Soixante-seizième session,
Conférence sur les océans, Dialogue de haut niveau – matin
MER/2155

Conférence sur les océans: l’ODD 14, un activateur potentiel pour une mise en œuvre complète du Programme de développement durable à l’horizon 2030

LISBONNE, 1er juillet -- Lors de la dernière table ronde organisée dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur les océans qui se tenait à Lisbonne, diverses parties prenantes ont examiné aujourd’hui la manière dont il serait possible de « tirer parti des liens entre l’objectif de développement durable no 14 et les autres objectifs aux fins de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 », notamment en harmonisant les efforts en cours et des ressources limitées.

Le Vice-Premier Ministre des politiques climatiques et Ministre de l’environnement et de l’eau de la Bulgarie a ainsi jugé important d’assurer la coordination des actions afin de parvenir à la réalisation de l’ODD 14.  M. BORISLAV SANDOV, qui coprésidait ce dialogue interactif, a rappelé que la Bulgarie se trouve aux abords de la mer Noire et que son pays collabore avec ses voisins pour renforcer la protection de cet espace maritime.  Il a donc jugé crucial pour les nations riveraines de privilégier l’économie bleue, avec l’appui du champ académique et du secteur privé, afin de garantir la protection de l’environnement marin.  Sofia, a-t-il annoncé, vient également de lancer un programme spécifique pour impliquer les jeunes dans cette nouvelle réalité de l’économie bleue, tout en les intégrant aux efforts de protection de l’environnement, y compris marin.  L’autre Coprésident de la session, le Ministre de la santé, du bien-être et de l’environnement d’Antigua-et-Barbuda, M. MOLWYN JOSEPH, a expliqué que les ODD se renforcent mutuellement et qu’il est donc logique de les mettre en œuvre de manière intégrée, pour des résultats plus probants.  Compte tenu de la nature indivisible de ces objectifs et de leur interdépendance, son pays, a-t-il dit, a privilégié une approche holistique qui tire le maximum de bénéfices de la mise en œuvre concomitante de tous les ODD.  Il relève du bon sens de privilégier des politiques globales pour s’attaquer à tous ces problèmes cruciaux, a justifié M. Joseph.

En effet, réaliser l’ODD 14 peut avoir un impact sur les autres objectifs, a confirmé le modérateur du débat, M. JAMES LEAPE, de l’Institut pour l’environnement de Stanford Woods.  Selon lui, promouvoir la pêche durable, par exemple, aura un impact certain sur l’élimination de la faim (ODD 2), l’éradication de la pauvreté (ODD 1), sans oublier les retombées sur diverses cibles relatives à l’ODD 3 portant sur la santé.  Il est donc question d’initier une collaboration intersectorielle au niveau international, afin de tirer parti des interconnexions entre les divers objectifs. 

Pour le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales de l’ONU, M. LIU ZHENMIN, en l’absence d’une intégration des préoccupations océaniques dans les activités engagées dans d’autres secteurs, nous ne pourrons pas parvenir à un océan sain et durable.  Sans la réalisation de l’objectif no 14 et de ses cibles liées à la pêche durable, nous aurons du mal à atteindre l’ODD 2 sur la sécurité alimentaire, a-t-il fait observer.  En effet, la pêche est une composante importante des systèmes alimentaires mondiaux et les ressources halieutiques représentent environ 20% de tous les apports en protéines animales pour 3,2 milliards de gens à travers le monde.  De même, durant la pandémie de COVID-19, quand des gestionnaires d’aires marines protégées ne pouvaient se rendre sur le terrain pour entreprendre les activités de suivi et de surveillance nécessaires, de nouvelles technologies innovantes ont été perfectionnées et exploitées, contribuant de facto à la réalisation de certaines cibles de l’ODD 9 relatif à l’industrie, l’innovation et l’infrastructure. 

Une innovation également de mise au sein de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a expliqué sa Secrétaire exécutive.  Mme ARMIDA SALSIAH ALISJAHBANA a appelé les États Membres à mieux tirer parti de la recherche scientifique, du développement et de la technologie pour trouver des solutions océaniques aux changements climatiques.  Pour aider à faire le lien entre le climat et l’océan, la CESAP a mis au point une approche alignée sur les priorités nationales, avec une méthodologie destinée à identifier les défis posés par la réalisation des cibles fixées par l’objectif no 14 et de ses liens avec d’autres ODD. 

Mme TERESA MOREIRA, la Chef par intérim de la Division du commerce international et des marchandises à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a fait valoir une approche transversale et inclusive, qui prendrait en compte les femmes, les jeunes, la pêche artisanale et les petites entreprises, puisque personne « ne doit être laissé pour compte ».  À l’appui d’une économie océanique durable et résiliente profitant à tous, le « Blue Deal » pour le commerce mondial, l’investissement et l’innovation peut jouer un rôle.  Selon la déléguée, il existe de nombreuses opportunités commerciales et d’investissement qui pourraient être utilisées de manière durable dans le secteur des océans, d’autant que les opportunités économiques basées sur l’océan sont estimées à au moins 24 milliards de dollars par la CNUCED, soit le PIB des États-Unis en 2021.  Outre l’exploitation de l’énergie océanique qui soutient les ODD 7 et 13, la CNUCED a relevé qu’en cultivant juste 2% des 34,7 millions de tonnes de plantes aquatiques récoltées des océans et mers chaque année, nous pourrions fournir assez de protéines pour nourrir une population de 12 milliards de personnes, avec une empreinte carbone « quasi inexistante ».

Le Portugal s’est félicité d’avoir pu stabiliser ses stocks de poissons, notamment la très prisée sardine.  Pour ce pays, une bonne gestion de la pêche et une aquaculture de qualité pourraient avoir un impact positif sur la sécurité alimentaire.  Mme CLAIRE JOLLY, Chef de l’unité de l’économie océanique et spatiale de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a également insisté sur les liens entre préservation des océans et sécurité alimentaire.  Elle a relevé que près de 170 millions de personnes dans le monde pourraient échapper à la dénutrition d’ici à 2030 si l’on accroît la production durable de produits de la mer grâce à une gestion efficace des pêches, des investissements conséquents et une innovation dans le domaine des aquacultures.  Après s’être félicitée de l’accord historique sur les subventions à la pêche de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Mme Jolly a fait état d’une étude datant de 2016, qui conclut que l’économie océanique pourrait doubler de taille d’ici à 2030, atteignant 3 000 milliards de dollars, pour employer 40 millions de personnes.  Mais, a-t-elle prévenue, cette croissance a un prix, avec de nombreux défis pour la santé des océans, notamment du fait des changements climatiques.

La Directrice générale en charge des pêches et des affaires maritimes de l’Union européenne, Mme CHARLINA VITCHEVA, s’est également appesantie sur les liens entre climat et océans.  L’Union européenne (UE), a-t-elle expliqué, a déposé sept engagements volontaires relatifs aux océans et au climat.  Ceux-ci portent par exemple sur l’observation de la Terre par des satellites afin d’assurer un suivi des changements climatiques et établir des prévisions sur les océans.  Selon elle, aborder ces interconnexions, c’est faire preuve de bon sens, mais aussi ce qui est exigé par le droit international.

Au cours des 10 dernières années, nous avons fourni environ 120 millions de dollars à des groupes travaillant dans plus de 60 pays, a pour sa part souligné M. J. CHARLES FOX, Directeur exécutif de Ocean 5, une coalition internationale de bailleurs de fonds, 23 fondations privées d’Amérique du Nord et d’Europe, qui fournissent des subventions aux organisations de la société civile œuvrant à la mise en place de nouvelles politiques de conservation des océans à travers le monde.  Il a indiqué que les dons versés en faveur de la lutte contre les changements climatiques sont probablement 6 à 10 fois plus importants que ceux dédiés aux océans.  Il s’est tout de même réjoui de constater qu’un important groupe de donateurs souhaiterait soutenir l’objectif « 30x30 » qui consiste à préserver 30% des océans d’ici à 2030. 

Cette perspective de financement a été bien accueillie par Cabo Verde qui a fait observer que réaliser l’ODD 14 et les autres objectifs exige de renforcer les financements en faveur des pays en développement, notamment les petits États insulaires en développement (PEID).  Parmi ces derniers, la Trinité-et-Tobago a appelé à renforcer les interconnexions entre océans et changements climatiques, afin de renforcer le lien entre les ODD 14 et 13.  L’Autorité internationale des fonds marins a également expliqué l’importance de bien gérer les fonds marins.  Elle a pour sa part travaillé à la mise en œuvre de 12 des 17 ODD, a-t-elle fait valoir.  La Roumanie a confirmé que la clef serait d’exploiter les liens entre l’ODD 14 et les autres, en s’appuyant par exemple sur la coopération régionale en vue de mener conjointement des activités ciblant l’ODD 14 en relation avec les autres.  Les Philippines ont aussi plaidé pour une approche intégrée tenant compte des partenariats, tandis que le Brésil a aussi parié sur des partenariats avec le secteur privé pour la conservation des ressources hydriques du pays.

Nauru, qui s’exprimait au nom des petits États insulaire en développement du Pacifique, a également appelé à la coopération entre les parties prenantes.  Pour sa déléguée, l’éducation des jeunes aux questions océaniques est cruciale.  Elle a appelé à la mobilisation des fonds publics et privés en faveur de l’ODD 14 et des autres, en droite ligne des Orientations de Samoa.  Le Zimbabwe a insisté sur le renforcement des capacités et le transfert des technologies afin de soutenir les pays en développement, notamment ceux sans littoral, pour réaliser l’ODD 14, et partant, les autres ODD.  Même son de cloche pour la Colombie qui a souligné l’importance de l’assistance financière pour les projets des pays en développement. 

Le grand groupe des enfants et des jeunes a invité les politiques à collaborer avec les jeunes pour la prise de décisions, ainsi que les dirigeants à écouter la science.  Je suis lasse d’entendre les adultes parler de leurs erreurs, s’est empotée la déléguée d’Acqua Matter, en implorant les délégations d’inclure les agents du changement que sont les jeunes.  Au sein du International Council for Local Environmental Initiatives, on appelle les dirigeants à mettre l’accent sur les initiatives locales.  Haïti a dit sa détermination à coopérer avec les acteurs multinationaux pour créer un cadre national de gestion des océans qui veillera à ne laisser personne de côté.  Quant à Medical Impact, elle a regretté que les États n’aient pas réagi à l’acidification des océans avec la même urgence que pour la COVID-19, alors que la mauvaise santé des océans pourrait tuer autant de gens que la pandémie.  Enfin, l’organisation Apco Worldwide a dit miser sur le recyclage, en se servant des technologies modernes et du principe selon lequel « la poubelle de l’un peut être le trésor de l’autre ».

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