9171e séance - après-midi
CS/15084

Le Conseil de sécurité se réunit en raison d’une plainte de la Russie alléguant des programmes d’armes biologiques en Ukraine

Le Conseil de sécurité s’est réuni, cet après-midi, après la plainte déposée par la Fédération de Russie au titre de la Convention sur les armes biologiques, arguant de programmes d’armes biologiques en Ukraine.  Pourtant, l’ONU n’a pas connaissance de programme de ce type, selon le Directeur du Bureau de désarmement des Nations Unies, M. Adedeji Ebo.  Inquiètes et repoussant de telles allégations, les délégations ont appelé à la désescalade, au dialogue et à la cessation des hostilités en Ukraine.

Le représentant de la Russie a assuré disposer d’importantes preuves de la violation par l’Ukraine et les États-Unis de leurs obligations découlant de la Convention.  Selon lui, l’Ukraine mène des activités biologiques militaires avec l’aide et la participation directes du Département américain de la défense dans des laboratoires situés sur le territoire des anciennes Républiques soviétiques.  Il a également annoncé qu’il présentera un projet de résolution au Conseil de sécurité qui viserait à établir et envoyer une commission d’enquête sur les allégations que la Russie a présentées dans sa plainte.

Les Nations Unies n’ont ni le mandat ni la capacité opérationnelle ou technique d’enquêter à ce sujet, a fait observer M. Ebo.  En outre, une réunion consultative formelle au titre de la Convention a déjà été organisée le mois dernier à Genève, à la demande de la Russie, et aucun des éléments qu’elle a fournis n’a pu démontrer que la coopération entre l’Ukraine et les États-Unis n’est pas menée à des fins exclusivement pacifiques, comme les deux pays l’ont affirmé.

La majorité des délégations ont rejeté en bloc les allégations de la Russie.  Perte de temps, allégations infondées, désinformation, propagande, absence de preuves tangibles…  Nombre d’entre elles ont vivement critiqué la demande de la Russie, dénonçant une prise en otage du Conseil de sécurité et une menace à sa réputation.  La Russie utilise la Convention et le Conseil de sécurité comme plateformes pour sa désinformation, dans une tentative de justifier l’injustifiable et illégale invasion de l’Ukraine, s’est hérissée l’Irlande.  Elle fait une « énième tentative de nous faire oublier qu’elle viole la Charte des Nations Unies », a renchéri la France.  Les États-Unis ont réitéré ne soutenir aucun laboratoire ukrainien d’armes biologiques, accusant en retour la Russie de maintenir depuis longtemps un programme d’armes biologiques en violation du droit international et d’avoir utilisé des armes chimiques en Syrie.

Invitée à s’exprimer en tant que pays concerné au premier chef, l’Ukraine a assuré n’avoir jamais produit ou stocké d’armes biologiques ou chimiques.  Elle n’en a tout simplement pas la capacité.  Se disant prête à recevoir un groupe d’experts indépendants pour visiter ses laboratoires lorsque la Russie cessera sa guerre à outrance et retirera ses forces, elle s’est surtout inquiétée que la Russie, en répandant de tels mensonges, ne prépare la voie à de nouvelles provocations en Ukraine.

« Même si les arguments de la Fédération de Russie ne vous plaisent pas, vous n’avez pas le droit de les ignorer en appliquant votre propre logique politique », a averti le représentant de la Russie, rappelant que son pays se fonde sur le droit international et réitérant son droit à demander une enquête.

En ce sens, le Gabon et la Chine ont plaidé pour une enquête impartiale et indépendante sur les allégations de la Russie.  Plusieurs délégations ont par ailleurs appelé à renforcer le régime de la Convention sur les armes biologiques ou à toxines, notamment lors de la neuvième Conférence d’examen prévue en novembre.  Pour la Chine, l’Inde et le Ghana, la communauté internationale doit évoluer sur la question d’un mécanisme international de vérification, notamment par le biais d’un protocole à la Convention.

Plus nuancé, le Brésil a demandé aux parties directement impliquées dans cette question de tirer profit de ces échanges d’informations pour garder ouvert les canaux de dialogue et éviter des malentendus qui pourraient être perçus comme des menaces. 

MENACE CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ ITNERNATIONALES

Déclarations

M. ADEDEJI EBO, Directeur du Bureau des affaires de désarmement et Haut-Représentant adjoint pour les affaires de désarmement, a indiqué que la Fédération de Russie a déposé une plainte officielle en application des dispositions de l’article VI de la Convention sur les armes biologiques au sujet d’allégations de programmes d’armes biologiques en Ukraine.  Comme le Haut-Représentant en a informé le Conseil, en mars et en mai de cette année, les Nations Unies n’ont pas connaissance de tels programmes jusqu’à ce jour.  En outre, a fait observer M. Ebo, les Nations Unies n’ont ni le mandat ni la capacité opérationnelle ou technique d’enquêter à ce sujet.  L’instrument de droit international pertinent en la matière est la Convention sur les armes biologiques de 1972, qui interdit la mise au point, la fabrication, l’acquisition, le transfert, le stockage et l’utilisation d’armes biologiques ou à toxines.  La Russie et l’Ukraine sont États parties à cette Convention, a-t-il rappelé.

M. Ebo a expliqué que, le 29 juin 2022, la Russie a soumis une demande de convocation d’une réunion consultative formelle au titre de l’article V de la Convention et des déclarations finales des deuxième et troisième Conférences d’examen de la Convention.  Cette réunion a commencé, le 26 août 2022, par une séance de procédure et a repris le 5 septembre, sur une période de quatre jours, sous la présidence de M. György Molnár, de la Hongrie.  La Russie y a présenté un exposé sur sa demande de consultation au titre de l’article V concernant ses questions en souffrance posées aux États-Unis et à l’Ukraine au sujet du respect de leurs obligations respectives au titre de la Convention dans le contexte de l’exploitation de laboratoires biologiques en Ukraine.  La réunion a entendu la réponse des délégations de l’Ukraine et des États-Unis, ainsi que celles de 42 États parties et d’un État signataire.  À l’issue de cette réunion, les États parties ont adopté un rapport convenant qu’« aucun consensus n’avait été atteint au cours de la réunion consultative formelle » et qui a marqué la fin du processus de consultation formelle.

Les dispositions de l’article VI de la Convention n’ont jamais été invoquées depuis son entrée en vigueur, a signalé M. Ebo.  Celles-ci stipulent que « chaque État partie à la présente Convention qui constate qu’une autre partie agit en violation des obligations découlant des dispositions de la Convention peut déposer une plainte auprès du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies.  Cette plainte doit fournir toutes les preuves possibles de son bien-fondé […] ».  La Convention ne fournit pas d’orientation sur le type d’enquête que le Conseil peut mener mais, s’il décide d’en lancer une, le Bureau des affaires de désarmement est prêt à le soutenir, a fait savoir M. Ebo.  Il a par ailleurs suggéré aux États parties de saisir l’occasion de la neuvième Conférence d’examen de la Convention, qui aura lieu en novembre et décembre, pour renforcer la Convention.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit regretter que le Secrétariat de l’ONU déclare toujours qu’il ne dispose d’aucune information concernant d’éventuelles violations sur le territoire de l’Ukraine de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction.  Il a ajouté avoir d’importantes preuves de la violation par l’Ukraine et les États-Unis de ladite Convention et réitéré sa préoccupation face aux activités biologiques militaires menées avec l’aide et la participation directes du Département américain de la défense dans des laboratoires situés sur le territoire des anciennes Républiques soviétiques, loin du continent nord-américain et à proximité de la Russie.  Il s’agit d’une menace directe pour la sécurité biologique de la Russie, a-t-il dénoncé.  En présentant sa plainte, la Russie a respecté ses obligations en vertu de la Convention, a expliqué le représentant.

Selon M. Nebenzia, la délégation russe a pris toutes les mesures nécessaires au niveau bilatéral et multilatéral pour résoudre la situation en envoyant aux États-Unis et à l’Ukraine des notes énumérant des questions spécifiques concernant leur mise en œuvre des dispositions des articles I et IV de la Convention, en demandant des réponses, en vain.  Ces deux pays n’ont pas fourni les explications nécessaires et n’ont pas pris de mesures immédiates pour corriger la situation, s’est-il plaint.  Il a ainsi justifié pourquoi, mise devant cette situation inadmissible, la délégation russe a saisi les dépositaires de la Convention pour convoquer une réunion consultative conformément à l’article V de celle-ci.  La tenue des discussions dans son cadre confirme la pertinence du problème qui concerne non seulement la Russie, mais aussi l’ensemble de la communauté mondiale, a-t-il fait remarquer.  Le représentant a formulé le vœu que Washington et Kiev prennent des mesures pour corriger la situation actuelle avant de donner des détails sur sa plainte.  Il a insisté que tout État partie à la Convention peut déposer une plainte auprès du Conseil de sécurité contre un autre État partie.  En outre, chaque État partie est tenu de coopérer à toute enquête que le Conseil de sécurité pourrait décider.  La Russie a donc saisi le Conseil d’une plainte faisant état des actions des États-Unis et de l’Ukraine en violation des obligations découlant des dispositions de la Convention, a rappelé le représentant.

M. Nebenzia a également annoncé avoir présenté un projet de résolution du Conseil de sécurité qui viserait à établir et à envoyer une commission d’enquête sur les allégations présentées dans la plainte de la Fédération de Russie contre les États-Unis et l’Ukraine concernant le respect des obligations au titre de la Convention sur les armes biologiques sur le territoire ukrainien.  Une telle commission devrait alors clarifier rapidement toutes les circonstances d’un éventuel non-respect par ces deux pays de leurs obligations découlant de la Convention en Ukraine afin de les encourager à remédier à cette situation inacceptable, a espéré le représentant.  Il a ajouté que, selon le projet de résolution précité, cette commission devrait soumettre un rapport et des recommandations au Conseil de sécurité au plus tard le 30 novembre de cette année.  Il a aussi fait valoir que ladite commission pourrait informer les États parties à la Convention des résultats de l’enquête lors de sa neuvième Conférence d’examen, prévue à Genève du 28 novembre au 16 décembre de cette année.

Mme MONA JUUL (Norvège) a déploré la désinformation russe dont le seul but est de servir d’écran de fumée, semer la confusion et détourner l’attention de sa guerre non provoquée, illégale et brutale en Ukraine.  Elle a dit avoir évalué les documents fournis par la Russie et les échanges lors des consultations formelles sans rien avoir entendu, ni rien lu qui puisse corroborer les allégations avancées.  Les consultations n’ont pas démontré qu’il y avait lieu de s’inquiéter des violations de la Convention par les États-Unis et l’Ukraine, a martelé la représentante.  Elle a estimé que la coopération entre les États-Unis et l’Ukraine a un objectif légitime et pacifique, dénonçant le fait que la Russie utilise les mécanismes de la Convention sur les armes biologiques pour critiquer l’aide internationale, qui est une pierre angulaire de la Convention.

La coopération transfrontalière est essentielle pour renforcer notre résilience collective face aux menaces biologiques, a plaidé la représentante qui a exhorté à s’opposer avec force et conviction aux tentatives visant à présenter à tort les activités de coopération et d’assistance pacifiques comme une forme de non-respect.  Au cours des derniers mois, a poursuivi la représentante, la Russie a fait de nombreuses allégations selon lesquelles l’Ukraine prévoyait des opérations militaires impliquant des matières chimiques, biologiques ou radioactives.  Mardi, la Russie a affirmé que l’Ukraine construisait et se préparait à utiliser une bombe sale contenant des substances radioactives, ce qui, selon elle, est un autre exemple des tentatives russes de semer la confusion.  La Russie devrait cesser de gaspiller le temps et les ressources de ce Conseil sur des accusations sans signification, a demandé la représentante qui a condamné la guerre de la Russie contre l’Ukraine en demandant qu’elle cesse.

Mme AMEIRAH ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a appelé le Conseil de sécurité à être unifié pour envoyer un message clair selon lequel toute utilisation d’armes biologiques, chimiques ou d’autres armes de destruction massive, quelles que soient les circonstances, est inacceptable et constitutive d’attaque contre notre humanité commune.  Dans le même temps, la déléguée a encouragé tous les États parties à la Convention à résoudre leurs désaccords par un dialogue constructif, arguant que c’est le seul moyen durable pour éviter la voie dangereuse sur laquelle nous nous trouvons actuellement.  La représentante a, à nouveau, appelé à la désescalade, à la cessation des hostilités dans toute l’Ukraine et à la recherche d’une solution diplomatique à ce conflit.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) s’est insurgée contre la Fédération de Russie pour avoir propagé la désinformation depuis le début de la guerre en alléguant de l’emploi de bombes sales ou d’armes chimiques à visée offensive.  Combien de temps allons-nous devoir encore entendre de telles allégations infondées? a lancé Mme Woodward, pour qui la Russie doit cesser de diaboliser la coopération technique, scientifique et pacifique légitime que tous les États parties à la Convention sur les armes biologiques ont le droit d’instaurer.  Les allégations de la Russie ont été entendues, examinées et rejetées, a-t-elle rappelé, estimant que rien ne permet d’enquêter plus avant.  La représentante a souligné que le Conseil de sécurité est un organe sérieux et regretté que les actes de la Russie menacent sa réputation.  La Russie déverse sur le programme du Conseil quantité de théories du complot, a-t-elle dénoncé, lui conseillant plutôt de se concentrer sur ses propres obligations au titre de la Charte des Nations Unies et de mettre un terme à la guerre.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré qu’alors que sa délégation prend très au sérieux toutes les questions impliquant des armes de destruction massive, tous les arguments présentés au Conseil aujourd’hui ne sont pas, selon elle, convaincants.  Il a regretté la triste réalité de voir le Conseil tenu en otage, paralysé et utilisé de manière abusive.  « N’en avons-nous pas assez de ces écrans de fumée qui visent à détourner notre attention des vrais problèmes de cette débâcle sur le terrain et dont le but est d’alimenter l’opinion internationale de paroles et paroles tout au long de l’année »? a demandé le représentant.  Les allégations de la Russie sont non vérifiées et sans aucun fondement, a-t-il tranché, en invitant, pour les vérifier, d’utiliser les mécanismes prévus par la Convention sur les armes biologiques notamment l’article V qui donne aux États parties des mécanismes de dialogue et de concertation.  Il a rappelé que ces mécanismes ont déjà été utilisés, en août dernier, mais sans aucun résultat.  Il a demandé d’éviter les pièges de la propagande simplement parce que la Russie a décidé de s’écouter parler et d’utiliser de manière abusive le Conseil pour présenter sa réalité biaisée.

Le délégué a insisté sur le fait que les documents présentés par la Russie ne contiennent aucune preuve tangible: ils ne démontrent nullement une éventuelle violation de la Convention en Ukraine.  Les travaux de recherche scientifique et les projets qui sont mentionnés entrent dans l’article X de la Convention, a-t-il expliqué, en concluant que les allégations et les conclusions tirées par la Russie ne sont pas crédibles et n’établissent pas la preuve de violations par les États-Unis ou l’Ukraine de leurs obligations.  Il a dénoncé les accusations de la Russie portant sur des agents pathogènes et des moustiques mortels tout en demandant « comment un moustique peut-il faire la distinction entre les Ukrainiens et les Russes ».  C’est la guerre russe qui est mortelle, qui fait des victimes, a conclu le délégué, en déclarant que cette guerre doit cesser.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a estimé que la réunion de cet après-midi est « franchement, une perte de temps pour tout le monde ».  La Russie, a-t-elle dit, nous a appelés ici, une fois de plus, dans le seul but de répandre la désinformation.  « Nous savons tous que ces affirmations sont de pures inventions, présentées sans la moindre preuve. »  La déléguée a affirmé que l’Ukraine n’a pas de programme d’armes biologiques et a rappelé les propos de M. Ebo qui a déclaré que l’ONU n’est pas au courant de tels programmes.  Les États-Unis non plus n’ont pas de programme d’armes biologiques, a-t-elle assuré, ajoutant qu’il n’y a pas de laboratoires ukrainiens d’armes biologiques soutenus par les États-Unis.  L’Ukraine possède et exploite une infrastructure de laboratoire de santé publique, tout comme de nombreux pays qui cherchent à se protéger des maladies infectieuses, a observé la représentante, en expliquant que ces installations permettent de détecter et de diagnostiquer des maladies, à des fins de santé publique.

Or, a-t-elle poursuivi, on ne peut pas en dire autant de la Russie.  C’est Moscou, selon elle, qui maintient depuis longtemps un programme d’armes biologiques en violation du droit international.  Et, c’est Moscou qui a une histoire bien documentée d’utilisation d’armes chimiques et de protection du « régime Assad », celui-ci ayant utilisé à plusieurs reprises des armes chimiques.  Mme Thomas-Greenfield a ainsi expliqué pourquoi elle estime qu’il devrait y avoir une enquête pour savoir si la Russie s’est procurée illégalement des véhicules aériens sans pilote iraniens.  Concluant son propos, la représentante a dit que peu importe le nombre de réunions que la Russie tente d’organiser sur ce sujet et peu importe à quel point elle accélère sa machine de propagande, « nous ne devons pas détourner les ressources de l’ONU vers une enquête sans fondement ».  Elle a aussi demandé de ne pas permettre aux tactiques de la Russie de nous distraire de sa brutale guerre d’agression.  Agir ainsi reviendrait à céder au mensonge et à saper la crédibilité et la dignité de ce Conseil, a conclu Mme Thomas-Greenfield. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a déclaré que seules les enquêtes internationales, indépendantes et impartiales, mandatées par les instances internationales en cette capacité peuvent faire la lumière sur des programmes ou des allégations d’utilisation d’armes biologiques.  Il faudrait donc que la communauté internationale parvienne à un consensus pour se doter de mécanismes de vérification renforcés, dans un contexte évolutif au plan international, a-t-elle déduit.  La représentante a également appelé les parties à éviter tout acte de provocation susceptible d’aggraver les tensions.  Les armes biologiques ne connaissent pas de frontières et personne ne sera à l’abri en cas d’utilisation, a mis en garde l’oratrice.

Mme TRACY WANJIRU MBABU (Kenya) a dit que la nature aveugle de ces armes ne peut amener que des dégâts à long terme pour les personnes et l’environnement.  En tant qu’État partie à la Convention sur les armes biologiques, le Kenya estime qu’il faut la respecter, notamment son article qui interdit la mise au point, la fabrication et l’utilisation d’armes biologiques ou à toxines, a dit la représentante.  Elle a appelé à continuer à rechercher une solution pacifique à ce confit conformément à la Charte des Nations Unies.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a pris note des déclarations de la Fédération de Russie sur les activités biologiques militaires présumées en Ukraine.  Il a rappelé que, si le Conseil de sécurité a traité de cette situation en mars et mai 2022, ce n’est qu’en septembre que les consultations prévues à l’article V de la Convention sur les armes biologiques ont eu lieu à Genève.  Ces consultations n’ont pas conclu à l’existence d’une quelconque violation de la Convention, a déclaré le représentant, citant le Bureau des affaires de désarmement qui a déclaré qu’il n’avait aucune preuve d’activités contraires à la Convention en Ukraine.  Le Bureau l’avait déjà portée à l’attention de ce Conseil en mai dernier, a-t-il ajouté.

Selon le représentant, la question qui se pose est de savoir si une enquête du Conseil de sécurité doit être déclenchée, comme le prévoit le paragraphe 2 de l’article VI de la Convention.  L’exigence incontournable pour pouvoir activer l’examen de la question par ce Conseil et envisager une enquête, à cet égard, est d’avoir des preuves irréfutables de la violation présumée des obligations découlant de la Convention.  Étant donné que le Bureau des affaires de désarmement a déclaré à deux reprises, et de nouveau cet après-midi, qu’il ne disposait pas de telles preuves, il convient que la question soit portée à l’attention de la neuvième Conférence d’examen de la Convention sur les armes biologiques qui se réunira le mois prochain à Genève, a suggéré le représentant.  Ce sera l’occasion de voir si nous parvenons à engager des négociations pour établir un véritable mécanisme de vérification, qui manque à la Convention, a-t-il conclu.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a dit condamner l’énième tentative de la Fédération de Russie de faire oublier qu’elle viole la Charte des Nations Unies.  À nouveau, la Russie utilise le Conseil de sécurité comme une plateforme de propagande, alors que les Nations Unies ont clairement indiqué, à plusieurs reprises, et encore aujourd’hui, qu’elles ne possèdent aucune information sur l’existence des programmes biologiques offensifs en Ukraine, a constaté le délégué.  Selon lui, la Russie sème une nouvelle fois la confusion.  Elle cherche à distraire l’attention de la communauté internationale, et de sa propre population, de la réalité catastrophique de sa guerre sur le terrain, a-t-il analysé, ajoutant que chacun sait que c’est la Russie, et non l’Ukraine, qui a utilisé des armes chimiques ces dernières années et a couvert, pendant des années, le « régime syrien ».  Pour M. de Rivière, les allégations russes selon lesquelles l’Ukraine se préparerait à utiliser une bombe sale sont à l’évidence fausses.  La France les rejette, a-t-il insisté, en estimant que personne ne serait dupe d’une tentative d’utiliser cette allégation comme prétexte à une escalade.  « Que cela soit clair: nous rejetons tout prétexte d’escalade, quel qu’il soit, de la part de la Russie. »  Le représentant a affirmé que le discours russe est dangereux, et d’autant plus irresponsable qu’il émane d’un État dépositaire de la Convention sur l’interdiction des armes biologiques.

M. GENG SHUANG (Chine) a déclaré qu’en tant qu’État ayant beaucoup souffert de l’utilisation d’armes biologiques durant la Seconde Guerre mondiale, la Chine estime que les questions posées par la Fédération de Russie méritent des réponses appropriées.  Il est regrettable que les parties n’y répondent pas, a dit le représentant, pour qui il est donc logique d’invoquer l’article VI de la Convention sur les armes biologiques.  Il a estimé par ailleurs que la communauté internationale doit évoluer sur la question d’un mécanisme international de vérification.  Cette Convention ne doit pas faire exception aux autres régimes, a argumenté le délégué, avant de rappeler la position de son pays à propos de la guerre en Ukraine: les parties doivent s’abstenir de toute escalade et en venir au dialogue pour mettre fin à ce conflit.  Cette guerre ne sert les intérêts de personne, a-t-il lancé en guise de conclusion.

Pour M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande), l’utilisation d’agents biologiques ou de toxines comme armes de guerre est odieuse et rigoureusement interdite par le droit international.  Le représentant a déploré les nouvelles demandes de la Russie contre l’Ukraine qu’il a jugé infondées puisqu’aucune preuve sérieuse ou crédible de ses allégations n’a été présentée, ni aujourd’hui ni lors de la réunion consultative formelle le mois dernier.  Les réponses de fond apportées par l’Ukraine et les États-Unis démontrent clairement que leurs activités conventionnelles, ainsi que celles menées dans le cadre du programme coopératif de réduction de la menace sont de l’ordre d’une coopération et d’une recherche pacifiques et légitimes, a analysé le délégué.  Profondément préoccupé par la plainte déposée au titre de l’article VI de la Convention, il a estimé que la Russie utilise la Convention et le Conseil de sécurité comme plateformes pour sa désinformation, dans une tentative de justifier l’invasion injustifiable et illégale de l’Ukraine.  Une telle attitude cynique nuit au Conseil et à son rôle de maintien de la paix et de la sécurité internationales, a déploré le délégué, en considérant que la Russie ferait mieux de mettre immédiatement et sans condition un terme à ses hostilités, en se retirant de la totalité du territoire de l’Ukraine.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a pris note des commentaires des délégations après la demande de la Russie et des arguments présentés par celle-ci.  S’agissant du projet de résolution russe présenté au Conseil de sécurité, il a dit qu’au titre de l’article VI de la Convention sur les armes biologiques, d’autres procédures peuvent être utilisées à l’avenir dans des cas semblables.  En outre, si le Conseil décidait de mener une telle enquête, il doit avoir des preuves solides et de fonds pour agir, a fait valoir le représentant, qui a demandé aux parties directement impliquées de tirer profit de ces échanges d’informations pour garder ouvert les canaux de dialogue: il faut en effet éviter des malentendus qui pourraient être perçus comme des menaces.  Il a saisi cette occasion pour appeler à la reprise de négociations visant à l’adoption et la ratification d’un protocole juridiquement contraignant renforçant la mise en œuvre de la Convention sur les armes biologiques.  La situation dont est saisi le Conseil, aujourd’hui, ne fait que renforcer l’urgence d’établir de tels mécanismes, a-t-il insisté.  La prochaine Conférence d’examen de la Convention représente, à son avis, une occasion de reprendre ces discussions sans attendre.

Selon M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde), la situation actuelle reflète la nécessité de négocier un protocole global juridiquement contraignant, prévoyant un mécanisme de vérification efficace, universel et non discriminatoire, afin de renforcer la mise en œuvre de la Convention par les États parties.  Profondément préoccupée par la dégradation de la situation en Ukraine, l’Inde n’a cessé d’appeler à la cessation des hostilités et de suivre la voie de la diplomatie et du dialogue pour faire face à la situation, a rappelé son représentant, pour qui le fait même de discuter de cette question au Conseil témoigne de la situation précaire dans laquelle se trouve le monde aujourd’hui.  L’escalade des hostilités et de la violence n’est dans l’intérêt de personne, a prévenu le représentant, avant d’exhorter les deux parties à revenir sur la voie de la diplomatie et du dialogue.  Soutenant tous les efforts diplomatiques pour mettre fin au conflit, le délégué a espéré une reprise rapide des pourparlers de paix afin de parvenir à un cessez-le-feu immédiat et à un règlement rapide du conflit.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit observer avec gravité le durcissement des positions et la radicalisation inquiétante de la rhétorique en lien avec la guerre en Ukraine, une rhétorique qui suggère des menaces d’utilisation d’armes de destruction massive.  Les allégations concernant l’existence de programmes de fabrication d’armes biologiques en Ukraine sont très graves et l’utilisation d’agents biologiques, d’agent pathogènes, de germes ou de champignons visant à répandre des maladies à des fins de guerre est un anachronisme, en plus de l’interdiction de ces armes depuis une cinquantaine d’années, a dit le représentant.  Il a donc appelé à renforcer le régime de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction.  De même, sa délégation appelle à une enquête impartiale et indépendante sur ces allégations, a conclu M. Biang.

M. VASSILY NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit ne pas être surpris par la réaction des délégations des États occidentaux, dont certaines, selon lui, confondent armes chimiques et armes biologiques.  Il a estimé que cela montre leur méconnaissance du sujet.  Ces délégations ne répondent même pas aux questions élémentaires posées par la Fédération de Russie, notamment sur la raison pour laquelle c’est le Pentagone qui s’occupe de la coopération avec l’Ukraine, a regretté le délégué.  « Personne n’est naïf ici au point de penser que le Pentagone partagerait ses secrets avec les Nations Unies. »  S’adressant directement aux délégations occidentales, M. Nebenzia a dit que « même si les arguments de la Fédération de Russie ne vous plaisent pas, vous n’avez pas le droit de les ignorer en appliquant votre propre logique politique ».  Il a rappelé que son pays se base sur le droit international.  Pour le délégué, cette tentative de faire passer les questions de la Russie comme étant de la propagande ne trompe personne.  « Restons dans le domaine du droit et laissons les considérations politiques pour d’autres réunions », a-t-il dit, réitérant le fait que sa délégation a le droit de proposer un projet de résolution et de demander une enquête.

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) s’est étonnée qu’en cette semaine mondiale de l’information et de l’éducation aux médias à l’ONU, la Russie ait convoqué trois réunions du Conseil de sécurité pour diffuser sa propagande et ses fausses informations.  En faisant cela, elle sape le travail du Conseil et la crédibilité et l’intégrité de la Convention sur les armes biologiques, a dénoncé la représentante.  Elle a ensuite assuré que l’Ukraine n’a jamais produit ni stocké d’armes biologiques ou chimiques, affirmant en outre qu’elle n’en a pas la capacité.  Elle a attiré l’attention du Conseil sur les résultats de la réunion des États parties à la Convention, qui a eu lieu à Genève, en septembre, à la demande de la Russie, pour dire que des informations détaillées et très complètes ont été transmises par l’Ukraine et les États-Unis à cette occasion et que l’écrasante majorité des États parties ont estimé qu’elles étaient convaincantes.  Toutes les allégations de la Russie à ce sujet ont été rejetées, a-t-elle fait valoir.  La représentante a indiqué que l’Ukraine sera prête à recevoir un groupe d’experts indépendants pour visiter ses laboratoires lorsque la Russie cessera sa guerre à outrance et retirera ses forces.  En conclusion, elle a déclaré qu’en répandant de tels mensonges, la Russie prépare la voie à de nouvelles provocations en Ukraine.  Les allégations concernant des agents de guerre biologiques doivent être prises au sérieux, a recommandé la représentante.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.