Information basée sur le rapport 2017 du Secrétaire général au Conseil de sécurité (S/2018/250) publié le 16 avril 2018.

La précarité de la situation qui règne en matière de sécurité dans les régions du nord et du centre du Mali, où les soldats de la paix, les membres des forces de sécurité nationale et les acteurs humanitaires continuent d’être visés la cible de menaces, entrave les efforts déployés pour enquêter sur les violences sexuelles liées au conflit. Faute de services idoines, de nombreuses victimes, méfiantes à l’égard des institutions nationales, se retrouvent à souffrir en silence. En outre, des tabous d’ordre culturel, renforcés par la crainte d’une stigmatisation et de représailles, expliquent toujours pourquoi le nombre des violences dénoncées reste largement en dessous de la réalité. Nombreuses sont les femmes et les filles qui demeurent traumatisées par l’occupation islamiste de 2012-2013, lorsque viols et mariages forcés étaient monnaie courante. L’impunité prévaut dans les régions du nord, en l’absence d’un système judiciaire opérationnel. Aux prises avec des problèmes de sécurité intérieure, le Mali est, de surcroît, devenu un point de transit des flux migratoires: nombreuses sont les agressions qui se produisent le long des itinéraires de migration ainsi que dans les zones d’exploitation minière, où il a été rapporté que des femmes ont été maltraitées par des passeurs et forcées à se prostituer.

En 2017, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a recensé 16 cas de violences sexuelles liées au conflit – visant, en majorité, des femmes et des filles voyageant dans les transports publics sur l’axe reliant les régions clés de Gao, Tombouctou, Ménaka, Mopti et sur la frontière avec le Niger. Ces actes ont été commis par des hommes armés non identifiés (8 cas) ; un membre du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) (1 cas) ; des éléments de la Coordination des mouvements et fronts patriotiques de résistance-II (3 cas) ; des éléments du Mouvement pour le Salut de l’Azawad (2 cas) et des membres des Forces de défense et de sécurité maliennes (2 cas) : on dénombre 11 cas de viol et 5 cas de viol en réunion, les faits s’étant produits à Gao, Tombouctou, Ménaka et Mopti. Deux des victimes appartenaient à la minorité ethnique Bell a, leur cas venant s’ajouter aux 10 affaires de violences sexuelles signalées en 2016 à l’encontre des femmes de cette communauté, auxquelles il n’a été donné aucune suite.
Le 7 juillet, à Kidal, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) a publié un communiqué unilatéral sur la prévention des violences sexuelles liées au conflit et les moyens d’y faire face, qui a été approuvé par les mouvements composant la CMA, y compris le HCUA, le Mouvement arabe de l’Azawad et le Mouvement national de libération de l’Azawad, qui est mentionné dans l’annexe au présent rapport. La Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 d’Alger a poursuivi la mise en œuvre des dispositions de son communiqué de 2016 visant à prévenir la violence sexuelle et à en poursuivre les auteurs.

L’ONU a continué d’appuyer l’élaboration d’une stratégie nationale visant à combattre la violence sexiste en fournissant un soutien technique et financier au Gouvernement. La MINUSMA s’est également employée à faciliter la réinsertion économique des victimes de violences sexuelles en mettant en œuvre des projets à effet rapide visant à générer des revenus. La question de la prévention des violences sexuelles liées aux conflits et des moyens d’y faire face a été prise en considération dans le cadre d’action destiné à la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel
et des domaines de coopération ont été répertoriés, notamment celui de la formation des membres de la Force conjointe en matière d’orientation des victimes, particulièrement des personnes relâchées par des réseaux terroristes ou de traite. Dans le cadre des mesures qui continuent d’être prises en vue de renforcer la confiance des femmes à l’égard des représentants de la justice, des projets soutenus par le Fonds pour la consolidation de la paix à Gao et à Tombouctou ont contribué à faire passer la proportion des actes de violence sexiste signalés à la police de 1 % en 2014 à près de 14 % en 2017. La MINUSMA soutient, depuis quelques années, la démarche engagée par une coalition d’organisations non gouvernementales en vue de traduire devant les tribunaux les auteurs de 120 actes de violence sexuelle liée au conflit, commis au cours de l’occupation islamiste et de la rébellion touareg dans le nord.

Recommandation
Je demande à nouveau instamment au Gouvernement d’adopter le projet de loi sur les infractions sexuelles, qui fera de la violence sexuelle un crime contre la personne de la victime plutôt qu’une « atteinte aux bonnes mœurs », et d’améliorer le traitement des plaintes pour faciliter l’exercice de poursuites judiciaires. J’engage le Gouvernement à mettre en œuvre son Plan national de lutte contre la violence sexuelle, ainsi que les mesures de formation, de responsabilisation et de contrôle du secteur de la sécurité que ce plan prévoit. J’exhorte les autorités à faire en sorte que les femmes et les enfants dissociés des Chabab bénéficient d’un soutien en tant que victimes au lieu d’être traités collectivement comme une menace.