DECLARATION
DE
S.E.M. ANASTASE
GASANA
AMBASSADEUR, REPRESENTANT
PERMANENT
DU RWANDA AUPRES DES
NATIONS UNIES
à la 56ème
Session de l'Assemblée Générale
de l'Organisation
des Nations Unies
New York, le 16 novembre 2001
Monsieur le Président,
C'est un grand honneur pour moi et au nom de la délégation rwandaise, de joindre ma voix à celles des orateurs qui m'ont précédé sur cette tribune des Nations Unies pour vous présenter nos vives et chaleureuses félicitations à l'occasion de votre élection à la présidence de l'Assemblée générale.
Je profite de cette occasion pour rendre un hommage mérité à votre prédécesseur pour la perspicacité avec laquelle il a dirigé les travaux de la cinquante-cinquième session de l'Assemblée Générale.
Qu'il me soit permis aussi
au nom de mon Gouvernement, d'adresser mes chaleureuses félicitations
à Son Excellence, Monsieur Kofi Annan, pour sa réélection
comme Secrétaire Général de notre Organisation.
Ses efforts remarquables dans le raffermissement du rôle des
Nations Unies et ses nombreuses initiatives dans la résolution des
conflits sont autant de témoignages éloquents qui confirment
ce deuxième mandat et mieux encore qui lui confèrent le titre
du Prix Nobel de la Paix qui vient de lui être décerné.
Monsieur le Président,
La présente session s'est ouverte dans un climat tragique suite aux actes ignobles et lâches orchestrés par des ennemis de la paix et de la sécurité internationale. Ces actes terroristes ont emporté des milliers de victimes innocentes dans les villes de New York et de Washington. Ce fut un coup dûr à l'encontre du Gouvernement et du peuple américain mais aussi un défi pour les Nations Unies et la Communauté Internationale tout entière.
Le Gouvernement rwandais a appris ces actes ignobles avec indignation et consternation, et a présenté ses condoléances au gouvernement américain et aux familles éprouvées.
Le Gouvernement rwandais réitère sa condamnation du terrorisme et reste disposer à toutes les initiatives visant à lutter contre toutes les formes du terrorisme.
C'est dans cet esprit que mon pays
soutient sans réserve toutes les résolutions pertinentes
prises contre le terrorisme et en particulier la résolution 1373
du 28 septembre 2001 et réaffirme sa détermination à
les mettre en application.
Monsieur le Président,
Les actes du 11 septembre 2001
constituent un défi pour les Nations Unies et pour chaque Etat membre.
Puisque les Nations Unies constituent le creuset de la paix et de
la sécurité internationale et qu'un groupe terroriste
s'en prend à des vies humaines innocantes - qu'importe le prétexte
- il revient à chaque Etat Membre, tout homme épris
de paix et de justice, à toute organisation humaine digne de ce
nom, de lutter avec la plus grande énergie contre ce groupe terroriste,
si puissant serait-il.
Monsieur le Président,
Nous disons si puissant serait-il et nous le disons en connaissance de cause pour en avoir nous même été victimes.
La terreur, non pas d'une Organisation quelconque, mais celle d'un Etat devenu en réalité un NON-ETAT avec toute la machine étatique à sa disposition pour en découdre avec ceux qu'il avait par ailleurs l'ultime devoir de protéger. Le Rwanda et le Peuple rwandais ont vécu sous la terreur d'un Etat assassin, terroriste et génocidaire trois mois durant. Ce règne de la terreur a emporté avec lui, comme vous le savez, plus d'un millions de vies humaines en 1994.
Les instruments de cette terreur
aveugle et sans merci, et dont le résultat accablant a été
un génocide sont connus: c'est l'Organisation des milices
para-militaires communément dénomée: INTERAHAMWE et
les anciennes Forces Armées Rwandaises communément
appelées: EX-FAR. Nous demandons, du haut de cette tribune,
que ces deux organisations qui, depuis une décennie, se sont érigées
en véritables machines à tuer, figurent en bonne et due forme
sur la liste des terroristes à combattre et à pourchasser
de par le Monde.
Monsieur le Président,
La République Démocratique
du Congo qui depuis 1994 abrite ces forces du mal, les nourrit, leur fournit
armes et munitions et qui fait d'eux leurs alliés, devrait répondre
aux appels incessants du Conseil de Sécurité des Nations
Unies d'arrêter tout soutien aux forces négatives présentes
sur son territoire, y compris les INTERAHAMWE et les ex-FAR, planificateurs
et auteurs du génocide au Rwanda.
Monsieur le Président,
S'agissant de la paix en République Démocratique du Congo et dans l'ensemble de la région des Grands Lacs Africains, mon Pays est déterminé à mettre en application les Accords de Paix de Lusaka.
L'Accord de Paix de Lusaka sur la République Démocratique du Congo comporte deux volets importants: le dialogue intercongolais dont on attend qu'il dégage une solution politique à la crise congolaise et le désarmenent et le désangement des Forces négatives dont le résultat devra être la paix aux frontières rwandaise, ougandaise et burundaise d'avec la République Démocratique du Congo.
Nous félicitons vivement la République soeur d'Afrique du Sud, qui, face à l'échec du dialogue intercongolais à Addis Abeba faute de ressources financières entre autres, a offert généreusement le logement et la restauration à plus de 300 délégués congolais qui iront à ce dialogue intercongolais tant attendu.
Nous félicitons tout autant le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD Goma) et le Mouvement de Libération du Congo (MLC Gbadolité) pour leur heureuse initiative de créer une Force Spéciale devant opérer le désarmement et le désangement des Forces négatives présentes sur le territoire congolais qu'ils contrôlent et d'avoir invité le Gouvernement de KINSHASA à s'associer à cette initiative.
Concernant la question des Droits de l'homme, nous tenons à réaffirmer notre attachement à la primauté du Droit dans les Relations Internationales. Nous sommes détérminés à renforcer l'Etat de Droit ainsi que le respect des Droits de l'Homme et les libertés fondamentales.
Le Gouvernement rwandais a accueilli avec beaucoup d'intérêts le rapport des Droits de l'Homme en RDC. Cependant, c'est avec regret que nous avons noté l'absence du Rapporteur Spécial M. Robert Garreton lors de la présentation dudit Rapport le 8 novembre dernier.
En effet, en raison de cette
absence, aucun débat contradictoire entre les parties concernées
et le rapporteur n'a pu avoir lieu. Encore une fois, ma délégation
trouve cela fortement regrettable.
Monsieur le Président,
Ce rapport des Droits de l'Homme en RDC contient de nombreuses allégations gratuites dont celle relative à la prétendue annexion du Congo. Nous voudrions rappeler ici que l'armée régulière du RWANDA n'a pas franchi nos frontières avec le Congo à des fins d'annexion comme le prétend le rapport, mais, comme nous l'avons expliqué et démontré à plusieurs reprises, pour assurer la sécurité de notre territoire et de notre population.
La sécurité au Nord du RWANDA a été et demeure constamment perturbée par les ex-forces armées rwandaises et les miliciens INTERAHAMWE qui ont commis le génocide en 1994 et qui utilisent le territoire congolais comme leur base arrière pour rééditer leur macabre forfait.
Ces groupes armés s'infiltrent
et tuent des centaines de personnes innocentes au Rwanda. Nous espérons
que la phase III de la MONUC, en étroite coopération avec
l'initiative RCD-MLC, mènera au désarmement complet de ces
groupes, à la stabilité et à la Paix dans notre région
des grands lacs.
Monsieur le Président,
Nous nous félicitons de la mise en place d'un Gouvernement de transition au BURUNDI. Nous sommes d'avis qu'il s'agit d'un grand pas vers un processus de réconciliation auquelle aspire nos frères, le peuple Burundais.
La région des Grands Lacs est aujourd'hui une région qui cherche des solutions aux conflits qui la minent. Puisse l'exemple du Burundi sous inspiration du Président Nelson MANDELA, apporter ses fruits pour l'intérêt général et le bénéfice du peuple Burundais et de l'Afrique tout entière.
S'agissant de l'Afrique, nous estimons
qu'une solution définitive au problème du Sahara Occidental
devrait également être trouvée.
Monsieur le Président,
Nous souhaitons voir la paix s'installer au Moyen Orient. La question des réfugiés palestiniens, vieille de plusieures décennies, devrait être réexaminée.
En effet, l'existence d'un
Etat Palestinien Indépendant à côté d'un Etat
Israël Indépendant et assuré de son existence en tant
que tel, est une nécessité pour la paix au Proche Orient.
Les amis des Israëliens et des Palestiniens que nous sommes au sien
de la famille des Nations Unies devrions à l'heure qu'il est plutôt
nous atteler à cultiver et à accroître les relations
d'amitiés et de coopération agissante entre les deux Etats
frères, l'Etat Israëlien et l'Etat Palestinien. Nous
avons hâte de vaquer à cette noble tâche.
Monsieur le Président,
Au-delà de l'Afrique et du
Moyen Orient, nous nous félicitons des progrès significatifs
enregistrés dans la Péninsule coréenne où les
deux Corées montrent des signes encourageants de règlement
définitif de ce qui reste comme conflit issu du contexte de la guerre
froide.
Monsieur le Président,
Cette 56e session ordinaire de l'Assemblée Générale est la 1ère après le Sommet du Millénaire et devrait par conséquent en faire le suivi et jeter les jalons des bases nouvelles pour l'avenir de l'humanité.
Parti des valeurs qui sous-tendent les relations internationales et du respect des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, ce sommet avait mis l'accent sur le rôle que devrait jouer les Nations Unies et recommandait de créer un climat propice au développement des pays les moins avancés qui n'étaient pas encore sur les rails de la mondialisation.
Tout au long de ce débat général, la pauvreté et le problème de la dette ont été soulignés comme obstacles majeurs au développement et, partant, une entrée difficile à la mondialisation. Cette dernière, avec son lot d'avantages pour les uns et d'inconvénients pour les autres, ne semble pas résoudre la question de l'écart entre les pays pauvres et les pays riches. Tout au contraire, le fossé qui les sépare continue d'être croissant. La marginalisation des pays pauvres dans le commerce international et le fardeau de la dette compromettent gravement leurs efforts de développement et accentuent la pauvreté.
C'est pourquoi les Nations
Unies devraient définir des politiques propices au développement
pour tous et adopter des mesures internationales de soutien aux pays pauvres
dans le domaine des investissements. Ces mesures viseraient aussi
la suppression de la dette et une intégration adéquate de
ces pays dans l'économie mondiale. Et c'est dans cette optique,
Monsieur le Président, que nous demandons aux Nations Unies de réexaminer
le Rapport présenté au Conseil de Sécurité
par une Commission d'enquête Indépendante dirigée par
Monsieur Carlsson, l'ancien Premier Ministre de Suède, et qui n'a
pas connu de suivi jusqu'à l'heure. Nous estimons en tant
que Pays Membre des Nations Unies, que l'Organisation à laquelle
nous appartenons devrait assurer un suivi à ce Rapport qui
définit assez bien les besoins de reconstruction économique
et sociale du Rwanda post-génocide.
Je vous remercie.