CAMEROUN 58ème SESSION DE L'ASSEMBLEE
GENERALE DES NATIONS UNIES DEBAT GENERAL Déclaration de New York, 2 octobre 2003 Monsieur le Président, Je voudrais tout d'abord vous féliciter,
Monsieur le Président, pour votre accession à la Présidence
de la 58ème session ordinaire de l'Assemblée Générale
de l'Organisation des Nations Unies. Votre élection à ce
poste témoigne de toute l'estime que les Etats membres de l'Organisation
portent à votre pays, Sainte-Lucie, partenaire traditionnel de
longue date du Cameroun au sein de la Famille ACP. Elle témoigne aussi de la confiance
que les représentants de ces Etats placent en vous, dans vos éminentes
qualités de diplomate. Soyez assuré de la pleine coopération
de ma délégation qui a l'heur de siéger au sein de
votre Bureau en sa qualité de Président de la Troisième
Commission. Permettez-moi d'associer les autres membres
de votre Bureau aux voeux de succès que je forme à votre
intention. Je saisis cette occasion pour redire à votre prédécesseur
S.E.M. Jan Kavan, toute notre appréciation pour le talent avec
lequel il a dirigé nos travaux lors de la dernière session. A Monsieur le Secrétaire Général
de l'ONU, je voudrais, dans le contexte international du moment, renouveler
l'expression de la grande fierté et de la confiance du Cameroun
pour et en son rôle de facilitateur dans le règlement des
conflits interafricains, son action énergique constante menée
au service des grands idéaux de l'Organisation. Notre Organisation a été créée
pour préserver les générations futures de la guerre,
faire bénéficier à tous des conditions de vie dignes,
promouvoir le respect des droits humains et des libertés fondamentales.
L'ONU a donc été créée pour qu'advienne la
paix. Cette paix, ainsi que l'a rappelé
le Pape Jean XXIII dans sa Lettre encyclique, Pacem in Terris, adressée
à tous les hommes de bonne volonté et dont nous célébrons
cette année le 40' anniversaire, cette paix repose sur quatre conditions
essentielles qui correspondent à quatre exigences précises
de l'esprit humain, la vérité, la justice, l'amour et la
liberté, Nos Chefs d'Etat se sont placés dans
le même sillage lors du Sommet du Millénaire. Ils se sont
en effet engagés à délivrer l'Homme de la guerre,
du besoin, à promouvoir les droits humains, à renforcer
les Nations Unies. Ces considérations méritaient
d'être faites dans le contexte actuel. L'état du monde dressé
depuis le z3 septembre au cours de ce débat général,
n'incite guère à l'optimisme. Monsieur le Président, Le 19 août 2003, l'ONU a été
tragiquement ébranlée. L'attaque terroriste qui a détruit
à Bagdad le Quartier Général des Nations Unies, frappé
et tué des dizaines d'innocents dont Sergio Vieira de Mello, représentant
spécial du Secrétaire Général en Irak, a lancé
un grand défi aux principes et valeurs qui constituent le socle
granitique de notre Organisation. Demain vendredi, nous pleurerons avec le
Peuple Irakien la perte tragique toujours à Bagdad de Madame Akila
AI-Hashemi, diplomate au grand talent, éminent Membre du Conseil
Irakien. Monsieur le Président, Le Carneroun se félicite de ce que
notre Organisation n'ait ni fléchi dans ses responsabilités,
ni même faibli dans sa détermination à jouer un rôle
central dans la stabilisation, la restauration ordonnée de la souveraineté
et la reconstruction de l'Irak, et à appuyer le processus politique
en cours. Venant à la suite d'une longue série
d'actes terroristes commis à travers le monde depuis la tragédie
du ii septembre2001, l'attentat du r9 août à Bagdad est venu
opportunément nous rappeler combien notre monde d'aujourd'hui est
vulnérable. La complexité du défi et la
gravité des périls nous nous commandent d'intensifier nos
efforts collectifs pour faire face avec efficacité au terrorisme
qui constitue aujourd'hui une menace sérieuse à la paix
et à la sécurité internationales. Le Cameroun plaide une fois de plus à
cet égard pour la convocation d'une Conférence de haut niveau,
chargée de définir une riposte collective organisée
de la Communauté internationale au terrorisme. Monsieur le Président, A ces nouvelles menaces à la paix
et à la sécurité internationales que sont le terrorisme
ou la prolifération des armes de destruction massive, s'ajoutent
d'autres menaces tout aussi pernicieuses : pandémies de toutes
sortes dont le VIH/Sida, la malaria et la tuberculose, la désespérance
induite par une pauvreté quasi-endémique. Notre mobilisation commune devrait donc viser
avant tout à réduire, voire à éliminer les
germes et les causes des conflits et de la désespérance. Ainsi, au Moyen-Orient, il convient d'exiger
des parties au conflit, Israël et la Palestine, de revenir sans délai
autour de la table de négociations pour convenir de modalités
favorisant la mise en oeuvre rapide et intégrale de la Feuille
de route. Le Cameroun regrette et condamne l'escalade
de la violence qui entrave gravement toute solution pacifique fondée
sur la lettre et l'esprit de la résolution I397(2002) adoptée
à l'unanimité le 12 mars 2002 par laquelle le Conseil de
Sécurité se déclare «attaché â
la vision d'une région dans laquelle deux États, Israël
et la Palestine, vivent côte à côte, à l'intérieur
de frontières reconnues et sûres». Nos amis Palestiniens et Israéliens
doivent se faire à l'idée de vivre côte à côte,
condamnés qu'ils sont à vivre ensemble, à coexister
dans la configuration géopolitique que leur a forgée leur
riche histoire commune. Pour cela, Israéliens et Palestiniens doivent
savoir désarmer, désarmer au niveau des politiques relatives
aux armements mais aussi et surtout désarmer au niveau culturel,
en s'employant unanimement et sincèrement à faire disparaître
de leur coeur là peur et la psychose de guerre. A l'axiome qui
veut que la paix résulte de l'équilibre de la guerre ils
doivent substituer le principe selon lequel la vraie paix ne peut s'édifier
que dans la confiance mutuelle Il en est de même des peuples de la
prestigieuse Mésopotamie qui émergent de trois décennies
de tyrannie et qui devront avec l'aide de la Communauté internationale,
retrouver très rapidement la plénitude de leur dignité,
de leur souveraineté dans un Iraq stable et prospère, vivant
en paix avec tous ses voisins. Monsieur le Président, Au cours de l'intersession, fort heureusement,
ces efforts commencent à porter des fruits. Certains des conflits
africains sont en bonne voie de règlement, alimentant de nouveaux
et légitimes espoirs. Il reste malgré tout des situations
fort déplorables où les protagonistes peinent à trouver
une solution politique négociée ou à tenir leurs
engagements. Nous sommes convaincus qu'avec une volonté politique
réelle des acteurs majeurs de tels conflits, des résultats
probants ne sauraient tarder. L'appui irremplaçable que leur apportent
les Nations Unies mérite amplement d'être salué et
reconnu. L'Afrique en général, et notre
sous-région en particulier, a pleinement conscience du rôle
de ce partenaire important pour notre développement économique,
pour la consolidation de la démocratie et de l'état de droit,
et enfin pour la promotion de la paix et de la sécurité
tant à l'intérieur qu`à l'extérieur de nos
Etats. C'est d'ailleurs pour cette raison que les
pays membres de la Communauté Economique des Etats d'Afrique Centrale
(CEEAC) ont exprimé avec force leur volonté de renforcer
leur coopération avec l'ONU par une présence politique de
cette Organisation dans la sous-région, qui appuierait nos capacités
sous-régionales, notamment dans les domaines de la paix et de la
sécurité. Le Cameroun voudrait à cette fin réitérer
au Secrétaire Général ses remerciements pour avoir
dépêché en Afrique Centrale en juin dernier, une mission
multidisciplinaire, à la demande des membres du Conseil de Sécurité.
Nous attendons avec intérêt les recommandations novatrices
que le Secrétaire Général fera, dans les jours prochains
au Conseil de Sécurité, recommandations qui alimenteront
également le débat au point intitulé : «Coopération
CEEAC-ONU». Nous accueillons très favorablement
les suggestions du Secrétaire Général relatives au
fonctionnement de l'Organisation dans ce monde en perpétuel mouvement.
Nous apporterons notre soutien à toute réforme qui rapprocherait
l'Organisation des peuples comme les mesures de renforcement de la coopération
entre l'ONU et les Organisations d'Afrique Centrale. Monsieur le Président, Dans la Déclaration du Millénaire,
les dirigeants politiques du Monde se sont engagés à mettre
en place un partenariat mondial pour le développement et à
répondre ce faisant aux besoins spéciaux de l'Afrique. Le Nouveau Partenariat pour le Développement
(NEPAD), par lequel l'Afrique a décidé de se réapproprier
l'initiative et la maîtrise de son destin, peut servir de plateforme
solide à un partenariat fécond entre le continent et la
communauté internationale. Monsieur le Président, Les réponses attendues par l'Afrique
sont plurielles. L'une d'elles et qui jouera un rôle décisif
dans la croissance du Continent est liée au commerce. Les Etats
africains aspirent à jouer un rôle plus important dans le
commerce des biens et des services. Cela suggère notamment des
normes propices â une compétition équitable. L'échec récent de la Conférence
Ministérielle de l'OMC tenue à Cancun aura suscité
de graves inquiétudes, particulièrement chez les pays africains
exportateurs de produits agricoles. La grande résistance des nations riches
à démanteler leurs régimes de soutien au secteur
agropastoral laisse perplexe et menace dangereusement la survie des économies
africaines adossées à l'agriculture et à l'élevage.
Les subventions qu'elles accordent à ce secteur sont, en tout cas,
en passe d'étrangler les millions de planteurs et de producteurs
de coton en Afrique Centrale et en Afrique de l'Ouest Dans le même ordre d'idées,
Monsieur le Président, votre pays Sainte-Lucie et le Cameroun sont
engagés dans un combat épique depuis une dizaine d'années
pour faire survivre nos industries bananières face aux géants
du secteur. L'on pourrait ainsi multiplier à loisir
des illustrations de cette exigence de solidarité qui commande
une réforme urgente du système économique multilatéral.
Nous voulons espérer que le cycle de Doha ne s'écartera
pas de son objectif principal, à savoir le développement
et qu'il prendra bien en compte les préoccupations des plus pauvres
afin de les arrimer sans délais, à l'économie globale. La globalisation ne concerne pas uniquement
le commerce, elle touche aussi le développement humain et les nouvelles
technologies, la préservation de l'écosystème, la
gestion durable de l'eau et des ressources naturelles. Tous ces aspects requièrent une approche
concertée, les sacrifices des uns profitant à tous. Le Cameroun
qui a choisi par exemple, de participer à la gestion rationnelle
et durable de l'écosystème forestier mondial, a mis en place
un Plan national de gestion de l'environnement courageux. Il est clair que pour mettre efficacement
en ouvre ces politiques, sans exposer à une extrême pauvreté
ses populations rurales, notre pays a besoin de concours financiers importants,
pour notamment diversifier sa production et assurer une transformation
systématique de ses produits de base. C'est donc dire que plus que jamais, solidarité
devrait rimer avec partenariat, et mondialisation avec commerce équitable,
pour un développement global et maîtrisé de notre
planète. Monsieur le Président, L'ONU reste assurément la seule organisation
universelle qui non seulement recèle des compétences et
de l'impartialité nécessaires, mais qui est dépositaire
aussi de la légitimité «conférable» à
toute action multilatérale s'attaquant aux grands défis
mondiaux, et nous venons d'en recenser un certain nombre. Pour atteindre ces nobles objectifs, elle
a un urgent besoin de réfléchir en profondeur sur ses orientations
actuelles, son fonctionnement et ses instruments de mise en oeuvre. Le Cameroun appuie sans réserve l'initiative
du Secrétaire Général de mettre en place un Groupe
de Haut Niveau d'Eminentes Personnalités chargé de réfléchir
aux moyens de renforcer l'Organisation. Nous attendons avec espoir leur
contribution à la réforme nécessaire et inévitable
de notre Organisation, pour améliorer ses performances, s'agissant
aussi bien de ses missions de caractère économique et social,
que du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Monsieur le Président, Le Secrétaire Général
nous propose d'aller plus loin dans le mouvement de réformes qu'il
a engagé depuis quelques années. Il a raison. Il, en va
de l'efficacité même de l'Organisation qui en a bien besoin
pour relever les grands défis de notre temps. Il peut compter sur
le soutien du Cameroun. Je vous remercie. |