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NEPAD : Faire des meilleures pratiques individuelles une norme
Par K. Y. Amoako

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Le Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) est l'initiative la plus importante de ces quarante dernières années en matière de développement pour l'Afrique. Pourquoi ? Parce qu'il fournit un leadership qui en assure la propriété. Et cette propriété change les règles sur lesquelles les partenariats sont fondés en dehors du continent. C'est, avant tout, un cadre qui permet d'instaurer un nouveau partenariat entre les dirigeants africains et le peuple africain dont l'objectif principal est l'engagement des dirigeants africains à créer un environnement favorable au développement économique.

Ils assument en commun la responsabilité de promouvoir et de protéger la démocratie et les droits de l'homme, ainsi que le rôle des femmes africaines dans le développement social et économique. Ils s'engagent également à restaurer et à maintenir la stabilité macroéconomique et à renforcer la capacité des États à instaurer des cadres juridiques, à faire respecter la loi, à maintenir l'ordre et à renforcer les mécanismes afin de rétablir la paix et la sécurité.

Avec le NEPAD, les dirigeants africains établissent leur propre ordre du jour du renouveau du continent, un ordre du jour fondé sur les priorités nationales et régionales ainsi que sur les plans de développement mis au point au moyen d'un processus de démocratie directe et participative.

Comme le montre la recherche, le processus du développement a plus de chances de réussir si les Africains contrôlent et dirigent le programme, parce que cela affecte directement son acceptation et sa mise en ouvre. Pour ce faire, il faut que les pays aient la capacité de planifier, de gérer et d'agir. Alors que les Africains prendront en main les programmes de développement, les conditions dictées par les bailleurs de fonds seront remplacées par un système d'autosurveillance ainsi que par un mécanisme d'examen par des pairs. Cela signifie que les bailleurs de fonds devront accepter de coordonner leur aide et les approches politiques avec les ordres du jour africains et réorienter leur assistance technique en vue de renforcer la capacité à long terme.

Il est de plus en plus nécessaire de renforcer les partenariats entre les dirigeants africains et leurs sociétés, et entre tous les États de la région, afin de répondre efficacement aux défis de développement de la région. Il est donc d'une importance capitale que le NEPAD soit plus qu'un processus vertical ou horizontal au niveau national ou bien un processus où seuls quelques pays vont de l'avant au niveau régional.

Le NEPAD doit être pour tous. Son succès dépend de la participation de tous les Africains. Or, ce n'est malheureusement pas encore le cas et les malentendus ainsi que l'incompréhension persistent, spécialement chez certains acteurs de la société civile.

Il est donc clair qu'il faut clarifier certains aspects de cette initiative pour qu'elle soit mieux comprise afin de promouvoir un sentiment de participation et de propriété parmi les parties concernées. L'Afrique ne peut assurer une croissance durable sans modifier sa relation avec la communauté internationale — un nouveau partenariat fondé sur une responsabilité commune en vue d'atteindre les objectifs de développement fixés.

Le mécanisme d'examen par des pairs est une part essentielle de cette responsabilité. Un autre changement notable concerne l'abandon des projets fragmentés pilotés par les bailleurs de fonds au profit d'un soutien à long terme aux programmes dirigés par les Africains et d'un partenariat fondé sur le dialogue et la recherche d'un consensus. La nécessité d'adapter les modalités du partenariat à la diversité des conditions est au cour du NEPAD. C'est pourquoi, différentes formes d'aide au développement devraient être offertes aux trois groupes de pays suivants:

Les pays possédant des stratégies de développement bien articulées et la capacité de les mettre en ouvre. Ils s'engageraient à soutenir les politiques macroéconomiques afin de réduire la pauvreté par le développement de la croissance et à instaurer des systèmes et des processus transparents qui leur permettraient de bénéficier de l'aide budgétaire directe, en remplaçant les conditions par un processus de surveillance tel que celui de l'examen par des pairs.

Les pays faisant face à une insuffisance de capacités. Ils pourraient bénéficier d'un soutien au projet, et avec la mise en place d'un programme solide à moyen terme, ils pourraient également bénéficier de programmes d'ajustement dans les industries.

Les pays sortant de conflits ou victimes de l'effondrement de l'État. Pour ces pays qui doivent remettre sur pied leurs institutions économiques et politiques ainsi que leurs infrastructures, certains types d'assistance, tels que les crédits de reconstruction, les forfaits d'assistance technique et la création de projets autonomes dans des zones ciblées, pourraient être adéquats.

L'idée n'est pas de classifier les pays selon des catégories définies mais d'offrir des points de repère pour différencier l'aide des donateurs et encourager les pays à mettre en place des systèmes et des processus qui leur permettraient d'améliorer les partenariats. Comment passer des principes définis dans le document du NEPAD à des actions qui améliorent les conditions de vie des populations africaines ? Il faut, en en premier lieu, mobiliser les ressources nationales, publiques et privées, physiques et humaines. Ces capacités existent mais elles ne sont pas utilisées ou le sont inefficacement. Il faut donc les renforcer.

Le moment est venu de passer de la vision à l'action. Cela est possible de diverses manières : premièrement, en ancrant le NEPAD sur les bases d'une analyse rigoureuse et en inscrivant ses objectifs dans les programmes nationaux. Deuxièmement, en encourageant la participation des parlements et des acteurs de la société civile aux stratégies nationales de développement. Troisièmement, en continuant de créer des projets sous-régionaux, spécialement pour les infrastructures. Quatrièmement, en mettant en ouvre le mécanisme d'examen par des pairs.

Aller de l'avant nécessitera naturellement un leadership solide et une volonté politique considérable, engageant toutes les parties intéressées et tous les citoyens dans le processus de développement. Il faudra renforcer les politiques sous-régionales, régionales et également les politiques internationales afin d'atteindre les objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Pour cela, des politiques économiques solides sont nécessaires, visant à mobiliser le potentiel du secteur privé afin de réduire la pauvreté, renforcer les capacités des États à mieux s'intégrer dans l'économie mondiale, mettre en ouvre le mécanisme d'examen des pairs et transformer nos partenariats avec les bailleurs de fonds par le biais d'une responsabilité partagée.

Trois domaines importants doivent être examinés au niveau national. Le premier concerne la formulation de politiques saines et la gestion des dépenses publiques dans le cadre de la réduction de la pauvreté, qui est au cour des OMD. Ces stratégies doivent être intégrées aux objectifs macroéconomiques des programmes de développement, aux systèmes de gestion des dépenses publiques renforcés pour assurer une allocation des ressources efficace et à de meilleurs systèmes de surveillance et d'évaluation des progrès. Il faut veiller à assurer une plus grande cohésion et une plus grande convergence politique. Des économies solides et une bonne gouvernance du monde des entreprises, ainsi que le financement des moyens d'exploitation et la création de partenariats, sont également cruciaux pour promouvoir le rôle du secteur privé, avec un mélange adéquat de partenariats publics et privés, spécialement dans les services sociaux.

Le deuxième a trait à l'intégration aux marchés mondiaux. Les résultats obtenus à Doha ont été mitigés mais les progrès accomplis ont été plus importants que lors des tables rondes précédentes. Pour aller de l'avant, nos partenaires internationaux doivent retirer sans tarder toutes les barrières commerciales, particulièrement les subventions agricoles allouées par l'Organisation de coopération et de développement économiques, les crêtes tarifaires et les nombreuses barrières non tarifaires. La franchise de droits, l'accès aux produits en provenance des pays africains, non soumis à des quotas, sont nécessaires ainsi que la simplification et l'harmonisation des règles existantes, afin que ces pays puissent bénéficier des opportunités de marchés offertes. Il faut également améliorer la représentation africaine dans les pourparlers sur le commerce mondial.

Par ailleurs, les pays africains doivent intensifier leurs efforts pour améliorer l'accès au marché et au commerce à l'intérieur du continent, ouvrir leurs marchés aux autres pays africains en modifiant leur politique tarifaire, en simplifiant les procédures douanières et en améliorant les infrastructures. La promotion de la coopération internationale, la rationalisation et le renforcement des communautés économiques régionales sont également d'une importance particulière. Les pays africains doivent intégrer le commerce aux stratégies du développement national et mettre en ouvre les réformes internationales qui peuvent stimuler l'offre. Le renforcement des capacités nationales à prendre part aux négociations commerciales multilatérales représente également un domaine d'intervention important. Le NEPAD fournit un cadre permettant de développer des objectifs communs, ce qui permettra à l'Afrique d'avoir un plus grand pouvoir de négociation lors des réunions de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Le troisième concerne la question de la responsabilité mutuelle. Il suffit de dire qu'une fois que les systèmes et le processus d'examen des pairs seront mis en place en Afrique, ses partenaires internationaux devront tenir compte des réformes.

Le NEPAD envisage de nouveaux partenariats soutenus par des stratégies de développement établies par l'Afrique. Pour ce faire, un engagement mutuel vis-à-vis des objectifs de développement communs sera nécessaire. Les nouvelles relations avec les partenaires de développement seront articulées autour de la responsabilité mutuelle. Pour les Africains, l'engagement à appliquer des processus de surveillance et d'examen des pairs est un élément essentiel de la responsabilité. Pour les partenaires, l'engagement essentiel consiste à assurer que toutes les politiques ayant un impact sur les perspectives du développement africain, dont celles concernant l'aide publique au développement, l'accès au marché et la dette, permettent d'atteindre les objectifs du millénaire pour le développement. Cela dépend principalement de la qualité et de l'importance du soutien ainsi que de la cohérence des politiques relatives au commerce et à l'aide.

Il est cependant clair que l'initiative d'allégement de la dette pour les pays surendettés n'est pas suffisamment couronnée de succès. Seulement six pays africains ont atteint les objectifs fixés, bien que, pour certains d'entre eux, la dette soit un fardeau très lourd. Plusieurs propositions sont faites pour aller au-delà de cette initiative afin de réduire davantage la dette de ces pays. Ce qu'il faut donc à ce stade, c'est viser au-delà de cet objectif, l'inscrire dans le cadre des OMD et libérer des ressources pour le développement. Mais il est également nécessaire d'alléger la dette des autres pays qui ne sont pas surendettés.

L'ONU a reconnu la nécessité d'améliorer la cohérence et la coordination de ses travaux sur l'Afrique, le NEPAD étant le cadre par lequel elle devait orienter ses efforts pour le développement de l'Afrique. De plus, il a été décidé que le forum de discussions sur ces questions sera la consultation régionale annuelle des institutions de l'ONU travaillant sur l'Afrique, organisée par la Commission économique pour l'Afrique. Le défi auquel les organismes de l'ONU font face est de trouver comment améliorer la cohérence et la coordination tout en respectant les divers mandats des organisations dont un grand nombre ont des programmes en cours aux niveaux national et régional. Cela demande un nouveau partenariat véritablement efficace parmi les divers organismes du système de l'ONU fonctionnant en Afrique, afin de mieux servir le continent.

Nombre de ces principes et de ces processus soulignant l'initiative du NEPAD sont déjà testés sur une base individuelle par plusieurs États africains et partenaires internationaux. Ce qui est différent, c'est que le NEPAD vise à ce que l'ensemble soit supérieur à la somme de ses parties, à ce que les meilleures pratiques deviennent des normes, et cherche à créer un soutien international pour le développement de l'Afrique.

Il est crucial que nos efforts soit centrés sur l'accomplissement d'un certain nombre de progrès rapides liés au NEPAD afin de pouvoir capitaliser sur l'élan initial en faveur du nouveau partenariat et le vaste soutien dont il bénéficie.

La Biographie
K.Y. Amoako est secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique et membre du conseil d'administration de Development Gateway Foundation, dont il dirige le comité de rédaction. Il a été membre de la Commission de l'OMS sur les politiques macroéconomiques et la santé et a assumé pendant plusieurs années des fonctions à la Banque mondiale.
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