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Face à la « pandémie vicieuse » du racisme, le Secrétaire général appelle à être délibérément antiraciste et à tirer les fruits de la diversité

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée devant l’Assemblée générale à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, à New York, aujourd’hui:

Je suis heureux d’être parmi vous à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale.

En cette journée, nous commémorons le jour où, en 1960, la police sud-africaine a tué 69 personnes qui participaient à une manifestation pacifique contre les lois racistes de l’apartheid.  Aujourd’hui, l’apartheid n’est plus.  Malheureusement, le racisme, lui, est bien vivant, dans toutes les régions et dans toutes les sociétés.

Le racisme actuel est en bonne partie le legs de siècles de colonialisme et d’asservissement.  On le voit dans la discrimination et l’exclusion systématiques dont souffrent les personnes d’ascendance africaine.  On le voit dans les injustices et l’oppression que subissent les peuples autochtones et les autres minorités ethniques.

On le voit dans les idées répugnantes des suprématistes blancs et autres groupes extrémistes.  Mêlé à la discrimination, on le voit dans l’antisémitisme, l’islamophobie, la persécution de certaines minorités chrétiennes et d’autres groupes religieux, et dans d’autres formes d’intolérance et de xénophobie.

On le voit dans les actes de violence horribles commis récemment contre les personnes d’ascendance asiatique, injustement blâmées pour le COVID-19.  On le voit également dans les préjugés intégrés dans les systèmes de reconnaissance faciale et l’intelligence artificielle.

L’année dernière, des personnes du monde entier sont descendues dans la rue pour manifester contre l’injustice raciale.  Elles ont dénoncé le racisme pour ce qu’il était.  Une pandémie vicieuse.  Dangereuse, abominable, abjecte, et surtout, omniprésente.

Le racisme est un mal profondément enraciné.  Il transcende les générations et empoisonne les sociétés.  Il perpétue l’inégalité, l’oppression et la marginalisation.  Notre devoir, en tant que bons citoyens et citoyennes du monde, est de l’éradiquer.

Où qu’il soit, nous devons le condamner sans réserve, sans hésitation, sans détour.  Nous devons descendre en nous-mêmes, et nous demander chacun, chacune: en quoi suis-je raciste, et en quoi ma société est-elle raciste?  Et que dois-je faire pour y remédier?

Le racisme est un phénomène culturel complexe; il ne se vaincra pas en une journée.  Pour combattre le racisme, nous devons être délibérément antiracistes.  C’est pourquoi, l’année dernière, j’ai lancé un débat à l’échelle de l’Organisation, piloté par l’Équipe spéciale pour l’éradication du racisme et la promotion de la dignité de toutes et tous à l’ONU.

Cette équipe est chargée, notamment, de nous amener à parler du racisme, des préjugés conscients et inconscients, de la façon dont nous pourrons créer une organisation antiraciste.  Il en va de notre responsabilité à tous et à toutes.  C’est un problème qui concerne la société dans son ensemble.

Nous fêtons cette année le vingtième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  Il s’agit d’une occasion importante de porter un regard objectif sur notre situation et sur ce qu’il nous reste à accomplir.

Le racisme peut prendre de nombreuses formes, conscientes et inconscientes.  Pour le combattre, il faut agir tous les jours, à tous les niveaux.  Il est particulièrement important de reconnaître que les injustices de l’histoire ont contribué à la pauvreté, au sous-développement, à la marginalisation, à l’exclusion sociale et à l’instabilité, au détriment des gens comme des pays.

Il est temps de reconnaître et de redresser ces torts de longue date et d’en soigner les séquelles.  La justice réparatrice est un rouage essentiel de la réconciliation, de la prévention des conflits et de la création de sociétés fondées sur l’équité, l’égalité, le respect et la solidarité.  Elle peut contribuer à réparer le contrat social entre les populations et les États.

Les sociétés devenant chaque jour un peu plus multiethniques, multireligieuses et multiculturelles, nous avons besoin d’un engagement politique, culturel et économique plus fort en faveur de l’inclusion et de la cohésion.  Nous devons cultiver la diversité et en tirer les fruits, pas la voir comme une menace.

Cette année, la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale met en lumière le rôle important de la jeunesse.  Les jeunes sont à l’avant-garde de la lutte contre le racisme.  Leurs attitudes et leurs comportements dessineront l’avenir de nos sociétés.

Ce n’est qu’en comprenant et en rejetant ce mal profondément enraciné que nous pourrons y mettre fin.  Aujourd’hui, je lance donc un appel aux jeunes du monde entier, aux dirigeants et aux éducateurs.  Proclamons partout que tous les êtres humains naissent égaux.  Le suprémacisme est une tromperie diabolique.  Le racisme tue.

En ce jour et chaque jour, ensemble, débarrassons le monde de ce mal pernicieux qu’est le racisme, afin que nous puissions toutes et tous vivre dans un monde de paix, de dignité et de possibilités.

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