de sécurité nationale. Pour cela, il faut mettre un terme à l'occupation israélienne du Golan syrien et de Jérusalem arabe. L'élimination des armes nucléaires est également une entreprise sérieuse pour que soit réalisée l'universalité du Traité de non-prolifération des armes nucléaires. A cet égard, il faudrait faire du Moyen-Orient une zone exempte d'armes de destruction massive et notamment des armes nucléaires.

M. FAICAL BIN ALI BIN FAISAL AL-SAID, Ministre du Patrimoine national et de la culture d'Oman : L'importance de ce Sommet se situe dans notre capacité de formuler un nouveau concept d'économie et de développement pour toutes les nations, fondé sur leurs expériences et leurs succès. Au seuil d'un nouveau millénaire, nous devrions tirer profit de l'expérience de plus d'un demi-siècle d'organisations internationales, dont le système des Nations Unies. Nous insistons sur la nécessité de réformer les économies des pays en développement, qui représentent la plus grande part du marché mondial et contiennent d'immenses ressources naturelles et matières premières. En outre, les économies développées devraient prendre des décisions drastiques pour parvenir à une meilleure croissance et à une économie mondiale plus juste et plus stable.

Dans ce contexte, les Nations Unies ont la lourde charge de créer les conditions économiques et sociales les plus appropriées pour la paix, la stabilité et la coexistence des nations. L'Oman réaffirme son soutien à la résolution adoptée par l'Assemblée générale visant à l'an prochain une année de dialogue entre les civilisations. Nous espérons que se poursuivront les efforts tendant à adopter un mécanisme efficace en vue d'un dialogue positif pour une coexistence pacifique marquée par la tolérance et le pardon. En ce sens, nous renouvelons notre appel à la communauté internationale et en particulier aux deux gardiens de la paix et à l'Union européenne, afin qu'ils fournissent leur aide à toutes les parties et les guident dans la bonne voie, afin de garantir une paix durable aux générations futures. Nous saluons la réponse apportée par Israël à la volonté internationale en procédant au retrait de ses troupes du Sud-Liban. Ce geste est un pas dans la bonne direction. Nous espérons que le Gouvernement israélien suivra la même voie avec les Palestiniens et la Syrie,

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