9029e séance – matin
CS/14886

Conseil de sécurité: le Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine dénonce les visées sécessionnistes des autorités de la Republika Srpska

Le Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, M. Christian Schmidt, a accusé ce matin, devant le Conseil de sécurité, les autorités de la Republika Srpska à rechercher une sécession de facto de la Bosnie-Herzégovine, en se retirant du cadre constitutionnel et en assumant des compétences étatiques.  S’il a salué, à l’instar du Président en exercice de la présidence de Bosnie-Herzégovine, les sanctions prises contre certains responsables, le représentant de la Serbie a fait part de son opposition de même que la Fédération de Russie qui a par ailleurs soutenu que le Haut-Représentant n’a pas la légitimité requise pour s’exprimer au Conseil de sécurité.

À l’entame de son propos, M. Schmidt a mis en garde contre le risque élevé d’incidents en Bosnie-Herzégovine, détaillant longuement les menaces que les autorités de la Republika Srpska font peser sur l’ordre constitutionnel bosnien.  L’assemblée de la Republika Srpska a ainsi donné instruction au gouvernement de l’entité de se retirer de plusieurs accords de transfert de compétences de ladite entité à l’État bosnien, notamment en matière de défense, a-t-il expliqué.  Le gouvernement de la Republika Srpska a ainsi l’obligation d’adopter dans les six mois des lois dans ces domaines qui rendraient inapplicables celles de l’État bosnien. 

« Si cela devait advenir, cela signifierait le retrait de la Republika Srpska des forces unifiées bosniennes et, possiblement, la constitution de sa propre armée », a averti le Haut-Représentant.  Il a aussi indiqué que le parti au pouvoir défend la « dissolution pacifique » du pays et que son objectif est une « Republika Srpska indépendante au sein de la Bosnie-Herzégovine de Dayton ».

Il a aussi dénoncé la non-participation des représentants de la Republika Srpska aux processus de prise de décisions au niveau de l’État bosnien, une stratégie perçue comme une tentative de paralyser l’État puis de prétexter de son dysfonctionnement ainsi créé pour démontrer le caractère non viable de la Bosnie-Herzégovine.  Enfin, M. Schmidt a salué l’adoption de mesures ciblées et jugé crucial de « garder ouverte la porte de l’Europe pour la Bosnie-Herzégovine ».

La représentante de la France a appelé l’ensemble des dirigeants de Bosnie-Herzégovine à retrouver la voie du dialogue et du compromis nécessaires au bon fonctionnement des institutions du pays et à son « cheminement européen ».  C’est le sens des 14 priorités identifiées en 2019 dans l’avis de la Commission européenne sur la demande d’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’Union européenne, a-t-elle rappelé, tandis que son homologue de l’Union européenne s’est inquiété des initiatives qui mettent en péril l’engagement en faveur de l’intégration européenne. 

Les actions de la Republika Srpska ont alarmé la plupart des délégations, dont celle des États-Unis qui a par ailleurs indiqué que tous les dirigeants ethnonationalistes, y compris les partis bosniaques, ont choisi de recourir à la corruption, la peur et la division pour rester au pouvoir.  Elle s’est également inquiétée des appels « dangereux » à l’obstruction des élections prévues en octobre et à la création d’une nouvelle organisation territoriale par les dirigeants croates de Bosnie. 

« Faute de disposer de mécanismes solides pour empêcher ces activités sécessionnistes, nous avons besoin de la communauté internationale pour les contrer », a appuyé le Président en exercice de la présidence de Bosnie-Herzégovine.  M. Sefik Dzaferovic a ainsi souhaité que toutes les lois contraires à l’Accord de Dayton prises par la Republika Srpska soient abrogées et appelé au déblocage des institutions bosniennes qui ne fonctionnent pas en raison de l’absence de ses représentants. 

Alors que ce blocage perdure, il s’est félicité que des sanctions aient été annoncées par la communauté internationale et a insisté, lui aussi, sur la nécessité de progresser sur la voie de l’intégration euro-atlantique.  « Dans la situation géopolitique actuelle, compte tenu des conséquences potentielles de la situation en Ukraine sur les Balkans occidentaux, l’UE devrait répondre positivement à la demande de candidature de la Bosnie-Herzégovine », a appuyé le Président pour qui l’octroi du statut de candidat permettrait de stabiliser la situation et donner nouvelle impulsion au processus de réforme. 

Le Président a par ailleurs accusé la Serbie de ne pas respecter la souveraineté de son pays, en intégrant la Republika Srpska dans sa stratégie de défense, pour ensuite s’inquiéter de l’ingérence de la Croatie dans les lois électorales de son pays.  Pour la première fois en 27 ans, les élections générales prévues en octobre prochain sont remises en question parce que les ministres croates du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine empêchent l’allocation des fonds nécessaires, a-t-il déploré, prévenant que ce blocage pourrait avoir des conséquences imprévisibles.

De son côté, la Croatie s’est dite préoccupée par les actions des dirigeants politiques bosniaques qui arborent « une mentalité de vainqueur ».  « La violation constante du principe d’égalité entre les peuples constitutifs n’a pas été traitée de manière appropriée depuis trop longtemps », a-t-elle déploré, tandis que le représentant de la Serbie a appelé les peuples de Bosnie-Herzégovine à décider de leur avenir, sans pression ni ingérence extérieure.  Ce dernier a notamment rejeté les interprétations et révisions unilatérales de l’Accord de Dayton, marquant son opposition aux solutions imposées qui ne sont pas le fruit d’un consensus de même qu’à l’imposition de sanctions aux représentants du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine et à la Republika Srpska. 

La déléguée de la Russie a, elle, fustigé le « rôle destructeur » du Bureau du Haut-Représentant, ainsi que la centralisation de l’État bosnien au profit d’une entité, celle des Bosniaques, au détriment des deux autres entités constitutives.  Elle a déploré que l’avenir de la Bosnie-Herzégovine se décide à « Bruxelles, Washington et dans d’autres chancelleries occidentales » avertissant en outre que les sanctions prises contre certains responsables bosniens ne font qu’aggraver la situation. 

LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE (S/2022/374)

Déclarations

Avant l’ouverture de la séance, M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que M. Christian Schmidt n’est pas habilité à faire un exposé en qualité de « soi-disant » Haut-Représentant.  Après avoir précisé que les hauts-représentants sont nommés par le Conseil de sécurité depuis 25 ans, le représentant russe a regretté que cette pratique ait été contournée dans la cadre de la nomination de M. Schmidt, qui de ce fait, a-t-il souligné, n’a pas le droit de s’exprimer au nom de la communauté internationale, ni au Conseil de sécurité.  Il a ajouté qu’une intervention de M. Schmidt au titre de Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine compromettrait la crédibilité du Conseil de sécurité.  Dans ce contexte, le représentant russe a estimé que M. Schmidt pouvait intervenir au Conseil de sécurité à titre personnel.  « C’est ainsi que nous considérons sa présence aujourd’hui », a-t-il dit.

Lui emboîtant le pas, M. DAI BING (Chine) a également considéré qu’à partir du moment où M. Schmidt n’a pas fait l’objet d’une désignation officielle, il n’est pas habilité à faire un exposé devant le Conseil de sécurité.

S’exprimant pour la première fois devant ce Conseil, M. CHRISTIAN SCHMIDT, Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, a indiqué que des menaces émanant avant tout d’une région du pays pèsent sur l’ordre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine.  Depuis l’année dernière, les habitants du pays ainsi que les médias internationaux ont évoqué la possibilité d’une nouvelle guerre.  Le conflit en Ukraine, pas si loin, est un avertissement que même au XXIsiècle, une autre guerre sur le sol européen n’est pas une impossibilité, a dit M. Schmidt.  Il a repris les mots d’un sénateur américain en visite en Bosnie-Herzégovine qui a parlé d’un « moment très préoccupant » pour le pays.  S’il n’y a pas de danger concret de guerre, la possibilité de tensions exacerbées et d’incidents est très élevée, a-t-il prévenu, en jugeant toujours nécessaire une présence internationale. 

Il a rappelé qu’en décembre dernier, l’assemblée de la Republika Srpska a adopté des conclusions donnant instruction au gouvernement de l’entité de se retirer de plusieurs accords antérieurement signés sur le transfert de compétences de ladite entité à l’État, y compris en matière de défense, de fiscalité indirecte et judiciaire.  Ces instructions obligent le gouvernement de la Republika Srpska à adopter dans les six mois des lois dans ces domaines, rendant ainsi inapplicables les lois de l’État bosnien.  Si cela devait advenir, cela signifierait au minimum le retrait de la Republika Srpska des forces unifiées de Bosnie-Herzégovine et, possiblement, la constitution de sa propre armée, a averti le Haut-Représentant.  Il a aussi indiqué que le parti au pouvoir en Republika Srpska défend la « dissolution pacifique » du pays et que son objectif est une « Republika Srpska indépendante au sein de la Bosnie-Herzégovine de Dayton ». 

M. Schmidt a indiqué que cette expression de « Bosnie-Herzégovine de Dayton » souvent employée par les autorités de la Republika Srpska témoigne d’un irrespect de la Constitution bosnienne.  Tout changement constitutionnel ne peut se faire de manière unilatérale mais doit découler de décisions parlementaires conjointes.  De tels changements doivent en outre respecter les décisions de la Cour constitutionnelle et les principes de Dayton.  Il a ajouté que le Haut-Représentant, en tant qu’interprète responsable de l’Accord-cadre général pour la paix, assurera le respect de ces principes fondamentaux. 

M. Schmidt a déclaré que les autorités de la Republika Srpska, en se retirant du cadre constitutionnel et en assumant des compétences étatiques, cherchent en réalité une sécession de facto.  Il a rappelé que les entités du pays existent en vertu de la Constitution et qu’elles n’ont pas le droit de sécession, avant d’accuser les autorités de la Republika Srpska de saper la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine.  Il a promis de préserver la souveraineté du pays et exhorté la communauté internationale à protéger les droits des trois peuples constitutifs. 

Le Haut-Représentant a aussi mentionné les décisions qu’il a prises pour remédier aux actions illégales et déstabilisatrices des autorités de la Republika Srpska, notamment la loi sur les biens nécessaires au fonctionnement des autorités qui contrevient aux décisions de la Cour constitutionnelle bosnienne.  L’application de cette loi empêcherait toute résolution acceptable et durable de la question des biens de l’État, qui est le premier objectif depuis 2008 du programme « 5 plus 2 ».  « Plutôt que de me substituer à l’assemblée de cette entité, j’ai ordonné la suspension de l’application de cette loi, en attendant son examen par la Cour », a dit M. Schmidt, précisant que cette décision avait été prise en dernier recours.  Selon lui, les autorités de la Republika Srpska auraient toujours l’intention d’appliquer ladite loi.  Néanmoins, elles semblent avoir abandonné leur calendrier sur le retrait d’autres accords de partage des compétences, a-t-il noté. 

Le Haut-Représentant a aussi dénoncé la non-participation des représentants de la Republika Srpska aux processus de prise de décisions au niveau de l’État bosnien.  « La stratégie des autorités de la Republika Srpska est perçue comme une tentative de paralyser l’État puis de prétexter de son dysfonctionnement ainsi créé pour démontrer le caractère non viable de la Bosnie-Herzégovine. »  Il a salué la nouvelle approche de la communauté internationale sur ce dossier, qui a soutenu son autorité de Haut-Représentant et pris des mesures ciblées. 

En venant aux élections générales de 2022, M. Schmidt a déploré l’échec à parvenir à un accord sur la réforme électorale, tout en indiquant que le vote se déroulera en octobre comme prévu.  Il a jugé crucial d’appliquer le programme « 5 plus 2 », ainsi que de garder ouverte la porte de l’Europe pour la Bosnie-Herzégovine et les Balkans occidentaux.  Enfin, estimant que le pays est à la « croisée des chemins », le Haut-Représentant a exhorté les responsables bosniens à œuvrer à une désescalade des tensions et appelé les représentants de la Republika Srpska à rejoindre pleinement les institutions de la Bosnie-Herzégovine. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a estimé que la Bosnie-Herzégovine ne peut exister en tant qu’État pleinement fonctionnel que si son peuple est attaché à ses lois et à ses institutions.  Il a jugé troublant à cet égard que des hommes politiques de Bosnie-Herzégovine s’emploient à créer des législations visant à saper les institutions étatiques actuelles.  Constatant que beaucoup reste à faire pour que le pays accède au statut d’État à part entière, il a regretté l’absence d’avancées sur le programme « 5 plus 2 » établi par le Comité directeur du Conseil de mise en œuvre de la paix.  Le délégué a donc appelé toutes les autorités de Bosnie-Herzégovine à travailler ensemble pour son accomplissement.  Il a également déploré l’impasse dans laquelle se trouve la réforme de la législation électorale, jugeant que les élections sont une opportunité pour faire entendre les voix de la société et pour aplanir les différences.  Il a jugé très préoccupante la paralysie législative identifiée par le Haut-Représentant qui empêche les réformes indispensables de l’État, estimant essentiel que les différentes parties de Bosnie-Herzégovine s’engagent dans une négociation politique ouverte afin d’adopter les lois nécessaires.  De même, face à l’incapacité du Gouvernement à mettre la loi en conformité avec les décisions judiciaires, il a souligné l’importance de renforcer l’état de droit pour parvenir à un État qui fonctionne.  Enfin, après avoir invité toutes les parties au Comité directeur du Conseil de mise en œuvre de la paix à prendre en considération les points de vue de tous ses participants, il a exhorté les différentes composantes du pays à faire un meilleur usage de l’assistance internationale. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a relevé que l’impasse politique et l’instabilité persistent en Bosnie-Herzégovine.  Elle s’est inquiétée des tentatives de M. Milorad Dodik de recréer une armée de la Republika Srpska et de se retirer des institutions de l’État.  Cette tentative qui vise à orchestrer une sécession de facto est extrêmement dangereuse et pourrait annuler 26 années de progrès et d’une paix durement acquise, s’est-elle alarmée.  Elle a appelé le Conseil de sécurité à continuer d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord de Dayton de même que le rôle du Haut-Représentant, et à promouvoir des politiques fondées sur la coopération et la compréhension en Bosnie-Herzégovine.  La représentante a ensuite indiqué que le Royaume-Uni a eu récemment recours à son propre régime de sanctions pour envoyer un message clair à ceux qui menacent l’avenir du pays.  Elle a condamné les tentatives visant à saper les fonctions du Haut-Représentant, y voyant une tentative de compromettre la sécurité régionale à des fins géopolitiques.  La déléguée a appelé l’ensemble des parties à avancer sur l’intégration euro-atlantique, et a souhaité que les élections du mois d’octobre se déroulent comme prévu. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté que les contestations persistantes et répétitives relatives à l’Accord-cadre général pour la paix sont sources d’instabilité politique, au moment où le pays a grand besoin de mener les réformes importantes nécessaires à la consolidation de l’état de droit.  Il s’est inquiété que pour la deuxième année consécutive, le budget de l’État n’ait pu être adopté, et que trois ans après les dernières élections générales, le pays ne dispose toujours pas d’un exécutif.  Il a appelé les parties à faire preuve de compromis et à s’abstenir de toute action ou de toute rhétorique clivante et non constructive, susceptible d’alimenter les antagonismes et de nuire à la paix et à la stabilité de la Bosnie-Herzégovine.  L’Accord de Dayton doit constituer le socle et la feuille de route vers la coexistence pacifique, a-t-il rappelé.  Il a déclaré qu’à quelques mois des élections générales prévues en début octobre prochain, il est essentiel qu’un accord soit trouvé en ce qui concerne les réformes électorales nécessaires à la tenue d’élections dans un contexte apaisé et dans un climat de confiance mutuelle.  Enfin, le représentant a rappelé que l’État central doit garantir l’égalité de tous les citoyens du pays et leur permettre d’exercer leurs droits civiques sans discrimination, y compris de prendre part aux différentes élections et de participer sur le même pied d’égalité à la vie de la cité.  ´

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) s’est dite très préoccupée par la rhétorique négative qui divise profondément les dirigeants politiques en Bosnie-Herzégovine et ne fait que réduire les perspectives de réconciliation, alors qu’elle est convaincue que l’impasse peut être surmontée par le dialogue.  Elle s’est alarmée en particulier de la glorification des criminels de guerre.  La représentante a estimé que les institutions de l’État doivent recommencer à fonctionner pleinement et prendre des mesures pour mettre fin au démantèlement des compétences de l’État.  Alors que des élections ont été convoquées pour octobre prochain, l’impasse politique et la paralysie des institutions de l’État aggravent déjà la frustration des citoyens de Bosnie-Herzégovine, a encore relevé Mme Byrne Nason.  Elle y a vu un facteur qui pousse beaucoup de jeunes à quitter le pays, plutôt que d’attendre les urnes.

Malgré les défis, la Bosnie-Herzégovine a été en mesure d’accomplir des réalisations importantes au cours du dernier quart de siècle, en bâtissant ses institutions gouvernementales et en développant son économie et sa société, a reconnu la déléguée en constatant que la voie politique peut fonctionner pour tous les habitants du pays.  Cela pourrait continuer si les représentants élus, en collaboration avec les dirigeants nationaux, font preuve de la volonté politique nécessaire, a encouragé la déléguée irlandaise.  Tout en soutenant la perspective européenne de la Bosnie-Herzégovine, elle a rappelé qu’il faut répondre aux besoins de tous les citoyens, appelant toutes les parties à défendre et à respecter l’égalité et l’inclusion en tant que principes clefs pour un avenir stable et prospère.  À cet égard, elle a observé que la participation des femmes à la vie politique reste faible, exhortant dès lors les autorités à assurer le développement de mécanismes efficaces pour la mise en œuvre de quotas dans ce domaine.  Un processus inclusif de réforme constitutionnelle et électorale éliminerait toutes les formes d’inégalité et de discrimination dans le contexte électoral, a ajouté la représentante.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a constaté que la situation en Bosnie-Herzégovine reste complexe, en raison d’un manque persistant de coopération entre les parties, souvent accompagné de tensions.  Il a encouragé tous les acteurs politiques du pays à répondre aux appels au dialogue du Haut-Représentant et a également jugé que le programme « 5 plus 2 » reste une bonne base pour les réformes nécessaires dans le pays.  Il a dénoncé les tentatives de M. Milorad Dodik, le chef politique de la Republika Srpska, de transférer les compétences du gouvernement central aux institutions de son entité, en violation de la Constitution nationale et des accords de Dayton.  Une telle action déstabilisatrice vise à défaire les réformes entreprises au cours des 26 dernières années, afin de stopper le processus d’intégration euro-atlantique et d’ouvrir la voie à la dissolution du pays, a-t-il accusé. 

Le délégué s’est ensuite déclaré préoccupé par la poursuite de la rhétorique politique de négation du génocide commis à Srebrenica, de glorification des criminels de guerre et de haine assortie d’insultes ethniques.  Les efforts visant à attiser les divisions entre les groupes ethniques portent la signature de Dodik, a-t-il martelé, avertissant que tout faux pas en Bosnie-Herzégovine risque d’affecter l’ensemble de la région.  Il s’est donc félicité des mesures prises par les États-Unis et le Royaume-Uni contre M. Dodik en raison de ses tentatives de saper la fonctionnalité de l’État bosnien et la paix durement gagnée par ce pays.  Essayer de gagner de l’influence en utilisant la montée du nationalisme et les divisions sur les questions religieuses et ethniques ne fait que polariser la politique et créer un sentiment d’insécurité dans plusieurs pays des Balkans occidentaux, a ajouté le représentant.  Il a également averti que l’influence de la Russie est en train de devenir une menace pour la sécurité en Bosnie-Herzégovine car elle s’appuie sur les tensions ethniques et religieuses dans le but de bloquer les réformes et de faire dérailler le processus d’intégration euro-atlantique.  Dans ce contexte, il a estimé que seuls une coopération et un véritable dialogue entre toutes les parties pourraient dénouer l’impasse sans fin que connaît le pays.  Si le rôle du Haut-Représentant reste primordial pour faciliter ce dialogue et garantir l’ordre constitutionnel, il est aussi crucial que l’Union européenne reste engagée dans ce processus, a-t-il plaidé, jugeant que la perspective européenne est de la plus haute importance pour le pays et la région. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a exprimé sa préoccupation au sujet de la crise politique en Bosnie-Herzégovine qui dure depuis l’été dernier, qui menace les acquis de près de trente ans de construction institutionnelle et de réformes dans le pays, dans le cadre prévu par les accords de Dayton/Paris et sur la voie du rapprochement européen.  La représentante a appelé l’ensemble des dirigeants de Bosnie-Herzégovine à retrouver la voie du dialogue et du compromis nécessaires au bon fonctionnement des institutions du pays et à son cheminement européen, arguant que les citoyens de Bosnie-Herzégovine ont droit à des institutions démocratiques efficaces et qui respectent pleinement les principes de l’État de droit.  C’est le sens des 14 priorités identifiées en 2019 dans l’avis de la Commission européenne sur la demande d’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’Union européenne, a-t-elle rappelé.  Ces priorités doivent continuer de guider les efforts de réforme, au bénéfice de tous les habitants du pays, a souhaité Mme Broadhurst en se disant particulièrement attentive à la participation pleine et effective des femmes à la vie politique.  « La France regrette qu’un accord n’ait pas encore été trouvé sur une réforme constitutionnelle et électorale qui garantisse le principe de non-discrimination et d’égalité de tous les citoyens, conformément aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. »  L’absence d’accord sur un nouveau cadre électoral ne saurait toutefois priver les citoyens de Bosnie-Herzégovine de leur droit fondamental à élire leurs représentants, a estimé la représentante en appelant les autorités de Bosnie-Herzégovine à prendre toutes les mesures nécessaires à l’organisation de ces élections et à leur financement dans les délais prévus. 

Face à ces dynamiques préoccupantes, elle a jugé nécessaire le maintien de la présence internationale en Bosnie-Herzégovine, pour garantir la stabilité du pays et de la région.  S’agissant du volet militaire, l’Union européenne remplit depuis 2004 le rôle principal dans la stabilisation de la paix dans le pays, a-t-elle rappelé en souhaitant que l’opération EUFOR ALTHEA reste présente dans la durée.  Alors que le continent européen fait face à un défi sans précédent né de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine, la France ne ménagera aucun effort pour œuvrer à la stabilité de l’Europe, notamment dans les Balkans où les blessures des conflits des années 1990 sont encore vives, a-t-elle affirmé.  En sa qualité de présidente du Conseil de l’Union européenne au premier semestre 2022, la France organisera fin juin une conférence sur les Balkans occidentaux, a annoncé la représentante en prévoyant la participation des 27 États membres et des 6 États de la région, afin de réaffirmer collectivement l’engagement sur la voie de l’intégration européenne et de continuer à construire les coopérations nécessaires en réponse aux défis communs.

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a exhorté le Bureau du Haut-Représentant à continuer de collaborer avec toutes les parties de manière objective pour instaurer la confiance afin de surmonter les obstacles et donner la priorité à la mise en œuvre du programme « 5 plus 2 » qui reste la base pour la réalisation de la stabilité à long terme.  Après s’être inquiété des discours de haine et d’une rhétorique qui divise, en particulier par le biais des médias sociaux, le représentant a estimé important de bien comprendre les griefs qui motivent ces discours et les instigateurs de cette rhétorique.  Persuadé que la Bosnie-Herzégovine trouvera sa propre voie vers la démocratie, M. Kiboino a rappelé qu’une démocratie ne peut être réalisée sans État de droit.  C’est pourquoi, il a dit partager l’avis du Haut-Représentant sur la nécessité de maintenir l’État de droit, notamment en ce qui concerne le statut des nombreuses décisions de justice internationales et nationales non mises en œuvre.  Enfin, prenant note des défis qui se posent pour les retours volontaires et la réintégration harmonieuse des réfugiés et des personnes déplacées, le représentant a prôné une collaboration entre les parties pour créer un environnement propice au retour des réfugiés et des déplacés dans leurs foyers d’origine.

M. DAI BING (Chine) a espéré qu’en cette année électorale, toutes les parties sur le terrain parviendront à s’entendre pour un processus apaisé, soulignant que la Bosnie-Herzégovine doit retrouver sa pleine souveraineté.  Le fait que les forces extérieures choisissent un camp ne va pas aider à baisser les tensions, a-t-il déploré.  Il a également décrié l’imposition de sanctions au pays.  Le délégué a pris note de l’augmentation des personnels déployés de l’opération EUFOR ALTHEA et a souhaité que la mission poursuive son rôle.  Il a invité la communauté internationale, notamment les partenaires européens, à aider la Bosnie-Herzégovine afin que celle-ci puisse se relever sur le plan économique.  Pour sa part, la Chine entend poursuivre son amitié avec tous les peuples de Bosnie-Herzégovine.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a déclaré être préoccupé par les récents développements et les tensions politiques qui menacent d’exacerber la situation politique et sécuritaire dans le pays.  Il faut apaiser ces tensions et résoudre les différends entre les parties conformément à la Constitution de Bosnie-et-Herzégovine afin d’éviter que la situation actuelle ne s’aggrave, en particulier à la lumière de la dangereuse conjoncture que traverse l’Europe à la suite de la guerre en Ukraine, a recommandé le représentant.  Il a réaffirmé son appui à l’unité et à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine conformément au droit international et à l’Accord de Dayton qu’il a demandé de respecter pour résoudre les divergences entre tous les partis politiques y compris la coopération qui est l’un des principes fondamentaux de cet accord.  Il a aussi souligné l’importance du plein respect des institutions nationales, saluant dans la foulée le rôle du Haut-Représentant qui a maintenu la paix dans le pays en protégeant les aspects politiques de l’Accord de Dayton au cours des trois dernières décennies. 

Le représentant a encouragé la coexistence pacifique entre les différentes communautés de Bosnie-Herzégovine et a appelé à maintenir les canaux de communication ouverts pour parvenir à une paix durable.  Il a condamné toute tentative de provoquer des tensions sectaires et ethniques, de répandre des discours haineux, d’encourager les haines raciales et d’organiser les crimes de guerre.  Ces actes compromettent les perspectives d’un engagement positif et menacent de renouveler la violence dans le pays, a prévenu le délégué qui a souligné l’importance du dialogue et de la construction de ponts entre les différentes communautés.  Cela contribuera à renforcer une société pacifique, sûre et prospère, a espéré le représentant qui a en conclusion, mis l’accent sur les efforts de l’Organisation de la coopération islamique. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a indiqué que la situation ne s’est pas améliorée en Bosnie-Herzégovine, la crise politique y étant plus grave que jamais.  Elle a constaté une centralisation de l’État bosnien au profit d’une entité, celle des Bosniaques, au détriment des deux autres entités constitutives.  Cela se reflète dans les décisions prises qui ne respectent pas les intérêts de tous les Bosniens, a dit la déléguée.  Elle a dénoncé l’ingérence dans les affaires intérieures bosniennes de l’ancien Haut-Représentant, M. Valentin Inzko, en estimant que ce n’est pas la Bosnie-Herzégovine qui décide de son avenir mais « Bruxelles, Washington et d’autres chancelleries occidentales ».  Elle a aussi dénoncé les sanctions prises contre certains responsables bosniens.  Une telle politique ne fait qu’aggraver la situation et entrave les efforts de normalisation, a-t-elle estimé.

La représentante a appelé à cesser les « reconfigurations » de l’Accord de Dayton, auxquelles certains pays se livrent, en insistant sur la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine.  La déléguée a aussi mentionné le « rôle destructeur » du Bureau du Haut-Représentant en rappelant l’autorité exceptionnelle qui lui est conférée alors que le poste de Haut-Représentant est « vacant ».  « M. Schmidt est un citoyen allemand, qui intervient à titre personnel, non pas au nom de la communauté internationale », a-t-elle insisté.  Elle a réclamé la fermeture dudit bureau et rappelé qu’aucun parallèle ne peut être dressé entre la situation en Ukraine et celle en Bosnie-Herzégovine.  La Russie, qui est un État garant de l’Accord de Dayton, appuie l’égalité entre les peuples constitutifs du pays, a conclu la déléguée, en ajoutant que la destruction des mécanismes mis en place par ledit accord aura des conséquences graves. 

Pour M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde), le désaccord sur le Bureau du Haut-Représentant en Bosnie-Herzégovine doit être résolu par un engagement constructif, conformément à l’Accord de paix et la mise en œuvre rapide du programme « 5 plus 2 » qui doit rester la priorité absolue de ce bureau.  Préoccupé par le fait que l’évolution politique récente en Bosnie-Herzégovine sape les progrès réalisés au cours des 25 dernières années, le représentant a appelé toutes les parties à s’engager dans un dialogue, dans un esprit de compréhension mutuelle et d’empathie envers les positions de l’autre.  Nous devons soutenir tous les efforts en faveur de la coopération, du développement et de la paix et éviter toute rhétorique qui pourrait saper l’accord de paix, a recommandé le délégué.  À cet égard, il est important que le Bureau du Haut-Représentant travaille objectivement avec toutes les parties, comprenne les points de vue divergents et cherche à rétablir la confiance et à renforcer le cadre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine, a poursuivi le délégué.  Il a souligné que l’Accord-cadre général pour la paix fournit la base pour trouver des solutions liées au règlement des conflits interethniques par le dialogue des parties en se basant sur l’égalité, le respect mutuel, le compromis et le consensus.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) s’est inquiété des tensions qui menacent la stabilité qui a permis de préserver l’unité de la Bosnie-Herzégovine au cours des 25 dernières années.  Dans ce contexte, il a exhorté les parties à respecter leurs engagements et obligations acceptés dans le cadre de l’Accord de Dayton.  Il a demandé à toutes les parties de respecter l’objectif d’une société multiethnique et multireligieuse en Bosnie-Herzégovine avant d’appeler à la tolérance zéro face aux discours de haine qui alimentent les tensions.  Il a salué les initiatives relatives à la répartition des propriétés entre l’État et les autres niveaux de collectivités.  Il a souhaité que la Bosnie-Herzégovine avance sur le chemin de la paix et devienne un État pacifique et viable intégré à l’Europe.  Enfin, il a dit la nécessité de favoriser les meilleures conditions pour un retour sûr et sans discrimination des réfugiés et personnes déplacées.  « Quelles que soient les divergences de points de vue entre les membres du Conseil de sécurité au sujet du poste de Haut-Représentant », le représentant du Ghana a exhorté le Conseil de sécurité à faire preuve d’unité dans l’intérêt d’un avenir pacifique de la Bosnie-Herzégovine. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a dit craindre que l’actuelle crise politique en Bosnie-Herzégovine se transforme en une situation sécuritaire plus grave.  Elle a dit être particulièrement préoccupée par l’augmentation de la rhétorique ethnique agressive, et a appelé les autorités à la condamner tout en s’abstenant de tout discours de haine.  Selon elle, le climat politique déjà difficile dans le pays risque également de se détériorer davantage en raison de l’impact de la guerre en Ukraine.  Elle s’est dite convaincue du caractère essentiel de la contribution de l’EUFOR ALTHEA au maintien de la paix et de la stabilité en Bosnie-Herzégovine et a appuyé le renouvellement de son mandat en novembre.

La représentante a ensuite déclaré que la justice et la responsabilité pour les crimes de guerre -y compris les violences sexuelles liées aux conflits– sont essentielles à l’édification d’une paix durable en Bosnie-Herzégovine.  Elle a exhorté le Haut-Représentant à s’engager avec les autorités et les partenaires pour assurer la responsabilité pour les crimes de guerre.  Au sujet du mandat du Bureau du Haut-Représentant, elle a rappelé que son travail prendra fin seulement quand le programme « 5 plus 2 » sera mis en œuvre.  Et cela n’est possible que si tous les acteurs politiques de Bosnie-Herzégovine travaillent ensemble de manière constructive et dans l’intérêt supérieur de tous les habitants du pays.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a regretté que les progrès du programme « 5 plus 2 », à l’exception de certains progrès dans le district de Brcko, soient pratiquement nuls, rappelant que la mise en œuvre de ce programme est essentielle pour la fermeture du Bureau du Haut-Représentant.  Il a insisté sur l’importance des prochaines élections d’octobre et a appelé les parties bosniaque et croate à parvenir à un accord sur la réforme électorale, y compris les aspects financiers.  « Nous espérons que toutes les parties redoubleront d’efforts pour trouver une solution à leurs différends et qu’après les élections, un gouvernement fonctionnel sera formé et que la malheureuse expérience de 2018 ne se reproduira pas », a-t-il dit. 

Le représentant s’est ensuite inquiété des informations sur la glorification fréquente des criminels de guerre, la négation du génocide et des crimes de guerre, et le rejet ou la relativisation des conclusions du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et des tribunaux locaux.  Il est inacceptable qu’il n’y ait pas de condamnation officielle de ce type d’action, et particulièrement alarmant que, dans certains cas, ce soient des agents publics qui promeuvent des récits nationalistes et alimentent une rhétorique de division, a dénoncé le représentant.  Il a donc demandé à l’Assemblée parlementaire d’adopter une législation sur la négation du génocide et d’autres crimes de guerre, avant de prendre note de la proposition du Haut-Représentant de retirer les amendements au code pénal présentés par son prédécesseur, afin que l’Assemblée puisse légiférer en la matière, conformément aux normes internationales. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a souligné que l’Accord de Dayton demeure essentiel dans un contexte où la stabilité durement acquise de la Bosnie-Herzégovine est menacée.  Elle s’est inquiétée des mesures prises par Milorad Dodik et la Republika Srpska pour se retirer de l’ordre constitutionnel, juridique et institutionnel de l’État et établir des cadres parallèles.  Les appels à l’obstruction des élections ou à la création d’une nouvelle organisation territoriale par les dirigeants croates de Bosnie sont également dangereux, a-t-elle ajouté.  Selon elle, tous les dirigeants ethnonationalistes, y compris les partis bosniaques, ont choisi de recourir à la corruption, la peur et la division pour rester au pouvoir. 

La représentante a regretté le recours, par les partis politiques, à une rhétorique incendiaire pour attiser les tensions et détourner l’attention de la corruption généralisée.  Les autorités à tous les niveaux doivent continuer à lutter contre la corruption, a-t-elle insisté, notant que ce fléau prive les citoyens d’un avenir plus prospère et entrave la voie euro-atlantique choisie par le pays.  Elle s’est félicitée de la décision de la Commission électorale centrale de convoquer des élections le 2 octobre et a demandé l’allocation immédiate de fonds pour permettre leur tenue.  Elle a aussi souligné l’importance d’achever le programme « 5 plus 2 », déplorant dans la foulée les tentatives continues de certains membres du Conseil de saper le mandat et la légitimité du Haut-Représentant.

M. SEFIK DZAFEROVIC, Président en exercice de la présidence de Bosnie-Herzégovine, après avoir salué le « compte rendu objectif » du Haut-Représentant, a constaté que, depuis plus de 10 ans, son pays traverse une crise politique profonde causée par des menaces de sécession, le blocage des institutions et les tentatives de la Republika Srpska de dévier de la Constitution et de l’Accord de Dayton.  Des progrès notables ont pourtant été enregistrés depuis l’accord de paix et nombre de réformes ont été engagées, a-t-il relevé, précisant que la Bosnie-Herzégovine a ainsi formé une armée conjointe et mis en place des ministères et des institutions judiciaires grâce auxquels l’État peut fonctionner de manière indépendante.  Tout cela s’est fait avec l’accord des deux entités et des trois peuples de Bosnie-Herzégovine, avec l’appui de la communauté internationale, y compris le Conseil de sécurité, a souligné le Président bosnien.  Or, certains cherchent à saper ces efforts, a-t-il averti, accusant l’entité serbe de vouloir faire dérailler les institutions et de s’approprier leurs compétences.  Observant que la Republika Srpska a adopté des lois sur la justice et la propriété de l’État qui menacent la souveraineté de l’État, il a jugé cette situation dangereuse car elle sape l’Accord de Dayton, pierre angulaire de la paix et de stabilité dans cette partie de l’Europe. 

Faute de disposer de mécanismes solides pour empêcher ces activité sécessionistes, nous avons besoin de la communauté internationale pour les contrer, a souligné le Président bosnien, selon lequel le Bureau du Haut-Représentant doit pouvoir faire son travail conformément au mandat qui lui a été confié.  Saluant à cet égard la décision prise par M. Schmidt d’abroger la loi sécessioniste sur la propriété de l’État adoptée par la Republika Srpska, il a souhaité que toutes les lois inconstitutionnelles et contraires à l’Accord de Dayton subissent le même sort.  Il a également appelé à débloquer les institutions de Bosnie-Herzégovine qui ne fonctionnent pas en raison de l’absence de représentant de la Republika Srpska, se félicitant que des sanctions aient été annoncées par la communauté internationale.  Selon lui, toutes les autorités doivent s’engager à mettre en œuvre les réformes pour assurer le progrès sur la voie de l’intégration euro-atlantique.  Il a cependant estimé que, compte tenu des conséquences potentielles de la situation en Ukraine sur les Balkans occidentaux, l’UE devrait répondre positivement à la demande de candidature de la Bosnie-Herzégovine.  Accorder le statut de candidat pourrait permettre une stabilisation de la situation et donner nouvelle impulsion au processus de réforme, a-t-il souligné. 

M. Dzaferovic a assuré que son pays s’engage à promouvoir la paix dans la région par le biais d’une coopération avec ses voisins, s’alarmant toutefois des signaux en provenance de Serbie.  En intégrant la Republika Srpska dans sa stratégie de défense, ce pays ne respecte pas la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, a-t-il accusé, se disant également préoccupé par la protection accordée à des criminels de guerre condamnés et à des suspects dans l’affaire du génocide de Srebrenica.  Il s’est aussi inquiété de l’ingérence de la Croatie dans les lois électorales de son pays, avant de rappeler que des élections générales doivent se tenir en octobre prochain.  Pour la première fois en 27 ans, ces élections sont remises en question parce que les ministres croates du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine empêchent l’allocation des fonds nécessaires, a-t-il déploré, prévenant que ce blocage pourrait avoir des conséquences imprévisibles.  Évoquant ensuite la prorogation en novembre de la mission EUFOR ALTHEA, le Président a souligné l’importance de la présence de forces militaires internationales pour mettre en œuvre les volets militaires de l’Accord de Dayton.  Il a appelé le Conseil de sécurité à prolonger le mandat de cette force qui, à ses yeux, constitue un mécanisme de dissuasion vis-à-vis de ceux qui veulent saper la paix.  Enfin, il importe que toutes les parties en présence adhèrent strictement à l’accord de paix car personne n’a le droit de détruire de manière unilatérale les mécanismes mis en place au prix d’efforts considérables.    

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne (UE), a condamné le blocage des institutions de l’État et a exhorté l’ensemble des dirigeants politiques à renoncer à toutes rhétoriques et actions conflictuelles, susceptibles de remettre en cause l’unité et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine.  Il s’est aussi inquiété des initiatives qui mettent en péril l’alignement du pays sur les normes européennes et l’engagement en faveur de l’intégration européenne, et a appelé les dirigeants au dialogue afin de sortir de l’impasse.  Malgré ces freins, il a salué les progrès observés sur certaines réformes, dont les réformes de l’administration publique, avant de citer en exemple la tenue en 2020, à Mostar, des premières élections depuis 2008.  Le représentant a ensuite exhorté toutes les parties à unir leurs efforts pour atteindre les 14 objectifs prioritaires entérinés par le Conseil de sécurité en 2019.  Ce n’est qu’en adoptant des reformes que le Bosnie-Herzégovine pourra se rapprocher de l’UE, a-t-il souligné.

M. NEMANJA STEVANOVIC (Serbie) a constaté que ces derniers temps, la région des Balkans occidentaux a été accablée par des tensions politiques inutiles et des rhétoriques rétrogrades qui font obstacle à toute solution constructive.  Cela a marqué la situation politique en Bosnie-Herzégovine, y compris les relations entre ses deux entités et ses trois peuples constitutifs.  Il s’est dit convaincu que la politique de la Serbie contribue positivement au processus de réconciliation dans les Balkans occidentaux et au renforcement des relations de bon voisinage. 

Le représentant a fait part de son attachement à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine et de la « Republika Srpska au sein de la Bosnie-Herzégovine », pour ensuite appeler au plein respect de l’Accord de Dayton.  Il a rejeté les interprétations et révisions unilatérales de l’Accord en arguant qu’elles mettent en péril la paix et la stabilité existantes.  Dans le même temps, la politique de la Serbie envers ses voisins est claire et sans équivoque: la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays.  Les peuples de Bosnie-Herzégovine doivent décider librement de leur avenir, sans pression ni ingérence extérieure, a estimé le délégué.  Il s’est opposé aux solutions imposées qui ne sont pas le fruit d’un consensus et qui seraient une menace pour la stabilité de la Bosnie-Herzégovine et de toute la région.  Il a également insisté sur l’importance pour les parties de dialoguer afin de régler les différends et rétablir la confiance mutuelle.  Il a appelé à condamner les crimes commis en Bosnie-Herzégovine et à traduire leurs auteurs en justice, mettant en garde contre toute politisation de cette question.  Il s’est ensuite opposé à l’imposition de sanctions aux représentants du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine et à la Republika Srpska.

M. HRVOJE ĆURIĆ HRVATINIĆ (Croatie) a déclaré que la Croatie est fermement résolue à aider la Bosnie-Herzégovine à s’acquitter avec succès de la multitude de tâches qui l’attendent, notamment la résolution des problèmes politiques profondément enracinés qui obscurcissent l’ensemble du paysage politique et socioéconomique.  Pour sa délégation, la crise politique et institutionnelle interne en Bosnie-Herzégovine est une source de grande inquiétude.  La paralysie des institutions de l’État, les tensions politiques entre les peuples constitutifs et la méfiance générale se reflètent dans les tendances centralisatrices et séparatistes croissantes, mettant en danger le fonctionnement régulier et démocratique de l’État, s’est-il inquiété.  L’absence de tout progrès substantiel, associée au dysfonctionnement actuel et à la baisse des normes démocratiques, s’accompagne d’une absence totale de volonté politique de finaliser la réforme électorale.  Tout ceci crée un environnement politique insoutenable, a mis en garde le représentant. 

Selon lui, la violation constante du principe d’égalité entre les peuples constitutifs n’a pas été traitée de manière appropriée « depuis trop longtemps ».  Le cadre électoral existant prive les Croates de Bosnie-Herzégovine de leur droit d’élire leurs représentants légitimes et la loi électorale affaiblit et délégitime les principales institutions de l’État, s’est alarmé M. Ćurić Hrvatinić, pour qui il est donc urgent de la modifier et de procéder à une réforme constitutionnelle limitée.  Il s’est ensuite déclaré profondément préoccupé par les actions des dirigeants politiques bosniaques qui font ouvertement obstacle à la réforme électorale et abusent du processus électoral « à des fins politiques », arborant « une mentalité de vainqueur ».  Pour la Croatie, les élections en Bosnie-Herzégovine doivent avoir lieu cette année et, si l’on veut éviter un autre cycle de crises politiques, il faut parvenir rapidement et sans plus attendre à un consensus sur la réforme électorale.  Ce consensus, a-t-il ajouté, doit être conforme aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme et aux décisions pertinentes de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine, notamment l’affaire Ljubić. 

Reprenant la parole, M. SCHMIDT, Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, a encouragé tous les responsables en Bosnie-Herzégovine à comprendre que le code électoral doit reposer sur le compromis le plus raisonnable.  C’est l’essence même de la démocratie, a-t-il dit.  Il a émis l’espoir qu’un accord de dernière minute sera possible, tout en reconnaissant que le code actuel n’est pas parfait.  Pour ce qui est des défis en matière de réconciliation, le Haut-Représentant a insisté sur l’importance du dialogue, et a mis en garde contre la glorification des criminels de guerre.  Tous les peuples de la région ont des victimes à déplorer, a-t-il rappelé.  Il a ensuite indiqué que son prochain rapport portera notamment sur les femmes et la politique.  La jeune génération d’hommes et de femmes politiques en Bosnie-Herzégovine prennent leurs responsabilités, a-t-il constaté, en citant notamment le cas de la nouvelle mairesse de Sarajevo qui est particulièrement engagée pour la réconciliation. 

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