DECLARATION
de
Son Excellence John Manley
Ministre des Affaires étrangères
Conférence en vue de faciliter l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires
New York, le 12 Novembre 2001
Bien que les objectifs de paix et de sécurité aient toujours été un des fondements des priorités des Nations Unies, ils n'ont peut-être jamais été aussi présents à notre esprit qu'ils ne le sont cette semaine, alors que chefs d'État, ministres et délégués du monde entier se réunissent à New York.
Les menaces auxquelles est confrontée la communauté internationale aujourd'hui sont complexes, diversifiées et imprévisibles. Les événements du 11 septembre mettent en évidence la nécessité devant laquelle se trouvent les États et les instances internationales de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la sécurité de leurs citoyens et celle de leurs nations tout en respectant la primauté du droit et les valeurs qui caractérisent nos sociétés.
Depuis le 11 septembre, les gouvernements ont pris toute une gamme de mesures internes, d'interventions politiques et, pour certains d'entre nous, d'engagements militaires. Mais ces efforts ne sont qu'un volet du régime de sécurité mondial dont nous avons besoin pour atteindre nos objectifs.
À la suite des déclarations du criminel Oussama ben Laden, il n'est plus permis de douter que les armes de destruction massive font partie du plan des terroristes. Est-il besoin de souligner que les armes chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires posent une menace réelle. Pour éviter qu'elles ne deviennent les outils des terroristes, nous devons établir un système international de traités assortis d'engagements concrets et de mécanismes propres à assurer le respect de ces instruments afin d'empêcher la fabrication, le stockage et l'emploi d'armes de destruction massive. C'est là le meilleur moyen d'éviter que ces armes ne tombent aux mains des criminels.
Nous avons besoin d'un régime mondial de contrôle des armements, de non-prolifération et de désarmement qui soit vigoureux et responsable, et qui soit régi par des règles et des normes claires, robustes et universellement respectées. Il aura fallu beaucoup de travail, d'expertises légales, d'études scientifiques et de volonté politique au cours des années et des décennies pour en arriver à créer ce régime. Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires est un pilier de l'architecture de sécurité mondiale mais il faut que tous les États y adhèrent.
L'entrée en vigueur de ce traité est une nécessité urgente et impérieuse.
Le traité repose sur les mêmes alliances et les mêmes coalitions qui sont désormais si nécessaires à la lutte contre le terrorisme, et il vient en même temps les renforcer. Il est basé sur des règles et établit des critères non ambigus pour ce qui est du respect de ces règles, de leur mise en pratique et des mécanismes de vérification. Enfin, le traité attache beaucoup d'importance au principe de l'action préventive la meilleure garantie de sécurité que nous puissions avoir.
Lorsque le traité a été conclu en 1996, après plus de 30 années d'études et de négociations, nous avons atteint un tournant dans l'histoire du désarmement et de la non-prolifération nucléaires. L'arrêt de toutes les essais nucléaires freinera le développement des arsenaux actuels et diminuera la valeur politique des armes nucléaires. Le traité a aussi pour but d'empêcher les États qui ont des aspirations nucléaires de mettre au point ou d'acquérir de nouvelles technologies à vocation militaire. Bref, le traité représente une étape critique vers la réalisation de l'objectif général que partagent tous les États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, soit l'élimination complète de la menace nucléaire.
Les bienfaits qu'apporte cet instrument sont manifestes pour le Canada et pour les 161 autres pays qui l'ont signé, y compris les 85 États qui l'ont ratifié. Nous avons là un traité bien conçu, si bien conçu, du reste, qu'il anticipe même les facteurs qui pourraient ralentir sa propre ratification. En effet, le paragraphe 2 de l'article XIV du traité à l'élaboration et la rédaction duquel le Canada a grandement contribué enjoint expressément aux signataires de veiller à faire progresser les étapes de son entrée en vigueur. C'est là la raison pour laquelle nous sommes rassemblés ici aujourd'hui.
Le traité accroîtra donc notre sécurité individuelle et collective. Il convient aussi d'attirer l'attention aujourd'hui sur les mesures de vérification prévues dans le traité, que certains États qui ne l'ont pas encore ratifié ont contestées. Le Canada considère que les dispositions du traité relatives à la vérification sont à la fois complètes et efficaces. Elles sont fondées sur les meilleures expertises et analyses scientifiques et techniques. Bien avant l'achèvement des négociations, en effet, nous avions mis en place un programme d'études scientifiques qui nous a donné une occasion inégalée de mettre à l'essai, perfectionner et calibrer minutieusement les mesures de vérification. Je vous invite tous à participer à l'atelier consacré à ces questions qui aura lieu cet après-midi. Au cours de cet atelier, qui est parrainé par le Canada, la Suède et l'Australie, et organisé par le Verification, Research, Training and Information Centre, on passera en revue les principales dispositions du traité relatives à la vérification.
L'essence d'un régime multilatéral bien conçu tient au fait que les signataires en partagent la tutelle et la responsabilité. Notre régime de traités qui représente un élément du fonctionnement efficace du Système de surveillance international exige que chacun d'entre nous joue son rôle. Notre système multilatéral, y compris le régime de contrôle des armements et de désarmement, doit fonctionner sur la base d'accords bien pensés et solides qui sont mis en place, mis à exécution et mis en pratique.
Comme d'autres délégations l'ont dit au cours de cette conférence, le Canada se réjouit lui aussi que les États-Unis aient annoncé qu'ils maintiendront leur moratoire volontaire sur les essais nucléaires. Nous sommes toutefois déçus qu'ils n'aient pas en même temps jugé bon de ratifier le traité interdisant ces essais, et nous les invitons instamment à reconsidérer cette décision.
Nous devons tous continuer à exhorter les États qui n'ont pas encore adhéré au traité à le faire. J'ai moi-même écrit à mes homologues de chacun des 13 pays dont nous attendons toujours qu'ils ratifient le traité afin qu'il puisse entrer en vigueur. Le Canada poursuivra ses efforts bilatéraux et multilatéraux à cet égard; je vous invite tous à en faire autant.
À l'heure actuelle, nos citoyens nous demandent de rendre le monde plus sûr, de ne pas nous lancer dans une nouvelle course aux armements qui dressera les États les uns contre les autres, mais plutôt de nous unir dans un mouvement de coopération, dont nous avons un besoin si urgent en ce moment. L'universalisation et l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires accroîtront la sécurité de nos citoyens et de la planète. Agissons dès maintenant pour faire de cet espoir une réalité.
Merci.