CD/G/322

CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LA CHINE EST DISPOSÉE A RENONCER PROVISOIREMENT A EFFECTUER DES ESSAIS NUCLÉAIRES A DES FINS PACIFIQUES

6 juin 1996


Communiqué de Presse
CD/G/322


CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LA CHINE EST DISPOSÉE A RENONCER PROVISOIREMENT A EFFECTUER DES ESSAIS NUCLÉAIRES A DES FINS PACIFIQUES

19960606

La Conférence tient un échange de vues sur la question de l'élargissement de sa composition à 23 nouveaux États membres

Genève, 6 juin -- La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, des déclarations sur le texte du projet de traité soumis le 28 mai dernier aux membres de la Conférence par le Président du Comité spécial chargé de négocier le traité d'interdiction complète des essais nucléaires, M. Jaap Ramaker.

La Chine, tout en soulignant les bénéfices technologiques qui peuvent être tirés de la réalisation d'essais nucléaires pacifiques en termes de développement économique et scientifique, a indiqué qu'elle était disposée à accepter une interdiction provisoire de ces essais jusqu'à la tenue de la première conférence d'examen des États parties au futur traité d'interdiction complète des essais nucléaires.

La Pologne a indiqué son appui au texte proposé par le Président, qui peut constituer une bonne base pour la conclusion du traité en temps voulu, tout en estimant que certaines améliorations pouvaient encore être apportées, notamment en ce qui concerne la référence au principe de non-prolifération, la composition du conseil exécutif de la future organisation du traité et concernant l'entrée en vigueur.

L'Ukraine est intervenue pour annoncer que le processus de transfert, en vue de leur élimination, des ogives nucléaires stratégiques de l'Ukraine vers la Fédération de Russie s'était achevé le 1er juin.

L'Algérie a pour sa part pris la parole sur la question de l'élargissement de la composition de la Conférence, rappelant que son pays a toujours été favorable à ce que les vingt-trois pays ayant fait l'objet d'une décision quant à leur admission deviennent tous, en même temps, membres de la Conférence.

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A cet égard, la Conférence a décidé de reporter une décision, proposée

par l'Argentine, aux termes duquel la Conférence déciderait d'admettre l'Afrique du Sud, l'Autriche, le Bangladesh, le Bélarus, le Cameroun, le Chili, la Colombie, la République populaire démocratique de Corée, l'Espagne, la Finlande, l'Iraq, Israël, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la République de Corée, le Sénégal, la Slovaquie, la Suisse, la Syrie, la Turquie, l'Ukraine, le Viet Nam et le Zimbabwe en tant que membre de la Conférence du désarmement.

Le représentant de l'Argentine a regretté que le débat sur la question ne s'oriente pas de façon constructive et a suggéré que les discussions se poursuivent jusqu'à la prochaine session plénière de la Conférence. Les représentants de Cuba et de la Chine ont également estimé qu'il fallait reporter la décision sur cette question afin, notamment, de permettre aux délégations de consulter leurs gouvernements.

En effet, le représentant du Maroc, tout en soulignant que son pays était favorable à l'élargissement, tout de suite, de la composition de la Conférence, a regretté qu'il soit envisagé, pour ces vingt-trois pays, de renoncer à exercer certains droits. Il a mentionné à cet égard une lettre qui aurait été adressée par ces pays à la présidence, soulignant à cet égard que «toute mention du chapitre 7 de la Charte était inacceptable». Il a en outre regretté le manque de transparence et déploré les méthodes utilisées par certains.

Le Chili, l'Afrique du Sud et l'Autriche, qui font tous trois partie des «vingt-trois», ont salué la proposition argentine et ont notamment souligné qu'il était de leur droit souverain de décider de la façon dont ils exerceraient leurs droits en tant que membres de la Conférence du désarmement. L'Afrique du Sud a souhaité que l'exercice de ce droit ne soit pas utilisé pour faire obstacle à l'admission des vingt-trois.

La prochaine séance plénière de la Conférence du désarmement aura lieu le jeudi 13 juin, à 10 heures.

Déclarations

M. LUDWIK DEMBINSKI (Pologne) a salué la façon dont le président du Comité spécial sur l'interdiction des essais nucléaires, M. Jalap Ramaker, a mené le processus de négociations en menant des consultations à participation non limitée. Il s'est félicité, dans ce contexte du document de travail présenté par le Président du Comité spécial le 28 mai. Ce document, de l'avis de M. Dembinski, constitue une base solide dans l'effort final pour conclure le traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Il a exprimé l'appui de sa délégation à l'essentiel du projet de traité figurant dans ce texte, qui met fin au cercle vicieux dans lequel s'était retrouvé le Comité spécial.

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M. Dembinski a souligné que le projet de traité proposé par le Président s'appuie résolument sur le consensus qui s'est dégagé jusqu'à présent au sein de la Conférence. En outre, les consultations sur les questions encore en suspens semblent encourageantes.

Le représentant polonais a toutefois estimé que certaines propositions pourraient être légèrement améliorées. Ainsi, le libellé des paragraphes du préambule pourrait être «moins timide» en ce qui concerne les aspects du traité d'interdiction complète des essais nucléaires qui touchent à la nonprolifération. En outre, la composition du Conseil exécutif de la future organisation devrait répondre de façon plus adéquate aux

préoccupations des groupes régionaux. La disposition concernant l'entrée en vigueur devrait en outre concilier le principe de l'universalité et la nécessité d'une entrée en vigueur le plus tôt possible.

M. OLEXANDER SLIPCHENKO (Ukraine) a donné lecture d'une déclaration du Président de l'Ukraine dans laquelle il annonce que le processus de transfert, en vue de leur élimination, des ogives nucléaires stratégiques de l'Ukraine vers la Fédération de Russie s'était achevé le 1er juin. Cet événement historique marque le respect en temps voulu des engagements de l'Ukraine aux termes de la déclaration tripartite des présidents de l'Ukraine, des États-Unis et de la Fédération de Russie, faite le 14 janvier 1994. Il constitue également une importante contribution au processus de désarmement. Le processus ne doit toutefois pas être unilatéral, souligne le Président ukrainien, qui a souligné qu'il doit être appuyé et complété sur les plans politique et pratique, en particulier par les pays ayant une capacité nucléaire.

M. Slipchenko a ajouté que l'engagement de l'Ukraine en faveur du désarmement et de la non-prolifération nucléaire témoignent de sa volonté de devenir membre de la Conférence.

M. HOCINE MEGHLAOUI (Algérie) a déclaré que «certains éléments portés à son attention au début de cette semaine» l'ont incité à prendre la parole pour aborder la question de l'élargissement de la Conférence du désarmement. Il a rappelé les déclarations qu'il a faites à ce sujet depuis 1994, en particulier en ce qui concerne le soutien que la délégation algérienne a apporté à la décision sur l'élargissement, le 21 septembre 1995. Il avait alors notamment apporté un soutien total à l'admission à la Conférence du désarmement des 23 pays concernés. Il avait estimé qu'il était grand temps d'élargir cette Conférence. Ceci est devenu même une nécessité.

La délégation algérienne avait insisté sur la nécessité d'admettre immédiatement à la Conférence du désarmement les pays figurant dans la liste de l'Ambassadeur O'Sullivan, mais avançait aussi une proposition qui indique sans ambiguïté qu'elle est prête à aller au-delà de cette liste. Nous ne pouvons pas ignorer que d'autres pays, ne figurant pas parmi les 23, sont

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candidats à l'admission à la Conférence du désarmement car, parmi eux, il y a des pays amis qui ne manquent pas de nous le rappeler chaque fois que l'occasion se présente a déclaré M. Meghlaoui. Il a exprimé le souhait que ces rappels dissiperont les doutes qui sont nés dans l'esprit du chef d'une délégation membre du groupe des 23 à propos de la position de l'Algérie sur la question de l'élargissement de la Conférence du désarmement.

La délégation algérienne n'ignore rien des difficultés qui ont empêché l'avènement d'une solution qu'elle a toujours appelé de ces voeux. Elle sait également qu'il faut rechercher le moyen de surmonter les difficultés qui se présentent. La délégation algérienne figure parmi celles qui font les consensus et non parmi celles qui les défont, a souligné le représentant. L'Algérie demeure toujours disposée à examiner avec la plus grande attention toute formule politiquement et juridiquement acceptable qui lui serait présentée. Et à le faire, surtout, dans la transparence afin d'éviter tout malentendu.

M. SHA ZUKANG (Chine) a estimé qu'aucun traité en matière de désarmement ne devrait faire obstacle au développement scientifique et économique des

États parties. S'agissant du traité d'interdiction complète des essais nucléaires, le représentant a souligné que la réalisation d'explosions nucléaires pacifiques, qui ont un potentiel technologique énorme, peut jouer un rôle important dans le développement de certains pays. Cet aspect de la question revêt un intérêt particulier pour la Chine, pays très peuplé dont le territoire est grand mais manquant de ressources naturelles. La Chine ne peut accepter qu'il soit interdit de développer une technologie prometteuse en vue d'interdire les essais d'armes nucléaires.

La Chine comprend la préoccupation devant la difficulté de différencier les explosions nucléaires pacifiques des explosions à des fins militaires devant les risques pour l'environnement. Elle estime toutefois que ces problèmes ne sont pas insurmontables. Souhaitant faciliter la conclusion du traité dans les délais fixés, la délégation chinoise est disposée à accepter une interdiction provisoire sur les essais nucléaires pacifiques, qui serait examinée à la première conférence d'examen des États parties au traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Si les États parties y décident, par consensus, de permettre la réalisation d'essais nucléaires pacifiques, elle devra alors se pencher sur les arrangements à mettre en oeuvre pour la réalisation de telles explosions. De tels arrangements excluraient tout accord militaire.

En ce qui concerne l'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires, la Chine estime qu'elle doit intervenir dès la signature de tous les États qui ont une capacité technique de réaliser des explosions nucléaires. La délégation chinoise appuie par ailleurs la

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proposition du groupe des 21 tendant à ce que le texte du traité fasse référence à l'objectif de désarmement nucléaire. La Chine estime en outre que l'attention voulue soit accordée aux garanties de sécurité pour les pays non dotés d'armes nucléaires, ainsi qu'à l'acceptation, par les États nucléaires, d'une clause de non-recours aux armes nucléaires en premier. Pour démontrer à nouveau sa souplesse, la délégation chinoise accepte de retirer son texte sur un article séparé relatif à cette question.

Enfin, M. Sha a souligné que les données recueillies par le système international de surveillance et les experts en provenance de divers pays chargés de le faire fonctionner seront, en principe, fiables et devraient être la principale base sur laquelle sera fondée une inspection sur place. Il a toutefois reconnu que les capacités du système de surveillance pourraient ne pas satisfaire aux besoins du traité en matière de vérification. A cet égard, les moyens techniques nationaux peuvent jouer un rôle complémentaire. Mais il faudra s'assurer que les données ainsi obtenues soient fiables, vérifiables et recueillies en conformité avec les principes universellement reconnus du droit international. Elles devront également être soumises à un processus d'examen tant technique que politique. La délégation chinoise est «catégoriquement opposée» au déclenchement d'une inspection sur place fondée uniquement sur des «renseignements d'origine humaine». Ces inspection seront sensibles au plan politique et pourraient, dans une certaine mesure, empiéter sur la souveraineté de l'État faisant l'objet d'une inspection. Les inspections sur place ne devraient être déclenchées qu'en dernier recours.

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