8965e séance – matin
CS/14792

Somalie: le Conseil de sécurité examine l’état d’avancement du processus électoral à la veille d’importantes échéances pour la sécurité du pays

Les membres du Conseil de sécurité ont examiné ce matin la situation en Somalie, où le processus électoral, très en retard, a été récemment relancé, et alors que se profilent deux échéances pour le Conseil: la fin de son autorisation donnée à la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) pour lutter contre les Chabab, le 31 mars, et la fin de son autorisation accordée aux États et aux organisations régionales qui coopèrent avec les autorités somaliennes dans la lutte contre la piraterie et les vols à main armée au large des côtes somaliennes, le 3 mars.  Plusieurs des membres se sont également ému de l’aggravation de la situation humanitaire dans le pays, frappé par une interminable sécheresse. 

Le Représentant spécial et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), M. James Swan, a rappelé que le processus électoral a pris un an de retard sur le calendrier prévu par la Constitution.  Comme la plupart des membres du Conseil après lui, il a considéré comme une « évolution positive » la complétion des élections de la Chambre haute et l’accélération du rythme des élections de la Chambre du peuple à la suite de la tenue en janvier d’un Conseil consultatif national, qui a permis, comme l’a fait observer le représentant de la Somalie, de relancer le processus.  Mais les mêmes intervenants ont également invité les responsables somaliens à accélérer le rythme, afin que le futur Gouvernement puisse se consacrer à combler les besoins de sa population en matière de sécurité, de construction de l’État ou de développement.  La Chine a toutefois recommandé que la communauté internationale accompagne les dirigeants dans une appropriation nationale de ce processus, sans exercer des pressions. 

Toujours dans le cadre du processus électoral, M. Swan et les membres du Conseil ont rappelé l’importance d’une meilleure représentation des femmes au Parlement, conformément aux engagements pris d’un minimum de 30% au sein de ce dernier.  L’Irlande a demandé l’application du principe « une personne, une voix », en se réjouissant des progrès signalés par le Représentant spécial dans la perspective des élections à venir. 

L’instabilité de la situation sécuritaire dans le pays a été un autre sujet de préoccupation pour les membres du Conseil alors que les discussions sur le devenir de la mission de l’Union africaine sont en cours.  M. Swan a rappelé que la configuration future de la mission qui doit succéder à l’AMISOM est « en cours d'examen » et que les Nations Unies participent « activement » aux discussions entre le Gouvernement fédéral somalien, l’Union africaine et les principaux donateurs. Il a apprécié les progrès accomplis lors des discussions techniques tenues à Mogadiscio du 27 janvier au 9 février. 

C’est aussi ce qu’a déclaré le Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Somalie et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), M. Francisco Caetano Jose Madeira, qui a affirmé que les difficultés entre l’Union africaine et les autorités somaliennes ont été aplanies, conduisant à l’adoption d’une approche en neuf points.  Selon lui, la nouvelle mission sera un mécanisme de transition qui viendra appuyer les autorités somaliennes en bénéficiant des acquis de l’AMISOM.  Le représentant de la Somalie a confirmé l’accord, ajoutant que la future mission devra être agile et mobile. Elle devra être capable de lutter efficacement avec des capacités à la mesure de la menace. 

Au nom des trois membres africains du Conseil (les A3), le Ghana a invité les parties prenantes à prendre « pleinement » en compte les points de vue des pays contributeurs de troupes.  Comme la Somalie, mais aussi la Fédération de Russie ou la Chine, les A3 souhaitent pour la future mission un financement « prévisible et durable ».  Le Royaume-Uni a demandé une mission qui soit « réaliste, efficace et abordable », et en mesure de soutenir la mise en œuvre du plan de transition pour la Somalie.  La France a souhaité que le passage de l’AMISOM à la future mission ne soit « pas uniquement un changement de nom », mais permette de gagner en efficacité.  La Fédération de Russie a souhaité une « approche équilibrée », tenant dûment compte des préoccupations des autorités somaliennes, tout en disant qu’il est encore trop tôt pour fermer les portes de la mission de l’Union africaine.  Les États-Unis se sont montrés soucieux de parvenir à un accord avant l’échéance du 31 mars, après une reconduction technique de trois mois. 

Les États-Unis se sont aussi inquiétés de l’autre échéance, celle du 3 mars, qui concerne l’autorisation donnée aux États de prendre des mesures pour lutter contre la piraterie au large des côtes somaliennes.  Ils ont souhaité l’adoption d’une nouvelle résolution dans un esprit de consensus, alors que la Somalie annonçait qu’elle ne « demanderait pas » le renouvellement de la résolution, estimant que cette lutte avait, après 15 années d’existence, « atteint ses objectifs ».  Si le Royaume-Uni a assuré n’avoir « aucune objection de principe au désir du Gouvernement fédéral de Somalie de passer à un cadre bilatéral de coopération maritime », il a souhaité une prorogation de la résolution 2608 (2021) jusqu’à ce qu’un tel cadre soit en place, afin d’éviter toute lacune opérationnelle. 

Enfin, plusieurs membres du Conseil ont appelé à l’intensification de l’aide humanitaire face à l’aggravation de la sécheresse.  L’Irlande a, en particulier, appelé la communauté internationale à tirer les leçons du succès de 2017, quand la famine a été évitée, comme de l’échec collectif en 2011, lorsqu’elle s’est installée dans des circonstances que la représentante a jugées « très similaires à celles d’aujourd'hui ».  Le Royaume-Uni et les Émirats arabes unis ont mis en avant leur assistance et ont également établi un lien entre les questions de sécurité et les changements climatiques.  Le Plan de réponse humanitaire pour la Somalie n’est à ce jour financé qu’à hauteur de 2%, a prévenu M. Swan. 

LA SITUATION EN SOMALIE (S/2022/101)

Déclarations

M. JAMES SWAN, Représentant spécial et Chef de la Mission dassistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), a rappelé que le processus électoral en Somalie avait désormais plus d’un an de retard sur le calendrier prévu par la Constitution.  S’il a vu comme une « évolution positive » la complétion des élections de la Chambre haute et l’accélération du rythme des élections de la Chambre du peuple à la suite du Conseil consultatif national de janvier, il a ajouté qu’il fallait encore accélérer le rythme.  Le Représentant spécial a rappelé qu’à ce jour, 130 des 275 sièges à la Chambre du peuple ont été pourvus et que 60 autres seront bientôt ouverts au scrutin.  M. Swan a en outre rappelé que 23 femmes ont été élues à ce jour à la Chambre du peuple, soit environ 22% du total, un chiffre « bien en deçà du quota » de 30% de femmes que les dirigeants politiques somaliens se sont engagés à atteindre pour les deux chambres du Parlement.  Il a donc exhorté tous les acteurs somaliens à redoubler d’efforts pour atteindre cet objectif. 

M. Swan a assuré que les Nations Unies continueront à fournir un soutien technique, matériel et consultatif aux organes de gestion des élections, au Bureau du Premier Ministre, au Conseil consultatif national (CCN) « et aux ambassadeurs de bonne volonté qui plaident pour la représentation des femmes ».  Rappelant que la Mission continue de recevoir des rapports sur des irrégularités présumées, il a invité les différents acteurs à « rectifier le tir pour améliorer le processus », afin de garantir que les élections soient crédibles et leur résultat acceptable par le public somalien.  Ceci, a-t-il expliqué, est essentiel pour permettre au futur gouvernement de se concentrer sur les priorités nationales du pays, y compris les problèmes de sécurité, la construction de l’État et le développement. Il a rappelé que les Nations Unies se coordonnent avec les partenaires internationaux pour veiller à assurer un consensus et des messages communs.  Il a par ailleurs attribué les tensions politiques sporadiques entre dirigeants somaliens à des manœuvres et des postures, rapidement maîtrisées, mais qui font peser un risque réel de conflit suite à « une erreur de calcul ».  Il a rappelé le rôle d’apaisement joué par les Nations Unies et leurs partenaires et a plaidé en faveur de « la retenue, du compromis et de solutions pragmatiques fondées sur le consensus ». 

Le Représentant spécial a rappelé que les Chabab continuent de représenter un défi de sécurité majeur, notamment en raison d’une utilisation plus intense d’engins explosifs improvisés, en particulier à Mogadiscio.  Il a rappelé que la configuration future de la Mission de l’Union africaine en Somalie est « en cours d’examen » et que les Nations Unies participent « activement » aux discussions entre le Gouvernement fédéral somalien, l’Union africaine (UA) et les principaux donateurs.  Les discussions techniques tenues à Mogadiscio du 27 janvier au 9 février ont permis de réaliser des progrès, a-t-il estimé.  Quant à la mise en œuvre du plan de transition somalien, essentiel tant pour la reconfiguration de l’AMISOM que pour le rythme du transfert des responsabilités de celle-ci aux forces de sécurité somaliennes, elle doit pour M. Swan rester une priorité urgente. 

M. Swan a qualifié d’extrêmement grave la situation humanitaire dans le pays, où 7,7 millions de Somaliens auront besoin d’une aide humanitaire en 2022. Il a rappelé que la Somalie est le pays le plus gravement touché par la sécheresse qui sévit dans la Corne de l’Afrique, alors que les prochaines pluies ne sont pas attendues avant avril.  L’opération humanitaire en Somalie dispose du savoir-faire nécessaire pour apporter une aide vitale aux personnes dans le besoin mais manque de ressources, a plaidé le Représentant spécial, qui a rappelé que le Plan de réponse humanitaire pour 2022 n’est actuellement financé qu’à hauteur de 2%.  Il a donc appelé les donateurs à accroître leur soutien.  La réponse humanitaire ne constitue pas une solution à long terme, a toutefois ajouté M. Swan, qui a rappelé les mesures prises par la famille des Nations Unies pour renforcer le lien entre l’humanitaire, le développement et la consolidation de la paix. 

M. Swan a rappelé que la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité et l’inclusion des jeunes reste au cœur du travail de l’ONU dans le pays.  Il a notamment rappelé le lancement, en novembre dernier, d’un nouveau programme « Femmes, paix et protection » pour promouvoir la participation des femmes aux processus de consolidation de la paix.  Il y a vu un investissement qui permettra aussi d’améliorer la protection des femmes et des filles contre les violences sexuelles dans les conflits. 

En conclusion, et malgré une situation politique, sécuritaire et humanitaire instable, M. Swan a dit garder l’espoir de voir le pays faire de nouveaux progrès « dans les mois à venir et au-delà ».  Il a néanmoins averti que cela suppose que les dirigeants somaliens mettent leurs différends de côté pour le bien du peuple somalien, concluent des élections crédibles dans les meilleurs délais et se concentrent ensuite sur les priorités nationales urgentes. 

M. FRANCISCO CAETANO JOSE MADEIRA, Représentant spécial du Président de la Commission de lUnion africaine pour la Somalie et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), a souligné l’attachement des autorités somaliennes au processus électoral, tout en reconnaissant la lenteur dudit processus.  Il a aussi salué le fait que 28 femmes aient été élues.  Il a assuré que l’UA, au travers de l’AMISOM, continue d’appuyer la Somalie.  « Mon objectif a toujours été d’écouter toutes les parties prenantes. »  Il a déclaré que la Somalie a besoin d’un appui international fort dans ce contexte électoral.  L’AMISOM s’est concentrée sur la sécurité des élections, en œuvrant notamment au renforcement des capacités des forces somaliennes, a dit M. Madeira.  Il a ajouté que l’AMISOM a amélioré son soutien opérationnel aux forces de police somaliennes, avant d’admettre que l’insécurité dans le pays reste préoccupante.  Il a mentionné la récente flambée de violence qu’il a imputée aux Chabab.  Il a aussi mentionné la résurgence de Daech, en particulier à Mogadiscio, estimant qu’elle doit s’évaluer à l’aune du contexte régional.  Les Chabab ont gagné en audace et en détermination dans leurs tentatives visant à mettre à mal le processus en cours, a mis en garde M. Madeira.  Il a déclaré que l’AMISOM a renforcé ses efforts de stabilisation en Somalie, en citant la récente neutralisation de cinq responsables des Chabab. 

Puis, le Représentant spécial a évoqué le remplacement de l’AMISOM par une autre mission, ainsi que le transfert futur des tâches sécuritaires aux autorités somaliennes.  En vue de cet objectif, les difficultés avec les autorités somaliennes ont été aplanies, conduisant à l’adoption d’une approche en neuf points, a expliqué M. Madeira.  Il a aussi mentionné la tenue de discussions techniques qui ont débouché sur l’élaboration de documents stratégiques à même d’apporter des réponses aux questions du Conseil.  Il a déclaré que la nouvelle mission serait un mécanisme de transition en appui aux autorités somaliennes, permettant à celles-ci de s’appuyer sur les acquis de l’AMISOM.  M. Madeira a estimé que cette nouvelle mission de l’Union africaine, ainsi que le bon transfert des tâches sécuritaires aux autorités somaliennes, nécessiteront un appui international robuste.  Il a aussi souligné la nécessité que les autorités somaliennes renforcent leurs capacités d’actions en ce qui concerne la neutralisation des engins explosifs et la collecte de renseignements.  La transition en Somalie est un processus complexe, a-t-il reconnu, en appelant à « l’unité » de tous les amis de la Somalie. 

M. OLOF SKOOG, Chef de la délégation de lUnion européenne (UE) auprès des Nations Unies, a jugé pertinente l’évaluation de la situation en Somalie, à l’aune du sommet Union européenne-Union africaine qui doit se tenir dans quelques jours à Bruxelles les 17 et 18 février prochains.  Il a qualifié la situation d’« extrêmement fragile et instable », en dépit des progrès, notamment en matière de réformes économiques.  La tendance croissante à la violence et à l’extrémisme, l’évolution de la menace des Chabab, combinés à la pandémie de COVID-19 et à une sécheresse dévastatrice sans précédent, sont les principaux moteurs des besoins humanitaires aigus, avec 2,9 millions de personnes déplacées et plus de 4,6 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë et à la faim, a-t-il détaillé, avant de juger « impératif » d’adopter une approche globale basée sur les liens pour créer des synergies entre les engagements humanitaires, les efforts de développement et la consolidation de la paix et la réconciliation. 

M. Skoog a estimé que la Somalie se trouve actuellement « à la croisée des chemins », notamment pour réaliser ses priorités immédiates que sont la conclusion d’élections parlementaires, une transition pacifique du pouvoir et la formation d’un gouvernement opérationnel capable de répondre aux attentes de sa population.  Elle doit également s’engager avec la communauté internationale, a-t-il ajouté. Cela implique que la politique soit « placée au centre », d’autant que depuis des mois, les partenaires et voisins de la Somalie n’ont cessé d’exhorter ses dirigeants à travailler dans un esprit de compromis pour surmonter les derniers obstacles politiques afin de finaliser un processus électoral inclusif dans les meilleurs délais et dans le respect des accords auxquels ils sont parvenus.  Le peuple somalien mérite le dévouement total de ses dirigeants à sa sécurité, son bien-être et son progrès, a-t-il aussi plaidé. 

En ce qui la concerne, l’UE, en collaboration avec des partenaires internationaux, a aidé la Somalie à conclure les élections attendues et à mener une transition de pouvoir ordonnée et pacifique.  L’année dernière, une enveloppe immédiate de 3,5 millions d’euros en faveur de la société civile a été débloquée pour mettre en pratique l’accord électoral.  L’UE soutient également, et de manière continue, une présence sécuritaire internationale face aux menaces des Chabab.  En plus d’un milliard d’euros d’aide au développement et d’aide humanitaire, l’UE est le plus grand investisseur dans le secteur de la sécurité et le premier contributeur de l’AMISOM, avec plus de 2,3 milliards d’euros depuis 2007.  Elle a également déployé une opération maritime, opération ATALANTA, qui a contribué avec succès à la répression de la piraterie au large des côtes somaliennes, a cité le chef de la Mission. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) s’est félicitée de la récente accélération du rythme des élections à la Chambre basse, estimant que l’achèvement du processus électoral permettrait d’éviter une incertitude politique prolongée et des risques accrus pour la sécurité et la stabilité de la Somalie, ainsi que d’affaiblir les Chabab et d’ouvrir la voie à la Somalie pour accéder au financement international.  Elle a exhorté les dirigeants politiques somaliens à privilégier l’intérêt national, à donner la priorité à la conclusion d’un processus électoral pacifique et crédible, et à veiller à ce que les forces de sécurité ne soient pas utilisées comme des instruments politiques.  Elle a espéré que les élections à la Chambre basse seront achevées d’ici au 25 février et que l’objectif de 30% de femmes élues sera atteint.  Mme Woodward a insisté sur l’importance d’un accord rapide sur la future mission de l’Union africaine en Somalie reconfigurée, qui soit « réaliste, efficace et abordable », et en mesure de de soutenir la mise en œuvre du plan de transition pour la Somalie.  Elle a salué les récents progrès accomplis en ce sens et a encouragé le Gouvernement fédéral somalien à indiquer clairement comment il compte générer les forces et les capacités nécessaires à la mise en œuvre du plan de transition pour la Somalie. 

Le Royaume-Uni se félicite des résultats obtenus dans la lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes grâce aux « efforts fructueux de la Somalie et de la communauté internationale », a poursuivi la représentante qui a dit n’avoir « aucune objection de principe au désir du Gouvernement fédéral de la Somalie de passer à un cadre bilatéral de coopération maritime ».  Elle s’est toutefois dite favorable à une prorogation de la résolution 2608 (2021) jusqu’à ce qu’un tel cadre soit en place afin d’éviter toute lacune opérationnelle. 

Enfin, Mme Woodward a rappelé que le Royaume-Uni avait récemment annoncé une aide humanitaire supplémentaire de 18,3 millions de dollars pour faire face aux effets de la sécheresse actuelle, en plus des 47,5 millions de dollars d’aide humanitaire déjà engagés.  Estimant qu’il fallait « tirer les leçons de 2017 », elle a invité la communauté internationale à agir rapidement pour améliorer l’accès aux populations touchées et pour renforcer la résilience à plus long terme aux chocs climatiques. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a imputé les retards dans le processus électoral aux divergences politiques entre les parties prenantes.  Il les a appelées à coopérer afin que le processus débouche sur l’élection présidentielle, arguant que tout retard ne fait que servir les ennemis de la Somalie, dont les Chabab.  Il a en effet insisté sur la nécessité de lutter contre le terrorisme, en Somalie et dans le monde, avant de louer la contribution « colossale » de l’AMISOM à la stabilité du pays.  Il a plaidé pour un financement prévisible de cette mission dont la transition et la reconfiguration exigeront l’appui de la communauté internationales.  Le délégué a dit attendre avec impatience les propositions sur cette transition. 

Au nom du A3 –Gabon, Ghana, Kenya, M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a dit prendre note des bons points, dont les avancées en matière électorale, mais aussi des mauvais points, liés notamment à la participation des femmes.  Il a appelé le Gouvernement fédéral à conclure l’élection de tous les membres de la Chambre basse, avant le 25 février, conformément au calendrier convenu.  Tout retard nuit au développement du pays, a prévenu le représentant, en appelant toutes les forces politiques à faire preuve de souplesse pour défendre les intérêts du peuple somalien.  

Il s’est également dit « inquiet » des menaces sécuritaire posées par les Chebab, qui poursuivent leurs attaques contre le Gouvernement fédéral.  Dans ce contexte, il a exhorté la communauté internationale à aider la Somalie et l’AMISOM à répondre à cette menace terroriste.  Alors que des négociations sur la mission de transition en Somalie débuteront au mois de mars, le représentant a dit que son groupe sera « très « attentif » et a voulu que l’on tienne pleinement compte des points de vue de toutes les parties prenantes, y compris les pays contributeurs de troupes.  Il a plaidé pour un financement « prévisible et durable » pendant toute la durée du mandat de la future mission, soit jusqu’au transfert des responsabilités sécuritaires au Gouvernement fédéral.  Le représentant n’a pas manqué de souligner l’attachement de son groupe à la souveraineté et à l’intégrité territoriales de la Somalie.  

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a fait part de sa vive préoccupation face à l’évolution de la situation en Somalie, tout en reconnaissant que des progrès significatifs avaient été réalisés ces dernières semaines.  Néanmoins, a-t-il ajouté, les calendriers électoraux n’ont pas été respectés.  Il s’est aussi inquiété du déploiement des forces de sécurité somaliennes dans le contexte des élections et a rappelé qu’elles ne doivent pas intervenir dans ce cadre.  Il a souhaité l’achèvement rapide d’élections crédibles. 

À propos de la future mission de l’Union africaine chargée de succéder à l’AMISOM, le représentant a rappelé que la prolongation technique de l’autorisation accordée en décembre dernier par le Conseil de sécurité arrive à expiration le 31 mars.  Il a souhaité que les différentes parties concernées puissent apporter leurs contributions dans les plus brefs délais, afin d’adapter la mission à l’évolution de la menace présentée par les Chebab. Le représentant a également rappelé que l’autorisation du Conseil concernant la lutte contre la piraterie au large de la côte somalienne arrive à expiration le 3 mars et a souhaité l’adoption d’une nouvelle résolution dans un esprit de consensus.  Il a enfin fait part de l’inquiétude des États-Unis face à la sécheresse qui sévit actuellement en Somalie. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) s’est dite préoccupée par le retard du processus électoral.  Elle a appelé les autorités fédérales somaliennes et les États membres de la fédération à mener ce processus à son terme dans les plus brefs délais, avant de saluer les efforts pour atteindre le quota de 30% de femmes élues.  Les Somaliens ont urgemment besoin d’un gouvernement pleinement légitime qui puisse répondre aux défis auxquels le pays est confronté, a-t-elle martelé. 

Notre deuxième priorité, a poursuivi la représentante, doit être de redéfinir le partenariat entre la Somalie et la communauté internationale pour faire face aux menaces sécuritaires.  Elle a rappelé que, le mois prochain, le Conseil de sécurité devra se prononcer sur la sécurité maritime au large de la Somalie, ainsi que sur l’avenir de l’AMISOM.  Nous devons mettre à profit cette période pour faire le bilan des initiatives menées jusqu’ici et rechercher des améliorations, dans le dialogue avec toutes les parties prenantes, à commencer par les autorités somaliennes. 

Mme Broadhurst a salué le fait que la Somalie et l’Union africaine aient trouvé un accord sur le principe d’une mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) qui prendrait la suite de l’AMISOM.  La France, a-t-elle dit, appelle toutes les parties à œuvrer pour que le passage de l’AMISOM à ATMIS ne soit pas uniquement un changement de nom, mais permette de gagner en efficacité. Enfin, la déléguée a jugé important que cette mission puisse mener des actions plus vigoureuses et mieux coordonnées contre les Chebab, tout en accompagnant, conformément à un calendrier « ambitieux », le transfert de responsabilités au profit des forces somaliennes. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a exprimé sa préoccupation devant la lenteur du processus électoral en Somalie et les menaces qui pèsent sur sa crédibilité.  Le programme de réforme économique convenu avec le Fonds monétaire international (FMI) est gravement menacé, à moins qu’un nouveau gouvernement ne soit formé au début de cette année, a-t-elle mis en garde.  Si tel est le cas, elle a prévenu que le financement international du développement en Somalie, y compris de la Banque mondiale, pourrait être considérablement réduit.  Cela aura un effet préjudiciable sur les efforts visant à instaurer la paix, la stabilité et le développement en Somalie, a-t-elle encore craint. 

La représentante a également fait part de ses préoccupations quant à la situation en matière de protection face aux actes non seulement des Chabab, mais aussi des forces de l’État.  Elle a exhorté les autorités somaliennes à enquêter et à poursuivre les auteurs de violences sexuelles et de violations graves contre les enfants conformément aux engagements antérieurs.  Elle a aussi appelé à l’intensification des efforts pour la mise en œuvre du plan de transition somalien, qui a pris du retard.  Pour parvenir à la justice et à la sécurité en Somalie, il est essentiel de construire et de soutenir un gouvernement local responsable et de renforcer sa capacité à fournir des services de base à la population, a-t-elle dit, avant de saluer les progrès réalisés vers l’objectif d’une AMISOM reconfigurée.  

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a jugé « choquants » les chiffres cités par M. Swan sur la situation humanitaire et a parlé de « l’une des plus graves sécheresses de l’histoire récente de la région ».  Cette crise humanitaire, qui ne cesse d’empirer, aggrave les nombreux défis politiques et sécuritaires, y compris les risques sécuritaires liés au climat, a ajouté la représentante.  Elle a appelé la communauté internationale à se mobiliser et à soutenir le peuple somalien, en fournissant dès maintenant des fonds supplémentaires, en facilitant les flux financiers et en titrant les leçons du succès de 2017, quand la famine a été évitée, comme de l’échec collectif en 2011, lorsqu’elle s’est installée dans des circonstances « très similaires à celles d’aujourd’hui ».  L’Irlande contribuera au nécessaire effort humanitaire, a promis la représentante, avant de condamner les attaques contre les travailleurs et les biens humanitaires, et de réclamer un accès humanitaire sûr et sans restriction à tout le pays. 

Mme Byrne Nason s’est félicitée des progrès vers l’achèvement des élections, qui arrivent « enfin ».  Elle a toutefois appelé les autorités somaliennes à « faire un dernier effort » pour que le processus soit mené à bien, de manière équitable et transparente afin que le Gouvernement puisse ensuite se consacrer au peuple somalien.  La représentante a rappelé que l’Irlande insiste sur l’importance qu’il y a à ce que les femmes jouent un rôle égal dans la vie politique et la sphère publique.  Elle s’est donc dit heureuse des progrès signalés en ce sens par le Chef de la MANUSOM, y voyant une étape encourageante dans la perspective des élections à venir, pour lesquelles elle a souhaité que soit appliqué le principe « une personne, une voix ». 

Mme Byrne Nason a condamné les attaques perpétrées par les Chebab et s’est inquiétée des informations faisant état de violences sexuelles et sexistes généralisées.  Elle a demandé que les autorités somaliennes protègent les civils, veillent à l’établissement des responsabilités et offrent des services à toutes les victimes.  La représentante a rappelé que son pays participe activement aux discussions sur une future mission de l’UA en Somalie, s’est félicitée du récent accord sur une proposition-cadre et a dit attendre avec impatience les plans détaillés.  La sécurité maritime s’inscrivant dans ce contexte, elle a souhaité un consensus sur le renouvellement de la résolution sur la sécurité maritime au large de la côte somalienne. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a exhorté les autorités somaliennes à rester concentrées sur le processus électoral.  Un processus juste, opportun, inclusif et transparent est crucial pour conserver la confiance du peuple somalien, a-t-il déclaré, en demandant la pleine participation des femmes.  Il a demandé que le quota de 30% de femmes élues à la Chambre basse soit respecté.  Il a ensuite condamné les attaques perpétrées par les Chabab, ainsi que leurs tentatives visant à perturber le processus électoral.  Il a souhaité qu’un consensus se dégage sur les contours de la nouvelle mission et prôné une voie « réaliste », s’agissant du transfert de responsabilités au profit des forces somaliennes.  Enfin, le représentant a estimé que la sécheresse que connaît la Somalie montre combien les changements climatiques peuvent aggraver les défis sécuritaires.  Ce Conseil doit en tenir compte, a conclu le représentant du Mexique. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a demandé que l’accent soit mis sur le soutien à la voie politique et a encouragé toutes les parties à s’engager dans un dialogue positif en donnant la priorité à la tenue d’élections équitables et inclusives.  Elle a jugé positifs les récents développements en la matière et souhaité que le quota de 30% de femmes élues dans les deux chambres puisse être respecté.  Elle a aussi rappelé l’importance de garantir la sécurité et la protection des femmes candidates à des fonctions politiques.  Elle a ensuite demandé que soit apportée à la Somalie une assistance lui permettant de faire face aux menaces sécuritaires et notamment aux Chabab, dont les activités empêchent la construction d’une paix durable.  Elle a souhaité que les pourparlers sur la reconfiguration de l’AMISOM soient « menés à bien avec précision », en insistant sur un transfert par « étapes calculées » des responsabilités en matière de sécurité aux forces de sécurité somaliennes, afin d’éviter de laisser un vide dont profiteraient les Chabab. 

La représentante s’est inquiétée de la détérioration de la situation humanitaire et a souligné l’importance de l’acheminement complet, sûr et sans entrave de l’aide tout en assurant la protection des travailleurs humanitaires. Les Émirats arabes unis ont récemment fourni un pont aérien pour transporter plusieurs tonnes d’aide alimentaire afin de minimiser l’impact de la sécheresse et ont envoyé un navire chargé de réservoirs d’eau et de matériel de secours pour les personnes déplacées, a-t-elle rappelé.  Mme Alhefeiti a exhorté l’ONU, l’AMISOM et les partenaires à aider la Somalie à faire face aux impacts des changements climatiques qui accroissent l’insécurité alimentaire.  Elle a plaidé plus largement pour une plus grande utilisation des énergies renouvelables dans les processus de paix.  La représentante s’est également félicitée des efforts internationaux qui ont permis d’interdire les exportations de charbon de bois de la Somalie et l’efficacité des mesures de lutte contre la piraterie.  Elle y a vu la démonstration de ce qui peut être réalisé grâce au renforcement des partenariats et à l’action multilatérale. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a salué les progrès accomplis dans la mise en œuvre des accords sur les élections du 17 septembre 2020 et du 27 mai 2021.  Il a pris note de l’achèvement du processus concernant la Chambre haute et dit espérer que les élections à la Chambre du peuple suivraient le même schéma.  Il a salué le fait que 26% de femmes aient été élues à la Chambre haute, y voyant une réalisation historique qui devrait faire progresser la représentation des femmes dans tous les aspects de la politique somalienne, y compris à l’occasion des élections à la Chambre du peuple.  Le représentant a par ailleurs remercié les contingents de l’AMISOM et les forces armées somaliennes pour leur travail courageux face au terrorisme, dans un contexte dangereux et instable.  Il a cité les tirs de mortier revendiqués par les Chabab qui ont atteint, le 27 novembre à Baidoa, le complexe des Nations Unies, le premier jour des élections de la Chambre du peuple dans la ville.  Il s’est également dit profondément préoccupé par les « niveaux alarmants de violations graves contre les enfants » dont a fait état la Représentante spéciale pour la protection des enfants dans les conflits armés, Mme Gamba. 

Le délégué a rappelé « l’interaction décisive » entre le processus électoral et la stabilité en Somalie.  Il a reconnu que les retards accumulés dans le processus électoral avaient initialement été imputables à des considérations sanitaires mais a ajouté que le report des élections, « les sièges législatifs vides, les mandats politiques étirés » présentent en soi des risques pour la stabilité politique, encore accrus par l’activité des Chabab.  C’est pourquoi le Brésil soutient les accords conclus sur les élections et exhorte la Somalie à les mettre pleinement en œuvre et à achever la sélection de ses représentants, a-t-il dit avant de souhaiter que les différents acteurs politiques, nationaux comme locaux, accordent dans les prochains mois la priorité à la stabilité de la fédération. 

M. BING DAI (Chine) a affirmé que « le processus électoral en Somalie avance envers et contre tous ».  Il a espéré que les dirigeants somaliens continueront de dissiper leurs différends et concluront au plus vite ledit processus.  De l’avis de la délégation chinoise, la communauté internationale devrait, au lieu d’exercer des pressions, accompagner les dirigeants dans une appropriation nationale de ce processus.  Le représentant a aussi souhaité que, de son côté, le Conseil de sécurité dote l’AMISOM de moyens suffisants et efficaces pour remplir sa mission en tenant compte du plan de transition élaboré par les autorités somaliennes.  Il faut éviter tout déficit de financement qui risquerait de miner les efforts de lutte contre le terrorisme, a mis en garde le représentant, rappelant que la Somalie est un pays stratégique dans la région qu’il ne faut pas « saper ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a souhaité l’achèvement du processus électoral dans les meilleurs délais et salué l’accord politique du 9 janvier dernier.  Un processus électoral crédible et transparent sera bénéfique au développement, à la sécurité et à la stabilité de la Somalie, a déclaré le délégué.  Rappelant que la démocratie est bien plus que la tenue d’élections, « une construction laborieuse jour après jour », il a demandé que toutes les composantes de la société somalienne soient dûment représentées.  Il a en outre insisté sur le quota de 30% de femmes élues à la Chambre basse.  Il a, à son tour, salué les progrès accomplis s’agissant des contours d’une mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) qui prendrait la suite de l’AMISOM, avant de rappeler que le mandat de cette dernière s’achève le 31 mars.  L’ATMIS devra répondre efficacement à tous les défis et passer le « flambeau de la sécurité » aux forces somaliennes, a-t-il insisté.  Enfin le représentant s’est dit profondément préoccupé par la situation humanitaire « critique » dans le pays et a demandé l’apport d’une aide aux près de huit millions de personnes qui en ont besoin. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a déclaré que la Somalie continue d’avancer dans son processus électoral et souhaité son achèvement conformément aux accords conclus.  Toutes les parties doivent œuvrer à la mise en place d’un modèle pérenne de gouvernance fédérale, a-t-elle poursuivi.  Elle a qualifié la situation sécuritaire de « tendue », les Chebab continuant de perpétrer des attaques meurtrières, y compris contre le personnel de l’AMISOM.  Elle a salué les avancées enregistrées s’agissant de la nouvelle architecture de sécurité qui doit voir le jour en Somalie et a dit attendre avec impatience la présentation des recommandations sur la reconfiguration de l’AMISOM, tout en souhaitant une « approche équilibrée », prenant dûment compte des préoccupations des autorités somaliennes.  Il est trop tôt pour fermer les portes de la mission de l’UA, a-t-elle argué, en demandant un financement prévisible et pérenne.  Enfin, la représentante a exhorté l’ONU à continuer d’aider la Somalie, tout en évitant les ingérences dans les affaires intérieures du pays. 

M. ABUKAR DAHIR OSMAN (Somalie) a annoncé que 45% des sièges à la Chambre basse du Parlement fédéral ont été pourvus, ajoutant que ce résultat met en lumière le fait que le Gouvernement somalien s’est engagé en faveur d’un processus libre et transparent.  La convocation récente du Conseil consultatif national a débouché sur des rectifications qui ont permis de progresser dans le processus électoral, lequel a recouvré sa crédibilité et la confiance dont il jouissait auprès de la population, a ajouté le représentant, qui a confirmé la volonté de son gouvernement d’achever le processus. 

En matière de sécurité, il a déclaré qu’un accord avec l’Union africaine a été obtenu sur les modalités d’une mission de transition.  Une feuille de route a été établie qui prévoit trois tâches clefs: un nouveau concept d’opérations conjointes, une proposition conjointe pour une nouvelle mission et un plan d’appui logistique.  Le Gouvernement somalien et les membres de l’Union africaine ont conclu un accord qui se concentre sur le nouveau mandat, les objectifs stratégiques et les stratégique de sortie de la future mission, a expliqué le représentant.  La mission devra être agile, mobile et à même de lutter efficacement avec des capacités à la mesure des menaces.  Elle s’appuiera sur le plan de transition somalien qui vise à former des forces de sécurité autonomes pour que le pays puisse assumer pleinement ses responsabilités en matière de sécurité. 

Le représentant a également rappelé l’attachement de son pays à la sécurité maritime.  Il a été décidé, à cet égard, de mettre en place une formation pour la police, les garde côtes et d’autres départements avec pour objectif de créer des unités chargées spécifiquement de la criminalité en mer, « y compris la pêche illégale pratiquée dans les eaux territoriales somaliennes ».  Il a conclu en déclarant que la Somalie ne demandera pas le renouvellement de la résolution portant sur la lutte contre la piraterie au large de sa côte car ce texte a « atteint ses objectifs », après 15 années d’existence. 

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