9500e séance – matin
CS/15521

RDC: le Conseil de sécurité débat du retrait de la MONUSCO à neuf jours des élections et dans un contexte de tensions accrues avec le Rwanda

La Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo (RDC), Mme Bintou Keita, et une majorité de délégations ont plaidé ce matin, devant le Conseil de sécurité, pour un retrait responsable de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MONUSCO) dans un contexte difficile, marqué notamment par l’exacerbation des tensions avec le Rwanda voisin.  Les élections qui doivent se tenir dans neuf jours en RDC ont également figuré au cœur des interventions.

« Nous sommes aujourd’hui à un tournant important des relations entre l’ONU et la RDC, mais également à un moment important pour le pays lui-même », a d’emblée déclaré Mme Keita, qui est également Cheffe de la MONUSCO. « La RDC est en pleine période électorale, à neuf jours d’un scrutin présidentiel, législatif national et provincial, et également local. »  Si les préparatifs électoraux sont en bonne voie, elle a souligné certains défis persistants, notamment la propagation de discours de haine.

Mme Keita a fait état de la crise sécuritaire et humanitaire « extrêmement éprouvante » pour les populations de l’est du pays, notamment les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu.  « La situation s’est détériorée dans le sud de la province du Nord-Kivu, notamment après la reprise des hostilités entre les Forces armées congolaises et le M23 depuis le mois d’octobre, et l’offensive du M23 dans le territoire de Masisi, à la suite du début du retrait des troupes de la Force de la Communauté de l’Afrique de l’Est. »

Les tensions entre la RDC et le Rwanda restent également très vives et le risque d’escalade militaire entre les deux pays demeure, a-t-elle averti.  À cette aune, Mme Keita a félicité le Gouvernement d’avoir officiellement interdit à ses forces armées toutes relations avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Elle s’est en revanche dite préoccupée par la montée récente de tensions entre le Rwanda et le Burundi, au lendemain de l’engagement des forces burundaises contre le M23 au Masisi.

La haute fonctionnaire a rappelé que la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) se prépare au déploiement dans les semaines qui viennent d’une nouvelle force, la SAMIRDC, qui devrait être dotée d’un mandat offensif.  Si ces efforts régionaux sont louables, ils ne pourront atteindre leurs objectifs sans l’investissement soutenu du Gouvernement congolais dans les processus politiques de résolution des conflits à l’est du pays, a noté la Représentante spéciale.

C’est dans ce contexte « extrêmement difficile », selon l’expression du Brésil, que se déroule le processus de retrait de la MONUSCO.  Mme Keita a rappelé qu’un plan de désengagement conjoint a été transmis au Conseil le 23 novembre, ce dernier s’étant engagé à décider, d’ici à la fin de l’année, du retrait progressif de la Mission.  Mme Keita a indiqué que celle-ci se concentrera sur sa tâche de protection des civils, tout en se tenant prête à épauler les opérations des forces régionales.

« Le départ de la MONUSCO doit se faire de manière responsable, en évitant tout risque de violence supplémentaire », a appuyé le Brésil, qui a en outre souhaité que les forces de la SADC coopèrent avec la Mission.  Dans chaque province, le retrait de la MONUSCO doit être évalué en fonction de l’impact sur la protection des civils, ont appuyé les États-Unis.  La Suisse a de son côté salué la coopération entre la RDC et la Mission dans l’élaboration du plan de désengagement.

La Coordonnatrice nationale de Solidarité des femmes pour la paix et le développement intégral (SOFEPADI), Mme Sandrine Lusamba, s’est montrée plus critique, en déclarant que la société civile n’a eu que peu d’informations et s’interroge sur le contenu de ce plan.  Elle a dit craindre la détérioration de la protection des civils et des personnes déplacées.

Ce plan fait de la protection des civils une priorité, a pour sa part déclaré la France, tout en souhaitant que la transition ne crée pas de vide sécuritaire.  Elle a indiqué avoir proposé aux membres du Conseil un projet de résolution portant sur la mise en œuvre du plan de désengagement, qui prévoit le retrait de la Mission du Sud-Kivu d’ici au 30 avril prochain et l’élaboration d’un nouveau rapport conjoint à l’issue de cette première phase.  « Nous pouvons faire du retrait de la MONUSCO un succès », a assuré la délégation française.

De la relation entre la RDC et la MONUSCO, l’histoire retiendra que la Mission a accompli des « exploits » dans l’exécution de son mandat, a souligné le représentant congolais.  Pour apaiser les tensions tout en consolidant les progrès réalisés, le retrait progressif de la MONUSCO est une étape nécessaire, a-t-il appuyé, justifiant ainsi la demande de son gouvernement de ramener le début du retrait de la MONUSCO de décembre 2024 à décembre 2023.

« Mon pays a fait preuve de flexibilité en acceptant une année de plus pour appliquer le plan de désengagement », a-t-il fait remarquer.  Sur le plan sécuritaire, la priorité doit être la fin de l’agression rwandaise et le retrait du Nord-Kivu, l’éradication des groupes armés « terroristes », dont le M23, le retour des populations déplacées et le rétablissement de l’autorité de l’État dans les territoires occupés par le M23, a détaillé le délégué.  « Le peuple congolais est soumis depuis trois décennies à une guerre d’agression imposée par un voisin aux visées expansionnistes », a-t-il affirmé.

Le Gouvernement congolais et sa « coalition de milices armées illégales » ont violé le cessez-le-feu dans l’est du pays, a quant à lui accusé le Rwanda.  « Le départ prématuré de la MONUSCO, à la demande de Kinshasa, met à mal les efforts régionaux de paix. »  La délégation a aussi déploré que la Mission reste muette sur la persécution des communautés tutsies par l’État congolais, conséquence directe de « l’idéologie génocidaire » dirigée contre les Tutsis congolais.  « Les solutions aux défis sécuritaires en RDC ne peuvent être trouvées dans des jeux de reproches », a-t-elle ajouté.

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO (S/2023/93)

Déclarations

« Nous sommes aujourd’hui à un tournant important des relations entre l’ONU et la RDC, mais également à un moment important pour le pays lui-même », a déclaré Mme BINTOU KEITA, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). Elle a rappelé que la RDC est en pleine période électorale, à neuf jours de scrutins présidentiel, législatif, national et provincial, et également local.  Elle demande par ailleurs un retrait accéléré, ordonné et responsable de la MONUSCO, pour lequel un rapport spécial du Secrétaire général et un plan de désengagement conjoint ont été transmis au Conseil de sécurité avec ses recommandations.  La Représentante spéciale a indiqué que l’est du pays, et notamment les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, fait par ailleurs toujours face à une crise sécuritaire et humanitaire extrêmement éprouvante pour ses populations et à des tensions régionales persistantes.  « L’ensemble de ces facteurs doit être pris en considération pour redéfinir le partenariat qui nous unit », a-t-elle estimé.

La haute fonctionnaire a indiqué que la situation ne cesse de se détériorer dans le Nord-Kivu.  Les tensions régionales entre la RDC et le Rwanda se sont encore exacerbées, aggravant le risque d’une confrontation militaire directe qui pourrait entraîner le Burundi.  Selon la Commission électorale nationale indépendante, les préparatifs des élections sont en bonne voie, a-t-elle noté, en saluant la validation des 26 candidats à l’élection présidentielle, dont deux femmes.  Elle a aussi mentionné les préoccupations en ce qui concerne les listes électorales, qui n’ont pas été publiées dans tous les bureaux de vote avant le 5 décembre, comme l’exigeait la loi.  La qualité des cartes électorales et l’accréditation des missions d’observation électorales sont d’autres défis qui pourraient alimenter la défiance, a-t-elle dit, en exhortant la Commission à y remédier.  Elle a regretté la désinformation et la propagation des discours de haine, déplorant également que les populations de certains territoires, notamment Masisi et Rutshuru, soit plus de 1,5 million de Congolais, ne pourront pas voter en décembre.

« La situation sécuritaire, humanitaire et des droits humains s’est malheureusement détériorée dans le sud de la province du Nord-Kivu, notamment à la suite de la reprise des hostilités entre les Forces armées congolaises et le M23 depuis le mois d’octobre, et l’offensive du M23 dans le territoire de Masisi, à la suite du début du retrait des troupes de la Force de la Communauté de l’Afrique de l’Est », a relevé Mme Keita.  Les tensions entre la RDC et le Rwanda restent également très vives et le risque d’escalade militaire entre les deux pays demeure important malgré les efforts régionaux et internationaux pour atténuer les tensions, a-t-elle dit.  La Représentante spéciale a félicité le Gouvernement d’avoir officiellement interdit toutes relations des Forces armées de la RDC (FARDC) avec les Forces démocratiques de libération de Rwanda (FDLR).  « L’expansion de l’opération conjointe Shujaa, entre les forces armées congolaises et ougandaises dans le nord de la province a mis sous pression le groupe armé ADF, sans pouvoir empêcher pour autant de nouvelles attaques contre les populations civiles. »  Elle a noté qu’en Ituri, l’insécurité est principalement alimentée par les groupes armés CODECO, Zaïre, FRPI et FPIC ainsi que les ADF, Djugu et Irumu restant les principaux foyers d’insécurité.  Les opérations coordonnées des FARDC et de la MONUSCO ont pu repousser plusieurs attaques contre les civils, mais le manque de ressources pour assurer l’autorité de l’État dans la province reste criant, a-t-elle déploré.

Pour protéger les civils, la MONUSCO et les FARDC ont mené six opérations conjointes en Ituri et au Nord-Kivu lors du précédent trimestre, a-t-elle poursuivi. Elle a indiqué que l’opération Springbok a notamment été lancée en novembre pour sécuriser les villes de Goma et de Sake et constitue jusqu’à présent un moyen de dissuasion efficace contre les tentatives d’avancées du M23 vers ces deux villes.  « Au Sud-Kivu, même si les incidents violents ont diminué ces derniers mois, des poches d’insécurité persistent, notamment dans les territoires de Kalehe, Mwenga, Shabunda, Uvira et Fizi. »  Elle s’est dite préoccupée par la montée récente de tensions entre le Rwanda et le Burundi, à la suite de l’engagement des forces burundaises contre le M23 au Masisi, avant d’appeler à l’apaisement pour éviter toute escalade.  « À la demande du Gouvernement congolais, le mandat de la force régionale de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) n’a pas été prolongé au-delà du 8 décembre et celle-ci a entamé son retrait. »  La Représentante spéciale a précisé que plus de 500 soldats du Kenya, du Soudan du Sud et de l’Ouganda ont déjà quitté la RDC.  En parallèle, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) se prépare au déploiement dans les semaines à venir d’une nouvelle force, la SAMIRDC, qui devrait être dotée d’un mandat offensif, a-t-elle déclaré.  Si ces efforts régionaux sont louables, ils ne pourront atteindre leurs objectifs sans l’investissement continu et soutenu du Gouvernement congolais dans les processus politiques régionaux, nationaux et locaux de résolution des conflits à l’est du pays, a tranché la Représentante spéciale.  « Cet investissement doit aller de pair avec la réforme du secteur de la sécurité congolais et la mise en œuvre de son programme de désarmement et de réinsertion communautaire, le P-DDRCS. »

Sur le plan humanitaire, elle a indiqué que le pays compte plus de 6,3 millions de personnes déplacées, dont 5,5 millions dans les trois provinces orientales du pays.  Le plan de réponse humanitaire n’est financé qu’à hauteur de 37,5%, a-t-elle précisé.

Enfin, la Représentante spéciale a rappelé que le plan de désengagement conjoint a été présenté au Conseil le 23 novembre dernier.  Pendant toute la durée du processus, la Mission se concentrera sur ses tâches prioritaires, telles que la protection des civils et le programme de désarmement.  Dépendant d’une autorisation de ce Conseil, la Mission se tient prête à épauler les opérations des forces régionales, dans le plein respect de la politique de diligence en matière de droits humains, a-t-elle dit.  « Si les défis en RDC sont nombreux et complexes, ils sont loin d’être insurmontables. »  La haute fonctionnaire a estimé que la déclaration présidentielle du 16 octobre a permis de renouer un partenariat constructif entre la Mission et le Gouvernement.  Le renouvellement du mandat de la MONUSCO doit nous permettre de poursuivre cet effort conjoint, dans un esprit de respect mutuel et de confiance, a conclu la Représentante.

Mme SANDRINE LUSAMBA, Coordonnatrice nationale de Solidarité des femmes pour la paix et le développement intégral (SOFEPADI), une organisation congolaise qui milite pour la défense et la promotion des droits des femmes, a fait état d’une dégradation de la situation sécuritaire en République démocratique du Congo (RDC) depuis son dernier briefing au Conseil de sécurité en 2021, et cela malgré la présence des Casques bleus de la MONUSCO et d’autres forces militaires nationales et étrangères dans le pays.

À la croisée des chemins, la RDC n’accueillera bientôt plus d’opération de maintien de la paix de l’ONU, a-t-elle constaté, mais hormis un communiqué annonçant que le Gouvernement de la RDC et la MONUSCO avaient convenu d’un plan de désengagement de la Mission, « la société civile n’a eu que peu d’informations et s’interroge sur le contenu de ce plan ».  Le retrait de la MONUSCO pousse les organisations de la société civile, y compris celles dirigées par des femmes, à considérer à la fois les opportunités du transfert de certaines tâches de la MONUSCO et les risques que présente un tel retrait.  S’agissant des opportunités, Mme Lusamba a estimé que certaines activités des sections des affaires civiles, du genre et de l’enfance de la MONUSCO pourraient être transférées à des ONG locales.  Ce transfert se ferait en fonction des compétences, de l’expertise et des domaines d’intervention des ONG, celles-ci devant recevoir les ressources et le soutien nécessaires pour bien assumer ces responsabilités de manière durable.

Quant aux risques liés au retrait de la MONUSCO, la représentante de la société civile a dit craindre la détérioration de la protection des civils et des personnes déplacées, notamment dans les zones non accessibles aux forces armées et à la police, ainsi que le manque de suivi sur les droits de l’homme par le Bureau conjoint pour les droits de l’homme.  Elle s’est également inquiétée d’un impact négatif sur le système d’alerte précoce et sur la collecte de données vérifiées sur la violence sexiste que le système des Nations Unies utilise pour rendre compte des droits humains en RDC et, plus généralement, pour surveiller les violations des droits des femmes.  En outre, les défenseurs des droits humains et les artisans de la paix, en particulier les femmes, risquent d’être confrontés à un harcèlement accru et à d’autres menaces de protection.  Mme Lusamba a aussi appréhendé une augmentation du chômage, car une grande partie de la main d’œuvre civile de la MONUSCO issue de la communauté locale va perdre son emploi.  Enfin, « la fermeture de la radio OKAPI signifie que la société civile n’aura plus accès à cette plateforme communautaire indépendante incontournable pour faire passer ses messages gratuitement et sans distinction », a-t-elle regretté.

Au vu de ces observations, Mme Lusamba a formulé une série de recommandations.  Premièrement, les femmes doivent être placées au centre du travail de la MONUSCO et de l’équipe de pays des Nations Unies.  Elles doivent diriger la prise de décision dans tous les domaines, y compris l’action humanitaire et l’attribution des ressources afin que la réponse se concentre sur les groupes les plus marginalisés et à risque.  Deuxièmement, la MONUSCO et l’équipe de pays devraient travailler avec les ONG locales et nationales pour développer des indicateurs spécifiques pour mesurer la protection et la promotion des droits humains des femmes, en particulier en ce qui concerne la violence sexiste et les attaques contre les défenseures des droits humains, dont les droits sexuels et reproductifs.  Troisièmement, le Conseil de sécurité devrait exiger que le Gouvernement et tous les autres acteurs intègrent une approche fondée sur les droits de l’homme et centrée sur les survivants tout au long de l’action humanitaire, et qu’ils fassent en sorte que les efforts visant à gérer la crise climatique et les ressources naturelles soient sensibles au genre.  « La communauté internationale des donateurs ne doit pas laisser tomber la population de la RDC », a conclu l’intervenante.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que la communauté internationale doit continuer d’accompagner la RDC dans l’organisation d’élections libres, inclusives et transparentes.  Il a pris note des avancées du processus électoral et des efforts déployés par la Commission électorale nationale indépendante pour organiser des élections crédibles dans les délais prévus.  Pour y parvenir, le représentant a encouragé les parties prenantes à s’abstenir de toute violence et de discours de haine.  Alors que les tensions se poursuivent dans l’est du pays, il a demandé au Rwanda de cesser son soutien au M23 et à la présence de soldats sur le territoire congolais.  Les Forces armées congolaises doivent quant à elles cesser toute collaboration avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  « Toute approche militaire ne fera que contribuer à l’escalade », a prévenu le délégué, avant d’appeler à la reprise des processus de Luanda et de Nairobi après les élections.

Poursuivant, il a salué les efforts consentis par les autorités congolaises et la MONUSCO pour finaliser le plan de désengagement conjoint de la Mission.  En octobre, a-t-il rappelé, le Conseil s’est engagé à décider, d’ici à la fin de l’année, du retrait progressif de la MONUSCO. Il s’est félicité de « l’esprit de responsabilité » de ce plan, qui fait de la protection des civils une priorité, tout en souhaitant que la transition ne crée pas de vide sécuritaire. Dans cette optique, la France a proposé aux membres du Conseil de sécurité une résolution portant sur la mise en œuvre du plan de désengagement, qui prévoit le retrait de la Mission du Sud-Kivu d’ici au 30 avril prochain et l’élaboration d’un nouveau rapport conjoint à l’issue de cette première phase.  « Nous pouvons faire du retrait de la MONUSCO un succès », a-t-il assuré.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana), qui parlait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a pris note du lancement de la campagne électorale, le 19 novembre 2023, en vue de la tenue d’élections générales le 20 décembre en RDC.  Avec 44 millions d’électeurs, elle a salué l’engagement du Gouvernement à organiser les élections dans un contexte sécuritaire particulièrement difficile. Les A3 encouragent la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à prendre des mesures de confiance et à maintenir le dialogue avec tous les acteurs politiques afin que les résultats de ces élections soient acceptés par tous, notant que le soutien apporté par la MONUSCO à cet égard est très apprécié.  En outre, les A3 ont appelé les autorités congolaises à ne ménager aucun effort pour faire en sorte que le bon voisinage et la stabilité régionale restent également une priorité avant, pendant et après les élections.  Sur le plan régional, la déléguée a réitéré le soutien des A3 à un règlement politique de la crise sécuritaire qui affecte l’est de la RDC, réaffirmant leur soutien aux processus régionaux qui constituent des solutions politiques africaines crédibles pour mettre fin à la crise, en citant notamment les actions prioritaires des accords de Nairobi et de Luanda en vue de la cessation des hostilités, du retrait immédiat du M23 des zones occupées, du rapatriement de tous les groupes armés étrangers et des étrangers et du respect par les groupes armés locaux du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation.  Les A3, a poursuivi la déléguée, ont pris note de la signature, le 21 novembre 2023, du plan et du calendrier de désengagement entre la MONUSCO et la RDC ainsi que de la demande de Kinshasa de refléter ce plan dans la résolution sur le renouvellement du mandat de la MONUSCO en cours de négociation.  À ce sujet, elle a encouragé la RDC et la MONUSCO à continuer à promouvoir un dialogue constructif afin d’assurer un retrait concerté, ordonné et responsable de la Mission.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) s’est félicité du plan de retrait progressif de la MONUSCO et de l’engagement du Gouvernement congolais à assurer la protection des civils et à renforcer l’autorité de l’État dans les provinces où est actuellement déployée la Mission de l’ONU.  Il a insisté sur le fait que, dans chaque province, le retrait de la MONUSCO doit être évalué en fonction de l’impact sur la protection des civils et de la situation humanitaire.  De même, a-t-il ajouté, aucun vide sécuritaire ne peut être accepté.  Le cas échéant, une pause devra être envisagée avant de passer aux phases ultérieures.  À cet égard, le représentant a salué l’engagement pris pour que des évaluations de la mise en œuvre du plan aient lieu tous les trois mois, souhaitant qu’elles soient communiquées au Conseil de sécurité.  Il a cependant estimé que, comme tout désengagement de mission, le retrait de la MONUSCO sera difficile, la RDC étant confrontée à des problèmes financiers sur fond de besoins humanitaires et de développement en hausse. Rappelant que l’Agence des États-Unis pour le développement international et le Département d’État ont alloué plus de 956 millions de dollars à l’assistance bilatérale pour 2022, sans compter le soutien apporté à la MONUSCO, il a demandé à la communauté internationale de mobiliser des ressources supplémentaires pour renforcer l’action des agences, fonds et programmes de l’ONU en vue du départ de la Mission.

Pour le représentant, le retrait de la MONUSCO exige aussi de nouvelles visions sécuritaires face à la crise que connaît la RDC depuis 30 ans.  Selon lui, le déploiement de forces régionales doit s’accompagner d’un engagement renouvelé dans les processus politiques.  Se disant alarmé des tensions grandissantes entre la RDC et le Rwanda, il a demandé à ce pays de cesser son soutien au M23 et de se retirer du territoire congolais.  Il a aussi appelé tous les acteurs régionaux à réaffirmer leur attachement aux processus de Nairobi et de Luanda, avant de se dire encouragé par les préparatifs du Gouvernement congolais visant à assurer la tenue d’élections libres et équitables le 20 décembre.  Dans ce contexte, il a exhorté les acteurs politiques à s’abstenir de tout discours de haine afin que tous les Congolais puissent voter en toute sécurité.  Enfin, après avoir rappelé les allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles au sein de la MONUSCO, il a souhaité que le personnel de l’ONU rende des comptes sur sa conduite et ses performances.

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire à l’est du pays et par les tensions accrues entre la RDC et le Rwanda.  Il a appelé toutes les parties au conflit, ainsi que les pays voisins, à se réengager en faveur des processus politiques, notamment les processus de Luanda et de Nairobi.  Le délégué a appelé tous les groupes armés à déposer leurs armes et à la cessation de tout appui extérieur auxdits groupes.  La transition de la MONUSCO se déroule dans un environnement extrêmement difficile, a reconnu le délégué.  Mentionnant le plan de désengagement agréé par l’ONU et la RDC, il a estimé que la priorité doit être donnée à un transfert raisonnable des tâches.  Le départ de la Mission doit se faire de manière responsable, en évitant tout risque de violence supplémentaire, a-t-il conclu.  « Alors que les forces de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) s’apprêtent à s’engager dans le Nord-Kivu, nous attendons d’elles qu’elles agissent en pleine coopération avec la MONUSCO. »

M. DAI BING (Chine) a reconnu que la RDC se trouve à la croisée des chemins, s’agissant du processus politique et de la sécurité.  Alors que les élections approchent à grands pas, il s’est félicité des efforts déployés par les autorités congolaises et la Commission électorale nationale indépendante en vue d’assurer la tenue d’un scrutin pacifique susceptible d’imprimer un nouvel élan à la stabilité à long terme du pays.  Selon lui, la communauté internationale doit pleinement respecter la souveraineté et l’appropriation nationale de ces élections, lesquelles relèvent des affaires internes de la RDC.  Le délégué a exprimé son appui aux opérations conjointes menées par la MONUSCO et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), et enjoint le M23 et les autres groupes armés à mettre un terme immédiat aux hostilités et à se retirer du territoire qu’ils occupent.

Considérant que la situation dans l’est du pays a une incidence sur la sécurité de l’ensemble de la région, le délégué a fait valoir que la communauté internationale se doit d’appuyer les processus de Nairobi et de Luanda.  Il a en outre exprimé son soutien aux organisations régionales et aux opérations de paix, en espérant que les pays de la région sauront renforcer leur coopération avec la RDC afin de préserver la sécurité régionale.  Enfin, le délégué s’est félicité de la signature du plan de désengagement et du programme de retrait progressif de la MONUSCO. La transition devra donc garantir le transfert de tâches au Gouvernement de la RDC afin de préserver la stabilité et la sécurité de la région.

M. TAKAYUKI IRIYA (Japon) s’est inquiété de l’aggravation de la situation sécuritaire dans les provinces de l’est de la RDC, soulignant les conséquences profondes et dévastatrices de la violation du cessez-le-feu sur les populations.  La nouvelle coalition de groupes armés qui se battent en appui aux Forces armées congolaises a aggravé les hostilités et déclenché des déplacements massifs de population, s’est-il alarmé.  Tous les groupes armés congolais et étrangers doivent rendre les armes sans conditions et participer au processus de démobilisation.

Au sujet de la stratégie de sortie de la MONUSCO, le représentant a estimé qu’un retrait graduel, responsable et durable exige une coopération étroite et constructive entre toutes les parties prenantes, sous la férule du pays hôte.  La protection des civils doit toujours être placée au centre des efforts et il est indispensable d’éviter tout vide sécuritaire sur le terrain, a-t-il poursuivi.  Par ailleurs, la protection du personnel, des installations et des équipements de la MONUSCO doit être assurée au cours du processus de retrait.  Le représentant s’est également inquiété du nombre élevé de violations des droits de l’homme, notamment de la violence sexuelle.  Quant aux élections à venir, il a estimé qu’elles sont l’occasion de gagner la confiance de la population et de renforcer l’unité.  Selon lui, renforcer la cohésion sociale est fondamental pour une stabilité durable, et des élections libres, justes, inclusives, pacifiques et transparentes sont plus nécessaires que jamais.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a constaté que la RDC se trouve à un moment critique marqué par la persistance de tensions avec le Rwanda, le risque d’élargissement du conflit, la poursuite des exactions de groupes armés, l’augmentation des besoins humanitaires et des violences à l’approche des élections.  C’est dans ce contexte que le Conseil de sécurité négocie le renouvellement du mandat de la MONUSCO, a-t-il observé, indiquant que son pays entend mettre l’accent sur la protection des enfants, alors que 2023 risque de devenir l’année la plus meurtrière pour les enfants depuis la création du mécanisme de surveillance et de notification en 2005.  À l’approche des élections, il a salué le travail effectué par la MONUSCO et l’UNICEF pour que les partis politiques signent une charte contre l’utilisation des enfants à des fins politiques et électorales, rappelant que la tolérance à l’égard des groupes armés mobilisés contre le M23 a conduit à une recrudescence du recrutement d’enfants.  Il a salué en particulier le travail effectué avec l’appui des autorités congolaises, qui a permis de ne plus recenser de tels cas de recrutement par les Forces armées congolaises entre 2021 et 2023.  Mettre en œuvre un retrait responsable de la MONUSCO, c’est protéger les plus vulnérables, a insisté le représentant, appelant à ce qu’une présence civile résiduelle soit maintenue dans les régions où les militaires partiront, afin de « laisser du temps au transfert des connaissances, à la formation et au renforcement des capacités ».  Se déclarant par ailleurs encouragé par la forte présence de candidates aux prochaines élections, il a souhaité que l’ONU consulte régulièrement les organisations de femmes de la société civile et veille à ce qu’une analyse complète de genre soit menée tout au long de la transition. « Nous devons comprendre et répondre à l’impact sur les femmes et les filles de toute reconfiguration de la présence de l’ONU », a-t-il dit, notant l’adoption d’une loi sur la protection et les réparations pour les victimes de violences sexuelles liées au conflit.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué la volonté du Gouvernement de la RDC de garantir un retrait responsable et échelonné de la MONUSCO.  Le Gouvernement devra assumer sa responsabilité de protection des civils, a dit le délégué, en l’exhortant à accélérer ses efforts en ce sens.  Il a souligné l’urgence d’un processus réussi, tant la violence s’intensifie dans le pays, notamment à l’est.  Il a appelé toutes les parties à s’engager en faveur d’un dialogue, en soulignant le risque d’une nouvelle escalade.  Les parties doivent s’engager en faveur des processus régionaux de Nairobi et de Luanda qui constituent la meilleure feuille de route en vue d’un pays en paix, a ajouté le délégué.  Enfin, il a appelé tous les pays de la région à s’acquitter de leur engagement en faveur de processus politiques revitalisés et à prendre les mesures concrètes en vue d’améliorer l’accès humanitaire et de réduire la violence.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a fait état d’un moment critique pour la RDC, une semaine avant la tenue des élections.  Elle a encouragé la MONUSCO et l’équipe de pays des Nations Unies à fournir le soutien nécessaire pour assurer le succès du processus électoral.  Alors que les attaques des groupes armés se poursuivent, notamment dans la région du Nord-Kivu, « la protection des civils doit rester une priorité absolue ». La représentante a condamné la violence croissante que connaît la région du fait de la violation du cessez-le-feu entre le M23 et l’armée congolaise.  Elle a appelé les autres groupes armés à déposer les armes et à s’engager sérieusement dans le processus de désarmement.  L’insécurité dans l’est du pays a en outre entraîné une augmentation significative des incidents de violence sexuelle depuis mars dernier, a dénoncé la représentante.  Afin d’assurer la sécurité et la stabilité de la région, il est à ses yeux essentiel que le dialogue entre la RDC et les acteurs régionaux se poursuive.  De même, la détérioration rapide de la situation humanitaire nécessite une réponse collaborative entre le Gouvernement congolais et la communauté internationale, des besoins immédiats à la planification à long terme. Enfin, elle s’est félicitée de la coopération entre la Représentante spéciale et le Gouvernement congolais afin d’élaborer un plan visant à accélérer progressivement le retrait de la MONUSCO.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a exprimé sa préoccupation au sujet des récentes violations du cessez-le-feu en RDC malgré l’accord conclu entre les forces de sécurité et le M23.  Elle a voulu souligner que le déplacement de population a atteint sept millions de personnes, ce qui est un chiffre colossal, et que la poursuite du conflit dans l’est du pays entraînera inévitablement une dégradation de la situation humanitaire.  La représentante a appelé tous les groupes armés à déposer les armes et à intégrer le processus de démobilisation, estimant que seule une solution politique permettra un cessez-le-feu global et une stabilisation durable de la situation.

Elle a jugé tout aussi indispensable de lancer des initiatives régionales dans ce contexte, se félicitant du prochain déploiement d’un contingent de développement de la Communauté de l’Afrique de l’Est dans l’est du pays.  Elle a également salué le rôle important joué par la MONUSCO, rappelant que son retrait doit tenir compte de l’évolution sur le terrain et être graduel et progressif.  Par ailleurs, la déléguée a appelé à enquêter sur les allégations de fautes graves commises par des Casques bleus, afin d’établir les responsabilités et de sanctionner leurs auteurs.  Il existe au sein de l’Organisation des mécanismes sur les atteintes à caractère sexuel et il faut se concentrer sur l’utilisation des outils existants, a-t-elle rappelé.

En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la Russie continuera de tout mettre en œuvre pour veiller au règlement de la crise en RDC, a assuré la représentante en conclusion.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a déclaré que le désengagement de la MONUSCO doit être responsable et échelonné.  La Suisse salue la collaboration entre les autorités congolaises et la Mission dans l’élaboration du plan de désengagement, a-t-elle dit, en reconnaissant l’appel de la RDC en faveur d’un retrait progressif de la Mission. « Ainsi, nous saluons la volonté du Gouvernement de garantir un retrait mené de manière responsable et échelonnée. »  Elle a souhaité que la priorité soit notamment donnée à la protection des civils. En vue du déploiement de forces régionales en RDC, il est essentiel que tout appui de la part de la MONUSCO soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme, a rappelé la déléguée.  Elle a appelé au renforcement des initiatives politiques pour mettre fin aux affrontements et consolider une paix durable.  « La tenue d’un dialogue sincère et approfondi, notamment entre la RDC et le Rwanda, est urgente pour mettre un terme aux cycles de violence. » Pour cela, tout soutien aux groupes armés, notamment au M23 et aux FDLR, doit cesser immédiatement, a tranché la déléguée.  Enfin, elle a regretté que les populations de certains territoires, notamment les territoires de Masisi et de Rutshuru, au Nord-Kivu, soient privées de la possibilité de participer au processus électoral.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a réitéré son appel à tous les groupes armés pour qu’ils déposent les armes et qu’ils s’engagent immédiatement dans les activités de désarmement.  Elle a appelé le Rwanda et la RDC à assurer la désescalade, dans le cadre du processus de Luanda, afin de briser le cycle de la méfiance et d’emprunter la voie de la paix en vue d’assurer la prospérité commune des pays de la région des Grands Lacs.  Bien qu’elle soit difficile, la voie de la réconciliation commence selon elle par la fin du soutien au M23 et le respect de l’intégrité territoriale de la RDC.  Pour sa part, la communauté internationale doit suivre de près le déroulement du scrutin à venir en RDC et montrer au peuple congolais qu’elle se tient à leur côté. La représentante a par ailleurs exprimé son appui au plan de désengagement ainsi qu’au retrait accéléré de la MONUSCO, tant qu’ils ne bénéficient pas aux groupes armés.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a espéré que les élections qui auront lieu le 20 décembre prochain en RDC garantiront un processus libre et transparent.  Les femmes et les jeunes doivent faire partie du processus de prise de décisions à tous les niveaux, a-t-il plaidé, leur participation étant essentielle dans tout processus électoral, car elle contribuera à construire des sociétés inclusives, sûres et pacifiques.  Notant les restrictions de l’espace civique, les incitations à la haine, les menaces de violence et la détention arbitraire de membres de l’opposition et de la presse en RDC, le représentant a réitéré la nécessité de défendre la liberté d’expression, d’opinion et de réunion, ainsi que l’obligation de protéger les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes, et de lutter contre l’intolérance.  Préoccupé par la détérioration de la situation en RDC, il a souligné l’importance du soutien de la communauté internationale pour répondre aux besoins de 25,4 millions de personnes confrontées à l’insécurité alimentaire et de plus de 450 000 personnes déplacées dans la région du Nord-Kivu.  Enfin, notant la décision du Gouvernement de la RDC sur le retrait anticipé de la MONUSCO, le représentant a estimé qu’il importe d’assurer une transition progressive, ordonnée et sûre, dans le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire à tous les stades.  Il a appelé à la mise en œuvre des décisions des processus de Luanda et de Nairobi pour parvenir à la paix dans la région.

M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a déclaré s’exprimer à un « moment crucial » pour son pays, alors que les négociations en cours sur le retrait de la MONUSCO entrent dans leur phase finale.  Rappelant que le peuple congolais est soumis depuis trois décennies à une « guerre d’agression imposée par un voisin aux visées expansionnistes », il a rendu hommage aux soldats de la paix qui œuvrent aux côtés des communautés locales à la prévention des conflits et à la protection des civils.  Il a également rappelé que, le 29 mars 2022, un hélicoptère de la MONUSCO qui effectuait une mission de reconnaissance au Nord-Kivu a été abattu par le M23, causant la mort de huit Casques bleus.  Après avoir remercié les pays contributeurs de contingents pour leurs efforts et leurs sacrifices, il a salué le leadership de la Représentante spéciale et Cheffe de la MONUSCO dans le processus en cours.

De la relation entre la RDC et la MONUSCO, née en 2010 sur les cendres de la Mission d’observation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), l’histoire retiendra que la Mission a accompli des « exploits » dans l’exécution de son mandat, a souligné le représentant, citant son apport au processus électoral, aux Forces armées de la RDC (FARDC), à la police nationale et à l’action humanitaire.  Sur le plan sécuritaire, il a regretté le caractère éphémère de la brigade d’intervention, créée en 2013 par le Conseil de sécurité pour soutenir les FARDC contre les insurgés du M23 au Nord-Kivu et composée de soldats de l’Afrique du Sud, du Malawi et de la Tanzanie.  Il a noté qu’après sa débâcle en 2013, le M23 a refait surface en novembre 2021 lorsque ses combattants ont lancé des attaques contre les FARDC et aggravé les tensions régionales.  Depuis lors, a-t-il déploré, ce mouvement soutenu par l’armée patriotique rwandaise a conquis des positions qu’il occupe depuis bientôt deux ans et la MONUSCO, malgré sa taille, n’a pu mettre fin au cercle infernal de massacres, de crimes de guerre et contre l’humanité et d’exploitation des ressources naturelles de la RDC.  Ces exactions se sont même amplifiées dans les provinces d’Ituri et du Nord et Sud-Kivu, tandis que Daech venait y étendre ses tentacules terroristes.

Cette situation est à l’origine des tensions survenues entre la MONUSCO et la population congolaise, notamment au Nord-Kivu, a précisé le représentant, avant de rappeler que le, 20 septembre dernier, le Président Tshisekedi a jugé que le temps était venu pour la RDC de « prendre en main son destin ».  Pour apaiser les tensions tout en consolidant les progrès réalisés, le retrait progressif de la MONUSCO est une étape nécessaire, a appuyé le délégué, justifiant ainsi la demande de son gouvernement de ramener le début du retrait de la MONUSCO de décembre 2024 à décembre 2023. Se réjouissant des « convergences de vue » entre le Gouvernement congolais et le Secrétariat de l’ONU, il a salué l’attitude du Conseil de sécurité, qui, à travers sa déclaration présidentielle du 16 octobre, a jeté les bases juridiques du plan de désengagement, tel que convenu à Kinshasa le 21 novembre dernier. Ce plan est le résultat d’un engagement consensuel des deux parties, a-t-il insisté, appelant à l’exécution de bonne foi des engagements qui en découlent.

Le représentant a cependant rappelé que « la guerre n’est pas terminée ».  Si le Conseil tient à la protection des civils et la restauration totale de la paix, il doit s’investir dans la mise en œuvre intégrale des processus de Luanda et de Nairobi validés par l’Union africaine et l’ONU, a-t-il plaidé, ajoutant que le dénouement des discussions politiques engagées par le Gouvernement congolais avec les groupes armés, arrêté à sa troisième phase, nécessite une synergie des deux processus.  De même, alors que la plupart des partenaires recommandent un dialogue avec le Rwanda, il a rappelé l’esprit d’ouverture du Président Tshisekedi à ce sujet, tout en faisant valoir que la feuille de route de Luanda prévoit notamment le retrait du M23 des zones qu’il occupe et la cessation de tout soutien aux groupes armés opérant dans l’est de la RDC.  À ses yeux, la priorité sur le plan sécuritaire est donc la fin de l’agression rwandaise et le retrait du Nord-Kivu, l’éradication des groupes armés « terroristes », dont le M23, le retour des populations déplacées, la restauration de l’autorité de l’État dans les territoires occupés par le M23 et la mise en œuvre du programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRCS).

Concernant le renouvellement du mandat de la MONUSCO, le représentant a indiqué que son gouvernement a fait preuve de flexibilité en acceptant une année de plus pour appliquer le plan commun de désengagement. Parmi les problèmes majeurs auxquels la Mission devra s’atteler avant son retrait, il a cité la protection des civils, l’appui à la réforme du secteur de la sécurité, le soutien à la police nationale et aux FARDC, le transfert des capacités pour renforcer l’appropriation, et l’appui au PDDRCS et aux élections de décembre.  Le plan de désengagement et le retrait ne sont pas une fin en foi, a-t-il affirmé.  Le Conseil de sécurité demeurera saisi de la situation en RDC et ne peut se décharger de son obligation de mettre un terme à la situation d’insécurité qui mine l’est du pays, a souligné le délégué.  Il a les capacités juridiques, politiques et matérielles pour contraindre toutes les parties à mettre en œuvre la feuille de routes issue des processus de Nairobi et de Luanda.  « Agissez avant qu’il ne soit trop tard », a-t-il lancé en conclusion, assurant que son gouvernement entend faire de ce plan de désengagement « un modèle pour les autres retraits de missions de maintien de la paix de l’ONU ».

M. ERNEST RWAMUCYO (Rwanda) a déclaré que le Gouvernement congolais et sa « coalition de milices armées illégales », dont la force « génocidaire » des FDLR, ont violé le cessez-le-feu mandaté par les processus de Nairobi et de Luanda, aggravant la crise humanitaire désastreuse dans la région.  De même, le départ prématuré de la MONUSCO, à la demande de Kinshasa, met à mal les efforts régionaux visant à ramener la paix dans l’est du pays.  Le représentant a exhorté le Gouvernement de la RDC à réaffirmer son engagement en faveur des accords régionaux, qui offrent selon lui les meilleures chances de paix.

Selon le délégué, le rapport de la MONUSCO reste muet sur les violations des droits humains et l’impunité des FARDC, y compris les meurtres systématiques de civils et la persécution des communautés tutsi par l’État congolais.  Les crimes odieux qui sont commis sont, à ses yeux, la conséquence directe de la prévalence des discours de haine, de la discrimination et de « l’idéologie génocidaire » dirigée contre les Tutsis congolais.  Il a imploré le Conseil de tenir Kinshasa responsable pour encourager la désinformation et les discours de haine, lesquels atteignent selon lui des niveaux sans précédent.  La rhétorique « violente et anti-rwandaise » menée par les responsables congolais, y compris le Président sortant, continue en outre de menacer le Rwanda « d’invasion, de meurtres de masse et d’annexion ».  Le représentant a exhorté la RDC à cesser les provocations, comme celles du 21 octobre 2023, lorsque des hommes lourdement armés, dont des FDLR, se sont mobilisés à la frontière entre les deux pays en proférant des menaces.

« Les solutions aux défis sécuritaires en RDC ne peuvent être trouvées dans des jeux de reproches ou dans l’externalisation des problèmes internes », a ajouté le représentant.  Il a plutôt préconisé la tenue d’un dialogue inclusif et constructif, la coopération régionale et la cessation des hostilités, tout en priorisant le bien-être des civils.

Reprenant la parole, M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a félicité le Rwanda d’être très intéressé par ce qui se passe en RDC mais a précisé, s’agissant du « discours génocidaire » qui devient « pratiquement un leitmotiv dans le langage des dirigeants rwandais », que si le génocide pouvait avoir une référence en Afrique, ce n’est pas en RDC qu’on la trouverait.

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