ENV/DEV/2039

Forêts: « Cette décennie est notre dernière chance pour assurer la survie de la planète Terre », avertit le Fonds pour l’environnement mondial

La contribution des forêts à la résolution des problèmes contemporains, comme les changements climatiques et la pandémie, a été mise en avant aujourd’hui par les participants au Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF) qui a tenu deux tables rondes pour examiner le niveau de mise en œuvre du Plan stratégique des Nations Unies sur les forêts (2017-2030).  Les forêts nationales, primaires, boréales ou autres, ainsi que leurs bois et produits non ligneux –bambou et rotin notamment–, ont été présentés comme des chances de capture du carbone, de prévention et de réduction des catastrophes, ou encore de création d’emplois dans la production et le commerce des produits forestiers.

Selon des constats faits par la science, « cette décennie est notre dernière chance pour assurer la survie de la planète Terre », a déclaré sur un ton alarmiste le Directeur des programmes au Fonds pour l’environnement mondial (FEM).  M. Gustavo Fonseca, qui prenait part à la première des deux tables rondes, a prôné, comme de nombreux intervenants, un multilatéralisme encore plus affirmé.  Il a notamment demandé la mise en œuvre des accords internationaux, comme celui de Paris sur les changements climatiques. 

Au cours de cette première discussion qui était présidée par le Vice-Président du FNUF, M. Tomasz Markiewicz (Pologne), M. Fonseca a fait remarquer que la pandémie a mis en avant la nécessité de prendre soin de l’environnement.  Le FEM, qui a pour credo « une planète saine pour des populations en bonne santé », poursuit ainsi ses investissements en faveur de la nature.  Le Fonds continue d’ailleurs d’adapter ses financements aux priorités des pays, tout en accompagnant ces derniers dans la recherche de financements privés.  En tant qu’organe de financement multilatéral du domaine de l’environnement, le FEM entend jouer sa partition et travailler avec tous les acteurs pour relever les défis écologiques du monde. 

« Il faut faire des efforts pour attirer le secteur privé », a renchéri la Directrice des opérations de l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT), prônant notamment des allégements fiscaux et des systèmes de règlement de différends souples, pour susciter davantage de fonds en faveur de la foresterie.  Mme Sheam Satkuru s’est en effet désolée de constater que les financements actuels pour la foresterie se situent bien en deçà de ce qui est nécessaire.  Elle a cependant estimé qu’il est possible de revaloriser la place des forêts dans l’optique de la séquestration du carbone.

Les forêts produisent également des ressources en bois et produits forestiers non ligneux, a rappelé la Secrétaire générale de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), qui a appelé à faire un commerce responsable des espèces protégées par la CITES, y compris des espèces forestières.  Cela ne peut être réalisé que lorsque trois principes fondamentaux sont respectés: durabilité, légalité et traçabilité.  Mme Ivonne Higuero a souligné que le secteur forestier génère quelque 80 millions d’emplois dans le monde, tandis que le bois et les produits forestiers non ligneux représentent également un cinquième des revenus des ménages ruraux dans les économies en développement.  Malheureusement, la surexploitation commerciale d’espèces forestières précieuses peut mettre en danger l’ensemble des écosystèmes dont dépendent ces millions de personnes.  C’est pourquoi la CITES joue un rôle de premier plan dans la réalisation des objectifs et cibles forestiers.

S’exprimant au nom de l’Union européenne (UE), le Portugal a demandé de renforcer la durabilité des systèmes alimentaires, notamment les systèmes d’agroforesterie, puisqu’il a été démontré que l’activité agricole contribue à la diminution du couvert forestier.  Selon l’UE, il existe des outils clefs pour atteindre les objectifs et cibles forestiers mondiaux.  La communauté internationale peut par exemple s’engager collectivement pour intensifier le boisement et le reboisement, tout en protégeant les forêts primaires.  Pour sa part, l’UE a lancé plusieurs initiatives et activités dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe. 

Le Brésil a souhaité une évaluation de toutes ces approches d’exploitation forestière.  Au Brésil par exemple, 20% des superficies forestières sont consacrées à la conservation.  Le Gouvernement brésilien plaide pour que les pays en développement aient les moyens de conserver leurs forêts, en droite ligne du principe de la « responsabilité commune mais différenciée ».  Le Japon a aussi demandé de renforcer la gestion forestière dans les pays en développement, avant d’insister sur l’importance d’améliorer le rôle que jouent les forêts en matière de prévention et de réduction des catastrophes et de renforcement de la résilience des communautés dans les pays en développement.

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a pour sa part décrié la politisation et la discrimination de l’assistance internationale dédiée à la conservation forestière.  Le Gouvernement nord-coréen a déclaré 2015-2024 « décennie de restauration des forêts nationales », a dit la délégation en se félicitant que plus de 1,2 million d’hectares de forêts aient été plantés depuis 2015.  La Nouvelle-Zélande, qui entend réduire les émissions de 30% d’ici à 2030, a vu le rôle que les forêts auront à jouer dans cette optique.  La Fédération de Russie a elle aussi adopté une nouvelle stratégie forestière, pour la période 2021-2030.  Elle a dit viser que, d’ici à 2030, les émissions de gaz à effet de serre reviennent au niveau de 1999.  De même, la Malaisie a dit s’être engagée à protéger au moins 50% de son couvert forestier, sachant que 5,8 millions d’hectares de forêts ont déjà été certifiés.

Le Pérou a expliqué avoir innové en mettant sur pied un programme de « gestion forestière sexospécifique », afin de tenir compte des spécificités des femmes dans la conservation des forêts, un peu comme il l’a fait pour l’examen des impacts sexospécifiques des changements climatiques.  D’autres intervenants importants dans la gestion durable des forêts sont les communautés locales, a dit le Mexique, tandis que le Kenya a indiqué partager les avantages tirés de la gestion forestière avec ces communautés.  Les États-Unis ont également défendu l’importance du partage des meilleures pratiques et des expériences réussies de conservation des forêts.  Justement, la Chine a dit être prête à partager avec le monde son expérience d’élimination de la pauvreté qui passe entre autres par le secteur forestier.  Au niveau régional, les pays membres de l’Organisation asiatique pour la coopération forestière (AFoCO) contribuent en commun, en espèces et en nature à hauteur de 27,7 millions de dollars, aux 50 projets de conservation forestière menés actuellement qui se chiffrent à un total de 62,7 millions de dollars.

La seconde table ronde fut consacrée au renforcement de la coopération avec les partenaires pour atteindre les priorités thématiques 2021-2022, sous la houlette du modérateur, M. Musah Abu-Juam (Ghana), qui est également Vice-Président du FNUF.

Selon le Partenariat de collaboration sur les forêts, chaque arbre compte et chaque action également.  C’est pourquoi, a expliqué sa Présidente, Mme Mette Wilkie, le Partenariat a reporté à 2022 son Congrès mondial et la remise du prix Wangari Maathai récompensant les « Champions de la cause des forêts ».  Pour cette institution, il est important de pouvoir réunir les 15 organisations et secrétariats internationaux qui la constituent et qui réalisent d’importants programmes forestiers.  Ces organisations partagent en effet leurs expériences et en tirent parti au profit de leurs membres respectifs.  Elles collaborent aussi pour rationaliser leur travail et trouver les moyens d’améliorer la gestion et la conservation des forêts et la production et le commerce des produits forestiers.

Mme Liliana Annovazzi-Jakab, qui est à la tête de la Section des forêts et du bois de la CEE/FAO, a expliqué comment sa section a aidé à la restauration de millions de terres dégradées, notamment dans le Caucase.  La Section, qui travaille en collaboration avec le PNUE, œuvre également à la promotion d’emplois verts dans le secteur forestier.  La Chef de la Section a insisté sur le rôle, très souvent oublié, des forêts boréales dans le contexte de la lutte contre les changements climatiques. 

Au nom de l’Organisation internationale du bambou et du rotin (INBAR), M. Lu Wenming a expliqué que ces deux matières peuvent contribuer à l’objectif mondial des forêts visant à « inverser la perte du couvert forestier ».  En effet, les États se sont engagés à restaurer plus de 5 millions d’hectares de terres avec du bambou d’ici à 2030, a-t-il signalé.  De même, le bambou et le rotin peuvent contribuer à l’objectif forestier mondial d’amélioration des avantages économiques, sociaux et environnementaux des forêts.  Ce sont deux des produits forestiers non ligneux les plus précieux au monde, et ils génèrent une source de revenus et de matériel pour des millions de personnes.  Au cours des deux prochaines années, INBAR contribuera à la création de plus de 700 nouvelles petites et moyennes entreprises, a-t-il promis, ajoutant que ces entreprises devraient générer plus de 11 000 nouveaux emplois.

L’industrie brésilienne de l’arbre, également connue comme l’Ibá, n’a pas manqué de souligner sa contribution dans la réalisation des objectifs forestiers mondiaux, notamment par le reboisement.  M. José Carlos da Fonseca Junior a expliqué que les forêts font partie de la solution pour la reprise verte de l’économie après la pandémie.  L’Ibá a d’ailleurs déboursé plus de 115 millions de reais pour aider les Brésiliens à lutter contre le coronavirus.  Dans son domaine primaire d’activité, l’industrie brésilienne de l’arbre a planté 9 millions d’hectares de forêts qui contribuent au stockage d’environ 1,88 milliard de tonnes de CO2. 

C’est le principe de « gestion intégrée des terres » qui a ensuite été mis en avant par M. Frederik Buchholz de l’International Forestry Student Association (IFSA), défendant l’importance d’un concept holistique pour aborder la gestion durable des forêts à plus grande échelle.  Pour arriver à cette gestion durable, la communauté des sciences forestières a beaucoup à offrir, a fait valoir l’Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO).  Le réseau mondial de l’IUFRO, composé de plus de 650 organisations membres dans 125 pays, représente une richesse des partenaires à l’intérieur et à l’extérieur du secteur forestier. 

Le problème soulevé par l’Union européenne (UE) dans la gestion durable des forêts est la fragmentation de la gouvernance forestière mondiale. Pour renforcer la coopération des partenaires régionaux et sous-régionaux, l’UE et ses États membres estiment qu’on pourrait mieux utiliser le potentiel des commissions régionales des forêts de la FAO, ainsi que d’autres organisations et processus régionaux et sous-régionaux.

Dans sa sous-région, la Malaisie entend justement continuer de renforcer son engagement avec les partenaires régionaux dans des domaines comme la lutte contre l’exploitation et le commerce illicites de bois.  La Malaisie organise aussi des camps d’apprentissage pour étudiants en foresterie.  Le Guatemala a lui aussi milité pour davantage d’initiatives mondiales pour une gestion forestière cohérente.  Le pays entend lancer un centre régional de lutte contre les incendies de forêts.  Dans ce contexte de partenariats, le Brésil a dit souscrire à la position des États-Unis qui ont insisté sur l’importance de tenir compte des capacités nationales des uns et des autres, et du fait qu’il n’y a pas de solution qui soit applicable à tous les contextes nationaux.

Dans cet esprit de partenariat, le Programme des Nations Unies pour l’environnent (PNUE) a annoncé le lancement d’une initiative en collaboration avec d’autres organismes afin de convaincre les banques commerciales de se détourner des projets d’agroforesterie qui n’ont pas de perspective durable.

Le Forum des Nations Unies sur les forêts poursuivra ses travaux demain, mercredi 28 avril, à partir de 10 heures.

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