Cinquante-cinquième session,
2e & 3e séances plénières – matin & après-midi
POP/1100

La Commission de la population et du développement entame une session 2022 axée sur la nécessité d’une croissance économique soutenue et inclusive

La Commission de la population et du développement a lancé, aujourd’hui, les travaux de sa cinquante-cinquième session, avec pour thème central « Population et développement durable, en particulier croissance économique soutenue et inclusive ».  Une orientation thématique unanimement saluée par les intervenants de cette séance inaugurale, responsables onusiens, experts et une quarantaine de délégations, alors que la pauvreté et les autres formes d’inégalité font l’objet d’une attention renouvelée à la lumière de la pandémie de COVID-19 et de son impact sur l’économie, et sur fond de guerre en Ukraine.

Au cours des trois dernières décennies, la population et l’économie mondiales ont connu une croissance significative, a précisé le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, chiffres à l’appui : la planète comptait 5,3 milliards d’habitants en 1990 et elle s’approche désormais de la barre des 8 milliards.  Dans le même temps, a ajouté M. Liu Zhenmin, le PIB mondial a été multiplié par 2,5.  Pourtant, la croissance économique globale n’a été « ni pérenne ni inclusive » entre les pays et les régions et à l’échelle de la population mondiale, a-t-il déploré.  Alors que la guerre en Ukraine contribue à accroître l’insécurité alimentaire en Afrique et dans les pays en développement, M. Liu a souligné la nécessité d’aider les populations les plus vulnérables, notamment en assurant un approvisionnement suffisant en aliments nutritifs et l’accès à l’aide alimentaire humanitaire.  Parmi les autres propositions sur la table, le Chef du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a cité la mise à disposition de réserves stratégiques de pétrole, le renforcement de la transition vers les énergies vertes et les changements nécessaires dans les mécanismes de financement internationaux existants.

Dans ce contexte de crise, aggravé par la dégradation de l’environnement et les effets des changements climatiques, M. Enrique A. Manalo, Président de la cinquante-cinquième session de la Commission, a jugé encourageant le fait que la croissance de la population mondiale continue de ralentir grâce à la réduction de la fécondité dans le monde.  Cela crée, à ses yeux, une fenêtre d’opportunité pour une croissance économique accélérée, souvent appelée « dividende démographique ».  Reste que, comme l’a souligné la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, le monde est encore loin d’atteindre son objectif d’élimination de la faim d’ici à 2030, a fortiori quand la guerre en Ukraine fait grimper le prix des denrées alimentaires et de l’énergie.  Face à la triple urgence alimentaire, énergétique et financière, le Secrétaire général a créé le Groupe mondial d’intervention des Nations Unies en cas de crise alimentaire, énergétique et financière pour proposer des solutions innovantes, a rappelé Mme Amina Mohammed, ajoutant que, selon une analyse préliminaire de cette structure, 107 économies en développement abritant 1,7 milliard de personnes sont exposées à au moins l’une des trois crises, tandis que 69 pays font face aux trois.  Rendue plus alarmante encore par les récents rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), la « tempête d’adversité » qui s’annonce doit pousser la communauté internationale à soutenir, par ses politiques démographiques et macroéconomiques, une croissance économique soutenue et inclusive, a plaidé Mme Mohammed.

Dressant le même constat, la Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) a mis l’accent sur le niveau élevé des inégalités dans le monde.  Lorsque le Programme de développement durable à l’horizon 2030 a été approuvé voilà sept ans, on estimait à 2,5 milliards de dollars le déficit d’investissement pour que les pays en développement atteignent leurs ODD, a rappelé Mme Rebeca Grynspan.  La pandémie a creusé cet écart à 4,3 milliards de dollars et la guerre en Ukraine devrait encore l’accroître, à tel point que « ce n’est plus un écart mais un gouffre », a-t-elle martelé.  Mme Grynspan a d’autre part noté que les pays qui ont le plus contribué aux modèles non durables de production et de consommation sont généralement ceux où le revenu par habitant est élevé et où la population croît lentement, pas ceux où le revenu par habitant est faible et où la population croît rapidement.  « Chaque crise a un visage féminin », a insisté, pour sa part, la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), en faisant état de « revers désolants », notamment dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive.  Or, la planification familiale améliore les résultats sur le plan de la santé et permet aux femmes et aux filles de rester à l’école et d’acquérir des compétences qui augmenteront leurs revenus tout au long de leur vie, a fait valoir Mme Natalia Kanem, non sans appeler à la levée des obstacles structurels à l’autonomie corporelle et au choix en matière de procréation.

Les crises multiples ne seront gérables si l’on reconnaît qu’il faut inclure tout un chacun, a abondé Mme Jayati Ghosh, professeure au Département d’économie de l’Université du Massachussetts.  Cela suppose une mobilisation massive contre les inégalités et beaucoup de volonté politique, a-t-elle souligné, avant de faire remarquer que cela vaut aussi pour l’environnement.  Selon elle, la surexploitation de la nature n’est pas liée au fait qu’il y a trop de gens sur Terre mais plutôt aux « mauvais schémas économiques actuels ».  Il convient donc d’agir directement sur la consommation carbone des acteurs les plus riches, a estimé l’enseignante, par opposition à l’idée d’une taxe carbone qui toucherait tout le monde.

Ponctuant le débat général, une table ronde s’est concentrée cet après-midi sur les trois rapports du Secrétaire général à l’étude. 

En début de séance, la Commission a confirmé la nomination de M. Antonin Bieke (Côte d’Ivoire), de Mme Mayra Lisseth Sorto (El Salvador) et de Mme Sara Offermans (Pays-Bas) en tant que Vice-Présidents pour cette cinquante-cinquième session.  Également Vice-Président, M. Andrei Nicolenco (Moldova) a, quant à lui, été désigné comme Rapporteur.  La Commission reprendra ses travaux mardi 26 avril à partir de 10 heures.

MESURES POUR LA POURSUITE DE LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT AUX NIVEAUX MONDIAL, RÉGIONAL ET NATIONAL - POINT 3 A) - E/CN.9/2022/4

LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE, EN PARTICULIER LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE SOUTENUE ET INCLUSIVE - POINT 3 B) - E/CN.9/2022/2, E/CN.9/2022/3

Déclarations liminaires

M. ENRIQUE A. MANALO (Philippines), Président de la cinquante-cinquième session de la Commissionde lapopulationet du développement, a indiqué que le thème spécial de cette session, « Population et développement durable, en particulier croissance économique soutenue et inclusive », est étroitement lié au chapitre III du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement qui souligne la nécessité d’intégrer les questions de population dans les stratégies de développement.  Ce chapitre met en évidence, selon lui, les liens entre la population, la croissance économique soutenue et la pauvreté, d’une part, et entre la population et l’environnement, d’autre part.  Des idées qui restent, à ses yeux, aussi pertinentes aujourd’hui qu’elles l’étaient il y a 28 ans.  De fait, a expliqué M. Manalo, la pauvreté et d’autres formes d’inégalité font l’objet d’une attention renouvelée à la lumière de la crise sanitaire mondiale et des ralentissements économiques causés par la pandémie de COVID-19. 

Parallèlement, a poursuivi le Président, le Programme 2030 se concentre, entre autres, sur les modes de production et de consommation non durables, compte tenu de leur impact sur la dégradation de l’environnement et les changements climatiques.  Si ces problèmes ne sont pas principalement dus à l’augmentation de la population humaine, ils sont tous aggravés et rendus plus difficiles à résoudre par une croissance démographique continue.  Il est donc encourageant de constater que la croissance de la population mondiale continue de ralentir grâce à la réduction de la fécondité dans le monde.  Cela crée, à son avis, une fenêtre d’opportunité pour une croissance économique accélérée, souvent appelée « dividende démographique ». 

Malheureusement, a nuancé M. Manalo, l’élévation du niveau de vie s’accompagne souvent de risques accrus de dégradation de l’environnement.  Il s’est, par ailleurs, félicité qu’après plusieurs années d’impasse, la Commission a pu parvenir en 2021 à un consensus autour d’une résolution sur le thème spécial de la session, démontrant ainsi la pertinence continue de la Commission, tout en apportant une contribution importante au Forum politique de haut niveau sur le développement durable. 

En tant que Président, son approche dès le départ a été de s’appuyer sur le succès de la session précédente, a-t-il assuré.  Pour finir, il a salué les délégations qui sont parvenues à dégager un consensus sur les trois projets de décision proposés par le Bureau, espérant les voir aboutir à un consensus sur le projet de résolution portant sur le thème spécial de cette session.

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a averti qu’au-delà des effets et des retombées de la pandémie de COVID-19, le monde est loin d’avoir éliminé la faim et la malnutrition d’ici à 2030.  En effet, le nombre de personnes souffrant de la faim devrait augmenter de dizaines de millions à mesure que la guerre en Ukraine fait grimper les prix des denrées alimentaires et de l’énergie. 

Mme Mohammed a rappelé qu’en réponse à la triple urgence alimentaire, énergétique et financière à laquelle sont confrontés de nombreux pays en développement, le Secrétaire général a créé un groupe mondial de réponse à la crise pour proposer des solutions innovantes.  Selon l’analyse préliminaire publiée il y a une semaine par son équipe de travail, 107 économies en développement abritant 1,7 milliard de personnes sont gravement exposées à au moins l’une des trois crises, alors que 69 pays font face aux trois.  Dans le même temps, a-t-elle relevé, de récents rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) font apparaître que le monde se dirige tout droit vers une catastrophe climatique, alors que les gouvernements et les entreprises ne respectent pas leurs engagements.

Face à la « tempête d’adversité » qui s’annonce, nous devons nous rassembler en tant que communauté internationale, a plaidé la Vice-Secrétaire générale, selon laquelle la Commission de la population et du développement a un rôle important à jouer au cours de cette cinquante-cinquième session.  Nous devons renouveler notre engagement à veiller à ce que les politiques démographiques et macroéconomiques soutiennent une croissance économique soutenue et inclusive, et donnent aux gens la possibilité de réaliser leur potentiel, a-t-elle affirmé.  De même, il est urgent de renouveler le contrat social afin de permettre aux jeunes de vivre dans la dignité, d’assurer aux femmes des perspectives et opportunités égales à celles des hommes, et de protéger les malades, les vulnérables et les minorités de toutes sortes.  

Alors que la plupart des pays connaissent une démographie vieillissante et sont, de ce fait, confrontés à des pressions budgétaires, les gouvernements doivent accorder la priorité aux investissements dans l’économie des soins, l’apprentissage tout au long de la vie, le travail décent et des modes de vie sains à tous les âges, a souligné Mme Mohammed.  Parallèlement, nous devons tirer parti du fait que nous avons la plus grande population de jeunes de l’histoire de l’humanité.  Il faut donc investir dans la jeunesse pour qu’elle libère son plein potentiel, a-t-elle estimé, ajoutant qu’à cette fin, le Secrétaire général a convoqué un sommet sur la transformation de l’éducation qui se tiendra en septembre à New York.  Nous devrons le faire tout en abordant la crise climatique et la reconstruction des économies ravagées par la pandémie et les conflits armés, a conclu la Vice-Secrétaire générale, en appelant à défendre la vision et les valeurs du Programme d’action du Caire, adopté en 1994.   

Mme NATALIA KANEM, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a fait remarquer que dans ce monde en plein bouleversement, « chaque crise a un visage féminin ».  Le visage d’une femme hantée par la violence fondée sur le genre ou traquée dans les conflits, trop souvent soumise aux deux.  Le visage d’une fille mariée ou mutilée contre son gré, enceinte avant que son corps ne soit prêt, alors que des barrières sont dressées contre les services protecteurs de santé sexuelle et reproductive, a continué Mme Kanem.  Le visage d’une fille exclue de l’école en raison des perturbations pandémiques, exclue de l’apprentissage par la pauvreté et la fracture numérique.  Les conflits, les chocs climatiques et la pandémie persistante de COVID-19 nous laissent aux prises avec de profondes conséquences sociales, sanitaires et économiques, a-t-elle déploré.  

Le Sommet de Nairobi sur la CIPD+25 a réitéré l’importance des droits et des choix pour tous comme un facteur déterminant pour parvenir à un développement durable et à une croissance économique inclusive.  Pourtant, le récent rapport de la Commission de haut niveau sur le suivi du Sommet de Nairobi, intitulé « Pas d’exceptions, pas d’exclusions: Réaliser la santé sexuelle et reproductive, les droits et la justice pour tous » fait état de revers désolants dans le monde, a souligné Mme Kanem.  Le rapport appelle à une action ambitieuse, délibérée et globale pour parvenir à la justice sexuelle et reproductive pour tous, car, « nous ne pouvons pas nous permettre d’autres revers », a martelé la patronne du FNUAP.  Les enjeux pour les femmes, les filles et les jeunes, mais aussi pour leurs sociétés, sont simplement trop importants, a-t-elle tranché.

Alors que la pandémie a mis en évidence la nécessité d’investissements massifs dans des systèmes de santé nationaux universels, résilients, fondés sur des données et dotés d’un personnel adéquat, Mme Kanem a également plaidé pour plus d’investissements dans la santé sexuelle et reproductive et les droits reproductifs.  À cet égard, elle a souligné que la planification familiale améliore les résultats en matière de santé et permet aux femmes et aux filles de rester à l’école et d’acquérir des compétences qui augmenteront leurs revenus tout au long de leur vie.  On estime que chaque dollar investi pour mettre fin aux décès maternels évitables et aux besoins non satisfaits en matière de planification familiale apportera près de neuf dollars en avantages économiques d’ici à 2050, a fait valoir Mme Kanem, soulignant au passage que près de la moitié de toutes les grossesses ne sont pas désirées. 

Pour elle, il ne fait pas de doute que le manque d’autonomie corporelle et de choix en matière de procréation continue de bloquer la voie des femmes vers l’égalité et la pleine participation à la vie économique.  Pour cela, il faut une action ciblée visant à éliminer les barrières structurelles et les lois et normes sociales discriminatoires qui entraînent des inégalités entre les sexes en matière de rémunération, d’accès au capital, aux retraites et à d’autres formes de protection sociale.  Le secteur des soins est largement dominé par les femmes alors que leur travail reste largement invisible, non reconnu et non pris en compte dans l’élaboration des politiques nationales, mais il est difficile de changer ce que l’on ne voit, a reconnu Mme Kanem.  Dès lors tous les gouvernements doivent être en mesure de collecter et d’utiliser des données actualisées, de qualité et désagrégées sur la population et le développement.  Malheureusement, les ressources consacrées aux systèmes de données dans leur ensemble, et notamment aux données démographiques, restent terriblement insuffisantes.  Mme Kanem a donc appelé à soutenir les États Membres pour assurer l’achèvement en temps voulu du cycle de recensement de 2020; à améliorer l’état civil et les statistiques de l’état civil; et à encourager une planification du développement qui réponde aux tendances et aux besoins nationaux et locaux de la population. 

La baisse du financement des questions liées à la population, en particulier la santé sexuelle et reproductive et les droits liés à la procréation, compromet le développement du capital humain, a-t-elle affirmé.  Il faut faire plus là où ça compte, a martelé la Directrice du FNUAP en appelant à travailler avec diligence et ensemble pour inverser nos trajectoires actuelles.  Il faut se réengager en faveur d’une croissance économique qui inclut tout le monde - les femmes et les filles, les populations autochtones, les personnes d’ascendance africaine, les migrants, les personnes handicapées, les personnes LGBTQI+.  Il est temps pour le monde de se montrer plus ambitieux sur la mise en œuvre du Programme d’action de la CIPD et des résultats de ses examens, a-t-elle souhaité en soulignant qu’il s’agit d’accélérateurs pour les objectifs de développement durable. 

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, Département des affaires économiques et sociales (DESA), a choisi d’explorer les principaux liens entre les tendances démographiques et le développement durable.  Selon lui, l’augmentation des inégalités de revenus dans les pays du monde entier a mis en évidence la nécessité d’une croissance économique inclusive qui favorise une prospérité partagée par l’ensemble de la population.  Au cours des trois dernières décennies, la population et l’économie mondiales ont connu une croissance significative.  La planète comptait environ 5,3 milliards d’habitants en 1990, et nous approchons maintenant rapidement de la barre des 8 milliards. 

Au cours de la même période, a poursuivi M. Zhenmin, le produit intérieur brut mondial (PIB) mondial a été multiplié par un facteur d’environ 2,5 et le PIB par habitant a augmenté de deux tiers.  Cependant, « contrairement aux aspirations de la communauté internationale, la croissance économique globale n’a été ni pérenne ni inclusive entre les pays et les régions et à l’échelle de la population mondiale », a-t-il fait observer.  Le manque d’inclusion a été bien documenté par DESA, notamment dans les rapports sur la situation sociale dans le monde qui montrent clairement l’accroissement des inégalités dans les pays abritant plus de 70% de la population mondiale.

De 1990 à la fin des années 2000, la croissance de la production économique mondiale a été positive mais assez variable, mais elle a plongé pour atteindre des niveaux négatifs pendant la grande récession de 2008-2009, a poursuivi le responsable onusien.  Le revenu par habitant a rapidement augmenté au cours de la décennie suivante, mais il a de nouveau chuté en 2020 à la suite de la pandémie de COVID-19.  L’économie mondiale a commencé à se redresser en 2021, mais elle est à nouveau durement touchée par les perturbations et l’instabilité causées par le conflit armé en Ukraine.

On prévoit désormais que le PIB de l’Europe et de l’Asie centrale diminuera de 4,1% cette année, soit une réduction deux fois plus importante que la contraction induite par la pandémie en 2020, a-t-il averti.  « La guerre en Ukraine a contribué à accroître l’insécurité alimentaire non seulement en Europe de l’Est et dans les régions voisines, mais aussi en Afrique et dans les pays en développement du monde entier. » 

Reprenant les propos du Secrétaire général, M. Zhenmin a rappelé que « la guerre amplifie une crise tridimensionnelle -alimentaire, énergétique et financière- qui frappe de plein fouet des personnes, des pays et des économies parmi les plus vulnérables du monde ».  C’est pourquoi, a-t-il poursuivi, le Secrétaire général a créé le Groupe de réponse à la crise mondiale sur l’alimentation, l’énergie et les finances afin de coordonner la réponse mondiale aux impacts de la crise en Ukraine.  Dans sa première note d’information, publiée le 13 avril, le Groupe a souligné la nécessité d’une action collective, appelant tous les pays à continuer à s’engager dans les forums multilatéraux pour soutenir l’approche progressive et coordonnée nécessaire.  L’accent est mis sur la nécessité d’aider les populations les plus vulnérables dans le monde, notamment en assurant un approvisionnement suffisant en aliments nutritifs pour tous et l’accès à l’aide alimentaire humanitaire.

Parmi les autres propositions, le Chef du DESA a cité la mise à disposition de réserves stratégiques de pétrole à court terme, le renforcement de la transition vers les énergies renouvelables à moyen terme et les changements nécessaires dans les mécanismes de financement internationaux existants.  Il s’agit, a-t-il expliqué, d’alléger la dette des pays en développement et de leur fournir le financement d’urgence dont ils ont tant besoin pour répondre aux besoins de leurs populations.  En ces temps difficiles, le multilatéralisme et la coopération internationale sont, à ses yeux, plus que jamais nécessaires pour défendre la vision et atteindre les objectifs du Programme d’action du Caire et du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  M. Zhenmin s’est dit convaincu qu’en travaillant ensemble, nous serons en mesure de résoudre les dernières crises et de nous en remettre, tout en poursuivant notre quête collective de paix et de développement.

Mme REBECA GRYNSPAN, Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a constaté que cette session n’arrive pas au meilleur moment, le monde en développement se trouvant au bord d’une « tempête parfaite » avec les crises de la dette, de l’alimentation et de l’énergie.  Compte tenu des niveaux élevés de stress socioéconomique engendrés par la pandémie de COVID-19 et les changements climatiques, ce sont des milliards de personnes vivant dans plus d’une centaine des pays qui sont exposés, a-t-elle souligné. 

Elle a relevé que, selon le premier rapport du Groupe mondial de réponse à la crise, 107 économies sont sévèrement confrontées à au moins un des trois canaux de transmission qui caractérisent cette crise, à savoir l’augmentation des prix, la hausse des prix de l’énergie et le resserrement des conditions financières.  Quelque 1,7 milliard de personnes vivent dans ces pays; plus de 500 millions d’entre elles sont déjà pauvres et 215 millions sont sous-alimentées.  Il résulte de cette situation qu’une crise systémique de la dette se développe, que l’inflation est à son plus haut niveau depuis des décennies et que « des troubles civils se préparent dans tous les coins du monde ».  Dans ce contexte, a mis en garde Mme Grynspan, les progrès vers le développement durable ont été gravement entravés au cours des dernières années et les niveaux de pauvreté et d’inégalité atteignent des niveaux préoccupants.  Lorsque le Programme 2030 a été approuvé, la CNUCED avait mesuré à 2,5 milliards de dollars le déficit d’investissement pour que les pays en développement atteignent leurs ODD, a rappelé la haute fonctionnaire.  Or, la pandémie a creusé cet écart à 4,3 milliards de dollars et la guerre en Ukraine devrait encore l’alourdir, à tel point que « ce n’est plus un écart mais un gouffre », a-t-elle observé.

Jugeant le thème central de cette session particulièrement pertinent, Mme Grynspan a noté que la composition de la population a des implications évidentes pour l’environnement et les changements climatiques.  Selon elle, le revenu par habitant est un meilleur critère que la croissance démographique pour prédire l’augmentation de la consommation d’énergie et des émissions de CO2.  En effet, les pays qui ont le plus contribué aux modèles non durables de production et de consommation sont généralement ceux où le revenu par habitant est élevé et où la population croît lentement, voire pas du tout, pas ceux où le revenu par habitant est faible et la population croît rapidement, a-t-elle fait valoir.  De fait, les populations elles-mêmes sont les plus grands agents de changement de l’histoire, a affirmé la Secrétaire générale de la CNUCED, non sans observer que nous avons peut-être aujourd’hui le plus grand nombre de femmes autonomes de l’histoire, ainsi que la jeunesse la plus diversifiée et la plus informée de tous les temps.  Hélas, ce sont les femmes et les jeunes qui souffrent le plus de la crise, alors même qu’ils peuvent briser la corrélation entre la population et la pollution.  Il importe donc, selon elle, d’autonomiser davantage les femmes et les jeunes et de comprendre que la solution réside dans une population « plus responsable, plus inclusive et plus engagée ».

Mme Grynspan a noté que, dans sa région, l’Amérique latine, la population s’inversera aussi vite qu’elle a explosé, et ce, en l’espace de seulement deux générations.  Nous ne savons pas comment nos systèmes de retraite fragiles pourront y faire face et ce que cela signifie pour notre politique et notre culture, a-t-elle commenté, constatant que le déclin de la population a une implication aussi importante que la croissance démographique pour le développement durable.  Elle a ainsi expliqué que, durant sa propre vie, la population mondiale est passée d’environ 2,7 milliards dans les années 1950 à près de 8 milliards de personnes aujourd’hui.  Et 3 milliards de plus devraient rejoindre la famille mondiale avant la fin du siècle, a-t-elle rappelé, avant de s’interroger: que savons-nous de ces 8 milliards d’individus?  Savons-nous s’ils se trouvent dans des pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire?  Leurs enfants vont-ils à l’école, ont-ils accès à l’eau, à l’énergie?  Ont-ils pu utiliser Internet pendant les confinements liés au COVID?  De plus, s’est-elle inquiétée, 1,7 milliard de personnes, soit près d’un cinquième de toute l’humanité, vivent dans des pays fortement exposés aux retombées de la guerre en Ukraine que sont la hausse des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, et l’aggravation des conditions financières.  Qu’adviendra-t-il de ces personnes si le baril de pétrole atteint 150 dollars, si l’indice des prix alimentaires de la FAO continue de battre des records historiques chaque mois et si les défauts de paiement connaissent un effet domino?  Pour Mme Grynspan, « aucune solution politique ne sera correcte si elle n’imagine pas à quoi ressemble le monde aujourd’hui à Addis-Abeba, à Bridgetown, à Lima ou à Karachi ».  Nous avons besoin d’un nouveau paradigme de développement durable qui intègre réellement la perspective du monde en développement, faute de quoi les négociations climatiques ne déboucheront jamais, a-t-elle conclu. 

Mme JAYATI GHOSH, professeure au Département d’économie de l’Université du Massachussetts à Amherst, a salué le fait que les Nations Unies sont conscientes de la situation et fixent le cap à suivre.  Les crises multiples auxquelles se heurte le monde, qu’elles soient sanitaires ou climatiques, ne sont pas gérables si l’on ne reconnaît pas qu’il faut inclure tout un chacun, a-t-elle estimé.  Il faut réduire les inégalités, ce qui exige une mobilisation de masse et beaucoup de volonté politique.  Pour Mme Ghosh, la surexploitation de la nature n’est pas liée au fait qu’il y a trop de gens sur terre mais plutôt aux « mauvais schémas économiques actuels ».  

Dans le contexte des changements climatiques, il y a des inégalités puisque 95% des émissions de gaz à effets de serre venaient d’un petit groupe de pays qui représentait 15% de la population mondiale jusqu’à récemment, mais on n’était pas conscient du problème.  Or au fil des conférences des parties, dont la COP26, il est apparu que se sont toujours les mêmes pays qui représentent la majorité des émissions mondiales.  Il faut donc agir directement sur la consommation carbone des acteurs les plus riches et sur leurs émissions, a estimé la professeure, par opposition à l’idée de la taxe carbone qui toucherait tout le monde.

Passant à la crise sanitaire, elle a dit avoir espéré que la pandémie pousserait à investir dans le secteur des soins, or cela ne s’est pas fait.  À cet égard, elle a souligné que ce sont essentiellement les femmes qui assurent souvent gratuitement les soins dans nos sociétés, et que les gouvernements en profitent « cyniquement ».  Mme Ghosh a donc appelé à investir de façon notable dans les services de soins sinon on ne sera pas en mesure de relever les défis sanitaires futurs.  L’autonomisation des femmes est importante, a-t-elle souligné en relevant le lien entre autonomisation et fertilité ou nombre d’enfants par femme.  Dans le cadre des défis qui pèsent sur l’humanité, les femmes doivent être le moteur du changement.  L’intervenante a appelé à réfléchir à des politiques nationales et internationales immédiates et efficaces pour faciliter le développement durable.  Selon elle, la Commission devrait se pencher cette année sur « une nouvelle façon d’articuler nos économies en mettant l’accent sur de nouvelles solutions multiples, vertes et bleues, mais aussi violettes (couleur qui représente l’économie des soins), et rouges (couleur de la redistribution et davantage d’égalité) ».  Ce nouvel accord « multicolore » doit se baser sur des financements publics, en plus de ceux du secteur privé, a conclu la professeure.

Table ronde sur l’examen des rapports du Secrétaire général

Cet après-midi, le panel était saisi de trois rapports du Secrétaire général dont les conclusions nourrissent le débat général inscrit à l’ordre du jour de cette session: rapport sur la population et le développement durable, en particulier la croissance économique soutenue et inclusive (E/CN.9/2022/2); rapport sur les programmes et interventions aux fins de l’application du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement pour ce qui concerne la population et le développement durable, en particulier la croissance économique soutenue et inclusive (E/CN.9/2022/3); rapport sur les flux de ressources financières devant concourir à la poursuite de l’application du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement (E/CN.9/2022/4).

Les deux premiers rapports fournissent une multitude de preuves sur les relations entre les tendances démographiques et le développement durable, en particulier la croissance économique durable et inclusive, a dit M. ANTONIN BENJAMIN BIEKE (Côte d’Ivoire), modérateur de la table ronde.  Ils mettent en lumière des tendances clefs dans les interrelations entre la dynamique de la population et la croissance économique, la pauvreté et les inégalités, avec les mégatendances mondiales telles que les changements climatiques et la numérisation, et avec l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, a fait observer M. Bieke.  Ils contiennent également des données récentes sur les effets de la pandémie de COVID-19 dans ces domaines et décrivent les actions nécessaires pour accélérer la mise en œuvre du Programme d’action de la CIPD et maximiser sa contribution à la réalisation d’une croissance économique soutenue et inclusive ainsi qu’à celle des autres objectifs de développement durable (ODD).

Quant au troisième rapport, il fait le point sur les flux d’aide permettant de respecter les engagements pris pour accélérer la mise en œuvre du Programme d’action, a résumé M. Bieke, lors d’une intervention liminaire, en prélude au débat qui a réuni quatre panélistes, pour finir sur un échange interactif avec les États Membres et la société civile.  S’adressant aux panélistes, le modérateur a voulu savoir quels étaient les liens observés entre les tendances démographiques et une croissance économique soutenue et inclusive dans différentes parties du monde.  Comment la pandémie de COVID-19 a-t-elle affecté ces relations?

Pour M. JORGE BRAVO, du Département des affaires économiques et sociales (DESA) et auteur principal du rapport du Secrétaire général sur la population et le développement durable, en particulier la croissance économique soutenue et inclusive (E/CN.9/2022/2), les gouvernements qui, au cours de la transition démographique, ont mis en œuvre des politiques visant à accroître l’accès des garçons et des filles à l’éducation, aux services de santé, y compris les soins de santé sexuelle et reproductive, et à élargir les possibilités d’emploi des femmes, ont stimulé ces dividendes et contribué à réduire les inégalités sociodémographiques.  Quant à la pandémie de COVID-19, elle a exacerbé certaines inégalités préexistantes, mais les inégalités économiques étaient en hausse bien avant que la pandémie ne frappe, a-t-il estimé.

Quels sont dès lors les obstacles à une croissance économique soutenue et inclusive auxquels s’attaquent le programme d’action de la CIPD et les parties connexes du Programme 2030?  Comment les allocations actuelles d’aide au développement aident-elles à relever ces défis ? a encore voulu savoir le modérateur.

Aujourd’hui, 71% de la population mondiale vit dans des pays où les inégalités se sont accrues et 9% de la population mondiale vit avec moins de 1,90 dollar par jour, a fait remarquer Mme RACHEL SNOW, du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).  Le rapport du Secrétaire général montre par exemple que les femmes représentent 80% de l’ensemble des travailleurs domestiques.  En outre, a fait observer Mme Snow, le rapport sur les flux de ressources révèle que l’aide au développement dans les domaines qui comptent pour une croissance économique plus soutenue et plus inclusive est insuffisante.  Ceci est d’autant plus regrettable que les politiques visant à promouvoir une croissance économique équitable doivent être fondées sur des données désagrégées de haute qualité qui identifient les vulnérabilités, localisent les laissés-pour-compte et mettent en évidence le chevauchement des privations.

M. MORITZ MEIER-EWERT, du Bureau de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) à New York, a, quant à lui, exclu tout lien automatique entre le commerce et l’éradication de la pauvreté.  Les exportations sont souvent concentrées dans un secteur ou une région de l’économie, comme les industries extractives ou les zones franches industrielles.  Dans d’autres cas, les pays les moins avancés n’ont pas pu profiter des possibilités d’accès au marché, car ils n’ont pas été en mesure de respecter les normes de qualité requises.  En outre, la plupart des pays les moins avancés (PMA) sont confrontés à d’importantes contraintes en matière d’approvisionnement, notamment des infrastructures inadéquates, un manque de compétences et un accès insuffisant aux capitaux, sans compter le poids de la dette.  Ils n’ont donc pas été en mesure d’approvisionner les marchés d’exportation avec des produits autres que les produits de base.  Et, bien sûr, a continué M. Meier-Ewert, la plupart des pauvres vivent dans des zones rurales, éloignées des marchés intérieurs, sans parler des opportunités commerciales internationales.  Par conséquent, pour maximiser l’impact du commerce sur l’éradication de la pauvreté, les politiques commerciales doivent être spécifiquement ciblées et complétées par des politiques nationales.

Que faut-il alors privilégier pour faire progresser l’inclusion sociale dans ces pays? s’est encore enquis M. Bieke.  Pour maximiser l’impact du commerce sur l’éradication de la pauvreté, les politiques commerciales doivent être spécifiquement ciblées et complétées par des politiques nationales, a préconisé le panéliste, insistant notamment sur une plus grande diversification de la production.  Sur un autre registre, le modérateur s’est intéressé aux approches nécessaires en vue de maximiser l’autonomisation des femmes à même de contribuer le plus efficacement à la reprise de la pandémie et au rétablissement des progrès vers les ODD.

Mme JEMINAH NJUKI, de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a suggéré une action concertée des gouvernements, des organisations d’employeurs et de travailleurs, et de la communauté internationale à la lumière de ces multiples défis pour atteindre l’égalité des sexes et l’autonomisation économique des femmes et des filles.  Sinon, a-t-elle mis en garde, ces effets différentiels perdureront bien au-delà de la pandémie elle-même, avec des implications profondes pour la réalisation de la justice sociale et du travail décent pour tous, y compris le plein emploi productif.  Parmi les bonnes pratiques, l’investissement dans l’expansion des services de soins sociaux peut potentiellement générer des milliers d’emplois décents, tant dans le secteur des soins lui-même que dans d’autres secteurs, grâce aux liens en amont, a encore estimé Mme Njuki.

Mais n’est-ce pas le moment de faire une nouvelle lecture des délais pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD), s’est interrogé le représentant de Cuba, notamment pour faire face à l’inertie causée par la pandémie et avancer de manière durable.  Certes a reconnu M. Bravo, « nous avons peu de chance d’atteindre tous les objectifs avant les échéances fixées, mais en même temps des expériences concluantes sont à mettre en avant », a-t-il répondu, citant le cas du Brésil qui en l’espace de 20 ans a divisé par deux son taux de pauvreté.  « Je ne sais pas s’il atteindra le niveau zéro en 2030, mais cela reste encourageant. »

L’Alliance ACT des églises, une association présente dans quelque 120 pays, s’inquiétant de l’accroissement des inégalités et des injustices, a demandé davantage de recommandations s’agissant de la protection sociale universelle.  Il faut encourager le service à la personne, cela bénéficie à la fois à l’économie et permet d’élargir l’assiette fiscale, a suggéré ONU-Femme, mettant en avant son effet multiplicateur.  M. Meier-Ewert a pointé du doigt les lacunes du produit international brut (PIB)en tant qu’étalon qui ne prend pas en compte toutes les inégalités, annonçant que des actions sont en cours dans le cadre des efforts du Secrétaire général de l’ONU pour corriger ces lacunes.  Quant à l’Association des fédérations internationale des étudiants en médecine, elle a déploré la désinformation, notamment pour ce qui est de l’accès aux informations sur la santé sexuelle et procréative.  Enfin, face à l’inquiétude du Malawi quant au poids de la dette, M. Bravo a rappelé que l’ONU a appelé le Fonds monétaire international (FMI) et d’autres institutions financières à œuvrer pour une atténuation des effets de cette dette.

Débat général

M. FLEMMING MØLLER MORTENSEN, Ministre du développement international du Danemark, au nom des pays nordiques, a condamné dans les termes les « plus vigoureux » la guerre d’agression contre l’Ukraine par les forces russes.  Cette agression viole très clairement le droit international et la Charte des Nations Unies, a-t-il souligné.  Il s’est dit extrêmement préoccupé par les rapports faisant état de violences sexuelles dans les zones contrôlées par l’armée russe.  Poursuivant, le Ministre est revenu sur l’importance accordée par les pays nordiques à la CIPD et à l’application pleine et entière de son programme d’action.  « Lorsque des individus dans toute leur diversité sont en mesure de prendre des décisions éclairées sur leur sexualité et leur reproduction, ils ont davantage de chances d’accéder à l’éducation et de participer au marché du travail », a-t-il fait valoir.  Citant le rapport du FNUAP, le Ministre a relevé que plus de la moitié des grossesses dans le monde sont non désirées et que la plupart d’entre elles font l’objet d’avortements, souvent dans des conditions peu sûres et désespérées.  C’est pourquoi, préoccupé par la santé des femmes, il a appelé à un accès à une éducation sexuelle complète, à la contraception, ainsi qu’à des avortements sûrs.  Cela permettra aux femmes et aux filles de devenir autonomes sur le plan économique, et par là même de faire baisser la pauvreté, ouvrant la voie au développement durable.

Au nom d’un groupe de pays, Mme GABRIELA RODRÍGUEZ RAMÍREZ, Secrétaire générale, Conseil économique et social du Mexique, a estimé qu’une croissance économique inclusive n’est possible que si les sociétés protègent les femmes et les filles dans leurs droits, en particulier les droits sexuels et reproductifs, les aident à s’autonomiser et se font les chantres de l’égalité de genre.  Les femmes et les filles doivent être libres de décider de leur corps et de jouer le rôle qui leur revient dans des sociétés exemptes de violence à leur encontre, a-t-elle plaidé.  Dans le contexte actuel, a relevé la responsable, on ne peut ignorer les graves conséquences de la pandémie de COVID-19 sur les systèmes de soins.  Cette crise a interrompu la fourniture de services essentiels, entraînant notamment une hausse de la mortalité maternelle dans certains pays, tout en accélérant la féminisation de la pauvreté, en intensifiant la précarité des femmes sur le marché du travail et en augmentant le nombre des mariages précoces et des grossesses chez les adolescentes.  Il est donc impératif d’accorder la priorité à un relèvement sexospécifique qui intègre les droits des femmes et des filles.  Mais il faut aussi tenir compte de la santé et du bien-être des jeunes afin qu’ils puissent avoir accès à une éducation complète et inclusive et ainsi briser le cycle de la pauvreté.  Les jeunes doivent avoir les moyens d’agir et bénéficier d’une éducation sexuelle globale pour prendre des décisions éclairées sur leur vie, a-t-elle poursuivi, avant de se féliciter de la tenue en septembre du sommet des Nations Unies sur la transformation de l’éducation.

M. KARL KENDRICK CHUA, Ministre de la planification socioéconomique des Philippines, a expliqué que son pays avait engrangé des progrès considérables entre 2010 et 2020 dans la réalisation des objectifs de la CIPD, notamment en termes d’accès aux contraceptifs modernes et à une éducation de base pour les 10-13 ans, mais aussi d’accès aux soins.  En 2018, l’incidence de la pauvreté a chuté de 7% et six millions de Philippins sont sortis de la pauvreté, a poursuivi le Ministre, mais la pandémie a mis un coup d’arrêt à ces progrès et malmené les institutions philippines, a-t-il regretté.  « La COVID-19 a mis les Philippines à l’épreuve, mais nous n’avons pas failli. »  Le Ministre a cité les avancées en termes d’inclusion financière puisqu’entre octobre 2020 et avril 2022, plus de deux millions de comptes bancaires ont été ouverts pour des individus à faible revenu.  L’économie philippine a rebondi en 2021, notamment grâce au succès du programme de vaccination qui a permis un retour au travail.  À l’avenir, a-t-il assuré, son pays accordera la priorité à l’adaptation aux changements climatiques et au renforcement de la coopération régionale et internationale.

M. JOSÉ CARLOS CARDONA ERAZO, Ministre du développement social du Honduras, a passé en revue les importants défis de son pays, notamment en termes de population et de développement.  Avec une population estimée à 9,6 millions d’habitants, dont 51,3% de femmes et 8,6% d’autochtones et d’afro-descendants, 29,8% de jeunes (10-24 ans) et 6% de personnes de plus de 65 ans, le « bonus démographique est pour le Honduras une occasion de faire face aux problèmes futurs liés à la durabilité du système social et aux conflits sociaux. »  En effet, a poursuivi le Ministre, 73,6% des ménages honduriens se trouvent en situation de pauvreté, dont 53,7% en situation d’extrême pauvreté, principalement dans les zones rurales.  C’est la raison pour laquelle le nouveau plan gouvernemental vise à mettre en œuvre des programmes axés sur les populations les plus vulnérables.  Il s’agit, a-t-il expliqué, de promouvoir l’égalité des sexes et d’accélérer les progrès en matière de santé et de droits sexuels et liés à la procréation en tant que générateurs de valeur économique durable et inclusive.  Pour la mise en œuvre de ces actions, en particulier, et du Programme national de développement à l’horizon 2030, en général, le Gouvernement du Honduras compte sur une contribution importante de la coopération internationale.

M. MANSUKH MANDAVIYA, Ministre de la santé et de la famille de l’Inde, a indiqué que la moitié de la population de son pays a moins de 25 ans.  Le Gouvernement indien s’emploie à tirer profit de ce dividende démographique au travers de programmes nationaux progressistes, notamment en faveur des adolescentes et des filles.  L’Inde autonomise les femmes et protège pleinement les groupes les plus vulnérables afin de parvenir à une plus grande participation de toutes les groupes de population, a-t-il assuré, ajoutant que l’égalité entre les genres est un objectif incontournable de son pays.  De même, nous redoublons d’efforts pour offrir une protection économique et une aide sociale aux populations vieillissantes.  En 2021, a précisé le Ministre, la croissance économique de l’Inde a atteint 9,2%, mue par des initiatives d’énergie verte et des considérations environnementales, et les dépenses sanitaires ont progressé elles aussi.  Lors de la pandémie de COVID-19, le Gouvernement a fait en sorte que chaque individu bénéficie d’un filet de sécurité et a mené une campagne de vaccination inclusive.  Les vaccins ont ainsi été mis à disposition gratuitement, s’est-il enorgueilli, ajoutant que 85% de la population indienne a été pleinement vaccinée et que le pays a également fourni des vaccins à plus de 100 pays.  Dans ce contexte, la croissance de la population s’est stabilisée et les services sanitaires ont gagné en efficacité, a encore relevé le Ministre, pour qui les travaux de la Commission et la réalisation des ODD ont pour dénominateur commun de mettre l’individu au centre du développement durable.

Mme ANNE BEATHE TVINNEREIM, Ministre du développement international de la Norvège, a déclaré que l’égalité des sexes est nécessaire pour assurer une croissance durable et inclusive.  Et pourtant, des législations et des pratiques discriminatoires restent en place à travers le monde, avec des impacts sur l’éducation, l’emploi, la protection juridique, l’accès aux services et la participation politique des femmes.  « L’égalité des sexes comprend le droit des jeunes filles et des femmes de décider de leur propre corps, de choisir leur partenaire et décider si, et quand, avoir des enfants », a insisté Mme Tvinnereim pour laquelle il s’agit d’un droit humain essentiel et d’un élément fondamental de la CIPD.  Trop de femmes et de filles mènent une vie dans laquelle la santé sexuelle et reproductive et les droits connexes ne sont encore qu’un rêve lointain.  En fait, la majorité des jeunes n’ont pas les connaissances nécessaires pour pouvoir prendre des décisions responsables concernant leur santé sexuelle et reproductive.  Cela les rend vulnérables à la coercition, aux mariages précoces, aux infections et aux grossesses non désirées, a-t-elle déploré, en plaidant pour une éducation sexuelle complète à l’école et au-delà.  S’appuyant sur le dernier rapport du FNUAP, la Ministre a souligné que la moitié de toutes les grossesses sont non désirées, que 60% des grossesses non désirées se terminent par un avortement et que les avortements à risque causent 800 décès maternels chaque jour.  « Nous ne pouvons simplement pas fermer les yeux sur cette situation », a-t-elle tranché, en appelant à renforcer l’accès à la santé sexuelle et reproductive et aux droits en la matière, y compris le droit à un avortement sûr et légal.  Pour la Ministre, l’égalité des sexes n’est pas une option politique. C’est un droit humain qui englobe le droit de participer pleinement à la société.  C’est aussi la clef pour libérer le plein potentiel d’un pays, a-t-elle conclu. 

M. HUGH HILTON TODD, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Guyana, a appelé à placer les individus au centre des stratégies de développement durable pour permettre une croissance économique inclusive à tous les niveaux.  Il a réitéré l’attachement de son pays à parvenir à ces objectifs.  Ceci est d’autant plus important à un moment où les défis comme la pauvreté, l’urbanisation galopante, les inégalités, l’analphabétisme et les modes de consommation et de production non durables, entre autres, se chevauchent et requièrent des efforts mondiaux.  Le Ministre a donc appelé à renforcer les capacités à tous les niveaux pour parvenir aux objectifs du Programme d’action de la CIPD.  « C’est guidé par le contrat conclu avec le peuple guyanais que son gouvernement mise sur une croissance économique inclusive » reposant sur des emplois adéquats, des activités entrepreneuriales significatives et une économie durable sous-tendue par une consommation et une production durables, a-t-il ajouté.  Pour finir, il a insisté sur la coopération internationale nécessaire pour la mise en œuvre du Programme d’action.

M. KHALED ABDEL GHAFFAR, Ministre de l’éducation supérieure, de la recherche scientifique et de la santé de l’Égypte, a estimé que cette session de la Commission donne la possibilité de s’engager davantage par rapport au Programme d’action de la CIPD, de la Déclaration du Caire et du Programme 2030.  Mettre le développement humain au centre des débats est nécessaire, car il constitue la pierre angulaire du développement global, a-t-il soutenu, avant de mettre en exergue les réalisations de son pays en la matière.  L’Égypte, a-t-il souligné, a lancé sa « Vision 2030 » en la mettant pleinement en adéquation avec les ODD.  Dans ce cadre, elle a adopté des politiques qui visent à l’autonomisation économique des femmes et à leur intégration dans le marché du travail.  À cet égard, la Banque mondiale a noté une diminution du chômage des femmes en Égypte, s’est-il enorgueilli, avant de souligner les efforts déployés par son gouvernement pour éliminer les discriminations contre les femmes et les filles.  En outre, les chiffres sur la participation des femmes à l’éducation supérieure font apparaître une diminution des inégalités entre les genres et une amélioration de leur niveau global, ce qui contribue à réduire le taux de pauvreté.  L’Égypte a par ailleurs lancé en 2019 un vaste programme de développement des zones rurales afin de permettre à des populations traditionnellement vulnérables de mener une vie décente.  Dans le même esprit, une stratégie nationale de développement du logement a été initiée en 2020, avec pour but notamment de faire bénéficier le plus grand nombre d’un logement sûr et d’un réseau d’évacuation des eaux usées.  Le pays redouble également d’efforts pour renforcer la protection sociale de ses citoyens et s’emploie à investir dans sa jeunesse pour garantir qu’elle participe à la croissance économique nationale.  Avant de conclure, le Ministre a insisté sur l’importance de la coopération internationale pour parvenir aux ODD. 

Mme ARIUNZAYA AYUSH, Ministre du travail et de la protection sociale de la Mongolie, a estimé que le meilleur moyen de mettre en œuvre les ODD est d’assurer la planification et l’application des politiques nationales.  Sur cette base, a-t-elle indiqué, le pays a adopté sa « Vision 2050 », qui vise à garantir un développement socioéconomique durable pour l’amélioration de la qualité de vie des citoyens.  Mais bien que le Gouvernement ait pris les mesures nécessaires pour répondre à la pandémie de COVID-19, la crise économique engendrée par celle-ci a fait reculer la croissance fin 2020, après une hausse entre 2017 et 2019, tandis que l’inflation a atteint 11,2% en 2021, soit une progression de 8,9 points par rapport à l’année précédente.  Afin d’atténuer ces effets, de protéger les revenus des particuliers et des entreprises, de préserver les emplois et relever l’économie, le pays a adopté une loi qui prévoit une nouvelle politique de relance axée sur un partenariat public-privé.  Il s’agit d’améliorer la productivité des services publics et de stimuler le développement économique et des infrastructures, a expliqué la déléguée, selon laquelle les objectifs de la première phase de la « Vision 2050 » seront atteints dans les 10 prochaines années.

Mme DIANA MILOSLAVICH, Ministre de la femme et des populations vulnérables du Pérou, a souligné l’importance du Consensus de Montevideo sur la population et le développement, feuille de route proposant une vision égalitaire et inclusive dans une région qui est l’une des plus inégales au monde.  Cette situation, a-t-elle relevé, s’est encore aggravée avec la pandémie de COVID-19, notamment au Pérou où le taux de mortalité est le plus élevé au niveau régional.  Avertissant que la crise sanitaire menace d’inverser les acquis éducatifs réalisés ces dernières années dans son pays, elle a également mis l’accent sur les retombées pour l’emploi des femmes, dont la participation au marché du travail a reculé de 8%.  La pandémie a d’autre part exacerbé la violence fondée sur le genre, avec 163 797 cas enregistrés au Pérou en 2021.  Entre janvier et octobre de cette même année, a-t-elle précisé, 12 800 cas de violences sexuelles ont été recensés contre des filles, des enfants et des adolescent-e-s.  De plus, sur les 9 342 viols contre des enfants et des adolescent-e-s signalés entre 2019 et 2020, 82% concernaient des mineurs de moins de 14 ans.  Pour y remédier, l’État péruvien a reconnu de nouveaux types de violence, tout en déclarant essentiels tous les services spécialisés en matière de violence sexuelle et fondée sur le genre afin que les soins ne soient ni suspendus ni limités.  Il travaille également à la création d’un système national de soins, son objectif étant de contribuer au développement durable sur la base de l’égalité des sexes et d’une perspective centrée sur les droits.

M. PÁVEL ISA CONTRERAS, Vice-Ministre de la planification de la République dominicaine, a averti que l’impulsion donnée à la croissance économique par le bonus démographique risque de montrer des signes d’essoufflement au cours de cette décennie.  D’abord, la demande de services dans les systèmes de santé et de sécurité sociale augmente de manière significative à mesure que la population vieillit. Or, a reconnu M. Contreras, ces systèmes sont insuffisamment préparés et financés.  Il s’est attendu, en outre, à une augmentation de la pression fiscale liée à une croissance moindre des recettes publiques et à une augmentation de la demande de services sociaux.

Enfin, l’immigration pourrait compenser au moins partiellement la diminution de la croissance de la population active.  Cependant, a tempéré le Vice-Ministre, cette population est moins qualifiée et moins productive, reçoit des salaires inférieurs et travaille souvent dans des conditions précaires et inacceptables.  Cela exacerbe les inégalités, d’autant plus que le système éducatif, appelé à soutenir les efforts visant à accroître la productivité en renforçant les aptitudes et les compétences, s’est révélé inefficace dans cette tâche.  Pour finir, il a détaillé les multiples défis à relever en République dominicaine, à commencer par une transformation productive qui accélère la croissance économique tout en empêchant les effets négatifs partiels du changement démographique.  Il faut, selon M. Contreras, renforcer les systèmes de santé, de protection sociale et de protection du travail, en les soutenant par un financement adéquat, et notamment élargir l’assiette fiscale et mettre en place des systèmes d’imposition plus progressifs. 

M. ENOCK PHALE, Vice-Ministre de la santé du Malawi, a indiqué que le taux de fécondité au Malawi est de 4,2 et que la population devrait atteindre 45,1 millions d’habitants en 2060.  Au cours de la dernière décennie, la population a augmenté de 35%.  Au total, 85% de la population vit dans des zones rurales avec une moyenne de 6,4 enfants contre 4,2 enfants en zone urbaine.  Au total, 42% de la population du Malawi a moins de 15 ans, a précisé M. Phale.  Une population jeune avec un modèle de familles nombreuses continuera à entraîner une trajectoire ascendante de la croissance démographique.  À cet égard, les objectifs nationaux clefs en matière d’éducation, de santé, de droits en matière de santé sexuelle et reproductive, de fécondité et d’élargissement des opportunités économiques sont tous des piliers centraux des politiques de son pays, visant à mettre en place une économie moderne et à atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire.  Pour le Vice-Ministre, la CIPD est la pierre angulaire de ces objectifs politiques.  À ce jour, a-t-il expliqué, nous avons mis en place un comité directeur de la CIPD qui a pour mandat de surveiller et de rendre compte de la réalisation des objectifs que nous nous sommes engagés à atteindre à Nairobi.  D’ici à 2025, son pays s’est engagé à créer un organe national de coordination de la population, à cette fin. 

M. XUEJUN YU, Vice-Ministre, Commission nationale de la santé de la Chine, a souligné l’importance des questions relatives à la population pour « le pays le plus peuplé au monde ».  Il a réitéré l’attachement de la Chine à une politique démographique durable et à la protection de l’environnement.  Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, la Chine a mis l’accent sur l’individu, a assuré le Ministre adjoint.  Il a en outre fait état d’une augmentation de l’espérance de vie dans son pays au cours de la dernière décennie et de l’éradication de la pauvreté dès 2020.  La démographie au niveau mondial est bien plus diverse que par le passé, a-t-il constaté, et la Chine observe, elle aussi, ces tendances.  À cet égard, le Ministre a évoqué notamment l’évolution de la perception de l’âge du mariage et des taux de fécondité et de mortalité.  Face à ces nouvelles tendances, le Gouvernement a pris des mesures pour garantir une croissance démographique durable à travers une politique de natalité qui tient aussi compte aussi du vieillissement de la population.  Revenant sur les répercussions de la pandémie sur la population, le Ministre adjoint a expliqué que la Chine a mis en place une stratégie de « zéro COVID », qu’elle poursuit sa politique de vaccination et qu’elle s’en tient à ses protocoles pour minimiser l’impact de cette pandémie.

M. MUHAMMAD RIZAL MARTUA DAMANIK, Vice-Ministre de la formation, de la recherche et du développement au Conseil national de la population et de la planification familiale de l’Indonésie, a mis en exergue les domaines clefs dans lesquels son pays s’est engagé à progresser, tout d’abord en intégrant la population dans sa stratégie de développement durable.  L’Indonésie a ainsi instauré un ensemble de cadres juridiques en lien avec la population, la santé reproductive et la planification familiale, et la croissance inclusive.

En 2021, l’Indonésie a poursuivi son engagement à réduire les taux de malnutrition et de rachitisme d’ici à 2024.  Des modalités intégrées au niveau communautaire ont aussi été mises en œuvre pour prévenir les retards de croissance chez l’enfant.  L’Indonésie, s’est-il félicité, est en train de se relever de la pandémie de COVID-19.  Son gouvernement a alloué 46,3 millions de dollars aux services de la santé, y compris de planification familiale, ainsi qu’à la protection sociale.  En 2022, son pays a atteint une couverture de 75% de vaccination à l’échelle du pays.  Enfin, le Vice-Ministre a souligné la nécessité d’une coopération mondiale pour relever les défis mondiaux.

Mme FATHIMATH NIUMA, Vice-Ministre du plan, du logement et des infrastructures des Maldives, a observé qu’à l’approche du trentième anniversaire de la CIPD, le monde reste confronté aux retombées de la pandémie de COVID-19.  Les Maldives figurent parmi les pays les plus touchés par cette crise en Asie du Sud, a-t-elle rappelé, faisant état d’une hausse de 23% du déficit budgétaire par rapport au PIB en 2020.  Heureusement, a ajouté la Vice-Ministre, le PIB a rebondi de 27% en 2021, pour l’essentiel grâce à la reprise salutaire du tourisme.  Dans ce contexte difficile, le pays progresse néanmoins dans la mise en œuvre du Programme d’action de la CIPD tout en venant en aide aux populations les plus vulnérables et en promouvant l’égalité femmes-hommes, a-t-elle assuré.  Jugeant que la pandémie a également renforcé l’importance d’une croissance inclusive, elle a vanté la politique de vaccination de son pays qui vise tous les habitants indépendamment de leur origine ou de leur statut de résident.  Cette approche a porté ses fruits et permis un relèvement résilient, a-t-elle constaté, tout en reconnaissant que le risque subsiste pour certaines populations de replonger dans la pauvreté, compte tenu de la fragilité structurelle des petits États insulaires en développement.  Selon elle, une personne sur trois aux Maldives est confrontée à des vulnérabilités multidimensionnelles.  Pour y remédier, le Gouvernement a pris un ensemble de mesures pour contrer les effets des changements climatiques, notamment pour réduire la dépendance du pays aux combustibles fossiles et éliminer le plastique à usage unique d’ici à 2023.  Il œuvre aussi à l’augmentation de la parité et à la participation des femmes dans vie publique.

Mme GABRIELA RODRÍGUEZ RAMÍREZ, Secrétaire générale, Conseil économique et social du Mexique, a expliqué que son gouvernement s’efforce de renforcer les capacités institutionnelles pour offrir dignité et droits humains à tous les habitants en adoptant une approche progressiste.  Comme beaucoup de pays, le Mexique affiche une augmentation du nombre de personnes âgées.  La Vice-Ministre a par ailleurs reconnu que des changements structurels s’imposent pour améliorer les conditions de vie des femmes dont beaucoup consacrent plus de 30 heures non rémunérées par semaine aux services de soins.  Elle a fait part de l’ambition du Mexique de jeter les bases d’un système universel de soins, ainsi que d’une retraite pour tous à partir de 65 ans.  De plus, le Fonds d’apprentissage des jeunes a été mis en place afin de leur faciliter l’accès au marché du travail et le Mexique a misé sur « le passage d’une économie linéaire à une économie circulaire » pour limiter les impacts sur l’environnement.  Abordant les questions de la scolarisation et de la santé mentale des jeunes, elle a souligné l’importance pour les enfants et les jeunes de retourner à l’école, et l’objectif d’éliminer les grossesses infantiles.   Plaidant pour l’enseignement gratuit et de qualité pour tous, elle a précisé que le Mexique pratique l’éducation sexuelle et reproductive dans les études et que l’avortement est dépénalisé. 

Mme ABIMBOLA SALU-HUNDEYIN, Commissaire fédérale, Commission de la population du Nigéria, a évoqué le rapport de l’ONU qui identifie l’Afrique comme étant le continent où environ les deux tiers de la croissance de la population mondiale devrait se produire dans les prochaines décennies.  Le continent comptera alors près de quatre milliards de personnes d’ici à 2100.  La Vice-Ministre a jugé préoccupant le manque de ressources pour faire face à l’explosion de la population et à la multiplication des défis humanitaires, sachant que la population sera jeune.  Elle a ainsi appelé à prendre à bras le corps la question de la fertilité grâce à un accès aux moyens de planification familiale, afin de freiner la croissance de la population africaine et d’atteindre les objectifs du développement durable.  Dès lors, le Nigéria souligne l’importance de mettre les femmes et les jeunes filles au centre d’institutions de gouvernance robustes et résilientes, transparentes et redevables.

Mme RANIA AL-ABBADI, Secrétaire générale du Haut-Conseil jordanien de la population, a indiqué que la moitié de la société jordanienne a moins de 22 ans, ce qui a un impact sur la croissance démographique et fait pression sur les ressources limitées du pays.  Pour y faire face, la Jordanie a récemment approuvé sa Stratégie nationale de la population 2021-2030.  Le taux élevé de croissance démographique est considéré comme l’un des défis majeurs, a-t-elle expliqué, et la situation s’est compliquée avec les vagues de demandeurs d’asile.  Les réfugiés représentent en effet 30% de la population en Jordanie, et le déficit de financement des plans de réponse aux exigences des demandeurs d’asile syriens a dépassé 71% en raison de la faible réponse de la communauté internationale.  Par ailleurs, forte du constat que la croissance économique durable repose sur un capital humain qualifié et hautement productif, la Jordanie a misé sur des initiatives visant à réformer le système éducatif, la formation et l’esprit d’entreprise.  En outre, la Jordanie attache une grande importance au renforcement de la protection sociale, à la réduction de la pauvreté et à l’accès aux services de base.  L’intervenante a également fait état de changements dans la législation et les stratégies pour promouvoir l’égalité entre les sexes et lutter contre la discrimination fondée sur le sexe.  Elle a également évoqué les pénuries en eau et le manque de sources d’énergie comme le pétrole et le gaz; le chômage et les répercussions de la pandémie de COVID-19.  Elle a évoqué les charges financières supplémentaires qui pèsent sur le trésor public et dépassent largement sa capacité, entravant la réalisation d’une croissance économique durable.  Avec des taux de croissance économique négatifs au cours des deux dernières années, le Gouvernement a eu recours à une série de mesures de relance économique et préparé un programme exécutif indicatif pour les années 2021-2024.

Mme CLAUDINE AOUN ROUKOZ, Présidente de la Commission nationale de la femme libanaise, a rappelé que son pays traverse une crise économique immense en raison notamment du grand nombre de personnes déplacées qu’il accueille, des effets dévastateurs de la pandémie et des pertes occasionnées par l’explosion du port de Beyrouth, en août 2020.  Dans ce contexte aggravé par les conflits dans la région et les retombées des changements climatiques, il importe, selon elle, de prendre en compte les disparités sociales pour permettre à terme la réalisation des ODD.  Le Gouvernement libanais, a-t-elle assuré, s’emploie à améliorer la situation économique, tout en se concentrant sur l’autonomisation des femmes, conscient que celles-ci font face à un ensemble de facteurs néfastes.  À cet égard, le Parlement a récemment érigé en crime le harcèlement sexuel et adopté des mesures législatives destinées à lutter contre la violence intra-familiale.  Dans le même ordre d’idées, des centres d’accueil pour femmes battues ont été ouverts dans tout le pays et cet effort s’accompagne de mesures contre la traite des personnes, de campagnes de sensibilisation sur les mariages précoces et de l’adoption d’une loi portant à 18 ans l’âge minimal pour une union.  Dans un pays où 44% de la population a moins de 20 ans, le Gouvernement lutte aussi contre le décrochage scolaire précoce et s’efforce de garantir aux enfants et aux adolescents un accès aux soins de santé.  Par ailleurs, a poursuivi l’intervenante, l’accent est mis sur la participation des femmes au marché du travail, avec des systèmes de garde maternelle pour encourager l’emploi féminin.  Enfin, a-t-elle souligné, le Liban continue, malgré ses propres difficultés, à aider les quelque 1,5 million de personnes déplacées de Syrie.  Dans ces conditions, il nous sera difficile de parvenir aux ODD d’ici à 2030, a-t-elle noté.

Mme SAMAR ALSIBAI, Présidente de la Commission syrienne des affaires familiales et démographiques, a expliqué que la guerre terroriste imposée à son pays, ainsi que la politique hostile de certains États, à son égard, ont créé des défis significatifs pour la réalisation des objectifs et recommandations de la CIPD en termes de politique démographique et économique.  Les mesures coercitives unilatérales qui visent la Syrie ont détricoté les efforts entrepris pour renforcer les infrastructures nationales, fournir des services de base à tous et promouvoir la croissance économique, a accusé l’intervenante.  Beaucoup de jeunes ont quitté le pays pour trouver refuge ailleurs, et la Syrie n’arrive pas à tirer parti de son dividende démographique, a-t-elle déploré, même si elle coopère avec le FNUAP pour mettre à jour ses politiques locales, en particulier pour les jeunes.  Travailler au niveau national n’est pas suffisant pour pouvoir réaliser les objectifs de la CIPD, a-t-elle encore estimé.  Non seulement il faut une coopération robuste aux niveaux régional et international, mais il faut aussi éviter le deux poids, deux mesures et le diktat de certains pays puissants.

Mme WISSAL HUSSAIN, Secrétaire générale du Conseil national de la population du Soudan, a rappelé que la révolution de décembre 2018 menée par les jeunes a changé le régime et qu’elle était censée installer un gouvernement civil de transition pour préparer la réalisation de la démocratie par des élections justes et libres.  Bien que cela reste le plus grand espoir pour tous les Soudanais, le chemin vers la démocratie exige de la population de réconcilier ses différences politiques et de s’accorder sur les priorités nationales de la période de transition.  « Lorsque la démocratie et un régime civil seront instaurés, le Soudan ouvrira la voie à une mise en œuvre efficace du programme de développement durable et de population », a-t-elle promis.  Revenant sur le début de la période de transition, la Secrétaire générale a passé en revue les progrès accomplis en ce qui concerne la levée des sanctions, le retrait du Soudan de la liste des pays qui soutiennent le terrorisme et son ouverture à de nouveaux partenariats et à des opportunités d’investissement.  Toutefois, a-t-elle reconnu, ces progrès et d’autres réalisations importantes ont été affaiblis par les effets négatifs des réformes économiques, de la COVID-19 et de l’agitation politique dans le pays.  En particulier, la dépréciation rapide de la monnaie nationale et l’inflation des prix à la consommation ont accru les souffrances des pauvres et des personnes vulnérables.  La pauvreté s’est largement répandue et, plus récemment, la faim et l’insécurité alimentaire sont devenues les caractéristiques les plus courantes de la vie dans le pays.  En dépit de ces défis, a assuré Mme Hussain, le Soudan s’efforce de traduire ses engagements en matière de population, de développement durable et de croissance économique inclusive en programmes d’actions à mettre en œuvre par les ministères concernés et les ONG.

Mme LAURA BAS, ambassadrice de la jeunesse des Pays-Bas pour la santé et les droits sexuels et reproductifs, a relevé que plus de la moitié de la population mondiale a moins de 30 ans.  « Nous sommes la plus grande génération de l’histoire.  Nous sommes le plus grand groupe de futurs électeurs, consommateurs, travailleurs et militants qui ait jamais existé », a-t-elle lancé en tant qu’ambassadrice de la jeunesse des Pays-Bas pour les droits en matière de santé sexuelle et reproductive, l’égalité des sexes et l’autonomie corporelle.  Selon elle, il serait d’ailleurs logique que davantage de jeunes prennent la parole au sein de la Commission.  La croissance économique inclusive exige de valoriser le travail de soins non rémunéré des femmes, d’assurer leur autonomisation économique et de mettre fin aux stéréotypes sexistes.  L’intervenante s’est adressée aux jeunes du monde entier qui « ont tous des histoires à raconter » pour partager ici un message clef, à savoir que la santé sexuelle et les droits de la procréation sont une condition préalable pour parvenir à l’égalité des sexes et au développement économique.  À titre d’exemple, elle a parlé de ces jeunes filles qui, dans certains pays en développement, ratent une semaine d’école tous les mois lorsqu’elles ont leurs règles, ce qui entrave leur succès scolaire.  Les jeunes doivent pouvoir disposer d’informations fiables sur leur santé sexuelle et reproductive, pour prendre des décisions « éclairées » concernant leur santé et leur vie.  D’ailleurs, a-t-elle indiqué, les recherches montrent que cela contribue à réduire le nombre de grossesses chez les adolescentes et de grossesses non désirées, le nombre d’avortements à risque et la violence sexuelle et sexiste.

M. CHARLES BANDA, Directeur du Département de la population et du développement, Ministère des finances et de la planification nationale de la Zambie, a expliqué que la vision 2030 est « opérationnalisée » en Zambie à travers des programmes et stratégies à moyen-terme.  La population zambienne est estimée à 18,9 millions de personnes, avec un taux de fertilité en baisse qui se situe actuellement à 4,7 enfants par femme; le taux de mortalité infantile est tombé à 42 morts pour 1 000 naissances.  Le pays est très jeune, a expliqué le représentant, 45,2% de la population a moins de 15 ans.  La Zambie s’efforce donc d’investir dans le capital humain.  Afin de répondre aux besoins des Zambiens, il faudrait un taux de croissance économique supérieur aux 2,8% par an actuels pour se situer autour de 10%, a toutefois souligné le représentant tout en faisant état d’une augmentation du PIB.  Pour y arriver, la Zambie va investir dans des secteurs créant de l’emploi, augmenter le nombre de bénéficiaires des mesures de protection sociale et miser sur la protection de l’environnement et la mitigation des effets des changements climatiques, a-t-il précisé.

M. LINTON MCHUNU, Directeur-général du Département du développement social de l’Afrique du Sud, s’est dit convaincu que la croissance soutenue et inclusive ne pourra être atteinte que si la population est en bonne santé, éduquée et épargnée par la pauvreté.  C’est la raison pour laquelle le Gouvernement sud-africain a pris des mesures en faveur des plus démunis afin de leur permettre de profiter des dividendes démographiques, a expliqué le délégué.  Une stratégie sur les droits en matière de santé sexuelle et reproductive a également été mise en place, avec des outils pour les enseignants.  Le pays reste cependant confronté aux effets de la pandémie de COVID-19, qui ont mis en exergue les failles en matière de développement.  Cela étant, nous avons tiré les enseignements de cette crise et sommes en train de reconstruire en mieux, a-t-il assuré, avant de mettre l’accent sur les changements climatiques et leurs retombées négatives pour la réalisation des ODD.  Ces 15 derniers jours, la côte est de l’Afrique du Sud a été frappée par des inondation dévastatrices qui ont fait des dizaines de victimes et contraint des milliers de sinistrés à quitter leurs foyers, a-t-il informé, appelant à prendre des décisions fortes face à ce fléau et à l’amélioration des investissements dans l’économie verte.  Il importe aussi d’accroître la résilience des communautés, ce qui passe par la mise sur pied de systèmes d’alerte précoce.  Notant ensuite que le chômage des jeunes a été aggravé par la pandémie, le délégué a fait état de mesures destinées à offrir une formation initiale de qualité aux jeunes afin qu’ils puissent trouver un emploi.  Enfin, il a indiqué que, dans le cadre de son plan de relèvement centré sur l’individu, le Gouvernement sud-africain continue d’accorder une aide sociale mensuelle à plus de 18 millions de personnes et soutient les travailleurs ayant perdu leur emploi.

M. JOEL SAITOTI TOROME, Secrétaire principal au Ministère des finances et de la planification du Kenya, a déclaré que son pays veut investir dans une société inclusive et équitable vivant dans un environnement protégé.  Le Kenya est en train d’élaborer un plan à moyen-terme, qui sera inclus dans le plan de développement national.  Si les jeunes représentent un pourcentage élevé de la population, la croissance démographique a contribué à la dégradation environnementale et exercé des pressions sur l’utilisation des ressources.  Le nouveau projet kényan tient compte des facteurs démographiques comme la taille de la population et le niveau de pauvreté, a précisé le représentant. Pour promouvoir la croissance inclusive, certaines lois ont été passées pour favoriser les plus vulnérables.  Les fonds de lutte contre les mutilations génitales féminines ou pour l’autonomisation des femmes s’inscrivent dans cette logique.  En conclusion, le représentant a dit que la croissance démographique rapide conjuguée à la pandémie ont ralenti les efforts d’éradication de la pauvreté.  Il faut donc trouver des solutions respectueuses des priorités nationales pour répondre à ces défis.

Mme MATILDA ERNKRANS, Ministre de la coopération internationale en faveur du développement de la Suède, a déclaré que l’égalité des sexes et les droits en matière de santé sexuelle et reproductive pour tous sont les fondements d’une croissance économique inclusive et de la réalisation du Programme 2030.  Pour parvenir à une croissance soutenue et inclusive, il faut éliminer toute législation discriminatoire, a soutenu la Ministre pour laquelle cela va dans le sens de la prévention de toutes les formes de violence sexuelle et sexiste.  Il faut en outre assurer le contrôle des femmes et des filles sur leur propre corps, leur sexualité et leur santé reproductive.  Si les femmes et les filles pouvaient décider librement si et quand elles veulent avoir des enfants, elles auraient un meilleur accès à l’éducation et au marché du travail, a-t-elle fait valoir.  Regrettant que les avortements à risque soient toujours l’une des principales causes de mortalité et de morbidité maternelles dans le monde, elle a plaidé pour un accès à des services d’avortement sans risque pour toutes les femmes.  Selon la Ministre, cela aiderait les filles à poursuivre leur éducation sans entrave et les femmes à participer plus librement au marché du travail, et contribuerait à une croissance économique inclusive et au développement durable.  Il faut pouvoir s’appuyer à la fois sur les données et sur l’expérience, a-t-elle dit, en expliquant qu’en Suède, les réformes sociales et économiques ont permis la pleine participation des femmes au marché du travail.  Il a fallu investir dans les systèmes de protection sociale et les soins de santé universels, offrir un congé parental individuel et une garde d’enfants abordable et de qualité, ainsi que l’accès à la contraception et à l’avortement sécurisé.  Une autre leçon apprise en Suède est que pour créer l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, il faut tenir compte dans l’équation des responsabilités ménagères et des soins assurés aux enfants et aux personnes âgées.

M. CHRIS CARTER, Sous-Directeur au Bureau des affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni, a estimé que la croissance économique durable et soutenue ne deviendra une réalité pour les femmes et les filles que si leurs droits sont respectés et protégés, y compris leur droit à la santé sexuelle et reproductive.  Les droits des filles et des adolescentes incluent le droit de décider librement des questions afférentes à leur sexualité, et ce, sans coercition ni violence, a-t-il fait valoir, en mettant l’accent sur la protection de ces droits dans le contexte humanitaire.  Il reste cependant un long chemin à parcourir puisque, selon les chiffres du PNUD, on dénombre chaque année 121 millions de grossesses non désirées, dont un grand nombre débouchent sur un avortement.  De plus, 41% des avortements se font dans des conditions peu sûres et entraînent la mort, a déploré le délégué, selon lequel « nous allons collectivement dans une mauvaise direction compte tenu des mouvements hostiles aux droits des femmes et des conflits qui limitent l’accès de ces dernières aux soins ».  Selon lui, permettre aux femmes et aux adolescentes de bénéficier de services de soins est crucial pour parvenir à la croissance inclusive et soutenue.  De même, il importe d’accorder la priorité à la couverture sociale intégrale et au développement d’innovations comme la télémédecine afin d’assurer la réalisation des droits sexuels et reproductifs.  Enfin, il est impératif d’accroître l’accès des filles à l’éducation afin de leur ouvrir les portes de l’emploi et de les arracher à l’exclusion, a-t-il plaidé, s’inquiétant qu’un grand nombre d’entre elles ne retrouvent pas les bancs de l’école après la pandémie de COVID-19, ce qui se traduit par une hausse des grossesses.

M. ANTONIN BENJAMIN BIEKE (Côte d’Ivoire) a regretté qu’en dépit des progrès, le chemin vers une croissance économique bénéfique pour tous soit encore long.  La Côte d’Ivoire, qui aspire à atteindre le statut de pays à revenu élevé, a appliqué sa vision 2030 à travers des réformes et des programmes qui ont permis de parvenir à une croissance économique moyenne de 6,9% par an entre 2016 et 2019, et de 2% en 2020 en dépit de la crise sanitaire.  Il reste cependant à relever des défis pour mettre la population ivoirienne en adéquation avec les objectifs en termes de développement, a concédé le représentant, en expliquant que 8 Ivoiriens sur 10 ont moins de 35 ans et que le taux de fécondité est de 4,5 enfants par femmes.  L’essor économique de la Côte d’Ivoire a permis des progrès en termes d’éradication de la pauvreté et d’éducation ainsi qu’en termes d’accès aux services de base comme à l’électricité et à la santé, a-t-il assuré.  Le représentant a également fait état d’initiatives en faveur des femmes pour leur inclusion financière et promouvoir la santé reproductive, et mentionné le renforcement de la mise en œuvre de programmes sociaux et de la lutte contre l’impact des changements climatiques.

M. CEM URALDI, Directeur-général du Ministère de la famille et des services sociaux de la Turquie, a estimé que l’adoption du principe visant à « ne laisser personne de côté » implique de faire bénéficier toute la population du développement social.  Il a rappelé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 appelle à se concentrer sur les groupes vulnérables, tels que les femmes, les enfants, les seniors et les personnes handicapées.  Il a également jugé que la famille doit être un pont entre l’individu et la société, tout particulièrement pour l’éducation des enfants.  Avec des familles plus fortes, la société elle-même se renforce et devient plus pacifique, a assuré le délégué.  De fait, le renforcement de la famille est, selon lui, essentiel pour le développement social, tandis que les politiques mises en place à cette fin sont importantes pour réduire les risques sociaux.  À cette aune, la Turquie continue de se développer comme une société en mutation, en mettant l’accent sur le soutien aux familles et sur l’identification de leurs besoins.  Pour accroître leurs capacités à résoudre les problèmes courants, des services de conseil familial ont été mis en place dans tout le pays, a ajouté le délégué, faisant également état d’une politique familiale axée sur les personnes handicapées.

M. JUAN CARLOS ALFONSO FRAGA, Sous-Directeur de l’Office national de la statistique et de l’information de Cuba, a constaté qu’alors que la pandémie s’éloigne, le programme d’action de la CIPD reste d’actualité.  Il a notamment souhaité que les pays développés honorent leurs engagements en matière d’aide publique au développement, car ce n’est qu’ainsi que les pays en développement pourront atteindre les ODD.  Rappelant que son pays subit depuis plus de 60 ans un blocus économique, financier et commercial et souffre de mesures imposées par le précédent Gouvernement des États-Unis et maintenues par l’Administration actuelle, il a indiqué que son pays a mis en place des mesures pour améliorer la qualité de vie de ses citoyens, en particulier des enfants et des jeunes adultes, dans le cadre de programmes inclusifs.  Malgré nos difficultés économiques, nous voulons que notre population ait une vie décente et nous fournissons aussi une assistance à d’autres pays, a expliqué le représentant, faisant état de l’envoi par Cuba de 52 groupes de médecins pour venir en aide à des populations confrontées à la pandémie de COVID-19.  Forte de son programme de développement national à l’horizon 2030, Cuba est fière d’avoir un niveau de développement élevé et d’enregistrer d’excellents résultats en matière de santé, d’éducation et de recul de la pauvreté.  Le pays a aussi un faible niveau de mortalité et de fécondité.  Pour parvenir à ces résultats, nous utilisons au maximum la science et l’innovation, ce qui nous permet de lancer des politiques de relance et de gommer les vulnérabilités, tout en investissant dans le capital humain, l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes.  Ce n’est qu’au travers d’une démarche globale que nous pourrons mettre en œuvre le plan d’action du Caire, a-t-il conclu. 

M. JOTHAM MUSINGUZI, Directeur-général du Conseil national de la population au Ministère des finances de l’Ouganda, a parlé de la vision 2040 de son pays et des mesures prises pour s’assurer que le relèvement postpandémie soit complet.  Fort d’une population jeune, plus de 78% des habitants ayant moins de 30 ans, l’Ouganda a mis au point son troisième programme de développement national avec pour objectif l’amélioration du bien-être social de la population, a précisé le représentant.  À cette fin, il collabore avec le FNUAP et sa politique de 2020 en matière de population vise à ce que la pyramide démographique permette le développement économique, notamment rural.  Parmi les réussites, le représentant a évoqué le taux de croissance économique de plus de 7% en 2021, le déclin du taux de fécondité qui est de 5,7 enfants par femme actuellement, et la baisse de la mortalité maternelle et infantile.  Grâce à ces efforts, l’espérance de vie est passée de 43 ans en 1990 à 63 ans en 2016.  Toutefois, pour combattre un taux de chômage de 9,2% et la persistance des mariages précoces et d’autres problèmes, l’Ouganda promeut des programmes de formation et des campagnes de lutte contre les grossesses précoces.

M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a constaté que huit ans avant la date cible du Programme 2030, la fragile reprise post-COVID-19, l’impact des changements climatiques et la hausse des prix alimentaires causés par l’agression de la Russie contre l’Ukraine menacent les progrès réalisés, en particulier dans les pays en développement.  Tout en se félicitant de l’adoption récente du Programme d’action de Doha 2022-2031, qui comprend de nouveaux engagements pour les pays les moins avancés (PMA), il a appelé à ne pas laisser de côté les États les plus vulnérables face aux défis émergents.  Le Luxembourg, a-t-il assuré, continuera à consacrer 1% de son PIB à l’aide publique au développement, avec un accent particulier sur les PMA et les populations vulnérables.  Au niveau multilatéral, il maintiendra ses financements pour répondre aux besoins spécifiques et déterminés des pays en voie de développement.  Le représentant s’est toutefois dit conscient que l’aide sous forme de subventions ne suffira pas à elle seule à surmonter le déficit de financement existant.  C’est pourquoi le Luxembourg met en place des instruments de financement innovants public-privé afin de faciliter de nouveaux investissements.  Il travaille également avec ses partenaires des Nations Unies sur l’introduction d’obligations de genre pour faire avancer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, a précisé M. Maes.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a déclaré qu’une population éduquée, qualifiée, en bonne santé et autonome est le principal moteur du développement.  En revanche, une population ignorante, non éduquée et affaiblie par la maladie et le chômage est un frein au développement et entretient une pauvreté persistante et croissante.  Le Pakistan reconnaît depuis longtemps l’importance des stratégies en matière de population, notamment en ce qui concerne la santé et les problèmes sociaux qui y sont liés, a indiqué le délégué.  Selon lui, les populations vivant sous occupation étrangère méritent un soutien politique et économique généreux.  L’aide humanitaire et économique d’urgence est essentielle dans des situations telles que celle de l’Afghanistan, ainsi que pour les populations de la Palestine occupée et du Jammu-et-Cachemire.  Le délégué a, de même, souscrit à l’appel lancé par le Secrétaire général et dans la Déclaration du financement pour le développement en faveur d’une aide concessionnelle plus importante, d’un allègement de la dette, d’une réaffectation des droits de tirage spéciaux inutilisés, d’un financement plus important de la part du FMI et des banques régionales, et de la mobilisation des 100 milliards de dollars annuels promis pour le financement du climat, afin de permettre aux pays en développement de se remettre de ces crises et de relancer leur économie

Mme RABAB FATIMA (Bangladesh) s’est félicitée que le Secrétaire général ait mis un coup de projecteur sur la faim et le niveau des inégalités dans le monde.  Le Bangladesh prend des mesures pour régler ces deux problèmes, qui ont été exacerbés par la pandémie de COVID-19, a-t-elle affirmé, plaidant pour un changement de paradigme au niveau mondial afin de traiter de ces questions de façon holistique.  Pour cela, il convient de renforcer partout la protection sociale, tout en menant une lutte solide contre les inégalités.  Il convient également de prendre en compte la situation des migrants qui, durant la pandémie, ont été confrontés à toutes sortes de discriminations, à des retours forcés et à un manque d’accès aux services sociaux.  Alors que le premier forum d’examen sur les migrations doit se tenir dans un mois, il est impératif, selon la représentante, de tirer les enseignements du Pacte de Marrakech.  Par ailleurs, parvenir à une croissance soutenue et inclusive exige de garantir des investissements adéquats dans l’éducation et la formation des jeunes afin qu’ils puissent s’adapter aux besoins du marché de l’emploi.  De même, il est urgent de réduire la fracture numérique Nord-Sud en faisant bénéficier les pays en développement des progrès technologiques.  Enfin, la déléguée a appelé les pays développés et les partenaires du développement à honorer leurs engagements en matière de financement et d’allègement de la dette.

Mme NATHALIA SÁNCHEZ GARCÍA, (Colombie) a mis en exergue une question cruciale pour son pays: la production de données ventilées fiables pour pouvoir mettre l’accent sur les besoins réels de la population dans la planification du développement à tous les niveaux.  La Colombie a promu la lancée d’une étude sur la population en 2018.  Il s’agit d’un outil essentiel pour mieux élaborer les politiques publiques à partir d’informations fiables sur la situation de la population dans le pays, a expliqué le représentant.  Un tableau virtuel a également été conçu pour permettre aux décideurs d’obtenir des informations sur les principales variables démographiques et des données comparatives.  De plus, la Commission interinstitutions sur la population et le développement a été mise en place.

M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a assuré que son pays met l’individu, ses intérêts et ses besoins au centre de sa politique, en investissant dans des programmes sociaux qui prennent en compte les défis complexes pour permettre une croissance économique inclusive et durable.  Au niveau constitutionnel, le Bélarus garantit l’accès gratuit à une formation professionnelle et l’égalité des chances entre les femmes et les hommes.  Cette approche, s’est enorgueilli le délégué, se confirme par des indicateurs proches de 100% d’alphabétisation pour les femmes et les hommes, par exemple.  Poursuivant, il s’est félicité de l’augmentation de l’espérance de vie de cinq ans.  Pour finir, il a évoqué le régime de sanctions inacceptable qui frappe le Bélarus depuis deux ans.  Si son pays a réussi à en gérer les répercussions négatives, ce n’est pas le cas d’autres pays.  Le délégué a ainsi dénoncé « les chantages et pressions économiques », les « provocations » qui mènent aujourd’hui à des niveaux records d’inflation avec leur impact sur la vie des citoyens.

M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a indiqué que la population et le développement durable sont interdépendants et se renforcent mutuellement.  Constatant que la pandémie de COVID-19 a inversé des décennies de progrès dans la réalisation de l’objectif mondial d’éradication de la pauvreté sous toutes ses formes, il a rappelé qu’elle a causé la perte de millions d’emplois à temps plein.  En outre, les changements climatiques ont des effets disproportionnés et néfastes sur les pays en développement.  Bien que la reprise économique soit en cours, la croissance pourrait mettre plus d’années à revenir aux niveaux d’avant la pandémie dans de nombreux pays, s’est-il inquiété.  Il est donc impératif de renforcer la coopération internationale pour parvenir au plein emploi et offrir à tous un travail décent.  Les efforts nationaux doivent être complétés par des mesures de soutien internationales, a insisté le représentant.  Il a précisé que la Constitution du Népal a comme objectif de parvenir à un développement économique durable et inclusif de manière écologiquement viable.  Le Gouvernement encourage la planification familiale et prend des mesures pour augmenter l’espérance moyenne de vie en réduisant le taux de mortalité maternelle et infantile.  Le représentant a mentionné également le droit de chaque femme à une maternité sans risque et à la santé reproductive.

Mme AMINATA LY DIOP (Sénégal) a assuré que parvenir à une croissance soutenue et inclusive demeure le principal défi des pays en développement, particulièrement dans cette période de relèvement post-COVID-19.  Toutefois, les économies les plus faibles ne sont pas en mesure de supporter la hausse actuelle de l’inflation et 60% d’entre elles se trouvent, en outre, en situation de surendettement, a-t-elle relevé, appelant la communauté internationale à redoubler d’efforts en matière de solidarité et de coopération si elle veut réaliser le Programme 2030 et entraîner les pays fragiles sur la voie d’une croissance durable.  Qualifiant, à cet égard, la CIPD de 1994 de « tournant décisif » pour les politiques de développement durable, la déléguée a indiqué que son pays s’y réfère au travers de ses programmes destinés à « capturer les dividendes démographiques ».  À cette fin, le Sénégal met l’accent sur l’amélioration de la qualité de vie de ses citoyens, l’investissement dans le capital humain et le traitement raisonné des réseaux de migration.  Conscient de sa dynamique démographique, le pays a aussi mis sur pied un programme de modernisation des villes, tout en luttant contre les inégalités sociales.  Il s’emploie également à accroître l’accès des populations aux services essentiels et aux financements.  Enfin, a ajouté la représentante, le Sénégal défend un modèle de société égalitaire et, dans ce cadre, œuvre en faveur de l’autonomisation économique des femmes et de la libération du potentiel de sa jeunesse.

M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a expliqué qu’en 2020, la population de la Malaisie était de 32,4 millions d’habitants, avec une croissance annuelle moyenne de 1,7% pour la période de 2010 à 2020.  Poussée par une baisse du taux de fécondité accompagnée d’une augmentation soutenue de l’espérance de vie, la Malaisie deviendra une nation vieillissante d’ici à 2030.  Conscient de cette tendance, le Gouvernement a mis en œuvre de nouvelles politiques et programmes, a indiqué le représentant, et les politiques nationales pour les personnes âgées et leur santé ont été intégrées à la Vision de prospérité partagée 2030 et au douzième Plan de développement malaisien pour 2021-2026.  Rappelant que le développement socioéconomique de la Malaisie lui a permis de passer du statut de pays à faible revenu au statut à revenu intermédiaire supérieur, le représentant a fait état de progrès significatifs dans l’éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités.  Cependant, la crise de la COVID-19 a eu un impact important sur les ménages vulnérables et les entreprises, et en réponse, le Gouvernement a déployé plusieurs plans de relance économique et d’assistance pour un total de 125 milliards de dollars, soit 36% du PIB.  Il y a également eu une expansion des programmes de protection sociale ciblant des groupes vulnérables spécifiques.  De tels plans devraient permettre de progresser dans l’éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités, a expliqué le représentant, alors que la Malaisie continue à œuvrer pour élever le niveau de vie à travers le pays.  En ce moment, la Malaisie tire toujours parti du dividende démographique grâce auquel le pourcentage de la population en âge de travailler est passé à près de 70% en 2020.  Le Gouvernement continue également d’encourager une plus grande participation des femmes à la population active.

Droits de réponse

Le représentant de l’Inde a réagi à l’intervention d’une délégation qui a utilisé « à mauvais escient » la Commission pour faire des allégations qui ne méritent, selon lui, que le mépris collectif.  Il a réaffirmé que le Jammu-et-Cachemire fera toujours intégralement partie de l’Inde.

À son tour, le représentant du Pakistan a tenu à apporter une précision s’agissant du Jammu-et-Cachemire qui ne fait pas partie de l’Inde.  Les Nations Unies le définissent comme étant un territoire « contesté », et cela figure sur toutes les cartes officielles des Nations Unies.  D’après lui, le statut final de ce territoire doit être tranché par les habitants du Jammu-et-Cachemire sous l’égide de l’ONU comme le prévoient de multiples résolutions du Conseil de sécurité, qui plus est, sont acceptées par l’Inde qui doit, dès lors, les mettre en œuvre.

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