Aperçu des travaux en 2020
CS/14407

En 2020, la capacité du Conseil de sécurité à s’adapter à la COVID-19 n’aura pas fait oublier les divisions de ses membres

En cette année 2020 extraordinaire, c’est l’arrêt, pendant les deux dernières semaines du mois de mars, des réunions publiques du Conseil de sécurité, et leur reprise en visioconférence puis en alternance, à partir du mois de juillet, avec des séances en personne au Siège de l’ONU, qui aura le plus marqué l’attention.  Cette adaptation sans précédent des méthodes de travail du Conseil, imposée par la pandémie de COVID-19, n’a pas pour autant dissimulé les divisions, notamment entre les cinq membres permanents, illustrées une fois encore par la crise syrienne et le dossier du nucléaire iranien.

Signes révélateurs de ces divisions, il aura fallu au Conseil plus de trois mois pour s’entendre sur un projet de résolution sur le soutien à l’appel au cessez-le-feu mondial lancé le 23 mars par le Secrétaire général dans le contexte de la pandémie.  Le Conseil aura en outre été incapable de s’entendre sur un texte commémoratif du vingtième anniversaire de sa résolution pionnière relative au programme « femmes, paix et sécurité ». 

Le recours rapide et massif aux visioconférences (VTC) a témoigné de la capacité du Conseil à s’adapter pour continuer de remplir son mandat.  Dix-huit jours après la suspension des séances publiques habituelles, il reprenait ses activités en VTC, séances certes non officielles mais dont la portée restait inchangée, y compris la force juridique des résolutions adoptées.  À partir du 14 juillet, le Conseil est parvenu à se réunir physiquement, certes assez rarement.

À l’exception de la seconde quinzaine de mars, le Conseil a ainsi pu maintenir une activité publique normale.  Les 238 séances publiques –en personne ou VTC- de 2020 égalent celles de 2016, tandis que les 57 résolutions ont été plus nombreuses que celles des deux années précédentes.  Mais le nombre des déclarations présidentielles -13- a confirmé la tendance à la baisse.  Le Conseil a en revanche tenu des réunions publiques moins longues car à partir d’avril, les débats ont été limités aux 15 membres du Conseil, aux chefs de département et pays concernés.  Cette année, le Conseil n’a effectué aucune mission sur le terrain. 

Flexible dans ses méthodes de travail, le Conseil a subi la rigidité des positions de ses membres sur les questions de fond.  Maintes fois dénoncé, l’unilatéralisme revendiqué des États-Unis s’est poursuivi sur les dossiers du Moyen-Orient et du nucléaire iranien, alors que l’intransigeance de la Fédération de Russie faisait plier les « Occidentaux » sur l’accès humanitaire en Syrie.  Les appels à la levée des sanctions unilatérales, souvent américaines, parfois européennes, en raison de la pandémie, ont divisé le Conseil à de multiples reprises.  Les désaccords sur le maintien des embargos ou des sanctions ont d’ailleurs contribué à un taux record de résolutions non consensuelles: 13 résolutions adoptées sur 57 n'ont pas obtenu l'unanimité.  En outre, sept projets mis aux voix ont été rejetés: quatre par manque de soutien et trois par droit de veto. 

Le Conseil a été une nouvelle fois absent ou en retrait dans plusieurs crises.  Inexistant lors du conflit au Haut-Karabakh ou spectateur passif des rapprochements entre Israël et plusieurs pays arabes sous l’impulsion des États-Unis, il a délégué la gestion du coup d’État au Mali à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour en entériner les résultats, à la satisfaction des partisans du principe « solutions africaines aux problèmes africains ».  C’est au nom du même principe que le Conseil a abandonné l’idée d’« une personne, une voix » pour les prochaines élections générales en Somalie.

Plusieurs questions sensibles n’ont pas été examinées cette année ou très brièvement.  Il en a été ainsi du Myanmar, dont le Conseil n’a pas traité depuis le 28 février 2019, ou encore de la prolifération nucléaire en République populaire démocratique de Corée, qui n’a conduit qu’à une prorogation annuelle, le 30 mars, sans débat ni explication de vote, du mandat du Groupe d’experts chargé de surveiller l’application des sanctions.  Le Conseil a en outre renoncé à examiner séparément la situation au Burundi et commençait tout juste, à la fin du mois de décembre, à se préoccuper de l’évolutions de la situation au Sahara occidental après la rupture de la trêve au mois de novembre et la reconnaissance de la souveraineté marocaine par les États-Unis au mois de décembre.

Le Conseil n’en a pas moins été appelé à soutenir des processus de paix.  Il a apporté son appui aux négociations intra-afghanes ouvertes à Doha, au mois de septembre après la signature, en février, d’un accord de paix entre les États-Unis et les Taliban, et continué de soutenir les progrès en République centrafricaine et en Colombie, où il a ouvert la voie à une prorogation du mandat de la Mission de vérification dans le cadre du processus de paix.

La tendance au repli des opérations menées par le Conseil en Afrique s’est confirmée.  Seule mission établie en 2020, la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS) est une mission politique spéciale, appelée à succéder à l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), clôturée le 31 décembre, tout comme le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS). 

En République démocratique du Congo (RDC), le retrait progressif de la MONUSCO a été acté, même si aucune date de clôture n’a été fixée.  Le Secrétaire général a été prié par le Conseil de lui présenter des options pour une « stratégie de sortie viable » de la FISNUA, Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei désormais présente depuis plus de 10 ans, et pour entreprendre une reconfiguration de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), laissant présager une diminution des effectifs.  En revanche, malgré les pressions américaines, le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a été reconduit pratiquement dans les mêmes termes. 

Le repli du Conseil a favorisé le renforcement de sa coopération avec les organisations régionales, y compris hors d’Europe et d’Afrique.  Après la Ligue des États arabes en 2019, il a entendu en 2020 l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’Organisation internationale de la Francophonie.  Au Conseil, les prises de parole communes des membres africains –les « A3 »- auxquels s’est jointe Saint-Vincent-et-les Grenadines, se sont multipliées, alors que pour la première fois, l’on assistait à des déclarations conjointes de membres asiatiques –le Viet Nam et l’Indonésie- au titre de l’ASEAN.  Toutefois, le « principe de subsidiarité » n’a toujours pas réglé la question du financement des opérations de paix menées par les organisations africaines avec l’autorisation du Conseil.

COMPOSITION DU CONSEIL DE SÉCURITÉ EN 2020

Outre ses cinq membres permanents –Chine, États-Unis, Fédération de Russie, France et Royaume-Uni– le Conseil de sécurité était composé en 2020 des 10 membres élus suivants: Allemagne, Afrique du Sud, Belgique, Estonie, Indonésie, Niger, République dominicaine, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Tunisie et Viet Nam.

La présidence mensuelle du Conseil de sécurité, qui tourne en fonction de l’ordre alphabétique en anglais du nom des États Membres, a été assumée dans l’ordre suivant:

Janvier:    Viet Nam
Février:    Belgique
Mars:       Chine
Avril:      République dominicaine
Mai:        Estonie
Juin:       France
Juillet:    Allemagne
Août:       Indonésie
Septembre:  Niger
Octobre:    Fédération de Russie
Novembre:   Saint-Vincent-et-les Grenadines
Décembre:   Afrique du Sud

Les derniers entrés au Conseil -l’Estonie, le Niger, Saint-Vincent-et-les Grenadines, la Tunisie et le Viet Nam-, membres depuis le 1erjanvier 2020 pour un mandat de deux ans, restent membres en 2021. 

Membres depuis le 1er janvier 2019, l’Allemagne, l’Afrique du Sud, la Belgique, l’Indonésie et la République dominicaine ont quitté le Conseil le 31 décembre 2020.  Ces États sont remplacés à compter du 1er janvier 2021 par l’Inde, l’Irlande, le Kenya, le Mexique et la Norvège, élus par l’Assemblée générale les 17 et 18 juin 2020 pour un mandat de deux ans. 

La documentation en français relative au Conseil de sécurité est disponible sur le lien Internet suivant: http://www.un.org/fr/sc.

L’IMPACT DE LA PANDÉMIE DE COVID-19 SUR LES MÉTHODES DE TRAVAIL DU CONSEIL

Voir aussi la question thématique « Méthodes de travail »

Comme partout aux Nations Unies, la pandémie a eu des conséquences importantes sur le Conseil de sécurité, contraint d’adapter ses méthodes de travail pour remplir son mandat d’organe principal chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, tout en veillant à la sécurité des délégations et du personnel du Secrétariat de l’ONU attaché à ses réunions. 

Alors que la pandémie frappait New York au mois de mars, le Conseil, alors présidé par la Chine, suspendait, dans un premier temps, ses réunions, dès le 12 mars.  Il les reprenait le 24 mars en visioconférences (VTC), chaque membre du Conseil s’exprimant depuis sa mission diplomatique ou son domicile.  Les deux premières de ces séances, officieuses, étaient consacrées à la République démocratique du Congo et à la Libye, deux questions que le Conseil aurait dû aborder en séances publiques comme le prévoyait son programme de travail, publié le 2 mars.

Le 2 avril, la nouvelle Présidente du Conseil, la République dominicaine, adressait aux États membres une lettre rappelant les dispositions fixées d’un commun accord pour l’organisation des séances.  Jusqu’à la fin de l’année, chaque nouvelle présidence fera de même. 

L’organisation des séances en VTC, appliquée dès le 30 mars, est restée pour l’essentiel la même jusqu’à la fin de l’année, avec des améliorations techniques.  Au lieu des réunions « officielles publiques » habituelles -réunions d’information et débats- les membres du Conseil se réunissaient en séances « VTC publiques » mais « non officielles », faute d’accord pour les considérer comme des séances formelles.  Dès lors, plus de procès-verbaux de séances officielles mais des documents dans les six langues officielles de l’ONU présentant en annexes les différentes interventions.  Quant aux séances de consultations à huis clos, elles s’appelaient désormais « VTC privées ».

Dans un premier temps, pour des raisons techniques, seule la première partie des VTC publiques, à savoir les interventions des chefs de département, représentants ou envoyés spéciaux concernés par la question à l’examen, était diffusée en direct, la deuxième partie, soit les débats, étant enregistrée.  Rapidement, les adaptations techniques ont permis la retransmission en direct de toute la séance.  Les enregistrements des séances publiques du Conseil en VTC sont donc disponibles, depuis le 21 avril, sur le site Web du Conseil de sécurité

Quid de l’adoption des résolutions?  La question se posait pour la première fois pour le renouvellement du mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) qui arrivait à échéance le 31 mars.  En vertu des modalités publiées par la présidence chinoise, excluant les votes à main levée en dehors des séances en présentiel, les votes seraient transmis électroniquement avant la séance à la Division des affaires du Conseil de sécurité. 

Une fois les votes recueillis, la présidence du Conseil organiserait une séance VTC publique pour annoncer les résultats du scrutin, sans explications de vote par oral mais avec la possibilité de les fournir ultérieurement par écrit, afin qu’elles soient compilées et publiées.  Les résolutions adoptées sous cette forme ont la même force juridique que celles adoptées lors de séances classiques.  Le Conseil utilisait encore régulièrement cette méthode pour l’adoption de résolutions à la fin de l’année.

Certains membres du Conseil, réticents à renoncer aux séances traditionnelles en personne, allaient chercher à les reprendre dès que possible.  Les restrictions dues à la COVID-19 étant allégées à la fin du mois de juin, la nouvelle présidence allemande annonçait, dès le 1er juillet, l’intention du Conseil de « reprendre progressivement ses réunions en présentiel au Siège de l’ONU, tout en continuant d’assurer la sécurité des délégations et des membres du personnel ».  Le 14 juillet, les membres du Conseil se retrouvaient ainsi en personne pour tenir une réunion officielle publique, dans la salle du Conseil économique et social (ECOSOC), jugée plus sûre car plus vaste que la salle du Conseil de sécurité.  Le Conseil continuait néanmoins à tenir la majorité de ses séances en VTC. 

Le 1er octobre, la présidence russe exprimait le souhait de voir le Conseil reprendre un « fonctionnement aussi normal que possible ».  Elle prévoyait des réunions « en présentiel dans la salle du Conseil de sécurité » et « selon les modalités habituelles », une réévaluation étant prévue à la fin du mois « ou plus tôt si besoin était ». 

Le 8 octobre, le Conseil faisait son retour dans « sa » salle, équipée de diverses protections.  Deux semaines plus tard, il devait néanmoins suspendre ses réunions en présentiel, après l’apparition de cas de COVID-19 dans la délégation du Niger.  Il les reprenait le 11 novembre, à un rythme réduit. 

Au total, 159 des 238 séances du Conseil de 2020 auront eu lieu en VTC, soit environ les deux tiers.  Entre le 31 mars et le 31 décembre, le Conseil n’aura tenu que 32 réunions publiques classiques et chaque mois, même en octobre, la majorité des séances aura eu lieu en VTC. 

Hormis deux reconductions techniques le 30 mars imposées par les circonstances -à savoir, le mandat de la MANUSOM et les effectifs de la MINUAD- la pandémie n’aura pas perturbé sur le fond les décisions du Conseil.  De même, les séances d’information, qui représentent depuis plusieurs années quelque 60% des séances, se sont poursuivies en VTC publiques. 

Les débats, et en particulier les débats ouverts à l’ensemble des États Membres de l’Organisation, ont été davantage affectés.  La présidence russe donnait en octobre une double explication pour justifier le format VTC de ces séances: la nécessité de limiter le nombre de personnes dans le bâtiment; et l’impossibilité de faire venir à New York, du fait des restrictions sanitaires, ministres et hauts dignitaires.

Les États non membres du Conseil ont néanmoins pu présenter des contributions écrites, tandis que les « États concernés » par les ordres du jour ont toujours pu participer en direct aux débats, comme lors de celui sur la Libye qu’organisait, au niveau ministériel, la présidence allemande le 8 juillet et qui vit intervenir 33 orateurs.  La nouvelle organisation des travaux aura toutefois nui à certains événements, en particulier la célébration du vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000), texte pionnier sur les femmes, la paix et la sécurité.

Les membres du Conseil ont dressé le 15 mai un premier bilan de leur adaptation, lors de la réunion annuelle sur les méthodes de travail. 

NOTE EXPLICATIVE

La présentation des activités du Conseil suit en général l’intitulé officiel de l’ordre du jour des réunions, parfois sous une forme simplifiée.  À titre d’exemple, les réunions pertinentes sont traitées sous « Ukraine » et non « Lettre datée du 28 février 2014, adressée à la Présidente du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de l’Ukraine auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2014/136) ». 

Certains points de l’ordre du jour particulièrement fournis ont été subdivisés, ce qui correspond aussi à une séparation de fait des séances.  Ainsi de la « situation au Moyen-Orient », qui inclut la Syrie, le Liban, l’Iraq et le Yémen.  Chacun des pays est traité séparément.  Il en est de même pour les « rapports du Secrétaire général sur le Soudan et le Soudan du Sud », subdivisés en Soudan (y compris les séances d’information avec la Procureure de la CPI), Soudan du Sud et Abyei, le Conseil abordant ces différentes questions lors de séances séparées. 

Inversement, certains regroupements ou reclassements ont été opérés.  Ces changements sont signalés sous la rubrique officielle. 

Six réunions tenues au titre du « maintien de la paix et de la sécurité internationales » ou de la « consolidation et pérennisation de la paix » mais entièrement consacrées à la pandémie de COVID-19 ont ainsi été regroupées dans une rubrique « COVID-19 » placée en tête des questions thématiques.

Plusieurs réunions thématiques ont été résumées sous l’intitulé du pays auquel elles étaient exclusivement consacrées (piraterie au large de la Somalie, trafic de migrants au large de la Libye, sanctions contre les taliban afghans…).  La résolution 2535 (2020), adoptée sous « maintien de la paix et de la sécurité internationales », qui concerne en fait « les jeunes, la paix et la sécurité », a été traitée sous cette rubrique.

En l’absence d’indication contraire, les résolutions de 2020 citées ont été adoptées à l’unanimité. 

SITUATIONS DE PAYS

MOYEN-ORIENT

La situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne

- 13 séances publiques: 21 janvier avec reprise le 22 janvier, 11 février, 24 février, 30 mars, 23 avril, 20 mai, 24 juin, 21 juillet, 25 août, 29 septembre, 26 octobre, 18 novembre et 21 décembre

Voir aussi: Liban; Syrie; Yémen; Maintien de la paix et de la sécurité internationales

Commencée par une dangereuse montée de la tension dans la région du Golfe après l’assassinat par les États-Unis, le 3 janvier à Bagdad, du général iranien Qassem Soleimani, l’année a ensuite été marquée par l’annonce, le 28 janvier, du volet politique de la « Vision » américaine pour les Israéliens et les Palestiniens, attendue de longue date mais aussitôt rejetée par les Palestiniens, la Ligue des États arabes et l’Organisation de la coopération islamique (OCI).  L’Envoyé spécial du Président des États-Unis, Jared Kushner, présentait officiellement le projet au Conseil, à huis clos, le 6 février, avant une réunion spéciale du Conseil, le 11 février.  La pandémie allait toutefois mettre un peu de côté le débat sur le plan de paix américain.  L’annonce, le 13 août, des « Accords d’Abraham » entre Israël et deux pays du Golfe -les Émirats arabes unis et Bahreïn-, puis la normalisation des relations entre Israël et le Soudan, en octobre, et avec le Maroc en décembre, changeaient de nouveau la donne.  Elles apparaissaient à nombre de membres du Conseil comme une remise en cause de la crédibilité de ce dernier, officiellement attaché à la solution des deux États mais incapable de la faire progresser, alors que semblait triompher la « diplomatie créative » du Président Donald Trump.  Fin décembre, Nickolay Mladenov, Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient depuis cinq ans, quittait ses fonctions. 

Les tensions entre les États-Unis et l’Iran dominaient le débat trimestriel des 21 et 22 janvier.  La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, soulignait que le conflit israélo-palestinien n’était pas à l’abri des tensions que connaissait le Moyen-Orient.  La Fédération de Russie qualifiait l’assassinat du général iranien d’« acte inacceptable qui place la région au bord d’un conflit aux conséquences inconnues ».  De nombreux États insistaient sur la nécessité de respecter le droit international, de faire preuve de la plus grande retenue et de s’engager de nouveau sur la voie de la diplomatie et du dialogue, qu’il s’agisse de la question palestinienne, de la Syrie, du Yémen ou de la Libye.  Le Liechtenstein mettait en garde contre une interprétation trop large du droit à la légitime défense. 

La réunion du 11 février réclamée par la Tunisie en réponse au plan de paix voyait le Secrétaire général réitérer « l’engagement des Nations Unies à appuyer les parties dans leurs efforts de parvenir à la solution des deux États ».  M. António Guterres rappelait que son Secrétariat était lié par la position des Nations Unies, « définie, au fil des ans, par les résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale ».  Invoquant « l’échec spectaculaire » des Nations Unies et de leur « plus de 800 résolutions » à résoudre la question palestinienne, les États-Unis disaient offrir aux Palestiniens « des chances réalistes d’assister, de leur vivant, à la création d’un État palestinien autonome et pleinement reconnu » et présentaient leur plan comme un point de départ.  Mais le Président de l’Autorité palestinienne considérait que la « proposition israélo-américaine » remettait en question le droit à l’indépendance dans son propre territoire du peuple palestinien et n’y trouvait rien qui puisse être considéré comme une base de négociation.  La plupart des intervenants estimaient que le plan s’écartait des paramètres internationalement agréés. 

Suite à cette réunion d’urgence, la partie publique de la réunion d’information mensuelle du 24 février se limitait à l’exposé du Coordonnateur spécial, qui estimait que, sans perspective de négociations bilatérales de fond, l’évolution de la situation continuerait à compromettre l’espoir d’une solution à deux États, à l’image d’un nouveau plan de constructions que le Premier Ministre israélien avait annoncé quelques jours plus tôt.

La pandémie allait faire passer temporairement le plan de paix américain au second plan.  Le 30 mars, la coordination « exemplaire » en cours entre Israéliens et Palestiniens face à la COVID-19 était saluée par de nombreux membres du Conseil et certains y voyaient une occasion « unique » de relancer le processus politique au point mort.  « Quand cette maladie sera reléguée au passé et que nous aurons échappé à son étau, chaque membre de ce Conseil pourra citer la coopération dont nous sommes les actuels témoins et affirmer que le dialogue entre Israéliens et Palestiniens est possible », déclarait la représentante des États-Unis, qui jugeait « peu opportun de tenir un débat complexe pour examiner dans le détail » la Vision pour la paix, l’attention étant mobilisée par la pandémie.

Lors des réunions suivantes, la priorité passerait progressivement de la pandémie aux projets d’annexion de parties de la Cisjordanie occupée par Israël, qui se dotait en avril d’un nouveau gouvernement. 

Le 23 avril, M. Mladenov parlait de la perspective « dangereuse » de l’annexion, qui avait été au cœur des dernières négociations entre partis israéliens sur la formation du nouveau gouvernement.  La plupart des membres du Conseil lui faisaient écho, alors que les États-Unis affirmaient leur « soutien inconditionnel » aux récentes mesures prises par le Gouvernement israélien.  Ils ajoutaient que la lutte contre la pandémie ne devait pas reléguer au second plan l’objectif de long terme d’instaurer la paix au Moyen-Orient. 

Le 20 mai, alors que l’Autorité palestinienne venait de se déclarer « exonérée  de tous les accords et arrangements avec les Gouvernements américain et israélien » trois jours après la prestation de serment du second, les États-Unis appelaient les membres du Conseil à concentrer leurs efforts sur les moyens d’asseoir les parties à la table des négociations et non sur des déclarations qui, à leurs yeux, devenaient « un peu répétitives ».

Alors qu’on parlait de l’annonce officielle d’une annexion à compter du 1er juillet, le Secrétaire général, le 24 juin devant le Conseil, appelait le Gouvernement israélien à abandonner ses projets, sous peine de porter une atteinte irréversible au processus de paix et de déstabiliser plus encore la région.  Mis en œuvre, les projets israéliens détruiraient « toute perspective de paix à l’avenir », ajoutait le Secrétaire général de la Ligue des États arabes, qui appelait le Conseil à reconnaître l’urgence de la question et à « exercer son influence sur Israël afin que ce pays s’abstienne de toute mesure unilatérale ».  Le sentiment était partagé par la grande majorité des délégations.  Les États-Unis disaient « comprendre » les préoccupations mais appelaient à ne pas rejeter leur plan, qui n’était « pas une proposition à prendre ou à laisser » mais « une offre initiale, le début d’une conversation; pas sa fin ». 

L’annexion n’intervenait pas le 1er juillet, mais personne ne s’en réjouissait lors de la séance suivante, le 21 juillet.  Plutôt que de réaffirmer notre opposition à l’annexion, il faut « redémarrer la diplomatie », s’impatientait le Coordonnateur spécial.  Plusieurs membres du Conseil se félicitaient que la direction palestinienne ait annoncé sa disposition à reprendre les négociations avec Israël sous les auspices du Quatuor pour le Moyen-Orient, avec une participation internationale.   Chine et Tunisie appuyaient deux autres propositions palestiniennes: la convocation d’une conférence internationale de paix et la création d’un mécanisme multilatéral élargi pour la paix.  Les États-Unis déploraient qu’on discute de la manière de punir Israël plutôt que des moyens de s’engager en faveur de la paix et appelaient le Conseil à s’attaquer aux causes profondes du conflit et aux « agitateurs », en premier lieu le Hamas et, derrière lui, l’Iran.

L’annonce le 13 août des « Accords d’Abraham », signés le 15 septembre, suscitait lors des séances suivantes à la fois félicitations et circonspection. 

Le 25 août, M. Mladenov estimait que l’accord conclu pouvait offrir une nouvelle chance à la paix entre Israéliens et Palestiniens, du fait qu’il mettait fin, au moins temporairement, aux plans d’annexion par Israël de certaines parties de la Cisjordanie occupée.  Ce point de vue était largement partagé par les membres du Conseil, qui saluaient la normalisation des relations entre Israël et deux États arabes du Golfe.  Les États-Unis vantaient « l’avancée la plus importante vers la paix au Moyen-Orient depuis plus de 25 ans ».  Le fait que des nations arabes fassent la paix avec Israël ne change rien au besoin de paix des Palestiniens, ajoutaient-ils en invitant les Palestiniens à s’inspirer de l’accord entre les Émirats arabes unis et Israël pour faire de même. 

Le 29 septembre, M. Mladenov invitait les parties à redynamiser le processus de paix, à la faveur d’une série d’« évolutions positives », dont faisaient partie les « Accords d’Abraham », et malgré une détérioration sur le terrain illustrée par la poursuite de la colonisation et l’intensification des affrontements israélo-palestiniens.  Les États-Unis mettaient en avant la « diplomatie audacieuse » du Président Trump.  Si les membres du Conseil saluaient les développements régionaux, plusieurs ajoutaient que les accords conclus ne devaient pas occulter « l’impérieuse nécessité d’une résolution juste et durable de la question palestinienne », qui devrait aboutir, selon l’Afrique du Sud, à « une véritable solution à deux États; pas un seul État viable et un bantoustan ».

Le débat trimestriel du 26 octobre confirmait les positions, alors que la normalisation israélo-arabe venait de s’étendre au Soudan.  La plupart des membres du Conseil voyaient dans celle-ci une menace d’abandon de la position internationalement définie d’une solution à deux États et donc un défi à la crédibilité du Conseil.  D’autant que les autorisations de nouvelles constructions en Cisjordanie occupée qui venaient d’être données apparaissaient à la France comme la poursuite de la « dynamique d’annexion de facto » qu’Israël s’était engagé à suspendre.  Il en était de même le 18 novembre.

La séance du 21 décembre était dominée par les dernières recommandations de M. Mladenov avant son départ.  Il estimait « encore possible » la solution des deux États, « la solution qui puisse permettre aux Palestiniens et aux Israéliens de vivre dans la paix et la sécurité » et ce, malgré une situation sécuritaire jugée délétère et la poursuite des activités de colonisation.  Regrettant que la vision des Accords d’Oslo soit restée « inachevée », il répétait que le conflit ne pourrait être résolu que par des négociations directes entre les dirigeants des deux peuples, coordonnées par le Quatuor pour le Moyen-Orient, avec la participation des partenaires arabes et la médiation de l’ONU.  Les membres du Conseil saluaient le dévouement et les efforts de M. Mladenov au cours des cinq dernières années, tout en déplorant le manque de progrès dans l’application de la résolution 2334 (2016) et en se montrant préoccupés par la réalité sur le terrain, qui éloignait de plus en plus la possibilité de la solution des deux États.  Les États-Unis affirmaient que, grâce au « plan ambitieux » de l’Administration Trump, Israël s’était engagé à œuvrer à une telle solution à deux États.  La Fédération de Russie estimait que même en l’absence de progrès dans le processus de paix, au moins le rôle central de l’ONU avait-il été préservé.

Liban

- 1 séance publique: 28 août

- 1 résolution: 2539 (2020)

Voir aussi: Moyen-Orient, y compris la question palestinienne; Maintien de la paix et de la sécurité internationales

Le 28 août, le Conseil renouvelait une nouvelle fois pour un an le mandat de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).  À la suite du rapport du Secrétaire général que le Conseil avait demandé dans sa résolution 2485 (2019) pour évaluer l’adéquation des ressources de la FINUL à son mandat et présenter des options visant à en accroître l’efficacité, la résolution 2539 (2020) demandait également au Secrétaire général de présenter au Conseil dans les 60 jours les premiers éléments d’un plan détaillé pour les mettre en œuvre.  Par ailleurs, le texte autorisait la FINUL à prendre des « mesures temporaires spéciales pour aider le Liban et son peuple » à la suite des explosions survenues dans le port de Beyrouth le 4 août 2020, qui ont ravagé la capitale.  Le Secrétaire général était prié d’évaluer l’impact des explosions sur les capacités de la FINUL.

La situation au Liban était aussi abordée dans le cadre de plusieurs des séances consacrées à la « situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne », notamment lors du débat trimestriel des 21 et 22 janvier, 23 avril, 21 juillet et 26 octobre

Syrie

- 33 séances publiques: 10 janvier, 29 janvier (humanitaire), 29 janvier (politique), 6 février, 19 février, 27 février, 28 février, 30 mars, 29 avril (politique), 29 avril (humanitaire), 18 mai, 19 mai, 16 juin, 29 juin, 29 juin (FNUOD), 7 juillet, 8 juillet, 10 juillet, 11 juillet, 23 juillet, 29 juillet, 19 août, 27 août, 10 septembre, 16 septembre, 18 septembre, 5 octobre, 27 octobre, 5 novembre, 25 novembre, 11 décembre, 16 décembre, 18 décembre

- 4 résolutions: 2504 (2020), 2530 (2020), 2533 (2020), 2555 (2020)

Voir aussi: La situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne; Liban; Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Terrorisme

Avec 33 réunions, Golan compris, c’est une séance publique sur sept que le Conseil aura dédiée à la Syrie en 2020, sans compter les interventions consacrées au pays dans le cadre des débats trimestriels ouverts sur la « situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne », lors de l’exposé du 18 juin du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés ou encore lors du débat du 20 octobre sur la situation dans le golfe Persique.  À partir d’octobre, les séances mensuelles d’information sur les aspects politiques et humanitaires ont été regroupées.  La question des armes chimiques, qui avait été traitée en 2019 exclusivement sous forme de consultations bimestrielles à huis clos, a été de nouveau examinée en séances publiques mensuelles, houleuses, à partir de septembre. 

Le dossier syrien aura aussi été à l’origine de la majorité des projets de résolution rejetés en 2020: quatre sur sept, dont deux du fait de doubles vetos russo-chinois. 

Sur le plan humanitaire, l’année a été dominée par la question de l’acheminement de l’aide transfrontalière, marquée par la réduction de nombre des points de passage imposée par une Fédération de Russie intransigeante.

L’année 2019 s’était achevée sur l’incapacité du Conseil à s’entendre sur un projet de résolution permettant le renouvellement annuel de l’autorisation transfrontière des convois humanitaires ainsi que du mécanisme de surveillance prévu dans la résolution 2165 (2014).  Si ce mandat n’expirait, comme chaque année, que le 10 janvier 2020, c’était la première fois que son renouvellement n’était pas acquis en décembre de l’année précédente et faisait l’objet de votes de rejet (quatre en deux jours, les 19 et 20 décembre, dont deux doubles vetos).

Le 10 janvier, à quelques heures de l’échéance, le Conseil adoptait, dans la douleur, la résolution 2504 (2020).  Validé par 11 voix pour et 4 abstentions (Fédération de Russie et Chine ainsi que, pour des raisons opposées, États-Unis et Royaume-Uni), ce texte de compromis limitait le renouvellement de l’autorisation à six mois, contre un an habituellement, et réduisait de quatre à deux -Bab el-Salam et Bab el-Haoua- le nombre des points de passage permettant l’acheminement de l’assistance humanitaire transfrontière sous le contrôle du mécanisme de surveillance reconduit.  Les membres occidentaux du Conseil déploraient cette double réduction, ce dont affectait de s’étonner la Fédération de Russie, qui insistait sur le consentement de l’État hôte.  « Même si tout le monde autour de cette table est insatisfait, le compromis permet tout de même de sauver des millions de vies syriennes », faisait observer l’Indonésie.

Le premier examen mensuel de la situation humanitaire, le 29 janvier, donnait le ton de la plupart des séances de l’année: accusations réciproques de politisation de l’assistance humanitaire entre les membres occidentaux du Conseil et la Fédération de Russie appuyée par la Chine, et déploration par les responsables humanitaires d’une plus grande difficulté à faire parvenir l’aide, du fait de la réduction des points de passage transfrontaliers.  Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock, faisait aussi état d’une intensification des hostilités dans la zone d’Edleb.  La Fédération de Russie demandait une fois de plus au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) de coopérer avec les autorités syriennes « légitimes » de Damas. 

Après l’échec d’un nouveau cessez-le-feu parrainé par la Turquie et la Fédération de Russie le 12 janvier et l’intensification des combats autour d’Edleb, le Conseil se réunissait en urgence le 6 février à la demande des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni.  M. Lowcock rappelait les efforts humanitaires en cours pour répondre aux besoins de quelque trois millions de personnes dans la région.  L’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Geir Otto Pedersen, répétait que l’approche militaire ne résoudrait pas le problème et annonçait son intention de se rendre à Téhéran pour une réunion des garants du processus d’Astana (Fédération de Russie, Turquie et Iran).  Le Royaume-Uni voyait dans l’échec du cessez-le-feu celui desdits garants et rappelait qu’il appartenait aux Nations Unies de mener le processus de paix en Syrie.  La Fédération de Russie ironisait sur les réunions d’urgence du Conseil, affirmant qu’elles étaient généralement convoquées quand le Gouvernement syrien semblait prendre l’avantage militaire sur les « terroristes ». 

La résolution 2504 (2020) demandait au Secrétaire général de faire rapport au Conseil avant la fin du mois de février sur la faisabilité de voies alternatives au poste frontière de Yaroubiyé.  Le 27 février, la Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, Mme Ursula Mueller, présentait le rapport, qui rappelait notamment que « l’impératif humanitaire en République arabe syrienne n’avait pas changé » depuis 2014, que le Gouvernement syrien devrait faciliter le passage de cette aide à travers les lignes de conflit et qu’à défaut, le Conseil devrait « autoriser l’ONU et ses partenaires d’exécution à emprunter des points de passage supplémentaires ».  Face à la situation humanitaire catastrophique décrite par Mme Mueller, plusieurs membres du Conseil mettaient en cause l’attitude du Gouvernement syrien et de son « protecteur » russe, lequel demandait: « Alors que la Syrie ne fait pas obstacle à l’acheminement de l’aide, pourquoi ce problème n’est-il pas résolu? » 

Le 29 avril, malgré le répit apporté par un énième cessez-le-feu annoncé le 6 mars par la Fédération de Russie et la Turquie, M. Lowcock jugeait impossible de maintenir l’ampleur de l’assistance humanitaire en l’état actuel.  Alors même que la région enregistrait son premier cas confirmé de COVID-19, les États-Unis affirmaient qu’« étouffer les flux d’aide à ce moment périlleux échappe à toute logique ».  Mais pour la Syrie appuyée par la Fédération de Russie, ce qui échappait à toute logique, c’était le maintien des mesures coercitives unilatérales imposées au pays, qui privait 24 millions de Syriens de biens de première nécessité et empêchait le système de santé national d’accéder aux kits de dépistage et aux traitements nécessaires à la lutte contre la pandémie. 

Les réunions mensuelles suivantes étaient dominées par la question du renouvellement de la résolution 2165 (2014). 

Le 19 mai, M. Lowcock appelait le Conseil à ne pas reporter à la dernière minute ce renouvellement et à prolonger de 12 mois l’autorisation donnée le 10 janvier.  Le Royaume-Uni demandait la réouverture du poste frontière de Yaroubiyé d’urgence et pour aussi longtemps que la COVID-19 demeurerait une menace pour la Syrie.  La Fédération de Russie faisait valoir que les membres du Conseil s’étaient toujours accordés sur le statut « urgent mais temporaire » des mesures relatives aux points de passage transfrontière.  La Syrie appelait le Conseil à demander au Secrétaire général un rapport complet dans les 30 jours sur les conséquences « désastreuses » des mesures coercitives unilatérales sur le peuple syrien.

Le 29 juin, à 11 jours de l’expiration de la résolution 2504 (2020), la Belgique et l’Allemagne faisaient circuler un projet de résolution reconduisant l’autorisation des deux points de passage conservés en janvier et prévoyant la réouverture pour six mois de celui de Yaroubiyé.  La Fédération de Russie affirmait que le mécanisme frontalier était devenu un outil politique utilisé pour créer des divisions à l’intérieur de la Syrie, le jugeait incompatible avec le droit international et ajoutait qu’il n’avait en fait jamais fonctionné.  Elle accusait en outre l’ONU de rejeter des projets alternatifs de Damas.  La Syrie qualifiait la résolution 2504 (2020) de mesure « exceptionnelle et temporaire » prise au regard de circonstances « qui n’existent plus » et réclamait la levée des sanctions à son égard, appuyée sur ce point par l’Afrique du Sud, le Niger ou encore Saint-Vincent-et-les Grenadines.  Les États-Unis rétorquaient que les sanctions en question ne visaient ni les médicaments ni la nourriture, mais le « régime d’Assad ». 

Il faudrait au Conseil quatre jours et cinq projets de résolution successifs pour trouver un accord, le 11 juillet, soit quelques heures après l’échéance.  Tout allait tourner autour de trois questions: la durée du renouvellement de l’autorisation, le nombre des points de passage transfrontière autorisés et l’inclusion dans la future résolution d’une demande de rapport au Secrétaire général sur les conséquences des sanctions unilatérales imposées à la Syrie sur la situation humanitaire du pays.

Le 7 juillet, un projet révisé belgo-allemand prévoyant la reconduction pour 12 mois de l’autorisation des points de passage maintenus en janvier et demandant en outre au Secrétaire général de lui faire rapport, au plus tard à la fin du mois d’août 2020, sur l’impact de la pandémie sur les besoins d’aide humanitaire et sur l’acheminement de cette aide obtenait 13 voix mais se voyait opposer un double veto russo-chinois.

Le lendemain, la Fédération de Russie faisait mettre aux voix un projet de résolution visant à renouveler pour six mois seulement le mécanisme pour le seul point de passage de Bab el-Haoua, qui en outre demandait pour le 31 août un rapport du Secrétaire général sur « les effets directs et indirects qu’ont les mesures coercitives unilatérales imposées à la Syrie sur sa situation socioéconomique et l’acheminement de l’aide humanitaire […] et sur la coopération humanitaire entre le Gouvernement syrien et les autres États Membres ».  Le texte était rejeté, n’ayant reçu que 4 voix pour (Afrique du Sud, Chine, Fédération de Russie et Viet Nam), 7 contre (dont la France, le Royaume-Uni et les États-Unis) et 4 abstentions (Indonésie, Niger, Saint-Vincent-et-les Grenadines et Tunisie). 

Le 10 juillet, une nouvelle version du projet belgo-allemand, qui reprenait le projet rejeté le 7 en réduisant la durée de l’autorisation à six mois, se voyait opposer le même double veto russo-chinois.  Le même jour, un nouveau projet russe, qui portait à 12 mois le renouvellement de l’autorisation de passage pour le seul poste de Bab el-Haoua et maintenait la demande de rapport au Secrétaire général, était rejeté par un vote identique à celui du 8 juillet. 

Enfin, le 11 juillet, le Conseil adoptait par 13 voix pour et 3 abstentions (Chine, Fédération de Russie et République dominicaine) la résolution 2533 (2020).  Nettement plus court que les projets rejetés, le texte des deux « porte-plume humanitaires » réduisait au seul point de Bab el-Haoua le passage de l’aide humanitaire transfrontière, reconduite pour 12 mois comme dans le dernier projet russe, mais sans référence à un rapport sur les effets des sanctions.  Contrairement aux dispositions prévues pour les votes par correspondance, la présidence allemande laissait les délégations faire des commentaires après l’annonce du résultat, ce que la Fédération de Russie condamnait.  Belgique et Allemagne estimaient que la décision prise ne « reflétait pas les véritables besoins humanitaires sur le terrain » et qu’il s’agissait donc d’un « jour triste pour ce Conseil et surtout pour les Syriens », mais qu’il avait fallu accepter un compromis dans l’intérêt des trois millions de personnes qui dépendaient de Bab el-Haoua.  Les membres permanents s’accusaient une nouvelle fois mutuellement d’hypocrisie. 

Les conséquences du vote du 11 juillet domineraient les séances des 29 juillet, 27 août et 16 septembre.  L’OCHA allait déplorer les difficultés opérationnelles et le renchérissement des coûts découlant de la fermeture de Bab el-Salam, tout en décrivant ses efforts pour faire passer l’aide humanitaire.  Les pays occidentaux dénonceraient l’attitude intransigeante de la Fédération de Russie et de la Chine.  La première ferait valoir que les « prévisions catastrophistes » des pays opposés à la réduction des points de passage étaient démenties par les faits.  La seconde stigmatiserait l’approche « inhumaine et hypocrite » des pays appliquant des mesures coercitives contre la Syrie, les accusant de « donner l’aide d’une main et d’essayer d’étrangler le pays de l’autre ». 

À partir d’octobre, le Conseil traitait en une même séance les aspects politiques et humanitaires de la situation en Syrie.  Le 27 octobre, pour la première de ces séances conjointes, la présidence russe se félicitait d’un format qui, selon elle, permettait d’éviter la politisation habituelle des questions humanitaires par certains des membres du Conseil.  Mais le 16 décembre, plusieurs membres, dont les États-Unis et les deux « porte-plume humanitaires » viendraient dénoncer la fusion de ce qu’ils présentaient comme deux crises distinctes que le regroupement rendrait « moins visibles », tout en « banalisant » les souffrances du peuple syrien.

Le 25 novembre, l’OCHA continuait de juger insuffisante l’assistance humanitaire mise en place et en rendait responsable l’existence d’un seul point de passage transfrontière.  La Fédération de Russie affirmait que le Gouvernement syrien facilitait toujours davantage l’acheminement régulier de l’aide, y compris le long de la ligne de confrontation, et reprochait aux pays occidentaux de ne jamais mentionner les éléments d’opposition qui entravaient ces efforts par la violence.

Sur le plan politique, ce sont les réunions, et surtout les blocages, de la Commission constitutionnelle qui auront dominé l’année et les discussions du Conseil. 

Le 29 janvier, l’adjointe de l’Envoyé spécial Geir Otto Pedersen, Mme Khawla Matar, plaidait au Conseil pour un processus politique élargi visant un rétablissement graduel de la confiance entre les parties, après l’échec, fin novembre, de la deuxième session de la Commission constitutionnelle.  Les États-Unis et le Royaume-Uni rendaient le « régime syrien » responsable de ces retards.  La Fédération de Russie appelait à ne pas dramatiser ni désigner de coupables.  La Tunisie jugeait « naturelles » voire « saines » les divergences d’opinions au sein de la Commission, dès lors que les négociations se poursuivaient.  Désireuse d’éviter que le blocage de la Commission ne devienne une « distraction », la France soulignait la nécessité de progresser parallèlement dans la mise en œuvre de tous les éléments de la résolution 2254 (2015).  Parmi ceux-ci, le Niger citait la libération massive des détenus et l’identification des personnes disparues.  La Chine demandait que le processus politique en Syrie ne soit pas « parasité » par des ingérences extérieures.

Deux semaines après la réunion d’urgence du 6 février, M. Pedersen devait reconnaître, le 19 février, qu’il n’y avait eu aucun progrès, ni sur la violence, ni sur le processus politique.  Plusieurs membres du Conseil appelaient à un « sursaut » et ajoutaient que, face à l’incapacité des « garants d’Astana » à faire taire les armes, l’ONU devait reprendre la main.  La France réclamait à M. Pedersen des propositions concrètes.  La Fédération de Russie répondait qu’elle travaillait avec la Turquie et l’Iran pour aider les Syriens à aller de l’avant, y compris dans le cadre de la Commission constitutionnelle.  Imposer des solutions de l’extérieur serait contraire au principe de l’appropriation nationale du processus politique sur lequel « nous nous sommes tous entendus », ajoutait-elle. 

Le 27 février, 33 soldats turcs étaient tués lors de frappes aériennes syriennes.  La Turquie ripostait, tuant plusieurs dizaines de soldats syriens.  Le 28 février, le Conseil se réunissait en urgence et le Secrétaire général y exprimait sa préoccupation face à un risque d’escalade hors de tout contrôle.  Les États-Unis voyaient dans ces graves incidents « le dernier clou du cercueil d’Astana », exigeaient un cessez-le-feu « immédiat, durable et vérifiable » et demandaient à M. Guterres de faire tout son possible pour l’obtenir, conformément à la résolution 2254 (2015).  La Fédération de Russie assurait de sa volonté d’apaiser les tensions mais ajoutait que, face aux attaques des « terroristes » établis dans la zone d’Edleb, le Gouvernement syrien avait le droit de réagir et de faire respecter sa souveraineté.  La Chine ajoutait que le problème d’Edleb tenait au contrôle de la région par des « forces terroristes » et appelait le Conseil à conserver « son impartialité ».  La Turquie demandait au Conseil de dire que « trop, c’est trop ».

C’est toutefois de nouveau la Turquie et la Fédération de Russie qui convenaient, le 5 mars, d’un cessez-le-feu dans le nord-ouest de la Syrie, confirmé sept jours plus tard par un accord.

L’accord tenait et, le 29 avril, M. Pedersen informait le Conseil de la possibilité « d’efforts communs » de la part des acteurs clefs en Syrie afin de préserver le calme « significatif » qui régnait depuis début mars.  Conscient du « risque constant » d’escalade, il demandait toutefois un cessez-le-feu dans tout le pays, tout comme la France, qui réclamait un « processus politique crédible », accusant le « régime » syrien de continuer de bloquer le travail de la Commission constitutionnelle alors que l’opposition faisait montre de souplesse.  L’Envoyé spécial se félicitait de l’accord trouvé sur l’ordre du jour de la prochaine session de la Commission. 

Mais, de reports en sessions infructueuses de la Commission, l’impatience gagnait les membres du Conseil au cours des séances du 18 mai, du 16 juin, du 23 juillet et du 19 août.  M. Pedersen voulait croire que la Commission pouvait encore « ouvrir une porte » vers une solution politique si elle travaillait « avec sérieux » mais soulignait à chaque fois la nécessité d’une « diplomatie constructive » de la part des « principaux acteurs internationaux qui ont de l’influence sur les parties ».  Dès mai, la France demandait à M. Pedersen de « faire savoir clairement au Conseil de sécurité quand il estimera que toute négociation n’est plus possible pour faire avancer la Commission constitutionnelle » et les pays occidentaux répétaient à l’envi qu’il n’était pas question de contribuer au financement de la reconstruction de la Syrie tant qu’une solution politique ne serait pas trouvée.  Ils qualifiaient en outre de « simulacre » les élections législatives organisées en Syrie le 19 juillet, lors desquelles près de la moitié de la population syrienne, dont six millions de réfugiés, n’avait pas pu voter. 

Si la Fédération de Russie saluait, le 18 septembre,« l’approche constructive » des parties syriennes lors de la troisième session de la Commission, fin août, ses résultats n’impressionnaient ni les États-Unis, qui regrettaient une « occasion manquée de faire avancer le processus politique », ni la France, qui constatait un « bilan nul » et dénonçait les « tactiques de procrastination » de Damas, accusé de chercher à gagner du temps en vue de l’élection présidentielle en 2021. 

Les membres du Conseil réitéraient leurs arguments lors de la première séance dédiée conjointement à la situation sur les plans politique et humanitaire, le 27 octobre.  M. Pedersen notait qu’aux yeux de nombreux acteurs, la phase militaire du conflit syrien était en train de s’achever, avec des lignes de front qui n’avaient plus bougé depuis mars et un nombre de civils tués à son niveau le plus bas depuis 2011.  Il appelait donc chacun à se concentrer sur le processus politique.  Ne donnons pas l’impression que la situation est en train de se normaliser, répliquait l’Allemagne. 

Le volet politique de la séance du 25 novembre n’apportait guère que la confirmation de la tenue d’une quatrième session de la Commission constitutionnelle du 30 novembre au 4 décembre, à Genève.  Plusieurs membres du Conseil affichaient leur scepticisme, comme l’Allemagne, qui jugeait ses efforts « largement futiles » du fait de l’obstruction « systématique et persistante du régime syrien ».  Outre la levée des sanctions, la Fédération de Russie demandait aux États-Unis de « lever leur présence militaire illégale dans certains territoires du nord-ouest », et réclamait que cessent les « plans sournois » visant à plonger la Syrie dans l’instabilité et le chaos.

Le 16 décembre, la Fédération de Russie, satisfaite des travaux de la quatrième session de la Commission constitutionnelle, y voyait « l’unique instance légitime » dans laquelle tous les Syriens pouvaient débattre de l’avenir de leur pays et insinuait que le dialogue politique aurait pu démarrer un an plus tôt s’il n’y avait pas eu tant d’interférences étrangères.  Les membres occidentaux réaffirmaient leur attachement au processus politique et rétorquaient que les mesures à prendre pour parvenir à une solution politique étaient bien connues et avaient été définies il y a cinq ans dans la résolution 2254 (2015) adoptée à l’unanimité.  Ils rejetaient de nouveau tout financement de la reconstruction de la Syrie avant l’aboutissement du processus politique, accusaient le « régime de Damas » de préparer « une fausse élection présidentielle » en 2021, rappelaient que les sanctions ne visaient que ledit « régime » et accusaient la Fédération de Russie et la Chine d’avoir « forcé » le Conseil à réduire de moitié l’accès humanitaire transfrontalier de l’ONU en Syrie au milieu d’une pandémie.

Le volet « armes chimiques » du dossier syrien a été traité en séances publiques à quatre reprises à partir de septembre, avec la participation de la Haute-Représentante des Nations Unies pour les affaires de désarmement, Mme Izumi Nakamitsu.

Le 10 septembre, la première séance publique du Conseil consacrée aux armes chimiques depuis novembre 2018 se tenait à la demande de la Fédération de Russie, qui déclarait alors n’avoir « rien à cacher ».  Mme Nakamitsu expliquait que la Syrie n’avait toujours pas fourni toutes les explications techniques demandées pour lever les doutes sur son renoncement complet à son programme d’armes chimiques, sept ans après les attaques chimiques de la Ghouta et l’adoption de la résolution 2118 (2013).  Elle rappelait que, le 20 juillet, le Conseil exécutif de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) avait donné 90 jours à la Syrie pour s’expliquer sur l’état exact de ce programme.  La Fédération de Russie qualifiait la décision du Conseil exécutif d’« antisyrienne » et accusait les pays occidentaux de se fonder sur « une série d’épisodes douteux » pour tenter de « délégitimer le Gouvernement syrien et justifier l’ingérence militaire », tout en ajoutant que Damas coopérait pleinement avec l’OIAC.  États-Unis, Royaume-Uni et France insistaient sur l’utilisation « bien documentée » d’armes chimiques à plusieurs reprises par le « régime d’Assad ».  Le Royaume-Uni appelait le Conseil à prendre des mesures face à cette menace pour la paix et la sécurité internationales.  D’autres membres du Conseil, comme l’Afrique du Sud, rappelaient que les États parties à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques devaient être tenus responsables de toute violation de leurs obligations « sur la base de preuves crédibles et irréfutables ».

Le 5 octobre, deux jours avant l’échéance fixée par le Conseil exécutif de l’OIAC, la première séance sur la Syrie que le Conseil tenait en présentiel depuis fin février donnait lieu à de nouveaux échanges acerbes entre les mêmes États, encore alimentés par le souhait de la présidence russe de faire intervenir un ancien Directeur général de l’OIAC, M. José Bustani, ce que refusaient les pays occidentaux au motif qu’ayant quitté ses fonctions depuis 2002, il n’avait pas compétence pour traiter de la question abordée.  Le représentant russe ayant intégré la déclaration prévue de M. Bustani à son discours, une partie de la réunion était transformée en échanges de reproches et en déplorations face à l’image que le Conseil donnait de lui-même.  Sur le fond, Mme Nakamitsu informait le Conseil que la Syrie n’avait pas fourni d’informations supplémentaires depuis septembre.  La France en concluait que l’exposé de la Haute-Représentante démontrait, « s’il en était encore besoin, que le régime syrien continue de se soustraire à ses obligations internationales ». 

Le 5 novembre, Mme Nakamitsu déclarait au Conseil qu’« en raison de lacunes, d’incohérences et de contradictions », le Secrétariat technique de l’OIAC estimait que la déclaration fournie par la Syrie « ne pouvait être considérée comme exacte et exhaustive selon les termes de la Convention sur les armes chimiques ».  Elle ajoutait que, d’après le rapport du Directeur général de l’OIAC du 14 octobre, la Syrie ne s’était pas expliquée dans les 90 jours comme exigé par le Conseil exécutif de l’organisation.  « Rien ne justifie l’utilisation d’armes chimiques […], rien ne peut excuser un acte inexcusable et les responsables doivent être identifiés et les responsabilités établies », ajoutait Mme Nakamitsu qui appelait le Conseil à « faire preuve d’unité sur cette question ».  En vain, puisque la Fédération de Russie jugeait « douteux » et « subjectif » le rapport du Directeur général de l’OIAC tandis que les États-Unis traitaient ce pays et la Chine de « facilitateurs d’Assad ».

Le 11 décembre, Mme Nakamitsu répétait sa position.  Le Directeur général de l’OIAC, Fernando Arias, qui participait à la séance, ajoutait que la Syrie ne s’était conformée à aucune des exigences avancées par son organisation.  Il revenait également sur l’affaire de l’empoisonnement de l’opposant politique russe Alexei Navalny par agent neurotoxique, rappelait qu’un tel acte constituait une utilisation d’arme chimique et disait toujours attendre des éléments de la Fédération de Russie afin de prévoir une visite d’assistance technique dans ce pays.  La Russie répondait en accusant les pays occidentaux d’instrumentaliser l’OIAC pour renverser le Gouvernement syrien et répétait que la Syrie s’était débarrassée de son stock d’armes chimiques dès son adhésion à l’OIAC.  Le Royaume-Uni accusait la Fédération de Russie d’avoir intensifié ses attaques contre l’OIAC depuis « l’affaire de Salisbury » en 2018 et l’Allemagne, soutenue par les États-Unis, exhortait les membres du Conseil à ne pas succomber à la « guerre d’usure » livrée contre l’OIAC et à la défendre.

Enfin, à propos du Golan, le Conseil, par ses résolutions 2530(2020) et 2555 (2020), adoptées respectivement le 29 juin et le 18 décembre, renouvelait par deux fois pour six mois, la seconde fois jusqu’au 30 juin 2021, le mandat de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD)

Iraq

- 8 séances publiques: 3 mars, 12 mai, 29 mai, 15 juin, 26 août, 18 septembre, 24 novembre, 10 décembre

- 2 résolutions: 2522 (2020), 2544 (2020)

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Terrorisme

La Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), dirigée par la Représentante spéciale Jeanine Hennis-Plasschaert, a été reconduite pour un an avec le même mandat.  Après plusieurs mois d’agitation, l’Iraq retrouvait en mars un premier ministre et en mai, un gouvernement qui affichait un programme ambitieux, y compris quant à la reprise du contrôle de sa souveraineté et de son intégrité territoriale, ne voulant plus être « un champ de bataille des conflits régionaux ».  À chacune des quatre réunions consacrées à l’Iraq, le Conseil était saisi, outre le rapport principal, d’un second rapport du Secrétaire général concernant « le rapatriement et le retour de tous les Koweïtiens et nationaux d’États tiers portés disparus, ou la restitution de leurs dépouilles », un dossier qui progressait, avec en particulier de nouvelles exhumations à Samaoua, en janvier. 

Le 3 mars, la Chef de la MANUI décrivait au Conseil une situation politique confuse qui n’incitait pas à l’optimisme, marquée par l’absence de gouvernement depuis novembre, cinq mois de manifestations ayant fait de nombreux morts et blessés et une corruption décrite comme peut-être la plus grande source de dysfonctionnement dans le pays.  S’y ajoutait une reprise des activités de Daech dans certaines régions, qui inquiétait les membres du Conseil.  Mme Hennis-Plasschaert trouvait toutefois des raisons d’espérer dans l’unité du peuple et sa détermination à forger un avenir juste et prospère, dans une nation souveraine qui refusait d’être le champ de bataille de conflits qui ne sont pas les siens et dans la richesse en ressources du pays.  Plusieurs membres du Conseil plaidaient pour qu’il soit mis fin à l’impasse politique.  Les États-Unis s’engageaient à utiliser davantage tous les outils nationaux disponibles pour promouvoir la responsabilisation.  Après l’assassinat du général iranien Qassem Soleimani à Bagdad et plusieurs attaques iraniennes contre des bases américaines en Iraq, Chine et Fédération de Russie mettaient en garde contre toute tentative de faire du pays une « arène pour régler des comptes régionaux » et le représentant de l’Iraq rappelait qu’il avait déjà adressé quatre lettres à l’ONU pour condamner de telles attaques, qui portent atteinte à la souveraineté iraquienne. 

Le 12 mai, la Représentante spéciale affirmait qu’on ne « saurait trop insister sur l’ampleur des défis » auxquels était confronté l’Iraq.  La liste desdits défis s’allongeait avec la pandémie de COVID-19 et la chute spectaculaire du prix du pétrole.  En revanche, la Chef de la MANUI et les membres du Conseil pouvaient se féliciter de la formation, une semaine plus tôt, d’un nouveau gouvernement.  Le représentant de l’Iraq précisait au Conseil que, pour mettre en œuvre le programme gouvernemental, certaines étapes préalables devaient être franchies.  Il citait parmi elles la préservation et le respect de la souveraineté du pays et la fin de l’ingérence des puissances étrangères qui « projettent leurs conflits et leurs rivalités en Iraq » ou « utilisent le sol iraquien comme base arrière pour attaquer d’autres pays ». 

La reconduction dans les mêmes termes du mandat de la MANUI ne posait pas de difficulté et, le 29 mai, le Conseil le prorogeait à l’unanimité jusqu’au 31 mai 2021 par sa résolution 2522 (2020).

Le 26 août, la Chef de la MANUI voyait dans les premières mesures prises par le Gouvernement un mouvement vers une plus grande redevabilité, un appui plus robuste à la liberté d’expression et de réunion et un engagement concret en faveur de la justice.  Les membres du Conseil saluaient la décision d’organiser des élections législatives anticipées le 6 juin 2021, mais la Représentante spéciale mettait en avant les nombreuses questions encore à traiter et s’impatientait par ailleurs de l’absence de progrès dans les relations entre le Gouvernement central et celui du Kurdistan iraquien.  Le représentant de l’Iraq appelait les préalables énoncés en mai et indiquait que son pays avait engagé avec les États-Unis un dialogue stratégique sur l’avenir de la présence des troupes américaines.  Les États-Unis se disaient déterminés à aider l’Iraq à se libérer de l’ingérence étrangère, en citant « l’influence et les activités malveillantes de l’Iran, premier commanditaire du terrorisme au monde », quand l’Iraq et la France mentionnaient aussi les incursions de l’armée turque au Kurdistan iraquien.  Alors que l’Indonésie préparait par ailleurs un projet de résolution sur les combattants terroristes étrangers et leurs familles, l’Iraq saluait les efforts de rapatriement des membres de leurs familles et appelait les États à rapatrier leurs ressortissants non condamnés. 

Le 24 novembre, la Représentante spéciale saluait les efforts des autorités iraquiennes pour préparer les élections législatives du 6 juin 2021.  Elle expliquait l’assistance technique apportée par la MANUI pour conseiller et prêter son concours aux autorités à cette fin, tout en insistant sur le fait que le scrutin devait être organisé « par et pour les Iraquiens ».  Les membres du Conseil insistaient aussi sur la lutte contre le terrorisme, qui devait rester une priorité.  « Le combat contre Daech n’étant pas terminé », la France jugeait indispensable la poursuite de l’appui militaire de la coalition internationale aux forces iraquiennes.  La Chine et la Fédération de Russie souhaitaient une coordination des différents acteurs dans le respect de la souveraineté du pays. 

Par ailleurs, le Conseil a examiné à deux reprises les progrès de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes (UNITAD), créée en 2017, et dont le mandat a été prorogé à l’unanimité pour un an le 18 septembre, par la résolution 2544 (2020).

Le 15 juin, le Chef de l’UNITAD, M. Karim Asad Ahmad Khan, faisait état de progrès importants dans l’identification et la collecte de nouvelles sources d’éléments de preuve grâce à l’expertise et la technologie de l’Équipe d’enquêteurs et à son étroite collaboration avec les autorités nationales et locales d’Iraq.  Il se félicitait en outre de l’adoption en mars d’une « Déclaration confessionnelle relative aux victimes de Daech » dans laquelle les dirigeants de toutes les grandes confessions d’Iraq manifestaient leur engagement à soutenir l’UNITAD. 

Le 10 décembre, M. Khan citait de nouveaux progrès et se disait encouragé par les efforts du Parlement iraquien pour faire adopter une législation qui permettrait de poursuivre les crimes de Daech en tant que crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide, ce dont se félicitaient les États-Unis et la France.  La Fédération de Russie s’étonnait néanmoins de voir « d’autres pays » que l’Iraq utiliser des éléments de preuve recueillis par l’UNITAD mais non encore transmis aux autorités iraquiennes et l’Iraq rappelait que toute utilisation d’éléments de preuve recueillis sur son sol ne devait se faire qu’avec l’accord et du Gouvernement et de la justice iraquienne. 

Yémen

- 12 séances publiques: 13 janvier, 16 janvier, 18 février, 25 février, 12 mars, 16 avril, 14 mai, 14 juillet, 28 juillet, 15 septembre, 15 octobre, 11 novembre

- 3 résolutions: 2505 (2020), 2511 (2020), 2534 (2020)

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; La situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne; Organes subsidiaires

Le Conseil a reconduit par deux fois la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH) –l’Accord de Stockholm, de décembre 2018- dirigée par l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Martin Griffiths.  La situation sur place a alterné périodes d’espoirs et rechutes dans la violence.  Le pays est resté l’objet de la plus grosse opération humanitaire au monde mais l’accès humanitaire a souvent été entravé, notamment par les houtistes.  Les États-Unis n’ont cessé d’accuser l’Iran de fournir des armes à ces derniers en violation de l’embargo; la Fédération de Russie n’a cessé de demander de ne pas pointer du doigt un acteur régional susceptible de contribuer à la solution au conflit. 

Après une première prorogation, de six mois, de la MINUAAH le 13 janvier par la résolution 2505 (2020), l’Envoyé spécial parlait le 16 janvier des dernières semaines écoulées comme de « l’une des périodes les plus calmes du conflit » et se félicitait que le pays ait su échapper à la récente crise régionale.  Il anticipait le démarrage dans un proche avenir de consultations politiques entre les parties, indispensables à la désescalade militaire alors en cours.  « Aucun d’entre nous ne devrait être satisfait » de l’état de mise en œuvre de l’Accord de Stockholm, ajoutait-il toutefois.  L’OCHA dénonçait le maintien de sérieuses entraves à l’accès humanitaire dans le nord. 

La violence reprenait rapidement le dessus.  « Nous sommes témoins au Yémen de ce que nous redoutions de longue date », déclarait au Conseil M. Griffiths le 18 février, qui disait craindre que la recrudescence des opérations militaires d’envergure de part et d’autre ne se traduise par « des revers et des conséquences humanitaires encore plus graves pour la population ».  Le Coordonnateur des secours d’urgence, Mark Lowcock, rappelait qu’il appelait depuis « des mois » à un cessez-le-feu national.  Les membres du Conseil demandaient tous la levée des obstacles à l’acheminement de l’aide humanitaire mais se divisaient quant aux causes de la détérioration de la situation sur le terrain.  Les États-Unis accusaient l’Iran d’ingérence mais la Fédération de Russie jugeait « dangereux et improductif d’inciter à la haine » contre ce pays.  Le Conseil entendait par ailleurs la Présidente du Comité des sanctions sur le Yémen.

Le 25 février, le Conseil reconduisait pour un an les sanctions par sa résolution 2511 (2020), marquée par les abstentions de la Fédération de Russie et de la Chine.  La première jugeait que la priorité du Conseil devrait être de rassembler autour d’un consensus pour stabiliser la région et non de mettre l’accent sur l’isolement et les sanctions; la seconde jugeait trop large le mandat du Groupe d’experts reconduit par le même texte. 

Le 12 mars, l’Envoyé spécial pouvait présenter au Conseil quelques mesures de renforcement de la confiance prises de part et d’autre, en particulier un accord conclu en février pour un échange de prisonniers, mais il ajoutait qu’il existait « une limite à ce qui peut être atteint en l’absence de processus politique ».  Il souhaitait donc la relance des discussions.  L’OCHA jugeait « intenables » les restrictions entravant l’accès humanitaire dans le nord du pays. 

Le 16 avril MM. Griffiths et Lowcock voyaient paradoxalement dans la pandémie « une chance de ramener la paix ».  « Le Yémen ne peut pas faire face à deux fronts en même temps: la guerre et la pandémie de COVID-19 », affirmait l’Envoyé spécial, qui se félicitait du cessez-le-feu unilatéral de deux semaines annoncé le 8 avril par la Coalition internationale emmenée par l’Arabie saoudite.  M. Griffiths informait le Conseil des propositions qu’il avait présentées aux deux parties et sur lesquelles il tentait d’obtenir une déclaration conjointe: un accord de cessez-le-feu national; des mesures humanitaires, avec notamment la libération des prisonniers et des détenus et des facilités de circulation permettant de lutter contre la pandémie; et la reprise urgente du processus politique. 

Le 14 mai, la majorité des membres du Conseil pouvaient saluer la prorogation du cessez-le-feu unilatéral de la Coalition, tout en exhortant les houthistes à faire de même.  M. Griffiths regrettait que des divergences subsistent sur son projet d’accord en trois points, en particulier certaines mesures économiques et humanitaires.  L’OCHA parlait d’un manque de 2 milliards de dollars pour couvrir les activités essentielles de juin à décembre. 

Le Conseil n’examinait pas la situation au Yémen en séance publique en juin mais le 14 juillet, c’est cette fois pour un an qu’il renouvelait le mandat de la MINUAAH par sa résolution 2534 (2020), la première qu’il adoptait lors d’une séance en personne depuis le 12 mars. 

Le 28 juillet, M. Griffiths décrivait une situation toujours bloquée et M. Lowcock décrivait une situation humanitaire dramatique, avec une perspective de retour de la famine.  La majorité des membres du Conseil demandaient une nouvelle fois la pleine application des accords de Stockholm entre le Gouvernement et les houtistes, et de Riyad, entre le Gouvernement et le Conseil du Sud, sous les auspices de l’ONU.  « Seul un cessez-le-feu à l’échelle nationale, conformément à la résolution 2532 (2020) et à l’appel du Secrétaire Général, permettra de lutter efficacement contre la pandémie de COVID-19 », déclarait la France. 

Une nouvelle reprise des combats faisait dire le 15 septembre à l’Envoyé spécial que le Yémen semblait s’être détourné de la voie de la paix.  Les parties doivent faire un choix, ajoutait-il: continuer sur la trajectoire actuelle de l’escalade de la violence et des souffrances humanitaires, ou faire les compromis nécessaires à la relance du processus politique et au règlement politique.  M. Griffiths rappelait qu’il leur avait présenté, la semaine précédente, un avant-projet de déclaration commune.  M. Lowcock agitait de nouveau le spectre de la famine et déplorait le faible niveau de financement -30%- de l’appel humanitaire pour le Yémen.  Il s’en prenait nommément à l’Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis et au Koweït, « pays qui ont une responsabilité particulière », qui n’avaient encore rien donné en 2020, et déplorait que certains fassent des promesses de dons et brisent ensuite les espoirs en ne les honorant pas. 

La séance du 15 octobre dressait un bilan mitigé.  « Le ciel yéménite a vu l’avion de l’espoir, ce matin » déclarait M. Griffiths en référence au processus de libération des prisonniers entamé le jour même dans le cadre d’un accord signé en Suisse le 27 septembre.  De son côté, M. Lowcock pouvait annoncer d’importants versements au Plan de réponse humanitaire.  En revanche, l’accès humanitaire restait toujours difficile dans plusieurs régions et le pays connaissait ses combats les plus intenses depuis la signature de l’Accord de Stockholm.  « Votre appui n’a jamais été aussi important », lançait M. Lowcock aux membres du Conseil. 

Le 11 novembre, l’Envoyé spécial exprimait, « au nom du peuple yéménite », sa « profonde frustration » devant l’absence d’accord sur un texte final de déclaration conjointe.  S’il reconnaissait une baisse d’intensité des attaques, il précisait qu’il était « un médiateur, et non un négociateur » et rappelait qu’il était nécessaire pour les parties impliquées dans un conflit de s’approprier la solution pour qu’elle soit viable.  « Les Yéménites ne sont pas affamés, on les affame », déclarait M. Lowcock qui, appuyé par le Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM) David Beasley, alertait de nouveau sur les risques de famine provoquée par « la combinaison toxique d’une flambée de violence, de l’aggravation de l’effondrement économique et monétaire, et de la COVID-19 ».  À la veille d’une conférence de donateurs, les dirigeants humanitaires demandaient 2,6 milliards de dollars pour financer un plan global pour 2021, dont « 1,9 milliard, au minimum, pour éviter une famine » l’an prochain.  Les membres du Conseil accueillaient les derniers développements politiques par des commentaires mitigés, se félicitant de la libération de prisonniers en octobre mais constatant l’impasse politique.  Beaucoup en profitaient pour rappeler leur propre contribution humanitaire. 

La séance publique prévue en décembre était transformée en séance de consultations à huis clos.

ASIE

Afghanistan

- 7 séances publiques: 10 mars, 31 mars, 25 juin, 3 septembre, 15 septembre, 17 décembre, 18 décembre

- 3 résolutions: 2513 (2020), 2543 (2020), 2557 (2020)

Voir aussi: Organes subsidiaires; Terrorisme

Ce fut, selon Deborah Lyons, la nouvelle Représentante spéciale du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), « une grande année » pour l’Afghanistan.  Commencée dans l’incertitude du résultat de l’élection présidentielle, contesté puis objet d’un compromis en mai, 2020 aura été marquée par l’accord de paix conclu le 29 février entre les États-Unis et les Taliban, qui a ouvert la voie à des négociations intra-afghanes entre ces mêmes Taliban et le Gouvernement afghan, lancées le 12 septembre à Doha, dont les perspectives restaient incertaines en fin d’année.  Le mandat de la MANUA a été renouvelé mi-septembre pour un an.  Les sanctions contre les Taliban ont été maintenues mais le Conseil a ouvert la voie en décembre à une possibilité de réexamen en fonction de l’évolution des pourparlers de Doha. 

Le 10 mars, le Conseil, dans sa résolution 2513 (2020), saluait « les considérables progrès » que représentaient l’Accord pour l’instauration de la paix en Afghanistan entre les États-Unis d’Amérique et les Taliban et la Déclaration conjointe de la République islamique d’Afghanistan et des États-Unis d’Amérique pour l’instauration de la paix en Afghanistan.  Il priait le Gouvernement afghan de « faire progresser le processus de paix, y compris en participant à des négociations entre Afghans » et lui demandait, ainsi qu’aux Taliban, de « s’atteler de bonne foi à des mesures de confiance supplémentaires destinées à créer des conditions propices à la prompte ouverture et au succès des négociations entre Afghans et à une paix durable ».  Concernant les sanctions visant notamment les Taliban, le Conseil se déclarait « prêt, dès le début des négociations entre Afghans, à envisager de rouvrir le dossier concernant le statut des personnes, groupes, entreprises ou entités inscrits sur la Liste établie et tenue à jour en application de la résolution 1988 (2011) », dans le souci de soutenir le processus de paix.  À l’image de la Chine, les membres du Conseil saluaient « un tournant de l’histoire de l’Afghanistan », tout en appelant à un retrait ordonné des forces étrangères, de manière à ne pas laisser un vide sécuritaire dont pourraient profiter les groupes terroristes étrangers, contre lesquels les États-Unis promettaient de soutenir le futur Gouvernement afghan, qu’ils souhaitaient inclusif et capable d’unifier le pays en donnant la priorité à la paix.

En effet, le 31 mars, dans les toutes nouvelles conditions de réunion imposées par la pandémie, le Conseil devait se pencher sur un autre problème: celui de la contestation du résultat de l’élection présidentielle du 28 septembre 2019.  Proclamés le 18 février, les résultats du premier tour donnaient la majorité absolue au Président sortant Ashraf Ghani, mais son principal adversaire, Abdullah Abdullah, revendiquait de son côté la victoire, comme cinq ans plus tôt et, le 9 mars, organisait sa propre cérémonie d’investiture parallèlement à celle du Président déclaré élu.  La question est de savoir si les dirigeants afghans peuvent se mettre d’accord pour engager des pourparlers substantiels avec les Taliban et parvenir à une paix durable, déclarait alors la Représentante spéciale adjointe de la MANUA, Mme Ingrid Hayden.  Elle avertissait que l’Afghanistan allait devoir prouver qu’il méritait toujours les investissements d’une communauté internationale accaparée par la lutte contre la pandémie et ses conséquences financières.  Les intervenants constataient que, pour leur part, les Taliban semblaient tenir leurs engagements en cessant leurs attaques contre les forces de la Coalition, tout en les poursuivant contre les forces régulières afghanes.

Nommée en mars, la nouvelle Chef de la MANUA se voulait « prudemment optimiste » le 25 juin, après l’accord politique conclu le 17 mai entre le Président Ghani et son vieil adversaire Abdullah Abdullah, placé à la tête du Haut Conseil pour la réconciliation nationale.  Mme Lyons annonçait pour juillet l’ouverture des pourparlers entre le Gouvernement afghan et les Taliban, prévus à Doha.  Plusieurs membres du Conseil s’en félicitaient tout en prédisant des pourparlers difficiles et longs.

Le 3 septembre, la Chef de la MANUA jugeait encore « profondément inquiétant » le niveau de violence sur le champ de bataille, tout en se réjouissant de la formation du Gouvernement.  Alors qu’approchait le début des négociations intra-afghanes, un peu retardées, Mme Lyons et les membres du Conseil insistaient sur le caractère essentiel de l’inclusion des femmes dans le processus et sur le respect de leurs droits dans tout le pays.  Belgique et Allemagne demandaient que la protection des droits des femmes et des filles reste au centre du mandat de la MANUA, que le Conseil s’apprêtait à renouveler.

La prorogation du mandat de la MANUA intervenait sans difficulté le 15 septembre.  La résolution 2543 (2020) reprenait le mandat antérieur, y ajoutant une référence aux efforts de la Mission pendant la pandémie.  Le Conseil s’y félicitait en outre de l’ouverture des négociations intra-afghanes à Doha trois jours plus tôt et engageait les parties à continuer de prendre des mesures de confiance et à y participer « de bonne foi en vue d’atteindre un cessez-le-feu permanent et global et un règlement politique inclusif visant à mettre fin au conflit en Afghanistan ».  « Une paix durable ne sera possible que grâce à un processus mené par et pour les Afghans, en intégrant les femmes », prévenait l’Allemagne, qui déplorait que « pas une seule femme » ne participe aux pourparlers du côté des Taliban.

Le 17 décembre, Mme Lyons dressait un premier bilan des pourparlers intra-afghans qui venaient d’annoncer une pause jusqu’à début janvier, mais s’inquiétait d’une violence incessante qui restait « un obstacle sérieux à la paix ».  Plusieurs des membres du Conseil, dont la France et l’Allemagne, s’interrogeaient sur la sincérité de l’engagement des Taliban et rappelaient que la participation pleine et entière des femmes était indispensable à la paix, tout comme la préservation des acquis démocratiques.  Les États-Unis jugeaient venu le temps pour tous les Afghans, Gouvernement et Taliban inclus, de présenter un « front uni » contre Daech, alors que la Fédération de Russie disait craindre que Daech et d’autres éléments terroristes se servent de la situation en Afghanistan pour intensifier leurs activités terroristes dans toute l’Asie centrale.  La présidence indonésienne du Comité des sanctions contre Daech et Al-Qaida qualifiait d’« encourageantes » les discussions de Doha et estimait que son Comité pourrait appuyer la création d’un environnement propice à une paix stable et durable.  Mais pour le Royaume-Uni, la levée des sanctions dépendait de l’arrêt des violences et de la dissociation des Taliban de tous les groupes terroristes. 

Le 18 décembre, le Conseil décidait de maintenir les sanctions et, par sa résolution 2557 (2020), reconduisait pour 12 mois « l’Équipe de surveillance » chargée de leur application.  Toutefois, afin de « faire en sorte que le régime de sanctions actuel concoure effectivement à l’action de promotion de la réconciliation menée par le Gouvernement afghan », le Conseil décidait d’« examiner activement » l’application de celles-ci « en stricte conformité avec la résolution 2513 (2020) » et « d’envisager d’y apporter des ajustements » afin d’appuyer la paix et la stabilité en Afghanistan.

AFRIQUE

Paix et sécurité en Afrique

- 4 séances publiques: 11 mars, 5 juin, 29 juin, 16 novembre

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/5

Voir aussi: Consolidation de la paix en Afrique de l’ouest; Opérations de paix des Nations Unies; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous régionales; Terrorisme; Mali; Libye; République démocratique du Congo, Soudan, Soudan du Sud, Somalie. 

Sous cette rubrique régionale généraliste, ce sont surtout des réunions sur le terrorisme en Afrique qui ont été tenues, à l’exception d’un débat en juin consacré aux différends liés au partage des eaux du Nil.

Le 11 mars, la dernière séance du Conseil avant la suspension forcée de ses travaux pour cause de COVID-19 était consacrée à un débat sur la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme en Afrique.  Les quelque 30 délégations participantes constataient avec inquiétude que le terrorisme gagnait des parties du continent jusqu’alors épargnées et faisait usage d’outils de plus en plus sophistiqués.  Beaucoup apportaient leur appui à la Force conjointe du G5 Sahel ainsi qu’à l’initiative de l’Union africaine « Faire taire les armes en Afrique d’ici à 2020 » et insistaient sur l’importance de la coopération multilatérale.  L’impératif de répondre en amont aux causes sous-jacentes du terrorisme en Afrique, notamment en appuyant le développement et l’emploi des jeunes, était aussi soulignée à plusieurs reprises.

Lors de cette séance, le Conseil adoptait une déclaration présidentielle par laquelle il préconisait un appui renforcé aux États africains dans la lutte contre le terrorisme et contre l’extrémisme violent pouvant y conduire, y compris par la mobilisation de ressources et de compétences plus prévisibles et durables. 

Le Conseil a tenu deux séances consacrées à la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S), un cadre institutionnel formé en 2014 par la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad. 

Le 5 juin, le Président du G5 Sahel, M. Ismail Ould Cheikh Ahmed, Ministre des affaires étrangères de la Mauritanie, venait vanter les succès de la Force conjointe face à « l’alliance diabolique des groupes terroristes et des narcotrafiquants » et demander un financement pérenne de celle-ci.  La France détaillait les mesures prises dans le cadre de la « Coalition pour le Sahel » qui venait d’être lancée au récent Sommet de Pau avec pour objectif militaire l’affaiblissement durable des mouvements terroristes et pour objectif politique le retour de l’État dans toutes les régions du Sahel.  Le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix Jean-Pierre Lacroix expliquait que l’appui apporté à la FC-G5S par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) ne pouvait être augmenté, sauf à modifier le mandat de la Mission, alors objet de difficiles négociations en vue de sa reconduction, le même mois.  Il réclamait lui aussi un appui global, financé par les contributions budgétaires des États Membres, qui permettrait à la Force conjointe de poursuivre une stratégie à long terme visant à son autonomie.  Au nom des « A3+1 », le Niger faisait la même demande.  Les États-Unis préféraient apporter une aide bilatérale.

Le 16 novembre, M. Lacroix venait présenter au Conseil un bilan positif des opérations militaires menées par la Force conjointe, ainsi que ses progrès en matière de respect des droits de l’homme.  Il mettait toutefois en garde contre les « implications désastreuses » pour le reste de la région de l’Afrique de l’Ouest si la situation sécuritaire du Sahel n’était pas correctement traitée.  Le Mali et les « A3+1 » mettaient également l’accent sur les « programmes structurants » destinés à lutter contre les causes profondes du terrorisme.  Le Secrétaire général adjoint rappelait que la résolution 2531 (2020) avait prévu une évaluation par le Secrétariat de l’appui apporté par la MINUSMA à la Force conjointe, qui serait présentée dans le deuxième rapport trimestriel de 2021 sur la MINUSMA. 

Le 29 juin, à la demande de l’Égypte, le Conseil se penchait sur l’état des négociations en cours entre ce pays, le Soudan et l’Éthiopie pour résoudre leurs différends relatifs à la construction du Grand barrage de la renaissance éthiopienne (GERD), un projet colossal remontant à 2011 dont la mise en eau devait commencer dans les semaines à venir et qui posait la question du partage des ressources des cours d’eau internationaux.  Le Ministre égyptien des affaires étrangères qualifiait le barrage de « menace d’une proportion potentiellement existentielle » pour son pays, tandis que l’Éthiopie le présentait, elle, comme une « nécessité existentielle ».

L’Éthiopie s’opposait en outre à l’examen de la question par le Conseil, d’une part parce que les négociations tripartites avec l’Égypte et le Soudan n’étaient pas terminées et d’autre part parce que l’Union africaine était saisie de la question, celle-ci ayant d’ailleurs, trois jours plus tôt, demandé au Conseil d’en « prendre note ».  L’Éthiopie jugeait ainsi regrettable que le Conseil ait ignoré les principes de complémentarité et de subsidiarité entre l’ONU et les organisations régionales, soutenue en cela par le Niger, par l’Afrique du Sud, qui demandait au Conseil de « respecter les efforts déployés au niveau du continent », par Saint-Vincent-et-les Grenadines, qui faisait confiance à la « sagesse collective de l’Afrique », et par la Fédération de Russie, favorable aux « solutions africaines aux problèmes africains ».  La plupart des autres membres du Conseil prenaient note des efforts de l’Union africaine, à l’image des États-Unis, sollicités comme facilitateurs.  Un projet de résolution préparé par l’Égypte, par lequel le Conseil aurait demandé aux parties concernées de s’abstenir de toute mesure unilatérale, et notamment de commencer à remplir le réservoir du barrage, tant qu’un accord n’aurait pas été conclu, n’avait pas de suite.  En juillet, l’Éthiopie annonçait que le remplissage du barrage avait commencé et que le niveau prévu pour la première année était atteint. 

Libye

- 12 séances publiques: 30 janvier, 11 février, 12 février, 5 mai, 19 mai, 5 juin, 8 juillet, 2 septembre, 15 septembre, 2 octobre, 10 novembre, 19 novembre

- 5 résolutions: 2509 (2020), 2510 (2020), 2526 (2020), 2542 (2020), 2546 (2020)

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales; Paix et sécurité en Afrique. 

Pour le pays, l’année fut riche en événements et rebondissements avant de s’achever sur une note d’espoir.  En janvier, une trêve conclue le 8 sous les auspices de la Fédération de Russie et de la Turquie était confirmée 11 jours plus tard par les parties réunies à la Conférence de Berlin, dont les conclusions allaient être entérinées par le Conseil.  La reprise des combats, la poursuite des violations de l’embargo sur les armes et les blocages amenaient l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Ghassan Salamé, à démissionner début mars, alors que le pays semblait s’enfoncer toujours plus dans une véritable « guerre par procuration » des puissances étrangères.  Mais en août, les principales parties libyennes au conflit lançaient un nouvel appel au cessez-le-feu, concrétisé à l’automne et suivi par la tenue à Tunis d’un forum de dialogue.  Entre-temps, le mandat de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) avait été renouvelé en novembre et son mandat modifié pour lui permettre d’appuyer toute forme de trêve qui serait convenue entre les parties.  Alors que le Conseil avait trouvé un accord pour que le successeur de Ghassan Salamé soit Nickolay Mladenov, celui-ci annonçait le 21 décembre qu’il renonçait à assumer ses fonctions à compter du 1er janvier. 

Le 30 janvier, M. Salamé faisait part au Conseil de son inquiétude face à la reprise des combats et aux multiples violations de l’embargo sur les armes, y compris par des participants à la récente Conférence de Berlin et en violation de l’esprit comme de la lettre de celle-ci.  L’Allemagne disait partager la colère de M. Salamé devant le « comportement cynique de certains États ».  La France demandait que cessent les ingérences étrangères et les appuis militaires et disait penser « en particulier à la Turquie ».  Elle appelait le Conseil à endosser rapidement les conclusions de la Conférence de Berlin par une résolution robuste apportant un soutien sans équivoque à la médiation onusienne en Libye.  Les membres africains du Conseil, dont deux sont voisins de la Libye, rappelaient les conséquences du conflit libyen sur le terrorisme et demandaient au Conseil de tenir compte des positions de l’Union africaine, dont le Comité spécial de haut niveau sur la Libye était réuni le jour même à Brazzaville, où se trouvait le Représentant spécial.

Le 11 février, le Conseil renouvelait pour un an l’embargo sur les armes décidées par sa résolution 1970 (2011), l’embargo sur les exportations de pétrole de la résolution 2146 (2014), les inspections en haute mer prévues par la résolution 2292 (2016) et les différentes sanctions associées.  La résolution 2509 (2020) était adoptée par 14 voix pour et l’abstention de la Fédération de Russie. 

Le lendemain, 12 février, le Conseil, par sa résolution 2510 (2020), entérinait les conclusions de la Conférence de Berlin.  Il priait le Secrétaire général de faire avancer le plus rapidement possible les tâches assignées à la MANUL et se félicitait de la nomination par les deux parties libyennes de leurs représentants à la Commission militaire mixte 5+5 mise en place.  La Fédération de Russie s’abstenait de nouveau, son représentant jugeant l’adoption de la résolution « précipitée » et lui reprochant de ne pas mentionner l’accord explicite des parties libyennes.  Pour lui, le Conseil aurait dû attendre les résultats du processus de consultations intralibyennes.  La Tunisie et le Niger se félicitaient au contraire d’un texte de nature à appuyer un cessez-le-feu permanent. 

Le 2 mars, M. Salamé, Envoyé spécial du Secrétaire général en Libye depuis juin 2017, annonçait sa démission.  La réunion du Conseil prévue le 10 mars était reportée et, à cause de la suspension des séances publiques du Conseil au début de la pandémie, celui-ci ne traitait de la Libye que le 26 mars, à huis clos.  Le bref communiqué publié par la présidence chinoise faisait état d’un hommage des membres du Conseil à M. Salamé, de leur appel à respecter l’embargo sur les armes et de leur inquiétude face à une « augmentation importante des hostilités sur le terrain ». 

Hormis quelques références à la Conférence de Berlin lors de la réunion du 5 mai dédiée à l’exposé de la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), il fallait attendre le 19 mai pour que le Conseil traite de nouveau publiquement de la situation en Libye, alors alarmante.  « La seule conclusion que nous pouvons tirer aujourd’hui en Libye est que cette guerre va s’intensifier, s’élargir et s’approfondir avec des conséquences dévastatrices pour le peuple libyen », prévenait la Représentante spéciale par intérim, Stéphanie Williams, qui mentionnait l’accumulation de matériels militaires de plus en plus sophistiqués fournis par des « donateurs étrangers » et le recrutement d’un nombre croissant de mercenaires par les forces du Gouvernement d’entente nationale et l’« Armée nationale libyenne » du général Khalifa Haftar.  « Ne laissez pas glisser la Libye », plaidait-elle.  L’Afrique du Sud dénonçait le mépris flagrant de l’embargo sur les armes comme des engagements pris à la Conférence de Berlin; le Niger s’alarmait de leurs conséquences pour les voisins immédiats de la Libye et l’ensemble de la sous-région.  La Tunisie appelait à axer tous les efforts sur la relance d’un processus politique inclusif dirigé par les Libyens eux-mêmes.  La France rappelait que l’Union européenne avait lancé le 1er avril une nouvelle opération, EUNAFOR MED IRINI, chargée de faire appliquer l’embargo. 

Le 5 juin, c’est à l’unanimité que le Conseil adoptait sa résolution 2526 (2020), qui reconduisait les autorisations d’inspection en haute mer initialement accordées par la résolution 2292 (2016).

Le 8 juillet, près de six mois après la Conférence de Berlin, la présidence allemande organisait un débat ministériel réunissant 33 participants pour la plus longue visioconférence publique du Conseil de l’année: plus de trois heures trente.  Le Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, Heiko Maas, exigeait que cessent les accords « passés dans les coulisses » par des acteurs étrangers désireux de « se ménager des sphères d’influence ».  La Libye n’a pas besoin d’être le théâtre de l’expression de la volonté de puissance de certains acteurs internationaux, ajoutait son homologue du Niger, pour qui ce niveau d’ingérence étrangère sans précédent venait saper les efforts en faveur d’un retour à un processus politique porté par les Libyens eux-mêmes.  Il rappelait aussi que les pays du G5 Sahel souffraient depuis près de 10 ans d’une instabilité croissante imputable en partie à situation libyenne, ce qui permettait à la Fédération de Russie de voir une nouvelle fois dans cette situation désastreuse le « résultat direct » de l’intervention militaire de l’OTAN en 2011.  Pour Moscou, si la mise en œuvre des résultats de la Conférence de Berlin avait échoué, c’était à cause du « péché originel » de ce texte, insuffisamment inclusif et qui n’avait pas obtenu l’assentiment de toutes les parties libyennes.  « Le temps n’est pas de notre côté », relevait le Secrétaire général António Guterres, qui concédait que la nomination toujours attendue d’un nouvel envoyé spécial faciliterait les efforts de la MANUL.  Il demandait au Conseil de l’aider à accélérer ce processus.

Le 2 septembre, Mme Williams invitait le Conseil à tirer profit de la « fragile fenêtre d’opportunité » ouverte par l’appel, le 21 août, des principaux responsables des deux parties libyennes au conflit, qui demandaient un cessez-le-feu, la levée du blocus pétrolier et la reprise des discussions politiques sous l’égide de l’ONU.  La France souhaitait que cette « étape positive » soit suivie d’un cessez-le-feu immédiat, du démantèlement des milices et de la reprise de la production pétrolière.  La Fédération de Russie appelait les parties à entamer au plus vite un dialogue national dans le cadre des mécanismes créés par la Conférence de Berlin.  Tous les membres du Conseil plaidaient pour que les forces étrangères se retirent du pays, mais l’Allemagne, présidente du Comité des sanctions sur la Libye, faisait observer que l’Union européenne restait « le seul acteur à mettre en œuvre l’embargo » sur les armes, et plaidait pour un engagement international plus crédible.  C’est dans ce sens que la France préconisait de donner à la MANUL les moyens de faire respecter efficacement l’embargo et d’accompagner le cessez-le-feu, appuyant ainsi les appels à « revigorer » la Mission lancés par le Royaume-Uni, pays porte-plume chargé de préparer le projet de résolution renouvelant le mandat de la Mission, dont l’échéance approchait. 

Celui-ci était renouvelé jusqu’au 15 septembre 2021 par la résolution 2542 (2020), adoptée le 15 septembre.  Le cœur du mandat de la MANUL restait le même mais le Conseil la chargeait en plus de « mener des activités de médiation et des missions de bons offices » et d’appuyer l’instauration et l’observation d’un cessez-le-feu, « une fois convenu par les parties libyennes ».  Le Conseil décidait par ailleurs de séparer la direction diplomatique de la Mission, confiée à un envoyé spécial que le Secrétaire général était prié de nommer « sans délai », de sa gestion quotidienne, dont serait chargé un coordonnateur.  Il demandait au Secrétaire général de soumettre la MANUL à un « examen stratégique indépendant » et de lui en rendre compte avant le 31 juillet 2021.  Fédération de Russie et Chine s’abstenaient.  La première estimait que le « principe fondamental » du consentement des parties libyennes n’était pas assez affirmé, la seconde jugeait qu’il restait dans le texte encore trop de références aux droits de l’homme et aux violences sexuelles. 

Le 19 novembre, les membres du Conseil pouvaient se réjouir des événements des deux mois écoulés, marqués par la signature le 23 octobre d’un cessez-le-feu national et la tenue, du 9 au 15 novembre, du Forum de dialogue intralibyen organisé à Tunis, qui avait permis de fixer au 24 décembre 2021 la date d’élections présidentielle et parlementaires.  « On entend maintenant en Libye davantage le langage de la paix que le langage de la guerre », se félicitait Mme Williams, qui se voulait optimiste tout en avertissant que les progrès n’en étaient qu’à leurs balbutiements.  Plusieurs des membres du Conseil disaient leur satisfaction de voir les Libyens reprendre en main leur destin.  C’était notamment le cas de la Fédération de Russie et de la France, laquelle demandait la mise en place d’un mécanisme de surveillance crédible et efficace des futures élections et réclamait du Secrétariat des options « réalistes et ambitieuses » à cette fin. 

Par ailleurs, à deux reprises, le 5 mai puis le 10 novembre, le Conseil entendait la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), Mme Fatou Bensouda, qui déplorait à nouveau que les mandats d’arrêt visant les trois suspects recherchés ne soient toujours pas exécutés, ni par la Libye, ni par l’Égypte, où réside l’un des suspects, Al-Tuhamy Khaled. 

En mai, la Libye reprochait à la Procureure l’absence de poursuites contre le général Haftar, qu’elle accusait de crimes contre l’humanité, et demandait à la CPI de travailler en coopération avec le Comité des sanctions du Conseil de sécurité et le Groupe d’experts pour identifier clairement tous les coupables.  Pour sa part, la Fédération de Russie accusait la CPI de ne gérer en Libye que ces trois affaires depuis neuf ans, en ignorant les dégâts causés par les bombardements de la Coalition internationale en 2013, ainsi que les actes des combattants de Daech. 

En novembre, alors que la CPI commençait à enquêter sur les responsabilités dans l’offensive menée en avril 2019 par les forces du général Haftar et des mercenaires, la Fédération de Russie allait jusqu’à suggérer que les poursuites de la CPI –qualifiée d’institution « biaisée, politisée et incompétente »- pourraient entraver le processus de paix en cours et que le principe de redevabilité n’était pas toujours la solution pour arriver à la paix.  Mme Bensouda réitérait l’engagement de la CPI de garantir aux victimes d’atrocités l’arrestation et le jugement des auteurs présumés de crimes graves relevant de sa compétence, indépendamment de tout cessez-le-feu ou d’un futur accord.  Plusieurs membres du Conseil en profitaient pour rappeler que la paix en Libye passait forcément par le respect de l’embargo sur les armes.  

Enfin, en marge du dossier libyen et sous la rubrique du « maintien de la paix et de la sécurité internationales », le Conseil renouvelait le 2 octobre, pour un an, par sa résolution 2546 (2020), l’autorisation donnée dans sa résolution 2240 (2015) aux États Membres d’inspecter les bateaux naviguant en haute mer au large des côtes libyennes s’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner qu’ils sont utilisés pour le trafic de migrants ou la traite d’êtres humains « ayant le territoire libyen et le large des côtes libyennes comme destination, zone de transit ou point de départ ». 

Sahara occidental

- 1 séance publique: 30 octobre

- 1 résolution: 2548(2020)

Le 30 octobre, le Conseil renouvelait une nouvelle fois, pour un an, le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un referendum au Sahara occidental (MINURSO).  Comme les trois années précédentes, le texte ne pouvait être adopté à l’unanimité, la Fédération de Russie et l’Afrique du Sud s’étant abstenues.  Le texte de la résolution 2548 (2020) était, mutatis mutandis, identique à celui de la résolution 2494 (2019) adoptée un an plus tôt, et à l’exception d’un paragraphe introductif par lequel le Conseil disait « attendre avec intérêt la nomination d’un nouvel Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, dans les meilleurs délais », le précédent, Horst Köhler, ayant quitté ses fonctions depuis mai 2019.

Mi-novembre, après un mouvement de l’armée marocaine, le Front Polisario annonçait la rupture du cessez-le-feu vieux de 30 ans.  Le 13 décembre, les États-Unis reconnaissaient la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental.  Le 21 décembre, le Conseil se réunissait sur le sujet à la demande de l’Allemagne, mais à huis clos. 

Consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest

- 4 séances publiques: 8 janvier, 11 février, 9 juillet, 28 juillet

- 2 déclarations présidentielles: PRST/2020/5, PRST/2020/7

Voir aussi: Paix et sécurité en Afrique; Afrique centrale; Consolidation et pérennisation de la paix; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous régionales; Terrorisme; Guinée-Bissau; Mali

Dirigé par le Représentant spécial du Secrétaire général Mohamed Ibn Chambas, le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) a commencé d’assumer une partie des activités dévolues au Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS), appelé à fermer le 31 décembre.  Face à l’insécurité au Sahel, M. Chambas n’a cessé, lors de ses interventions semestrielles, de prôner une « approche transversale » pour soutenir plus efficacement les différents pays de la région.

Le 8 janvier, M. Chambas présentait au Conseil les progrès accomplis par son Bureau dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.  Après une série d’attaques terroristes sanglantes au Niger et au Burkina Faso, il plaidait pour un soutien effectif aux pays de la région dans leur lutte contre le terrorisme et se félicitait de la récente adoption par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) d’un plan d’action 2020-2024 pour éradiquer le terrorisme dans la sous-région, également salué par de nombreux membres du Conseil.  La Fédération de Russie invitait à ne pas oublier les menaces de déstabilisation pesant sur les États du golfe de Guinée et rappelait que pour rétablir la paix au Sahel, il faudrait d’abord stabiliser la Libye en proie au chaos du fait des « activités aventuristes » de certains pays occidentaux.  La France souhaitait un rôle de coordination accru pour l’UNOWAS dans une approche combinant sécurité et développement.

Le 11 février, le Conseil adoptait une déclaration présidentielle dans laquelle il demandait à l’UNOWAS de renforcer les réponses intégrées aux difficultés auxquelles la région fait face afin d’améliorer la coordination et l’efficacité de la réponse internationale.  Il rappelait que les activités de médiation du Bureau exigeaient une appropriation nationale, le consentement des parties au différend ou au conflit visé et le respect de la souveraineté nationale.  Il se félicitait des initiatives des États de la région pour combattre l’insécurité et appelait par ailleurs au respect des échéances électorales prévues dans plusieurs pays.

Le 9 juillet, M. Chambas dressait un tableau sombre de la situation au Sahel et dans la région du lac Tchad, où terrorisme, crime organisé et violences intercommunautaires semblaient de plus en plus imbriqués.  Il souhaitait voir l’ONU appuyer le plan d’action quinquennal de la CEDEAO.  Il rappelait en outre que cinq élections présidentielles à fort enjeu devaient se tenir avant la fin de l’année au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Ghana, en Guinée et au Niger, qui seraient l’occasion de consolider la démocratie dans ces pays mais risquaient aussi d’être « des foyers majeurs de crise ».  Enfin, il notait que les efforts de lutte contre la pandémie, qui avait ralenti mais pas stoppé les processus pré-électoraux, avaient fini par faire consensus dans la plupart des pays malgré des critiques concernant des atteintes aux droits de l’homme.

Dans une nouvelle déclaration présidentielle, adoptée le 28 juillet, le Conseil apportait son plein soutien à l’UNOWAS et à son chef pour ses activités en cours, y compris le soutien du Bureau à la coopération des États dans leur lutte contre la pandémie.  Dix jours après le coup d’État au Mali, le Conseil se disait « vivement préoccupé par les dernières tensions » dans le pays et appelait au dialogue en tenant compte « des recommandations formulées par la CEDEAO le 19 juillet ».  Le Conseil appelait une nouvelle fois à la tenue régulière et ponctuelle des différentes élections et s’inquiétait du processus électoral en Guinée.  Enfin, il appelait l’UNOWAS à poursuivre les préparatifs en vue d’assumer une partie des fonctions du BINUGBIS. 

Guinée-Bissau

- 3 séances publiques: 14 février, 28 février, 10 août

- 1 résolution: 2512 (2020)

Voir aussi: Consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales

Le processus de clôture du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS) s’est poursuivi pour aboutir à la fermeture du Bureau le 31 décembre, conformément au calendrier en trois phases établi dès la résolution 2458 (2019) et confirmé en février.  Le transfert des compétences du BINUGBIS au Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) et à l’équipe de pays s’est fait dans un contexte politique tendu après l’élection présidentielle de novembre-décembre 2019.  Le Président de la formation Guinée-Bissau de la Commission de consolidation de la paix (CCP) a participé aux réunions d’information.

Le 14 février, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau et Chef du BINUGBIS, Mme Rosine Sori-Coulibaly, pouvait se féliciter de la bonne tenue du scrutin présidentiel et de la fin d’un cycle électoral, mais cela ne l’empêchait pas de s’inquiéter de « l’intensification des tensions politiques » manifestée par des recours successifs du candidat battu.  La période postélectorale pourrait être l’occasion d’un retour à la paix durable, à la stabilité et à la réconciliation nationale, estimait-elle, mais elle ajoutait: « Encore faudrait-il que cela s’accompagne d’une volonté politique des parties prenantes. »  C’est dans ce contexte que la Chef du BINUGBIS expliquait au Conseil le programme de transition mis en place pour transférer les compétences du Bureau à l’équipe de pays de l’ONU et à l’UNOWAS, appelé à jouer un rôle de bons offices après le départ du BINUGBIS. 

Le 28 février, par sa résolution 2512 (2020), le Conseil confirmait la prorogation du BINUGBIS jusqu’au 31 décembre et sa fermeture à cette date.  Il décidait en outre de réexaminer dans les six mois le régime de sanctions mis en place par la résolution 2048 (2012).  Le Conseil exprimait toutefois sa préoccupation face à la situation politique et appelait les différents acteurs politiques bissau-guinéens à s’abstenir de tout acte ou déclaration susceptible de perturber le processus politique, au lendemain de l’investiture du nouveau Président, Umaro Sissoco Embalo.  Le représentant du Niger, dont le pays présidait la CEDEAO, rappelait l’intérêt particulier apporté par l’organisation sous-régionale à la situation en Guinée-Bissau. 

Le 10 août, Mme Sori-Coulibaly décrivait au Conseil une atmosphère politique marquée par une méfiance croissante entre les parties prenantes et reconnaissait que la crise politique et la paralysie du Parlement avaient empêché son Bureau de soutenir les réformes urgentes décrites dans l’Accord de Conakry de 2016.  Les membres du Conseil insistaient sur la poursuite des réformes prévues par cet accord, ainsi que sur le respect des droits de l’homme et de l’état de droit.  La représentante de la Guinée-Bissau regrettait toutefois la « dramatisation » d’« incidents isolés ».  La Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) jugeait de son côté préoccupante la résurgence du transit par le pays du trafic de cocaïne venu d’Amérique latine à destination de l’Europe.  Le Président de la CCP rappelait qu’un engagement international continu et une concentration soutenue sur les priorités du pays seraient essentiels pour assurer la reprise économique et le développement durable.  La Fédération de Russie plaidait pour une levée des sanctions, affirmant que la situation du pays n’avait plus rien à voir avec celle qui avait provoqué leur imposition en 2012.

Mali

- 8 séances publiques: 15 janvier, 7 avril, 11 juin, 29 juin, 31 août, 8 octobre, 15 octobre, 17 novembre

- 2 résolutions: 2531 (2020), 2541 (2020),

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/10

Voir aussi: Paix et sécurité en Afrique; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales; Opérations de paix des Nations Unies; Terrorisme

La difficile mise en œuvre de l’Accord d’Alger pour la paix et la réconciliation au Mali de 2015 est restée au centre des travaux du Conseil sur ce pays, dont la situation est indissociable de celle prévalant au Sahel en général, avec notamment la menace terroriste.  La dégradation de la situation provoquait le 18 août une mutinerie qui évoluait en coup d’État militaire et aboutissait à la chute du Président Ibrahim Boubacar Keita, brièvement détenu.  La CEDEAO imposait aussitôt des sanctions, levées dès l’adoption en septembre d’une charte de transition et la nomination du Gouvernement de transition de 18 mois.  Le Conseil de sécurité qui, fin juin, avait reconduit pour un an la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) en réorganisant son mandat mais en maintenant sa principale priorité stratégique, à savoir l’appui à la mise en œuvre de l’Accord d’Alger, laissait largement la main à la CEDEAO et attendait sept semaines pour débattre de la situation, puis adopter une déclaration présidentielle qui entérinait l’évolution survenue entre temps.

Le 15 janvier, moins d’une semaine après une sanglante attaque djihadiste contre un camp nigérien à Chinegodar, à quelques kilomètres de la frontière malienne, le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix Jean-Pierre Lacroix plaidait devant le Conseil pour que la MINUSMA soit rendue plus agile, flexible et mobile.  Il notait aussi la lenteur avec laquelle l’Accord d’Alger était mis en œuvre, ce que regrettaient les membres du Conseil.  La France relevait néanmoins le progrès que représentait le redéploiement dans le nord du pays des premières unités de l’armée malienne reconstituée; elle mettait aussi en avant les résultats du récent Sommet de Pau.  Des différences de vues s’affirmaient quant au mandat de la MINUSMA, dont les États-Unis proposaient une « évaluation lucide » avant juin, en souhaitant un mandat mettant l’accent sur la protection des civils plutôt que sur la mise en œuvre de l’Accord d’Alger, qu’aucune partie ne semblait très désireuse d’appliquer.  Les États-Unis souhaitaient aussi réduire la taille de la Mission et allouer les ressources ainsi dégagées à des initiatives jugées plus efficaces de lutte contre le terrorisme dans la région.  La Fédération de Russie rejetait toute idée de réexamen à ce stade du mandat de la Mission. 

Le 7 avril, Mahamat Saleh Annadif, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali et Chef de la MINUSMA, faisait part au Conseil de « réels espoirs » en citant en particulier des progrès dans la mise en œuvre de l’Accord.  La France se félicitait de l’inauguration d’une structure conjointe entre elle-même et les pays du G5 Sahel et affirmait: « Les résultats sont là. »  Alors qu’approchait l’échéance du renouvellement du mandat de la MINUSMA, les « A3+1 » plaidaient pour un mandat plus robuste de la Mission et pour des capacités accrues.  Les États-Unis estimaient une nouvelle fois qu’il fallait déterminer « maintenant et avec réalisme » ce que la Mission pouvait accomplir face à une menace terroriste croissante.  La Fédération de Russie jugeait prématuré d’envisager la réduction de la Mission.

Le 11 juin, sous présidence française, une visioconférence au niveau ministériel faisait le bilan de l’Accord d’Alger cinq ans après leur signature.  La France notait qu’on attendait toujours les réformes politiques et institutionnelles prévues par l’Accord, qui devait rester, pour le Haut-Représentant de l’Union africaine pour le Mali Pierre Buyoya, « le cadre et la voie privilégiés » pour régler la triple crise -sécuritaire, économique et désormais sanitaire- frappant le pays.  Le Secrétaire général répétait que ce n’est qu’en renforçant la présence des Forces de défense et de sécurité maliennes dans l’ensemble du pays que l’on pourrait combattre le terrorisme et rétablir l’autorité de l’État.  Il rappelait aussi le plan d’adaptation de la MINUSMA et renouvelait son appel en faveur d’un dispositif d’appui complet, financé par les contributions statutaires, qui permettrait à la Mission de fournir un soutien prévisible et durable à la Force conjointe du G5 Sahel.  Les États-Unis appelaient à la « clairvoyance » devant les échecs des parties signataires à l’Accord d’Alger et présentaient le renouvellement de mandat de la Mission comme « une formidable opportunité » d’apporter un changement « réel et durable » en obtenant des différentes parties qu’elles respectent les critères de référence du mandat.  Ils appelaient en outre à améliorer la qualité des effectifs en uniforme de la Mission.

Le 29 juin, le Conseil, par sa résolution 2531 (2020), décidait à l’unanimité de proroger jusqu’au 30 juin 2021 le mandat de la MINUSMA, avec les mêmes plafonds d’effectifs en uniforme et en gardant comme principale priorité stratégique d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord.  Le Conseil fixait à la Mission comme seconde priorité stratégique de « faciliter l’application par les acteurs maliens de la Stratégie de stabilisation du centre du Mali, dans le cadre d’une action globale à orientation politique, afin de protéger les civils, de réduire les violences intercommunautaires et de rétablir l’autorité et la présence de l’État ainsi que les services sociaux de base dans le centre du pays ».

Le 31 août, ce sont les sanctions -gel des avoirs et interdiction de voyager des personnes désignées par le Comité créé en vertu de la résolution 2374 (2017)- que le Conseil reconduisait à l’unanimité, jusqu’au 31 août 2021, en adoptant sa résolution 2541 (2020).  Treize jours après le coup d’État du 18 août, le Conseil se disait seulement, dans le préambule de la résolution, « profondément préoccupé par les faits récents survenus au Mali ».  Il « condamnait vigoureusement la mutinerie » et soulignait « qu’il importe de toute urgence de rétablir l’état de droit et de s’orienter vers un retour à l’ordre constitutionnel ».  Mais s’il réaffirmait son « appui résolu aux initiatives et aux efforts de médiation de la CEDEAO », le Conseil se déclarait simplement « prêt à débattre de la question, durant l’année en cours, compte tenu des conséquences que pourraient avoir ces faits survenus récemment sur la mise en œuvre de l’Accord [d’Alger] ». 

Ce n’est que le 8 octobre que le Conseil examinait en séance -la toute première qu’il tenait physiquement dans « sa » salle depuis le 12 mars- la situation au Mali depuis le coup d’État.  Entre-temps, une « charte de transition » avait été adoptée le 12 septembre puis, révisée, publiée le 1er octobre, et un gouvernement de transition formé le 5 octobre, entraînant le lendemain la levée de ses sanctions par la CEDEAO.  Le Chef de la MINUSMA expliquait au Conseil que la réussite de la transition en cours était « à portée de main » et ajoutait: « C’est la première fois depuis la signature de l’accord de 2015 que les mouvements signataires ont fait leur entrée au gouvernement ».  Les « A3+1 » saluaient les consultations qui avaient abouti à l’adoption de la Charte de transition.  La Chine affirmait que « les parties maliennes doivent se servir de la transition comme d’une occasion d’écrire un nouveau chapitre de l’histoire du pays ».  Le Royaume-Uni saluait la formation d’un gouvernement de transition dirigé par des civils, dans lequel les États-Unis ne voyaient toutefois qu’une première étape vers le retour à l’ordre constitutionnel.  La Fédération de Russie disait espérer que le délai de 18 mois serait respecté pour la tenue des élections et plusieurs autres membres du Conseil saluaient le rôle joué par la CEDEAO.  La France encourageait les nouvelles autorités à profiter de cette période pour jeter les bases d’une réforme des institutions visant à bâtir une démocratie plus forte et plus légitime.  Elle fixait trois priorités pour les mois à venir: la poursuite de la lutte contre le terrorisme; la reprise de la mise en œuvre de l’Accord d’Alger; et la stabilisation du centre du pays, avec le rétablissement du respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  Elle annonçait la préparation d’un projet de déclaration présidentielle reprenant ces différents éléments.

La déclaration présidentielle était adoptée le 15 octobre.  Le Conseil s’y félicitait de la mise en place des dispositions relatives à la transition au Mali, soulignant que celle-ci devait s’effectuer conformément à la Charte de la transition pour « aboutir au retour à l’ordre constitutionnel et à la tenue d’élections dans un délai de 18 mois ».  Il engageait la CEDEAO et l’Union africaine à renforcer leur soutien « pour que les parties prenantes maliennes puissent poser les fondements d’un pays plus stable et plus paisible ».  Il réaffirmait par ailleurs l’importance stratégique d’une « mise en œuvre pleine, effective et sans exclusive de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali », en soulignant qu’il n’y avait pour le pays « aucune autre solution viable » que ce dernier.

Enfin, le 17 novembre, le représentant de la République dominicaine, Président du Comité des sanctions concernant le Mali, présentait au Conseil un bref rapport sur les activités du Comité durant l’année écoulée.

Afrique centrale

- 2 séances publiques: 12 juin, 9 décembre

Voir aussi: Paix et sécurité en Afrique; République centrafricaine; Terrorisme

Le Conseil de sécurité a examiné en juin et septembre les rapports semestriels du Secrétaire général sur la situation dans la région et les activités du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC), dirigées par son Représentant spécial, François Lounceny Fall. 

Le 12 juin, ce sont les conséquences de la pandémie de COVID-19 qui dominaient la séance du Conseil, en raison de son impact sur la croissance économique des États de la région et de la priorité donnée aux dépenses de santé publiques, qui réduisaient les ressources nécessaires au bon fonctionnement des institutions nationales et au financement de réformes essentielles.  M. Fall demandait le soutien de la communauté internationale à la Stratégie régionale de stabilisation, de relèvement et de résilience des zones touchées par Boko Haram dans le bassin du lac Tchad et rappelait les autres priorités pour la région: éradication de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), atténuation de l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité, et lutte contre l’insécurité maritime dans le golfe de Guinée, laquelle était en baisse.  Plusieurs membres du Conseil s’inquiétaient de nouveau de la situation au Cameroun, touché au nord par les attaques de Boko Haram mais également en proie à des troubles dans les parties anglophones du pays. 

Les mêmes problèmes étaient abordés le 9 décembre.  À propos de Boko Haram, M. Fall préconisait d’établir des liens entre la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et la Stratégie régionale pour le bassin du lac Tchad.  Les troubles au Cameroun étaient une fois encore évoqués mais la Fédération de Russie voyait dans le problème anglophone les conséquences de la période coloniale et s’opposait à toute ingérence dans les affaires intérieures du pays.  Les cycles électoraux 2020-2021, qui concernent 8 des 11 États de la région, étaient également abordés.  Les « A3+1 » voyaient dans le retour au pays des réfugiés burundais après le scrutin de mai la confirmation que la situation au Burundi ne constituait plus une menace à la paix et la sécurité internationales.  Le Royaume-Uni considérait les élections générales du 27 décembre en République centrafricaine comme une étape importante vers une paix durable dans ce pays.  Les membres du Conseil appelaient tous les acteurs politiques à veiller à ce que les différents scrutins à venir soient inclusifs, pacifiques, libres et équitables.  Le Représentant spécial rappelait sa détermination à continuer d’offrir les bons offices du Secrétaire général pour encourager un dialogue politique inclusif et significatif.

République centrafricaine (RCA)

- 6 séances publiques: 31 janvier, 20 février, 22 juin, 28 juillet, 19 octobre, 12 novembre

- 3 résolutions: 2507 (2020), 2536 (2020), 2552 (2020)

Voir aussi: Afrique centrale; Région des Grands Lacs

La situation en République centrafricaine est examinée tous les quatre mois par le Conseil.  La mise en œuvre de signature de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation du 6 février 2019 s’est poursuivie, ainsi que la marche vers les élections législatives et présidentielle, tenues le 27 décembre.  Déjà allégé en septembre 2019, l’embargo sur les armes a fait l’objet de nouvelles dérogations en janvier et juillet, sans pleinement satisfaire la demande du Gouvernement centrafricain visant à une levée totale.  En novembre, le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) a été renouvelé pour un an. 

Le 31 janvier, le Conseil prorogeait de six mois les sanctions individuelles frappant les personnes ou entités désignées par son Comité des sanctions et l’embargo sur les armes imposé à la RCA.  La résolution 2507 (2020) augmentait toutefois les exceptions en élargissant la gamme des armes légères que le Gouvernement pouvait acquérir.  Présentée comme un « bon compromis » par la France, pays porte-plume, le texte voyait toutefois l’abstention de la Chine et de la Fédération de Russie, qui jugeaient l’assouplissement insuffisant, faisant ainsi obstacle au réarmement de l’armée centrafricaine.  Le Royaume-Uni craignait qu’une prorogation de seulement six mois envoie un « mauvais message » aux groupes armés.  À l’image des « A3+1 », les pays favorables aux sanctions et à l’embargo expliquaient que les sanctions n’étaient pas une fin en soi, mais plutôt l’expression de l’engagement du Conseil « pour une transition du pays vers la stabilité et la paix ». 

Le 28 juillet, le régime de sanctions était de nouveau prorogé, cette fois jusqu’au 31 juillet 2021, et l’embargo sur les armes était entaillé d’une nouvelle exemption pour permettre aux forces centrafricaines de se doter de lance-roquettes.  La résolution 2536 (2020) présentée par la France était adoptée à l’unanimité, la Fédération de Russie estimant qu’elle donnait à la RCA une chance d’obtenir « d’ici un an » la levée des sanctions.  Les autres membres occidentaux du Conseil disaient toutefois craindre que, sans une bonne gestion des stocks d’armes, ce nouvel assouplissement ne favorise la contrebande, et donc la prolifération, des lance-roquettes. 

Entre-temps, le Conseil avait examiné par deux fois la situation en RCA.  Le 20 février, le Chef de la MINUSCA, Mankeur Ndiaye, faisait le bilan de la mise en œuvre de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation un an après sa signature.  Il faisait observer qu’« en dépit de nombreuses difficultés », les parties signataires lui avaient réaffirmé leur attachement et que le Gouvernement inclusif issu de l’Accord était toujours en place.  Il citait parmi les progrès la « nette réduction » de la violence, l’extension progressive de l’autorité de l’État sur tout le territoire, la poursuite du processus de désarmement et la création d’unités spéciales mixtes de sécurité.  À l’approche des élections, il saluait l’esprit d’ouverture du Président Faustin-Archange Touadéra à l’occasion du retour d’exil des anciens présidents François Bozizé et Michel Djotodia.  L’Union européenne dénonçait néanmoins le non-respect de leurs engagements par plusieurs groupes armés.  M. Ndiaye appelait le Conseil à examiner des mesures « fortes » contre tous ceux qui continuaient à entraver le processus de paix. 

Le 22 juin, le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, Jean-Pierre Lacroix, appelait le Conseil à la vigilance.  Il citait des progrès importants dans la préparation des élections, que saluaient l’ensemble des membres du Conseil, mais aussi des tensions et une situation « instable ».  Il faut comprendre « ce qui se cache derrière la résurgence de la violence », ajoutait le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, Smail Chergui.  Pour l’Union européenne il était grand temps que le régime des sanctions prévu dans l’Accord politique soit défini et appliqué.  La France rappelait qu’à son initiative, le Conseil avait sanctionné un chef de groupe armé.  La Ministre des affaires étrangères de la RCA demandait un soutien « ferme et unanime » de la communauté internationale. 

La préparation des élections du 27 décembre dominait la réunion du 19 octobre.  Le Chef de la MINUSCA estimait que le pays était en marche « assurée » vers le scrutin, qu’il présentait comme l’occasion unique de « capitaliser » sur les acquis des élections de 2015, de consolider l’ordre constitutionnel et de poursuivre l’œuvre de stabilisation du pays.  Il parlait de progrès « notables » dans l’application de l’Accord du 6 février 2019. 

C’est à l’unanimité que le Conseil adoptait, le 12 novembre, la résolution 2552 (2020) par laquelle il prorogeait la MINUSCA jusqu’au 15 novembre 2021 avec les mêmes effectifs et l’objectif stratégique d’aider à créer les conditions politiques, institutionnelles et de sécurité permettant de réduire durablement la présence et la menace des groupes armés.  Les tâches prioritaires de la Mission comprenaient la protection des civils, la mise en place des conditions de sécurité permettant l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire et les bons offices et l’appui au processus de paix, en particulier l’appui aux autorités centrafricaines dans la « préparation et l’organisation d’élections présidentielles, législatives et locales pacifiques en 2020 et 2021 ».

Région des Grands Lacs

- 2 séances publiques: 22 avril, 13 octobre

Voir aussi: République démocratique du Congo; Burundi; Soudan du Sud; République centrafricaine

Malgré la double épidémie d’Ebola et de COVID-19, les développements politiques positifs de la région ont incité à l’optimisme l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs, Xia Huang, lors de ses présentations semestrielles.  Tout en se réjouissant des progrès dus à plusieurs initiatives régionales, les membres du Conseil ont appelé les pays concernés à se pencher sur les « causes profondes et complexes » de l’instabilité, en particulier l’exploitation et le commerce illicites des ressources naturelles.

Le 22 avril, M. Xia se félicitait de plusieurs évolutions positives survenues durant le dernier semestre dans la région, avec la consolidation de la coalition gouvernementale en République démocratique du Congo (RDC), la normalisation des relations entre le Rwanda et l’Ouganda et, aux marges, la formation d’un gouvernement d’unité nationale au Soudan du Sud et les efforts diplomatiques de la RDC et de la Zambie pour régler leur différend frontalier.  Les membres du Conseil se félicitaient de cet élan positif.  Les « A3+1 » craignaient toutefois de voir ces avancées sapées par la COVID-19.  L’Envoyé spécial reconnaissait que la pandémie avait obligé ces pays à réorienter leurs priorités et provoqué le report d’importantes réunions régionales, ce qui avait retardé la mise en œuvre de l’Accord-cadre d’Addis Abeba pour la paix, la sécurité et la coopération de 2013, qui restait pour les membres du Conseil, la « pierre angulaire d’une paix et d’une stabilité durables » pour la région. 

Le 13 octobre, l’Envoyé spécial confirmait une situation politique « globalement stable avec des avancées encourageantes » dans la région, avec un recours accru à la concertation diplomatique et aux mécanismes régionaux pour résoudre pacifiquement leurs différends.  La RDC et la Zambie avaient conclu un accord sur leur différend frontalier et le Rwanda et l’Ouganda s’étaient engagés à poursuivre le processus de normalisation de leurs relations grâce aux bons offices de l’Angola et de la RDC.  Les membres du Conseil se félicitaient de ces initiatives régionales, ainsi que du transfert pacifique du pouvoir au Burundi après l’élection présidentielle de mai, qui avait permis le retour des réfugiés burundais du Rwanda et de Tanzanie.  M. Xia n’en rappelait pas moins les défis persistants auxquels la région restait confrontée, comme les activités des groupes armés et l’exploitation illicite des ressources naturelles, problème auquel la plupart des membres du Conseil demandait une « solution globale ».

République démocratique du Congo - RDC

- 5 séances publiques: 25 juin (réunion), 25 juin (résolution), 6 octobre, 7 décembre, 18 décembre

- 2 résolutions: 2528 (2020), 2556 (2020)

Voir aussi: Paix et sécurité en Afrique; Région des Grands Lacs; Opérations de paix des Nations Unies

La porte ouverte par la résolution 2502 (2019) sur une stratégie de retrait fortement conditionnée de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) a été confirmée, avec la conclusion d’un accord, le 19 octobre, entre la MOMUSCO et le Gouvernement sur une stratégie de retrait progressive, présentée par le Secrétaire général dans son rapport du 26 octobre. La stratégie, qui prévoit comme première étape un retrait de la Mission, dès juin 2021, des Kasaï, a été entérinée en décembre par le Conseil, qui a prorogé pour un an le mandat de la MONUSCO avec le même plafond d’effectifs, alors que le pays entrait dans une crise politique avec la rupture de la coalition gouvernementale.

Le 25 juin, la Chef de la MONUSCO, Leila Zerrougui, déclarait au Conseil que, si la coalition gouvernementale en RDC tenait toujours, de « graves tensions » et des manœuvres partisanes provoquaient une érosion de la confiance.  Elle appelait tout l’éventail politique congolais à renoncer au sectarisme pour éviter une crise politique qui pourrait avoir des conséquences « majeures » sur la stabilité du pays.  La pandémie inquiétait à double titre.  La Fédération de Russie craignait que les groupes armés de l’est du pays n’en profitent pour intensifier leurs attaques contre les forces armées congolaises et les civils.  En outre, elle retardait l’idée d’un dialogue structuré entre la Mission et le Gouvernement sur l’avenir de la MONUSCO.  Les préoccupations à court terme ne doivent pas nous détourner de la nécessité de travailler à un transfert réaliste des tâches de la MONUSCO aux autorités congolaises dans les années à venir, relevait la Belgique, qui rappelait que les critères de sortie de la Mission étaient attendus pour le 20 octobre; elle insistait aussi pour que l’appropriation nationale de la réforme du secteur de la sécurité soit au cœur du processus.  La Fédération de Russie « prenait note » du ralentissement des discussions et les États-Unis invitaient à user de solutions créatives pour faire avancer le dialogue sur les préparatifs du retrait.

Le même jour, le Conseil, par sa résolution 2528 (2020), reconduisait jusqu’au 1er juillet 2021 le régime de sanctions imposées en RDC.

La séance du 6 octobre se déroulait dans l’attente du rapport des propositions et conditions de retrait de la Mission.  Mme Zerrougui expliquait que le futur accord prévoirait un transfert progressif des tâches accomplies par la MONUSCO vers les autorités congolaises ainsi qu’une stratégie tenant compte des disparités régionales avec un renforcement de la présence de la Mission dans les Kivu et en Ituri, où des conflits actifs persistaient, un retrait du Kasaï et une réduction de sa présence au Tanganyika.  Plusieurs pays rappelaient la nécessité d’une sortie sur la base de « conditions et de repères réalistes » qui inscriraient la réforme du secteur de la sécurité au cœur même du processus.  Le Royaume-Uni insistait sur son appropriation nationale par la RDC.  Mme Zerrougui s’inquiétait en outre des tensions croissantes au sein de la coalition gouvernementale et lançait un appel à l’unité qui trouvait un écho chez les « A3+1 », pour qui la situation politique actuelle offrait une « occasion rare » pour les dirigeants congolais de construire un avenir stable et un pays unifié. 

Le rapport du Secrétaire général du 26 octobre expliquait que la MONUSCO, « dans les années à venir », se « replierait progressivement » dans les trois provinces où le conflit est encore actif, à savoir les deux Kivu et l’Ituri, et poursuivrait ses bons offices et le renforcement institutionnel au niveau national.  Le calendrier prévoyait un retrait « d’ici à juin 2021 » du Kasaï, région « sortie du conflit et en phase de consolidation de la paix », et ajoutait que la Mission « devrait pouvoir réduire sa présence militaire en 2022 » au Tanganyika, où la sécurité s’était améliorée récemment.  Le rapport posait comme condition du retrait de la Mission que soit « réduite la menace que représentent les groupes armés nationaux et étrangers, de sorte qu’elle puisse être gérée par les autorités nationales ».  La Mission devrait donc maintenir dans les Kivu une « présence robuste de sa force militaire, de sa police et de sa composante civile pour assurer une protection complète des civils » et ne se retirer de ces zones qu’« en dernier », sans qu’une date soit évoquée.  En outre, ajoutait le rapport, « le besoin de stabilisation et de consolidation de la paix ne s’arrêtera pas avec le retrait de la Mission ».  Du fait des « importants défis » que la RDC devait encore relever malgré les « étapes importantes vers la stabilisation » franchies au cours de l’année écoulée, le Secrétaire général estimait que le pays avait encore besoin de la MONUSCO et demandait que son mandat soit prorogé d’un an, avec les mêmes effectifs en uniforme et les mêmes objectifs stratégiques de protection des civils, de stabilisation et de renforcement des institutions de l’État.

Le devenir de la MONUSCO dominait la réunion du 7 décembre, au lendemain de l’éclatement au grand jour de la crise gouvernementale, annoncée par le Président Tshisekedi.  Mme Zerrougui présentait le plan de retrait comme une « transition », « non pas un processus qui vient de commencer mais bel et bien la poursuite de mesures prises au lendemain de l’élection présidentielle de 2018 et de la passation pacifique du pouvoir », puisque la MONUSCO avait déjà fermé depuis lors neuf bureaux provinciaux.  Mme Zerrougui précisait que la transition dépendrait de la capacité du Gouvernement à assurer la sécurité. 

Tout en saluant la stratégie commune de retrait, les États-Unis se disaient « déçus par le fait que certains critères prévus par la résolution 2502 (2019) n’aient pas été remplis » et demandaient « un affinement des critères et un calendrier plus précis ».  Les autres membres du Conseil insistaient sur la nécessité d’un calendrier flexible tenant compte à tout moment de la situation sur le terrain et, ajoutait la Fédération de Russie, des priorités établies par Kinshasa et les pays fournisseurs de contingents.  La Chine rappelait que le retrait dépendrait des capacités du Gouvernement et jugeait « raisonnable » un renouvellement d’un an du mandat.  Les « A3+1 » mettaient en garde contre un « retrait prématuré de la Mission pour des raisons budgétaires », qui serait « désastreux » et saperait des décennies d’investissement dans le maintien de la paix.  Ils demandaient un plein engagement du Conseil afin de fournir à la Mission tous les moyens nécessaires à l’exécution de son mandat.  Pour que la MONUSCO atteigne sa pleine capacité opérationnelle, la France et le Royaume-Uni réclamaient une reconfiguration de la Brigade d’intervention de la Force, suivis par le représentant de la RDC qui demandait lui aussi un renforcement des capacités offensives de la Mission, « conditions sine qua non » de la réussite du mandat de protection des civils et d’une « sortie progressive responsable »

Le 18 décembre, le Conseil entérinait les demandes du Secrétaire général en prorogeant d’un an le mandat de la MONUSCO avec le même mandat et les mêmes effectifs maximum en uniforme, et en approuvant la « stratégie commune de retrait progressif et échelonné » de la Mission, y compris les étapes de transition prévues.  La résolution était adoptée par 14 voix pour, avec l’abstention de la Fédération de Russie.

Burundi

- 1 séance publique: 4 décembre

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/12

Voir aussi: Région des Grands lacs; Afrique centrale; Coopération entre l’Organisation des Nations Unies et les organisations régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales

L’année a été marquée par la tenue d’élections générales le 20 mai, dont la présidentielle, qui voyait la victoire au premier tour d’Évariste Ndayishimiye, qui succédait dès le 18 juin à Pierre Nkurunziza, décédé 10 jours plus tôt pendant la période de transition.  Après la démission fin octobre 2019 de l’Envoyé spécial du Secrétaire général Michel Kafando, une mission d’évaluation stratégique de l’ONU menée en septembre 2020 présentait diverses recommandations au Secrétaire général pour améliorer les relations entre les Nations Unies et le pays, qui réclamait depuis longtemps la suppression de son inscription à l’ordre du jour du Conseil.

Le Conseil n’examinait toutefois pas formellement le point de son ordre du jour consacré au Burundi et c’est sous la rubrique « Coopération entre l’Organisation des Nations Unies et les organisations régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales » qu’il adoptait, le 4 décembre, une déclaration présidentielle, par laquelle il prenait note de l’amélioration des conditions de sécurité et d’une « nouvelle phase » pour le Burundi, qu’illustraient les priorités annoncées par le nouveau Chef de l’État.  Le Conseil se félicitait de certaines mesures prises pour lutter contre l’impunité et promouvoir les femmes et constatait les progrès tout en relevant qu’il restait « encore beaucoup à accomplir pour faire avancer la réconciliation nationale, la promotion de l’état de droit et d’un système judiciaire indépendant et efficace ».  Le Conseil mettait fin à l’obligation faite au Secrétaire général de lui transmettre des rapports périodiques sur le Burundi, qui serait désormais traité dans le cadre plus large de la région des Grands Lacs et de l’Afrique centrale.  Il engageait en outre le Secrétaire général et le Gouvernement burundais à « laisser suffisamment de temps au Bureau de l’Envoyé spécial pour procéder à une transition sans heurt ».

Somalie

- 13 séances publiques: 24 février, 27 février, 30 mars, 21 mai, 29 mai, 9 juin, 22 juin, 20 août, 28 août, 28 octobre, 12 novembre, 23 novembre, 4 décembre

- 6 résolutions: 2516 (2020), 2520 (2020), 2527 (2020), 2540 (2020), 2551 (2020), 2554 (2020)

Voir aussi: Paix et sécurité en Afrique; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales; Organes subsidiaires

Les questions de sécurité et la préparation des élections générales, reportées à 2021, ont dominé les réunions trimestrielles du Conseil sur la Somalie.  Le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), dirigée par James Swan, a été prorogé jusqu’au 31 août 2021.  Le Conseil a également prorogé jusqu’au 28 février 2021 son autorisation donnée à Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), chargée de réduire la menace posée par les milices islamistes Chabab et de former les forces de sécurité somaliennes.  Présente toute l’année, la perspective du retrait de l’AMISOM, lancé dès 2017 et censé s’achever fin 2021, est devenue plus pressante en novembre. 

Le 24 février, M. Swan parlait au Conseil de « signaux positifs », en provenance de Somalie, en particulier sur le plan économique.  Plus prudent sur les aspects politiques, il regrettait notamment l’arrêt depuis mai 2019 des consultations entre la présidence fédérale et les dirigeants des États membres de la fédération, alors que le pays devait connaître avant la fin de l’année des élections générales censées être organisées pour la première fois depuis 1969 sur le principe « une personne, un vote ».  M. Swan jugeait venu le temps d’entamer des discussions sur le transfert des questions de sécurité de l’AMISOM aux autorités somaliennes.  Le Chef de l’AMISOM, Francisco Caetano José Madeira, estimait toutefois que son retrait ne serait ni conforme au calendrier du plan de transition, ni souhaitable au vu de la réalité sur le terrain.  Il préconisait une reconfiguration de la Mission en forces mobiles capables de lutter contre les Chabab.  La Belgique rappelait le large soutien de l’Union européenne à l’AMISOM via diverses missions et les États-Unis déclaraient que l’opération de l’Union africaine ne pourrait rester indéfiniment dans le pays.  La solution aux problèmes résidait selon eux dans l’amélioration de la coopération et de la coordination entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés. 

Le 21 mai, MM. Swan et Madeira décrivaient au Conseil un pays concentré sur la lutte contre la COVID-19, qui affectait gravement l’économie et la population et retardait les processus politiques et le calendrier électoral, ainsi que la formation des forces somaliennes.  Soutenu par les « A3+1 », M. Swan demandait toutefois que les partenaires extérieurs de la Somalie se tiennent prêts à mobiliser leur appui technique et financier en vue de l’élection.  Côté sécurité, tout en se félicitant de « gains tangibles » face aux Chabab, M. Madeira considérait comme impossible d’atteindre une « masse critique » de forces somaliennes capables de prendre d’ici à 2021 le relais de l’AMISOM, dont l’Union africaine avait, le 7 mai, reconduit le mandat pour un an.  M. Swan demandait une actualisation du plan de transition pour qu’il reflète les retards dans la constitution des forces.  La Fédération de Russie jugeait inacceptable toute réduction des effectifs des soldats de la paix mais la France avertissait que le modèle actuel n’était « plus tenable », et encore moins l’appui financier de l’Union européenne à l’AMISOM.

Le 29 mai, la résolution 2520 (2020) du Conseil autorisait les États membres de l’Union africaine à maintenir l’AMISOM jusqu’au 28 février 2021.  Outre la lutte contre les Chabab, l’AMISOM devait continuer de former les forces somaliennes et leur transférer progressivement ses responsabilités afin qu’elles puissent prendre la direction des opérations d’ici à 2021.  L’AMISOM était également chargée de soutenir la sécurité des préparatifs des élections devant se tenir « à la fin de 2020 ou au début de 2021 ».  Le Conseil demandait au Secrétaire général de mener avant le 10 janvier 2021 une évaluation indépendante et de lui présenter des « options relatives à l’appui international à la sécurité globale en Somalie après 2021 ».

Le report des élections se confirmait lorsque, le 20 août, M. Swan avertissait le Conseil qu’il ne serait pas possible de les tenir comme prévu en novembre, mais, au mieux, en mars 2021.  Il ajoutait que, faute de Cour constitutionnelle, il faudrait trouver un large accord politique sur le processus électoral, laissant présager un renoncement au suffrage universel direct.  Plusieurs membres du Conseil rejetaient l’idée d’un retour au vote « clanique » comme en 2016, tout en admettant que ce serait aux parties somaliennes d’en décider. 

Après deux reconductions techniques le 30 mars et le 22 juin, le Conseil, le 28 août, adoptait sa résolution 2540 (2020) par laquelle il reconduisait pour un an, jusqu’au 31 août 2021, le mandat de la MANUSOM, chargée de faciliter la réconciliation, favoriser une vie politique inclusive, appuyer la tenue des élections et apporter son appui aux principales réformes du secteur de la sécurité. 

Le 23 novembre, MM. Swan et Madeira se félicitaient de la reprise du dialogue entre le nouveau Gouvernement fédéral et les États fédérés, qui avaient abouti en septembre à un accord sur les modalités du futur scrutin fédéral, accepté ensuite par tous les partis politiques et la société civile, et ratifié par le Parlement fédéral.  Au nom du large consensus et de l’appropriation nationale du processus, la plupart des membres du Conseil saluaient une « étape importante », bien que le principe « une personne, une voix » eût été mis de côté au profit d’un système indirect.  Ils plaidaient toutefois pour un processus crédible et inclusif, respectant un quota de 30% de femmes parmi les futurs parlementaires.  Les États-Unis insistaient en outre sur la préparation des discussions prévues en février 2021 sur le mandat de l’AMISOM.  Les « A3+1 » et la Fédération de Russie avertissaient déjà que toute décision sur le retrait de l’AMISOM dépendrait des progrès accomplis dans la préparation de l’armée somalienne et devrait prendre en compte les avis des autres parties prenantes, en particulier l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et les pays contributeurs de contingents.

Le Conseil a par ailleurs examiné à trois reprises la question de l’embargo sur les armes et des sanctions prises à l’encontre des milices islamistes.

Le 27 février, le Président du Comité 751 rendait compte au Conseil d’une visite effectuée dans la capitale somalienne en janvier pour faire mieux connaître l’objet et la portée des sanctions et « corriger la perception erronée » selon laquelle elles cibleraient le Gouvernement fédéral somalien, alors qu’elles visent essentiellement les Chabab.  La grande majorité des membres du Conseil se prononçait pour le maintien des sanctions, mais Chine et Fédération de Russie demandaient que les préoccupations des « autorités souveraines » du pays soient prises en compte.  La Somalie réclamait une fois de plus la levée totale de l’embargo sur les armes.

Le 9 juin, le Président du Comité faisait un nouveau point et pouvait saluer la reprise de la coopération entre le Gouvernement fédéral somalien et le Groupe d’experts de son Comité, après une période de tensions.

Après la publication du rapport final du Groupe d’experts mi-septembre, le Conseil entendait une nouvelle fois le Président du Comité 751, le 28 octobre.  La Fédération de Russie décrivait le régime de sanctions comme un « instrument important » et les embargos sur les armes et le charbon de bois comme « très utiles », ajoutant qu’elle croyait au « potentiel inexploité » des mesures concernant les composants d’engins explosifs improvisés introduites en 2019 par la résolution 2498 (2019).  Elle demandait toutefois, comme la Chine, que le Conseil évalue en permanence le régime de sanctions « à l’aune des besoins exprimés par les Somaliens » afin qu’il ne gêne pas l’Armée nationale somalienne dans sa lutte contre les Chabab. 

Le 12 novembre, le Conseil renouvelait pour un an le mandat du Groupe d’experts et laissait inchangé le régime de sanctions par sa résolution 2551 (2020), dont l’adoption était marquée par les abstentions russe et chinoise.  La Somalie rappelait qu’elle était soumise au « plus long régime de sanctions imposé par l’ONU et celui dont le champ d’application est le plus vaste » et demandait que soient définis des « critères clairs » en vue de leur levée complète.

En marge du dossier somalien le Conseil reconduisait, le 4 décembre, pour une nouvelle période de 12 mois, les autorisations accordées aux États et organisations régionales qui coopèrent avec les autorités de la Somalie dans la lutte contre la piraterie et les vols à main armée au large des côtes somaliennes.  La résolution 2554 (2020) relevait qu’aucune attaque n’avait été perpétrée depuis mars 2017, mais notait la demande d’assistance du Gouvernement somalien à la communauté internationale pour lutter contre le phénomène.  Le Conseil ajoutait qu’il envisageait de reconduire les autorisations si les autorités somaliennes lui en faisaient la demande.

Soudan – Darfour

- 14 séances publiques: 11 février, 30 mars, 24 avril, 29 mai, 4 juin (MINUATS), 4 juin (MINUAD), 9 juin, 10 juin, 15 septembre, 25 septembre, 8 décembre, 10 décembre, 11 décembre, 22 décembre

- 6 résolutions: 2508 (2020), 2517 (2020), 2523 (2020), 2524 (2020), 2525 (2020), 2559 (2020)

Voir aussi: Soudan du Sud; Abyei; Libye; Opérations de paix des Nations Unies; Organes subsidiaires

Malgré un retard, provoqué par la pandémie, dans le calendrier fixé par la résolution 2495 (2019) du 31 octobre 2019, le Conseil a établi en juin la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), mission politique de suivi appelée à succéder le 1er janvier 2021 à l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), clôturée le 31 décembre.  Les sanctions et l’embargo sur les armes ont été maintenus mais le Soudan n’a cessé de demander la levée du second, appuyé par plusieurs des membres du Conseil. 

La résolution 2495 (2019) avait prévu le maintien des effectifs en uniforme militaire de la MINUAD jusqu’au 31 mars 2020 et une décision par le Conseil avant cette date sur les mesures à prendre concernant « le retrait et la sortie responsables » de la Mission et la création d’une « présence de suivi ».  Ces décisions devaient être prises sur la base d’un nouveau rapport spécial ONU-Union africaine.  Mais la pandémie retardait les travaux et, le 30 mars, le Conseil décidait par sa résolution 2508 (2020) de reporter au 31 mai sa décision sur l’avenir de la MINUAD et de maintenir jusque-là les effectifs militaires et policiers de la Mission.

Le 24 avril, les Secrétaires généraux adjoints aux opérations de paix et aux affaires politiques, Jean-Pierre Lacroix et Rosemary DiCarlo, jugeaient désormais « irréaliste » la fin de la MINUAD à l’échéance du mandat en cours, le 31 octobre.  Ils précisaient néanmoins les contours de la future « présence », dont l’objectif serait d’aider le Soudan à réussir sa transition.  La protection des civils, composante principale du mandat de la MINUAD, serait une priorité à définir avec le Gouvernement soudanais dans le cadre d’une approche de consolidation de la paix à long terme.  Plusieurs membres du Conseil insistaient pour que toute décision soit prise dans le respect du pays hôte et le Soudan prévenait qu’il rejetterait toute décision impliquant une référence au Chapitre VII de la Charte.  La République dominicaine appelait à une « extrême prudence » lors du retrait de la MINUAD pour éviter toute rechute de la violence et « ne pas laisser le Soudan devenir le prochain Haïti ».  Les « A3+1 » rappelaient que l’Union africaine préconisait la levée de toutes les sanctions imposées au Soudan.

Après une brève reconduction technique décidée par la résolution 2523 (2020) du 29 mai, c’est le 4 juin que le Conseil, par deux résolutions successives, créait la MINUATS et scellait le sort de la MINUAD

La résolution 2524 (2020) créait, pour une période initiale de 12 mois, la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), dont les objectifs stratégiques consistaient à soutenir la transition politique; appuyer les processus de paix et la mise en œuvre des futurs accords de paix; appuyer la consolidation de la paix, la protection des civils et l’état de droit au Darfour et dans les deux Zones; et appuyer la mobilisation de l’assistance économique et la coordination de l’aide humanitaire.  Le Secrétaire général était prié de faire en sorte que la MINUATS soit en mesure de commencer son travail le 1er janvier 2021, après une transition « graduelle, échelonnée et efficace » avec la MINUAD, facilitée par un mécanisme de coordination destiné à s’entendre sur les modalités et les calendriers du transfert des responsabilités.

La résolution 2525 (2020) prorogeait la MINUAD jusqu’au 31 décembre 2020, le Conseil devant avant cela se prononcer sur les mesures à prendre concernant « le retrait et la sortie responsables » de l’Opération.  La MINUAD conserverait jusqu’à cette date les mêmes effectifs en uniforme avec pour priorité la protection des civils, notamment en appuyant les capacités du Gouvernement soudanais à le faire, en particulier dans le Jebel Marra.  Le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’Union africaine étaient chargés de présenter avant le 31 octobre 2020 un rapport spécial comportant en particulier une évaluation des effets du processus de paix sur les conditions de sécurité au Darfour.

Le 25 septembre, M. Lacroix et Mme DiCarlo venaient informer les membres du Conseil des conditions de la transition entre la MINUAD et la MINUATS, dont plusieurs demandaient qu’elle se fasse « en douceur ».  Ils venaient surtout présenter l’accord de paix conclu le 31 août à Djouba, au Soudan du Sud, entre le Gouvernement du Soudan et les principaux groupes armés du Darfour, à l’exception notable de l’ALS-faction Abdul Wahid, qualifiée de « principal fauteur de troubles » par la Fédération de Russie et appelée par la plupart des pays à rejoindre le processus de paix en cours.  La prudence restait de mise face à ce que M. Lacroix qualifiait de « constellation de documents » devant encore être réunis en une vision unique de l’avenir, mais Mme DiCarlo parlait de « développement politique important ». 

Signé formellement le 3 octobre, l’Accord de Djouba semblait solide et la séance du 8 décembre était largement consacrée à la transition « historique » de la MINUAD, « l’une des plus vastes opérations de paix jamais déployées sous les auspices de l’ONU », à la MINUATS, pour laquelle les autorités soudanaises souhaitaient une « empreinte légère » et une « présence limitée dans le temps ».  M. Lacroix appelait à la coordination du soutien international aux efforts du Gouvernement soudanais et des parties à l’Accord de Djouba pour protéger les civils, alors que des affrontements se poursuivaient au Darfour.  L’engagement du Soudan était salué par les membres du Conseil.  Pour les « A3+1 », tant la situation sur le terrain que l’Accord plaidaient en faveur du passage de témoin entre les deux missions à la date convenue du 31 décembre.  Les États-Unis faisaient toutefois observer que la MINUATS n’avait toujours pas de représentant spécial à sa tête et appelaient donc à sa nomination rapide. 

Le 22 décembre, la résolution 2559 (2020) venait « mettre fin au mandat de la MINUAD à compter du 31 décembre 2020 ».  Le Conseil, qui prenait note du rapport spécial conjoint ONU-Union africaine du 13 novembre, priait le Secrétaire général de « commencer à réduire les effectifs de la MINUAD le 1er janvier 2021 » et d’achever avant le 30 juin le retrait de tous ses effectifs.  La protection des civils du Darfour serait assurée à compter du 1er janvier 2021 par le Gouvernement soudanais conformément à son Plan national de protection, présenté le 1er juin. 

Par ailleurs, le Conseil prorogeait, le 11 février, le mandat du Groupe d’experts chargé d’appuyer le Comité des sanctions concernant le Soudan (« Comité 1591 ») jusqu’au 12 mars 2021 et lui demandait de lui présenter son rapport final avant le 13 janvier 2021.  La résolution 2508 (2020) était adoptée à l’unanimité mais Chine et Fédération de Russie jugeaient le temps venu pour le Conseil d’adopter une feuille de route préparant la levée progressive des sanctions, après 15 ans d’imposition. 

Le Président du Comité 1591, l’Ambassadeur Sven Jürgenson (Estonie), présentait ensuite trois rapports au Conseil en rappelant à chaque fois que le régime de sanctions avait été établi dans le seul but de contribuer au retour de la paix au Darfour.  Le 9 juin, il s’inquiétait de la poursuite de la présence des différents groupes armés darfouriens en Libye, source de financement et de trafic d’armes.  Le 15 septembre, il faisait même état d’une reprise des incidents intercommunautaires et des attaques au Darfour, en particulier de la part de l’ALS-faction Abdul Wahid, tout en reconnaissant la volonté du Gouvernement de Khartoum de répondre aux attaques et la nécessité de renforcer les capacités de celui-ci.  Le 11 décembre, il rappelait qu’en dépit de l’Accord de Djouba, plusieurs problèmes majeurs demeuraient, liés notamment à la propriété foncière et à l’utilisation des terres au Darfour.  Il ajoutait que le retour au Darfour, prévu par l’Accord, de plusieurs milliers de miliciens bien entraînés des groupes armés signataires devrait être géré avec soin, au risque de provoquer une instabilité localisée.

Enfin, le Conseil a, comme chaque année, entendu par deux fois Mme Fatou Bensouda, Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), à laquelle le Conseil avait déféré la situation au Darfour il y a 15 ans. 

Le 10 juin, Mme Bensouda se félicitait que la CPI détienne désormais l’un des six Soudanais visés par des mandats d’arrêt, Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, (Ali Kushayb), un ancien chef des milices janjawides, arrêté trois jours plus tôt en République centrafricaine et transféré la veille à La Haye.  Elle disait en outre son optimisme quant à l’ouverture d’un nouveau chapitre dans sa coopération avec le Soudan, parlant de l’ouverture d’une fenêtre d’opportunité et appelant à agir « ensemble pour rendre enfin justice aux victimes du Darfour ».  Elle jugeait essentielle l’exécution des autres mandats d’arrêts, alors que quatre suspects avaient été arrêté fin 2019 au Soudan, dont l’ancien Président soudanais Omar el-Béchir.  Les pays européens appuyaient les demandes de la procureure et le Royaume-Uni lui suggérait de se rendre au Soudan, y compris au Darfour.  Au nom du principe de complémentarité de la CPI, plusieurs autres membres du Conseil demandaient, à l’image de la Tunisie, de laisser les tribunaux soudanais exercer leur compétence.  La République dominicaine y voyait l’occasion d’une « première étape parfaite » dans une relation fructueuse de coopération entre le Soudan et la CPI; l’Afrique du Sud saluait la possibilité évoquée par le Soudan de juger les suspects à Khartoum devant un tribunal hybride. 

Le 11 décembre, Mme Bensouda, qui avait pu se rendre en octobre avec son équipe au Soudan pour la première fois en 13 ans, déclarait au Conseil avoir eu des discussions fructueuses avec les autorités soudanaises, qui n’avaient toutefois pas encore réagi au projet de mémorandum d’accord sur les modalités de coopération.  Elle demandait donc au Conseil de leur faire comprendre qu’elles devaient apporter concrètement et rapidement leur entière coopération à la Cour, comme le prévoyait d’ailleurs l’Accord de Djouba. 

Soudan du Sud

- 6 séances publiques: 4 mars, 12 mars, 29 mai, 23 juin, 19 septembre, 15 décembre

- 2 résolutions: 2514 (2020), 2521 (2020)

Voir aussi: Soudan; Abyei

La situation politique s’est lentement améliorée avec la mise en œuvre très progressive de « l’Accord revitalisé » du 12 septembre 2018.  Dirigée par David Shearer, la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) a vu son mandat reconduit en mars dans les mêmes termes, mais les perspectives d’une reconfiguration de son mandat en 2021, esquissés dès mars, se confirmaient en décembre. 

L’année débutait sous de bons auspices: le 4 mars, M. Shearer et les membres du Conseil se félicitaient de l’accord conclu le 22 janvier entre le Président Salva Kiir et Riek Machar, qui devait permettre de former un gouvernement de transition dans lequel ce dernier serait Premier Vice-Président.  Ils saluaient l’engagement de l’Union africaine, de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et des pays de la région, ainsi que la médiation de la Communauté de Sant ‘Egidio, qui avaient permis d’obtenir un cessez-le-feu de la part de groupes non parties à l’Accord de Khartoum.  Si plusieurs membres, comme l’Allemagne ou la France, faisaient preuve de prudence sinon de scepticisme, la Belgique voyait « de vraies raisons d’être optimiste » et le Niger rappelait que « sur le chemin de la paix, il n’y a pas de petits pas ».

Le 12 mars, le Conseil prorogeait d’un an le mandat de la MINUSS avec les mêmes mandat et plafonds d’effectifs.  Les États-Unis, pays porte-plume pour ce texte, se félicitaient de voir le mandat renouvelé pour la première fois dans un contexte positif, évoquant notamment la création du Gouvernement provisoire d’union nationale.  La résolution 2514 (2020) demandait aussi au Secrétaire général de procéder à un examen stratégique indépendant de la Mission visant à lui présenter, pour le 15 décembre, des « recommandations détaillées en vue d’une reconfiguration possible du mandat de la MINUSS afin de tenir compte de l’évolution du processus de paix ».

Le 29 mai, c’est sur la toujours épineuse question des sanctions et surtout de l’embargo sur les armes que se prononçait le Conseil, qui prolongeait les deux mesures pour un an.  La résolution 2521 (2020) était adoptée par 12 voix pour et 3 abstentions (Afrique du Sud, Chine et Fédération de Russie).  Le Niger, qui s’était abstenu en 2019, expliquait son vote favorable par le fait que la résolution prévoyait un « bilan à mi-parcours de ces mesures le 15 décembre 2020 au plus tard », le Conseil se déclarant « prêt à envisager de les adapter ». 

Lors des réunions trimestrielles du 23 juin puis du 19 septembre, M. Shearer faisait état de lents progrès dans la mise en œuvre de l’accord de 2018, en particulier la formation du Gouvernement d’union nationale et la nomination des gouverneurs des différents États, mais s’inquiétait des retards dans la réforme du secteur de la sécurité et de la poursuite des violences intercommunautaires, ainsi que de la pandémie et des inondations saisonnières de l’automne, qui aggravaient encore une situation humanitaire déjà déplorable.

Les mêmes constats prévalaient lors de la séance du 15 décembre, mais le Représentant spécial y préparait déjà le renouvellement en mars de la MINUSS en estimant que les nouvelles circonstances exigeaient une évolution du mandat de la Mission, comme l’indiquait le rapport du Secrétaire général examiné.  Celui-ci mentionnait la transformation des sites de protection des civils, « appelés à devenir des camps de déplacés » et que le Gouvernement sud-soudanais était parvenu à prendre en main et diriger.  M. Shearer précisait que le retrait des Casques bleus de ces tâches « passives et statiques » permettrait leur redéploiement vers les zones où la vie des civils est menacée.  « Conserver les actifs pour être agiles et proactifs est essentiel à notre efficacité », ajoutait le Représentant spécial, qui n’en parlait pas moins de « réduction graduelle des effectifs globaux de la force ».  Les recommandations détaillées demandées en mars par le Conseil lui seraient communiquées « à brève échéance ».  Par ailleurs, les « A3+1 » et la Chine souhaitaient que l’examen à mi-parcours de l’embargo sur les armes promis dans la résolution 2521 (2020) permette de lever les sanctions, ce à quoi s’opposaient la France et l’Allemagne.

Abyei

- 4 séances publiques: 28 avril, 14 mai, 22 octobre, 12 novembre

- 2 résolutions: 2519 (2020), 2550 (2020)

Voir aussi: Soudan; Soudan du Sud

Le réchauffement des relations entre le Soudan et le Soudan du Sud n’a pas encore permis de trouver une solution à la question d’Abyei, ce territoire que les deux États se disputent depuis l’indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.  Le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA) a été de nouveau reconduit, dans les mêmes termes et par périodes de six mois, jusqu’au 15 mai 2021.  Le Conseil a toutefois demandé au Secrétaire général de lui présenter des options pour une « stratégie de sortie viable » de cette force intérimaire désormais présente depuis plus de 10 ans. 

Le 28 avril, le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix Jean-Pierre Lacroix avertissait le Conseil que, malgré l’amélioration continue des relations entre le Soudan et le Soudan du Sud, il était peu probable que des progrès soient faits à court ou moyen terme dans la détermination du statut final d’Abyei.  L’Envoyé spécial pour la Corne de l’Afrique, Parfait Onanga-Anyanga, précisait que les deux pays étaient encore trop concentrés sur leurs propres conflits internes.  Quant à l’Union africaine, elle était elle aussi prise par d’autres priorités, y compris le développement de la pandémie de COVID-19 sur le continent.  Les membres du Conseil pouvaient toutefois noter que le Soudan avait réitéré son engagement à l’égard de tous les accords signés avec le Soudan du Sud, en particulier l’Accord du 20 juin 2011 concernant les arrangements provisoires pour l’administration et la sécurité de la zone d’Abyei et l’Accord de coopération de 2012.  Le représentant du Soudan expliquait en outre que les deux pays étaient convenus, en janvier, de créer un mécanisme conjoint de protection des populations civiles à Abyei.

Suivant les recommandations du Secrétaire général, le Conseil décidait le 14 mai, par sa résolution 2519 (2020), de proroger jusqu’au 15 novembre la FISNUA, avec le même mandat et les mêmes effectifs, en reportant le retrait prévu de 295 soldats jusqu’à ce que le Secrétaire général lève la suspension des rapatriements de troupes, décidée en raison de la pandémie.

La signature le 3 octobre, à Djouba, d’un accord de paix entre le Gouvernement de transition du Soudan et plusieurs mouvements de la rébellion armée dans ce pays, facilitée par les autorités du Soudan du Sud, était largement saluée le 22 octobre au Conseil, en particulier par ceux de ses membres partisans de « solutions africaines aux problèmes africains ».  Les « Occidentaux » se montraient plus réservés, notamment parce que, comme le notait le Royaume-Uni, le rapprochement entre Khartoum et Djouba ne s’était toujours pas traduit sur le terrain à Abyei.  M. Lacroix, qui d’un côté qualifiait d’« évolution politique sans précédent » la nomination par chacune des deux capitales de son propre administrateur en chef pour Abyei, faisait observer de l’autre que les progrès enregistrés restaient minimes et la situation, instable.  Il demandait donc au Conseil de renouveler une fois encore pour six mois le mandat de la FISNUA.  Les membres du Conseil en étaient d’accord mais la France rappelait que la Force, intérimaire, n’avait « pas vocation à figer éternellement une situation sans perspective politique de règlement du conflit ».  Les États-Unis étaient encore plus clairs: la FISNUA devait se poursuivre mais il était temps « d’envisager un avenir à Abyei sans la présence de la communauté internationale ».  Plusieurs membres du Conseil dénonçaient en outre les blocages imposés par les deux Soudan, qui empêchaient toujours de concrétiser la forte augmentation de la composante de police de la FISNUA que le Conseil avait décidée dès mai 2019.

De fait, la résolution 2550 (2020), que le Conseil adoptait unanimement le 12 novembre, prorogeait le mandat de la FISNUA jusqu’au 15 mai 2021, avec les mêmes plafonds pour les effectifs en uniforme.  Tout en demandant aux pays concernés de faciliter le déploiement des policiers prévus, le Conseil mentionnait pour la première fois la question de consultations conjointes à mener par le Secrétaire général avec les Gouvernements soudanais, sud-soudanais et éthiopien ‑le seul État fournisseur de contingents à la FISNUA- « afin de discuter de la stratégie de sortie de la FISNUA ».  Le Conseil demandait au Secrétaire général de lui remettre avant le 31 mars 2021 un rapport sur les différentes options, « lesquelles devront faire primer la sûreté et la sécurité des civils vivant à Abyei, tenir compte de la stabilité de la région et comprendre une option de retrait et de sortie responsables de la FISNUA qui ne soit pas limitée par la mise en œuvre des accords de 2011 ».    

AMÉRIQUE LATINE ET CARAÏBE

Colombie

- 5 séances publiques: 13 janvier, 14 avril, 14 juillet, 25 septembre, 14 octobre

- 1 résolution: 2545 (2020)

Le Conseil a continué de suivre et soutenir la mise en œuvre de l’Accord final de paix du 24 août 2016.  À la demande du Président de la Colombie, après accord entre le Gouvernement et l’ancienne rébellion armée des FARC, le Conseil a de nouveau reconduit pour un an la « Mission de vérification », en ouvrant la voie à une extension de son rôle.  Nommée Ministre des affaires étrangères de Colombie en novembre 2019, Mme Claudia Blum Capurro de Barberi a participé aux quatre réunions trimestrielles. 

La politique de « la paix par le droit » en Colombie est irréversible, assurait le 13 janvier aux membres du Conseil de sécurité la nouvelle Ministre colombienne des affaires étrangères, tandis que le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification, Carlos Ruiz Massieu, faisait part de nouveaux progrès importants dans le processus de paix.  Parmi ceux-ci figurait le succès des élections locales et départementales du 27 octobre 2019, marquées par la première participation du parti politique Force alternative révolutionnaire du peuple (FARC), issu de l’ancien principal mouvement de lutte armée.  M. Ruiz Massieu n’en notait pas moins des « menaces sérieuses », touchant en particulier à la sécurité des dirigeants sociaux et des anciens combattants.  Reprenant son leitmotiv, il appelait donc le Conseil à poursuivre son appui à une mise en œuvre complète de l’Accord de paix.  Les membres du Conseil approuvaient.  Les États-Unis saluaient ainsi le lancement par le Gouvernement de « conversations nationales » en réponse à d’importantes mobilisations sociales, en souhaitant qu’elles facilitent l’intégration des anciens combattants et renforcent la présence du Gouvernement et l’octroi de services dans les territoires reculés. 

Le 14 avril, le Chef de la Mission de vérification rappelait au Conseil les trois priorités affichées par le Secrétaire général: protéger par tous les moyens les défenseurs des droits de l’homme, les figures de la société civile et les anciens combattants des FARC, toujours cibles de violences; renforcer les bases du processus de réintégration à plus long terme; et continuer de placer les communautés, en particulier les victimes, au centre des efforts de consolidation de la paix.  Il saluait aussi le cessez-le-feu unilatéral déclaré pour le mois d’avril par l’Armée de libération nationale (ELN), dont Mme Blum contestait toutefois la réalité.  Un jeune colombien invité à présenter ses espoirs pour le pays ne cachait pas ses inquiétudes face au possible impact économique de la pandémie de COVID-19 sur les projets productifs des anciennes victimes et anciens combattants.  « La paix en Colombie ne peut ni ne doit être une victime de la pandémie », lançait M. Ruiz Massieu. 

C’est moins la COVID-19 que le rythme des assassinats d’anciens combattants des FARC, de membres des communautés autochtones et afro-colombiennes, de défenseurs des droits de l’homme et de figures de la société civile -rythme que la pandémie n’avait pas ralenti- qui constituait la grande préoccupation du Représentant spécial lorsqu’il s’adressait, le 14 juillet, devant le Conseil de sécurité, réuni pour la première fois physiquement depuis quatre mois.  La Ministre des affaires étrangères le reconnaissant elle aussi, la séance portait sur l’impératif de renforcer la protection des personnes ciblées ainsi que les poursuites judiciaires contre les auteurs de ces actes.  La France disait prendre note avec intérêt de l’aspiration des parties colombiennes à confier aux Nations Unies un rôle de vérification de l’application des sanctions de la Juridiction spéciale pour la paix.  Elle estimait que ce système de justice transitionnelle unique, constituant un des aspects les plus innovants de l’Accord de paix, devrait à ce titre être le plus possible conforté et légitimé.

Cette aspiration était prise en compte par le Conseil de sécurité quand il adoptait, le 25 septembre, sa résolution 2545 (2020), qui reconduisait jusqu’au 25 septembre 2021 le mandat de la Mission de vérification.  Rappelant que « l’Accord final prévoit que la Mission de vérification jouera un rôle dans le contrôle de l’application des peines prononcées par la Juridiction spéciale pour la paix », le Conseil ouvrait la voie à un tel rôle en se déclarant « prêt à envisager, en temps opportun, d’intégrer cette tâche dans le mandat de la Mission de vérification, à la lumière des résultats du processus de consultation en cours sous la coordination du Gouvernement colombien ».

Lors de la dernière réunion de 2020 que le Conseil consacrait à la Colombie, le 14 octobre, Mme Blum se félicitait de la résolution adoptée trois semaines plus tôt, estimant qu’il serait désormais possible d’évaluer la réelle contribution des FARC à la vérité, aux réparations et à la justice.  Pour sa part, le Représentant spécial mettait en avant les résultats « historiques et indéniables » enregistrés, comme le désarmement et la transition des FARC-EP vers un parti politique.  Mais il rappelait aussi les « énormes défis » toujours présents et en particulier, une fois encore, les assassinats d’anciens membres des FARC, de dirigeants communautaires et de militants des droits de l’homme.  À l’image de la France, qui appelait à reconnaître « avec lucidité » qu’un certain nombre de dispositions de l’Accord restaient à mettre en œuvre, plusieurs membres du Conseil rappelaient que ses différents volets étaient indissociables. 

Haïti

- 4 séances publiques: 20 février, 19 juin, 5 octobre, 15 octobre

- 1 résolution: 2547 (2020)

L’année 2020 a vu se poursuivre et s’aggraver l’impasse politique dans laquelle le pays avait replongé dès l’automne 2019, au moment même de la fermeture de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), opération de maintien de la paix remplacée par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).  Ce dernier a été reconduit en octobre pour un an, avec le même mandat. 

Le 20 février, la Représentante spéciale du Secrétaire général et Chef du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), Helen La Lime, décrivait une crise marquée par le report sine die des élections prévues en octobre 2019, l’absence de gouvernement investi par le Parlement, l’expiration des mandats de tous les élus locaux et de la plupart des parlementaires, le tout dans un pays s’enfonçant toujours plus profondément dans la récession économique et gangrené par les gangs.  « Nous sommes face à une crise constitutionnelle et à une violence rampante qui mettent en péril les progrès enregistrés par les missions précédentes », déplorait la République dominicaine, qui rappelait qu’elle avait exprimé son désaccord en 2019 sur la fermeture de la MINUJUSTH, jugée précipitée.  L’Allemagne insistait sur la nécessité de renforcer la Police nationale haïtienne.  La France appelait à « regarder en face » les causes profondes de la crise sociopolitique en Haïti.  Elle n’en saluait pas moins, comme plusieurs autres membres du Conseil, le rôle d’assistance joué par le BINUH.

Le 19 juin, c’est une situation encore aggravée par la pandémie que la Chef du BINUH décrivait au Conseil, même si le nombre de cas était relativement limité par rapport à d’autres pays de la région.  Mme La Lime estimait que le cercle vicieux de la méfiance, des récriminations et de la violence recommençait à définir la dynamique de la politique haïtienne et jugeait de plus en plus évidente la nécessité d’une profonde réforme pour le briser et « créer les conditions de la stabilité institutionnelle, de la bonne gouvernance et de l’état de droit ».  Elle ajoutait toutefois qu’une telle réforme ne serait possible que si elle résultait d’un processus véritablement national combinant un leadership fort et des efforts réels de toutes les parties prenantes pour mettre de côté leurs intérêts politiques étroits.  Au représentant d’Haïti, qui réclamait « plus de solidarité, d’affabilité et de souplesse de la part des donateurs bilatéraux et multilatéraux » ainsi que des ressources « adéquates et prévisibles », le Président de la Fédération des barreaux d’Haïti rétorquait qu’au vu des ressources investies au fil des décennies dans le pays, la détérioration de la situation était totalement « incompréhensible ».  Estimant que les causes essentielles de l’instabilité n’avaient pas été réglées, il interpellait le « Groupe des Amis d’Haïti », dont plusieurs membres du Conseil, pour leur demander comment ils pouvaient permettre autant de violence et de détournements de fonds.  « N’avez-vous pas les moyens de demander des comptes à un État? » leur lançait-il. 

Le tableau était encore noirci par l’assassinat, le 28 août, du Président du barreau de Port-au-Prince lorsque le Conseil examinait à nouveau la situation du pays, le 5 octobre.  Plusieurs membres du Conseil déploraient un climat d’impunité encore renforcé par l’absence totale de mesures concrètes de la part du système judiciaire haïtien pour ouvrir des poursuites judiciaires face à la montée de la violence.  Certains, dont les « A3+1 », souhaitaient la convocation par les différents acteurs haïtiens d’un dialogue national et la formation rapide d’un gouvernement pour sortir de l’impasse politique.  Plusieurs estimaient que le caractère multidimensionnel de la crise haïtienne rendait essentiel le rôle d’accompagnement des autorités par le BINUH et plaidaient pour la prorogation de son mandat, ainsi que l’octroi des moyens nécessaires à sa pleine mise en œuvre.

Le 15 octobre, le Conseil prorogeait pour un an le mandat du BINUH dans les mêmes termes.  La résolution 2547 (2020) n’était adoptée que par 13 voix pour et 2 abstentions, celles de la Chine et de la Fédération de Russie.  La Chine estimait que cette « prorogation technique » ne répondait en rien à la « grave » situation du pays et la Fédération de Russie reprochait au texte de ne pas même mentionner l’obligation pour les autorités haïtiennes de respecter la Constitution.  Malgré son vote positif, la République dominicaine jugeait elle aussi le mandat du BINUH « insuffisant » par rapport aux objectifs recherchés et ajoutait qu’il aurait dû être renforcé.  La France répliquait que la résolution adoptée attestait de la vigilance de la communauté internationale et demandait que la lutte contre la corruption soit « la priorité absolue de la classe politique en Haïti ».  Nous continuerons à exiger des acteurs politiques haïtiens qu’ils fassent des progrès pour régler des problèmes connus de longue date, ajoutaient les États-Unis, pays porte-plume. 

Venezuela

- 1 séance publique: 20 mai

En 2019, le Conseil de sécurité avait consacré quatre séances entre janvier et avril à la situation au Venezuela, à la demande des États-Unis qui souhaitaient y voir examiner la répression de manifestations de contestation consécutives à l’élection présidentielle, puis les conséquences pour la région de la fuite dans les pays voisins de plusieurs centaines de milliers de Vénézuéliens.  La tenue même des réunions avait été contestée et celles-ci n’avaient débouché sur aucune décision, les projets de résolution concurrents présentés ayant été rejetés.

En 2020, la situation dans le pays revenait à l’ordre du jour du Conseil le 20 mai, cette fois à la demande de la Fédération de Russie, qui souhaitait une discussion sur l’« opération Gédéon », une tentative de déstabilisation que le Gouvernement vénézuélien avait dénoncé dans une lettre envoyée une semaine plus tôt au Président du Conseil et mettant en cause les États-Unis et la Colombie.  « Quel est le rôle de la Colombie dans tout ça? » demandait la Fédération de Russie, qui voyait dans ces violations de la souveraineté du Venezuela par des agents étrangers une menace « directe » à la paix, à la sécurité et à la stabilité non seulement du pays mais aussi de la région.  La Colombie s’offusquait de ces « accusations irresponsables » et les États-Unis qualifiaient la séance de « perte de temps » et de tentative du « régime illégitime de Maduro » pour détourner l’attention de ses meurtres et exécutions extrajudiciaires.  Le Royaume-Uni estimait que le Conseil avait été convoqué pour parler d’une opération indépendante menée par un groupe de mercenaires « voyous ».  Membre du Conseil issus de la région, Saint-Vincent-et-les Grenadines y voyait la dernière en date d’une longue liste d’agressions injustifiées conduites, depuis deux décennies, contre une nation souveraine; la République dominicaine appelait à « une enquête factuelle et indépendante » avant toute conclusion, qui serait à ce stade « prématurée ».

La Fédération de Russie présentait au Conseil un projet de déclaration à la presse que Saint-Vincent-et-les Grenadines jugeait « factuel et équilibré », par lequel le Conseil aurait demandé que la situation actuelle au Venezuela soit réglée par un dialogue entre Vénézuéliens, sans ingérence extérieure et par des moyens pacifiques et politiques, conformément au Chapitre VI de la Charte des Nations Unies et dans le cadre de la Constitution vénézuélienne et du plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du pays.  Le texte restait sans suite.  Le Conseil n’a pas réexaminé la situation au Venezuela en séance publique en 2020.

EUROPE

Chypre

- 3 séances publiques: 30 janvier, 28 juillet, 9 octobre

- 2 résolutions: 2506 (2020), 2537 (2020)

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/9

Le Conseil de sécurité a par deux fois, les 30 janvier et 28 juillet, prorogé de six mois le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), la seconde fois jusqu’au 31 janvier 2021.  Les deux résolutions ont été adoptées à l’unanimité. 

Dans chacun des deux textes au dispositif presqu’identique, le Conseil se félicitait de la réunion trilatérale tenue à Berlin le 25 novembre 2019 par les dirigeants des deux communautés et le Secrétaire général, durant laquelle les deux parties avaient réaffirmé leur attachement à une fédération bicommunautaire et bizonale fondée sur l’égalité politique.  Il se félicitait également que le Secrétaire général ait accepté de poursuivre ses efforts pour parvenir à un accord sur un cadre de référence devant constituer un point de départ consensuel pour des négociations.  Il ne s’en déclarait pas moins préoccupé par la nouvelle escalade et l’aggravation des tensions en Méditerranée orientale au sujet de l’exploration d’hydrocarbures, lançait un appel à l’apaisement des tensions et invitait toutes les parties concernées à s’abstenir de tout acte ou propos susceptible d’entamer les chances de succès.

En outre, en juin, le Conseil se disait conscient de l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les perspectives et les capacités de négociation mais s’inquiétait de la fermeture non coordonnée de points de passage sur la Ligne verte, qui avait interrompu la plupart des contacts bicommunautaires, au risque « d’anéantir les progrès accomplis sur ce plan depuis 2003 ».

Le 9 octobre, le Conseil publiait une déclaration présidentielle après l’ouverture au public, la veille, par les autorités chypriotes turques, pour la première fois depuis 1974, de la plage de Varosha.  Cette ville anciennement peuplée de Chypriotes grecs est aujourd’hui vide et sous le contrôle de l’armée chypriote turque.  Le Conseil s’est préoccupé de Varosha dans plusieurs résolutions, notamment les résolutions 550 (1984) et 789  (1992), pour s’opposer à toute tentative de modification de sa population.  Après des consultations menées à la demande de la République de Chypre, considérée par l’ONU comme souveraine sur l’ensemble de l’île alors que la « République turque de Chypre-Nord » n’est reconnue que par la Turquie, la déclaration présidentielle réaffirmait le statut de Varosha tel que défini dans ses précédentes résolutions, demandait le rappel de la mesure annoncée et appelait à éviter « toute action unilatérale qui pourrait accroître les tensions sur l’île ». 

Bosnie-Herzégovine

- 2 séances publiques: 6 mai, 5 novembre

– 1 résolution: 2549 (2020)

En cette année du vingt-cinquième anniversaire des Accords de Dayton, le Conseil de sécurité, lors de ses deux réunions semestrielles, n’a pu une fois de plus que constater les blocages politiques en Bosnie-Herzégovine.  La Fédération de Russie a continué de s’en prendre au Bureau du Haut-Représentant, Valentin Inzko, qu’elle juge « obsolète » mais que défendent notamment les pays « occidentaux » membres du Conseil.  En novembre, la reconduction pour 12 mois supplémentaires de la force multinationale de stabilisation de l’Union européenne (EUFOR ALTHEA) s’est faite sans difficulté.  Mi-novembre, le pays a tenu des élections locales marquées par un reflux des différents partis nationalistes. 

Le 6 mai, M. Inzko pouvait saluer le récent lancement par la Bosnie-Herzégovine du processus de mise en œuvre des 14 priorités fixées en mai 2018 par la Commission européenne dans son avis sur la demande d’adhésion du pays à l’Union européenne.  Il saluait aussi la collaboration entre les deux entités fédérales ‑la Fédération croato-musulmane et la Republika Srpska- dans la lutte contre la COVID-19 mais disait craindre un retour rapide au statu quo d’avant la pandémie, marqué par le blocage des décisions au niveau fédéral du fait de la coalition au pouvoir en Republika Srpska.  Il rappelait que la Fédération n’avait toujours pas de gouvernement, que la ville de Mostar attendait depuis plus de 10 ans de pouvoir organiser des élections locales et que celles prévues dans le pays début octobre étaient menacées, faute de budget national.  La Fédération de Russie accusait une fois de plus le Haut-Représentant de présenter un rapport « biaisé » et de multiplier des arguments « inventés de toutes pièces » pour préserver indéfiniment « un protectorat obsolète » sur l’État souverain et indépendant de Bosnie-Herzégovine.

Le 5 novembre, M. Inzko dressait au Conseil un bilan mitigé de la « paix imparfaite » apportée par les Accords de Dayton 25 ans plus tôt.  Il vantait l’« énorme succès » qu’avait constitué le retour à la paix mais déplorait que la communauté internationale ait investi sa confiance « dans certains hommes politiques qui ont utilisé notre bonne volonté pour relancer des politiques nationalistes et de division » et pour qui, 25 ans après Dayton, le processus de réconciliation, « qui ne devrait plus être un problème, n’a pas même commencé ».  Il condamnait aussi le révisionnisme, voire le négationnisme, affiché par certains 25 ans après le génocide de Srebrenica.  Alors que plusieurs des membres du Conseil prenaient note des « frustrations » du Haut-Représentant, la Fédération de Russie estimait que c’était lui qui « empêchait la Bosnie-Herzégovine de progresser ». 

Le rôle joué par l’Union européenne n’était en revanche pas contesté et c’est à l’unanimité que le Conseil de sécurité reconduisait une nouvelle fois pour 12 mois l’autorisation donnée à la force multinationale de stabilisation EUFOR ALTHEA par la résolution 2549 (2020), ce que saluait le représentant de la Bosnie-Herzégovine, qui y voyait une contribution au « renforcement de capacités et de formation » des forces armées de son pays. 

Kosovo

- 2 séances publiques: 24 avril, 21 octobre

Conformément à l’accord accepté le 7 février 2019 entre les membres du Conseil, ce dernier n’a tenu en 2020 que deux réunions consacrées à la situation au Kosovo.  L’année a été marquée par un apaisement des relations commerciales entre le Kosovo et la Serbie.  Les relations politiques n’en restaient pas moins difficiles, chacune des parties campant sur ses positions avec le soutien de ses partenaires au sein du Conseil: les pays occidentaux pour le Kosovo, et la Fédération de Russie pour la Serbie.

Le 24 avril, alors que le Kosovo affrontait depuis mi-mars à la fois la pandémie de COVID-19 et une crise politique, le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), Zahir Tanin, plaidait pour une approche internationale coordonnée à l’appui du dialogue facilité par l’Union européenne, toujours en panne.  Les membres du Conseil pouvaient se féliciter de la bonne coopération régionale pour lutter contre la pandémie, ainsi que de la suppression le 1er avril des droits de douane à 100% imposés quelques mois plus tôt par le Kosovo aux biens en provenance de Serbie et de Bosnie-Herzégovine.  Les États-Unis demandaient une nouvelle fois la clôture de la MINUK mais la Fédération de Russie prédisait que les tentatives des États-Unis et de l’Union européenne pour créer les conditions du dialogue échoueraient si elles cherchaient à ignorer les dispositions de la résolution 1244 (1999), texte que la Chine considérait comme une base juridique importante pour le règlement de la question du Kosovo, ajoutant que le Conseil devait rester saisi de la question. 

Le 21 octobre, M. Tanin et les membres du Conseil pouvaient se réjouir de la reprise, mi-juillet, du dialogue entre Belgrade et Pristina sous les auspices de l’Union européenne après 20 mois de blocage, ainsi que de la conclusion, le 4 septembre à Washington, d’accords devant ouvrir la voie à une normalisation économique.  Les États-Unis saluaient « l’immense courage » dont avaient fait preuve les dirigeants des deux camps en signant l’accord « historique » de Washington.  La France rappelait toutefois qu’il était « essentiel que tous les sujets contentieux soient traités, y compris les plus sensibles », en particulier la question récurrente de l’Association des municipalités à majorité serbe du Kosovo.  Toute description des relations entre le Kosovo et la Serbie est incomplète sans la vision de l’Union européenne, ajoutait l’Allemagne, tandis que de la Belgique jugeait un accord « global, définitif et juridiquement contraignant » indispensable pour que les deux parties puissent continuer à progresser sur la voie de l’intégration européenne.  La Fédération de Russie déclarait soutenir les efforts des États-Unis comme de l’Union européenne mais répétait que toute solution devait trouver racine dans la résolution 1244 (1999) et qu’aucune tentative pour imposer d’autres solutions ne donnerait les résultats escomptés.

Ukraine

- 1 séance publique: 18 février

Voir aussi: Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales

Le Conseil de sécurité a examiné la situation en Ukraine, à la demande de la Fédération de Russie, le 18 février, au lendemain du cinquième anniversaire de l’adoption de la résolution 2202 (2015), par laquelle le Conseil avait entériné les accords de Minsk, conclus six jours plus tôt pour tenter de mettre fin au conflit entre le pouvoir central à Kiev et les mouvements séparatistes pro-russes du Donbass.  L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui dispose d’une mission spéciale d’observation en Ukraine, était représentée par le Chef de celle-ci ainsi que par la Représentante spéciale de la présidence de l’OSCE. 

Lors de la réunion, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Rosemary DiCarlo, informait le Conseil de faits permettant d’espérer des progrès dans la mise en œuvre des accords de Minsk.  Elle mentionnait en particulier l’appel à des mesures immédiates de stabilisation lancé lors du Sommet, tenu à Paris en décembre 2019, du « format Normandie », -France, Allemagne, Fédération de Russie et Ukraine- l’échange de prisonniers d’envergure qui avait suivi et l’avancement des discussions sur de nouvelles zones de désengagement.  Elle concédait toutefois que ces premiers signes encourageants restaient limités et facilement réversibles.  Les représentants de l’OSCE parlaient d’un « calme relatif, pas d’un silence complet » des armes et faisaient état de centaines de violations du cessez-le-feu, certaines impliquant des armes qui auraient dû être retirées en vertu de l’Accord de Minsk.  Ils déploraient surtout « qu’en dépit de progrès indéniables, la confiance et la volonté politique manquent pour une véritable avancée ».

La France rappelait que l’objectif des dirigeants du format Normandie restait la mise en œuvre des clauses politiques des accords de Minsk et l’Allemagne saluait la volonté du Président ukrainien de parvenir à un règlement, tout en accusant la Fédération de Russie de n’avoir pas mis en œuvre les accords.  Cette dernière voyait dans la mise en œuvre des accords la seule chance pour les autorités ukrainiennes de regagner la confiance des populations du Donbass mais ajoutait qu’« il y a deux parties au conflit, le Donbass et Kiev, pas trois » et que le conflit ne pourrait être résolu tant qu’il n’y aurait pas de dialogue entre elles.  Elle précisait que le format Normandie ne pouvait remplacer ces accords.  Les États-Unis rappelaient que leurs sanctions unilatérales à l’encontre de la Fédération de Russie demeureraient en vigueur jusqu’à ce que l’Ukraine reprenne le contrôle de l’ensemble de son territoire.

QUESTIONS THÉMATIQUES

COVID-19

- 6 séances publiques: 1er juillet, 2 juillet, 12 août, 9 septembre, 24 septembre, 3 novembre

- 1 résolution: 2532 (2020)

Voir aussi: maintien de la paix et de la sécurité internationales; Consolidation et pérennisation de la paix; Opérations de paix des Nations Unies

Si le Conseil n’a pas créé de point spécifique consacré à la pandémie, il a tenu sous d’autres intitulés –« maintien de la paix et de la sécurité internationales » et « consolidation et pérennisation de la paix »- des séances entièrement dédiées à la COVID-19, regroupées ici.  La pandémie a en outre imprégné l’ensemble des débats du Conseil à partir de la fin février, y compris lors de l’adoption de résolutions.  Tenus sous forme de VTC, les trois débats ouverts consacrés directement à la COVID-19 n’ont pas permis aux États Membres non membres du Conseil de participer directement mais plusieurs dizaines d’entre eux ont, à chaque fois, apporté des contributions écrites. 

Le 1er juillet, soit plus de trois mois après l’appel au cessez-le-feu mondial du Secrétaire général, le Conseil adoptait la résolution 2532 (2020) par laquelle il exigeait la cessation générale et immédiate des hostilités, apportait son soutien au Secrétaire général et demandait une pause humanitaire immédiate et d’au moins 90 jours consécutifs.  La cessation des hostilités excluait les opérations militaires dirigées contre Daech, Al-Qaida et tous les groupes que le Conseil avait désignés comme terroristes.  La présidence allemande parlait d’un « signe d’espoir que nous envoyons au monde ». 

Si l’adoption du texte était unanime, elle s’accompagnait d’explications de vote critiques.  Le Royaume-Uni jugeait « profondément décevant » le temps mis par le Conseil pour soutenir l’appel du Secrétaire général.  L’Afrique du Sud regrettait que la résolution « ait négligé d’aborder l’impact des sanctions ou des mesures coercitives unilatérales » et se disait « consternée » de l’abandon dans le texte final de la reconnaissance du rôle essentiel et dirigeant de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans la lutte contre la pandémie.  La Fédération de Russie faisait référence aux « négociations ardues » mais relevait que les membres du Conseil de sécurité étaient aussi « capables de dépasser leurs intérêts nationaux étroits et de relever les défis mondiaux de notre époque ».  La Chine voyait dans l’adoption une illustration du leadership du Conseil et parlait de « victoire pour le multilatéralisme », qualifié de « seul choix possible dans un monde confronté à de multiples défis » et opposé à l’unilatéralisme, qui « ne bénéficie d’aucun soutien et n’aboutira qu’à une impasse ».  Les États-Unis déploraient que le texte « manque cruellement de toute référence au fait que la transparence et le partage des données sont des aspects essentiels de la lutte contre ce virus ».

Le 2 juillet, lors d’un un débat ministériel en VTC consacré aux implications de la COVID-19 sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Secrétaire général mettait en garde contre le risque de voir des processus de paix fragiles mis à mal par la crise, «  surtout si la communauté internationale est distraite ».  Il appelait à tout faire pour éviter que les maladies ne soient délibérément utilisées comme une arme et jugeait nécessaire de renforcer le rôle de la Convention sur les armes biologiques.  Le Président du Comité international de la Croix-Rouge, Peter Maurer, insistait sur l’importance d’une distribution équitable du « vaccin du peuple ».  Plusieurs membres du Conseil insistaient une nouvelle fois sur le rôle essentiel d’un « multilatéralisme fort » pour surmonter les défis de la pandémie et appelaient à renforcer l’OMS, dont les États-Unis avaient déjà annoncé leur retrait.

Le 12 août, la présidence indonésienne du Conseil organisait un débat sur le thème « les pandémies et les défis de la pérennisation de la paix » auquel participaient notamment l’actuel Secrétaire général et son prédécesseur.  M. Guterres décelait dans la pandémie trois dangers majeurs: l’érosion de la confiance de l’opinion publique dans les autorités, soupçonnées de mal gérer la crise; la déstabilisation de l’ordre économique international; et la dégradation du tissu social.  Ban Ki-moon voulait y voir une « occasion générationnelle » pour l’ONU de contribuer à reconstruire en mieux.  Mais il dénonçait les « mois gaspillés » par le Conseil avant d’adopter sa résolution 2532 (2020) de soutien à l’appel au cessez-le-feu mondial du Secrétaire général, estimant que le désaccord entre ses membres avait affaibli son message et aggravé les situations instables.   L’Allemagne appelait le Conseil à doter les opérations de paix et les missions politiques spéciales de l’ONU des mandats et ressources leur permettant de relever les différents défis de la pandémie.  L’Indonésie craignait de voir les pays en conflit mis « hors-jeu » dans la « course au vaccin ».  La séance donnait aussi l’occasion à plusieurs intervenants, dont la Chine et la Fédération de Russie, de dénoncer les conséquences humanitaires des sanctions unilatérales et d’appeler à les lever.

Le 9 septembre, les Secrétaires généraux adjoints aux affaires politiques, aux opérations de paix et aux affaires humanitaires présentaient au Conseil un premier bilan de l’impact de la pandémie sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales et de l’impact de la résolution 2532 (2020).  Ils constataient les effets limités de l’appel du Secrétaire général au cessez-le-feu mais aussi de la pandémie sur la dynamique des plusieurs conflits et sur les opérations de maintien de la paix et appelaient le Conseil à faire preuve de coordination, d’unité et de solidarité.  Plusieurs membres du Conseil appelaient une nouvelle fois à la levée des sanctions unilatérales.  Les États-Unis s’en prenaient à la Chine, accusée de « défaillances », et à l’OMS dans une intervention qualifiée de « toxique » par la Fédération de Russie.  Le Niger demandait une nouvelle fois que le futur vaccin soit accessible aux plus faibles et aux moins nantis. 

Le 24 septembre, c’est encore la pandémie qui était au centre du Sommet annuel –cette fois virtuel- du Conseil, consacré à la « gouvernance mondiale post-COVID-19 », que le Secrétaire général souhaitait « déterminée, coordonnée, souple et prête à réagir à l’éventail des défis auxquels nous devons faire face », regroupant les États et élargie aux collectivités territoriales, aux entreprises et à la société civile.  La plupart des membres du Conseil défendaient, non sans divergences, la coopération internationale, et le multilatéralisme mais la séance n’échappait pas aux polémiques acerbes.  Les États-Unis, un des deux seuls États Membres à intervenir au simple niveau de sa représentante permanente, répétaient leur intention de « demander des comptes à la nation qui a déclenché ce fléau dans le monde: la Chine », qu’ils accusaient d’avoir dissimulé les origines et la dangerosité du virus, provoquant une vive réaction de la Chine dont le représentant s’écriait: « Ça suffit! » 

Le 3 novembre, Saint-Vincent-et-les Grenadines, qui venait de prendre la présidence du Conseil, organisait un débat ministériel consacré aux « facteurs contemporains de conflit et d’insécurité », en l’occurrence la pandémie de COVID-19 et les problèmes environnementaux.  La Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, Amina Mohammed, estimait que la pandémie avait mis en évidence la nécessité d’investir dans une gouvernance et des institutions inclusives et équitables et présentait le Programme de développement durable à l’horizon 2030 comme « notre ultime outil de prévention ».  « Il est fort peu probable que nous réussissions à nous mettre d’accord sur les mesures cruciales nécessaires pour lutter contre les changements climatiques », regrettait le Président de l’ECOSOC, Munir Akram, ce que confirmait le Vice-Ministre russe des affaires étrangères en rappelant son opposition à voir le Conseil traiter ces questions, préférant laisser cette tâche aux entités concernées de l’ONU.  Son homologue de l’Allemagne appelait au contraire le Conseil à assumer ses responsabilités en incluant le sujet dans son ordre du jour.

PAIX ET SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Maintien de la paix et de la sécurité internationales

- 4 séances publiques: 9 janvier (avec reprise les 10 et 13 janvier), 24 juillet, 17 septembre, 20 octobre  

- 1 résolution: 2546 (2020)

- 2 déclarations présidentielles: PRST/2020/1, PRST/2020/6

Voir aussi: COVID-19; Consolidation et pérennisation de la paix; Les jeunes, la paix et la sécurité; Paix et sécurité en Afrique; Terrorisme; Moyen-Orient; Libye; Non-prolifération (Iran)

Sous cette rubrique généraliste apparaissent notamment des débats, parfois ouverts, organisés sur des questions d’intérêt particulier pour les présidences mensuelles successives.  Plusieurs des séances tenues sous cet intitulé ont été reclassées sous d’autres rubriques: COVID-19; les jeunes et la paix et la sécurité; et Libye. 

Membre élu tout juste entrant au Conseil, le Viet Nam avait annoncé, pour marquer sa présidence, un débat consacré au respect de la Charte, prévu le 9 janvier.  Le jour dit, le Conseil commençait par adopter une déclaration présidentielle par laquelle il demandait aux États Membres de se conformer pleinement à la Charte, de la promouvoir et de la défendre.  La déclaration rappelait la détermination du Conseil à faire appliquer la Charte dans toutes ses activités et à œuvrer pour que ce texte, « outil indispensable » au maintien de la paix et de la sécurité internationales, soit mieux appliqué.

Toutefois, l’assassinat le 3 janvier par les États-Unis du général iranien Qassem Soleimani à Bagdad, après plusieurs attaques iraniennes contre des bases américaines en Iraq fin 2019, allait dominer le débat ouvert.  S’inquiétant du « niveau dangereux » des tensions politiques, notamment dans le Golfe, le Secrétaire général rappelait que la Charte demeurait « le cadre commun de la coopération internationale au service du bien commun ».  Il adressait alors un « message spécial » au Conseil pour rappeler que le privilège d’en être membre « s’accompagne de la responsabilité vitale de respecter les principes et les valeurs énoncés dans la Charte, en particulier s’agissant de prévenir et de régler les conflits ».  Les désaccords présents et passés ne doivent pas entraver l’action sur les menaces d’aujourd’hui, ajoutait-il, plaidant pour « éviter le deux poids, deux mesures » tout en précisant que la perception de celui-ci ne pouvait justifier l’absence de toutes normes.  « La guerre n’est jamais inévitable; c’est une question de choix – et souvent elle est le produit d’une simple erreur de jugement; la paix, elle aussi, n’est jamais inévitable; elle est le produit d’un travail acharné, et nous ne devons jamais la tenir pour acquise », déclarait M. Guterres. 

Les trois jours de débat, qui verraient l’intervention d’une centaine de délégations, étaient l’occasion d’appeler à traduire davantage en actions les dispositions du document fondateur, « instrument puissant et universel ».  Plusieurs États Membres subissant des conflits dénonçaient les atteintes à leur souveraineté et intégrité territoriale, en violation de la Charte, y compris l’Iraq, qui demandait qu’on lui épargne « une implication dans les conflits externes entre des États amicaux et alliés ».  De nouveaux appels étaient lancés pour encadrer le droit de veto des membres permanents. 

Les tensions entre États-Unis et République islamique d’Iran domineraient également l’examen d’ensemble de la situation dans la région du golfe Persique auquel la présidence russe conviait le Conseil le 20 octobre.  Plusieurs experts évoquaient les risques de conflits, attribués notamment à l’activisme iranien et à la politique de « pression maximale » des États-Unis à son encontre, mais aussi aux ambitions de plusieurs États de la région et à leurs perceptions divergentes, le tout en l’absence de mécanisme institutionnel permettant à chacun de faire valoir ses revendications et tenter de rapprocher les points de vue.  La Fédération de Russie en profitait pour rappeler son concept de sécurité collective dans le golfe Persique, présenté en 2019, et sa suggestion faite en août d’organiser un sommet des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, avec l’Iran et l’Allemagne, en vue d’arrêter ensemble les modalités d’un travail commun.  Les États-Unis rejetaient l’idée, convaincus que, pour promouvoir la paix et la sécurité dans la région, la communauté internationale n’avait pas besoin d’un nouveau mécanisme, mais seulement d’utiliser les outils à sa disposition « pour tenir l’Iran comptable de ses actes ». 

Par ailleurs, deux débats ouverts ont été organisés, en VTC, sur des thèmes liés à l’environnement.

Le 24 juillet, une cinquantaine de pays contribuaient au débat ministériel organisé par la présidence allemande sur le thème « Climat et sécurité ».  « L’urgence climatique est un danger pour la paix », déclarait au Conseil le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques et à la consolidation de la paix,  Miroslav Jenča, qui expliquait que, même sans lien direct avec les conflits, les changements climatiques exacerbent et créent de nouveaux risques.  Les Fidji jugeaient fondamentale la responsabilité du Conseil d’assurer des progrès soutenus dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat.  L’Allemagne demandait la nomination d’un représentant spécial sur le climat et la sécurité.  La France et la Belgique proposaient que le Secrétaire général vienne tous les deux ans présenter à l’Assemblée générale et au Conseil un rapport sur l’état des lieux des risques que représentent les changements climatiques pour la paix et la sécurité partout dans le monde. 

Le 17 septembre, un autre débat ministériel était consacré aux « effets humanitaires de la dégradation de l’environnement et paix et sécurité ».  Était en particulier abordé l’impact des sécheresses de plus en plus fréquentes et sévères, susceptibles de provoquer des émeutes contre les hausses de prix de produits de base ou encore des affrontements sur le partage de l’eau.  Plusieurs pays, dont la présidence nigérienne du Conseil, attiraient l’attention sur les régions du Sahel et du lac Tchad, où les conflits sapent la capacité des communautés à faire face aux changements climatiques.  La France renouvelait sa proposition de rapport biennal du Secrétaire général.  Saint-Vincent-et-les Grenadines appelait à incorporer les préoccupations humanitaires et de sécurité liées aux changements climatiques et à la dégradation de l’environnement dans tous les rapports sur les situations inscrites à l’ordre du jour du Conseil. 

Consolidation et pérennisation de la paix

- 3 séances publiques: 13 février, 3 décembre, 21 décembre

- 2 résolutions: 2553 (2020), 2558 (2020)

Voir aussi: COVID-19; Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Opérations de paix des Nations Unies; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales

L’année 2020 aura vu le troisième examen quinquennal du dispositif de consolidation de la paix.  Le 21 décembre, le Conseil adoptait sa résolution 2558 (2020) dans laquelle il se félicitait des progrès accomplis par les États Membres dans l’application des résolutions relatives à la consolidation et à la pérennisation de la paix et saluait « le rôle important » de la Commission de consolidation de la paix, à laquelle il demandait de « continuer à renforcer ses fonctions de conseil, de liaison et de rapprochement » pour soutenir les autorités nationales des pays dont elle a à connaître.  Le Conseil y soulignait l’importance des analyses conjointes et d’une planification stratégique efficace des activités de consolidation de la paix et notait également que le financement de telles activités restait un « défi majeur ». 

Le 13 février, une soixantaine de délégations participaient à un débat ouvert organisé par la présidence belge du Conseil sur la justice transitionnelle, en présence notamment de la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet.  De nombreux pays ayant connu cette forme de justice ‑Afrique du Sud, Népal, Colombie…- expliquaient que sous réserve d’être centrés sur les victimes, adaptés aux contextes nationaux et appliqués simultanément, les quatre piliers de cette justice -vérité, justice, réparation et garanties de non-récurrence- pouvaient transformer et fortifier les sociétés.  Le Conseil était invité à apporter sa contribution en luttant contre l’impunité et en traitant des causes indirectes des conflits ou des facteurs qui les exacerbent.

Le 3 décembre, la présidence sud-africaine du Conseil organisait un débat sur la réforme du secteur de la sécurité.  La Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique, Bintou Keita, rappelait qu’il s’agissait d’un « travail de longue haleine », dont le succès dépendait de la solidité du contrat social et de la confiance de la population, sur laquelle insistait également la Tunisie, qui parlait d’un « processus délicat ».  Les participants insistaient sur le caractère essentiel de l’appropriation nationale du processus.  L’aide apportée « ne doit pas être vue comme une tentative d’imposer des recettes toutes faites de l’extérieur » sans quoi elle serait mal perçue, voire rejetée, appuyait la Fédération de Russie.  Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de paix, Alexandre Zouev, mettait en avant les « partenariats stratégiques » et préconisait un renforcement de la coopération avec les organisations régionales.  La question du financement était amplement discutée, l’Union africaine et les membres africains du Conseil insistaient sur la nécessité d’un financement prévisible et durable, alors que les États-Unis demandaient aux États entreprenant une telle réforme d’« aligner leurs ressources nationales sur les promesses qu’ils font ». 

Le débat était suivi de l’adoption de la résolution 2553 (2020), par laquelle le Conseil précisait sa vision de la réforme du secteur de la sécurité, soulignant « l’importance cardinale » de l’appropriation nationale de ses mécanismes, lesquels devaient être adossés à des processus politiques nationaux ouverts à toutes les composantes de la société.  Le Conseil décidait aussi de continuer d’inscrire des éléments de réforme du secteur de la sécurité dans les mandats des missions qu’il créerait, en leur accordant « le degré de priorité voulu ».  Le Secrétaire général était prié de lui présenter, en septembre 2021, un rapport sur les mesures prises pour consolider l’approche globale de l’ONU en la matière. 

Sous l’intitulé « consolidation et pérennisation de la paix », le Conseil a également tenu deux débats ouverts, le 12 août et le 3 novembre, sur les pandémies et les défis de la pérennisation de la paix et les facteurs contemporains de conflit et d’insécurité.  Ces deux débats totalement dominés par la question de la pandémie ont été placées sous la rubrique spécifique « COVID-19 ». 

Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme

- 5 séances publiques: 7 février, 6 août, 24 août, 31 août, 29 décembre

- 1 résolution: 2560 (2020)  

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Organes subsidiaires; Moyen-Orient; Afghanistan; Iraq; Syrie; Paix et sécurité en Afrique

Le Secrétaire général adjoint au Bureau de lutte contre le terrorisme, Vladimir Voronkov, et la Chef de la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT), Michele Coninsx, ont présenté au Conseil deux rapports semestriels sur l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL/Daech), le 7 février et le 24 août.  La question du rapatriement des combattants terroristes étrangers détenus a fait voler en éclat le consensus habituel sur les questions relatives au terrorisme et à la lutte contre Daech. 

Lors de chaque séance, les deux responsables de la lutte contre le terrorisme aux Nations Unies avertissaient que, malgré sa défaite militaire en Syrie et l’élimination de son chef Abu Bakr al-Baghdadi en 2019, l’EIIL continuait de représenter une menace terroriste transnationale, qui parvenait à reconstituer des réseaux clandestins, à étendre son influence au Sahel et en Afrique de l’Ouest et risquait de prendre racine en Asie centrale, en particulier en Afghanistan. 

Au-delà, les hauts fonctionnaires mettaient en avant le sort des combattants terroristes prisonniers et de leurs familles.  La situation était particulièrement délicate dans le nord-est de la Syrie, où 100 000 personnes étaient détenues, dont 70 000 femmes et enfants placés dans le camp de Hol.  Entre la crise humanitaire ainsi créée et les risques d’évasion, de radicalisation et de violence dans ces camps, se posait la question du rapatriement.  Mme Coninsx jugeait que les abandonner serait « non seulement contraire aux principes d’humanité mais aussi contre-productif pour les efforts de lutte contre le terrorisme ». 

La question divisait les membres du Conseil.  Les États-Unis annonçaient leur intention de rapatrier leurs ressortissants présents en Syrie afin qu’ils rendent des comptes dans leur pays et mettaient en avant la nécessité de réinsérer et réhabiliter les enfants des combattants terroristes afin d’éviter de créer « une nouvelle génération de terroristes ».  La Fédération de Russie estimait que les combattants terroristes étrangers devaient être soit extradés vers leur pays d’origine, soit jugés sur place mais en aucune manière laissés en détention.  La France expliquait attacher une importance particulière à la prise en charge et au suivi des mineurs mais, comme le Royaume-Uni, estimait que les auteurs présumés de crimes devaient être jugés « au plus près de l’endroit où ces crimes ont été commis ». 

Déjà sensibles le 7 février, les divergences s’approfondissaient le 24 août.  La Fédération de Russie regrettait que certains membres du Conseil aient décidé de ne pas mener le « combat du rapatriement » au motif de donner la priorité aux questions de droits de l’homme.  Les États-Unis se disaient déçus que les efforts de la présidence indonésienne du Conseil pour rédiger un projet de résolution global sur « les poursuites, la réadaptation et la réintégration des terroristes, y compris les combattants terroristes étrangers et les membres de leur famille qui les accompagnent », se soient heurtés au refus de certains membres du Conseil d’inclure le rapatriement. 

Le 31 août, les États-Unis opposaient leur veto au projet de résolution de l’Indonésie, qu’ils qualifiaient de « farce cynique et délibérément inconsciente », lui reprochant de « ne pas même faire référence à la première étape fondamentale, à savoir le rapatriement vers les pays d’origine ou de nationalité ».  « Nous devons absolument veiller à ce que l’EIIL ne renaisse jamais de ses cendres et cela commence par appliquer la justice à tous ceux qui le méritent », expliquait la représentante des États-Unis, qui ajoutait: « Nous voulons que tous les pays reprennent leurs ressortissants.  C’est la première chose à faire.  Il est impératif qu’ils le fassent. »

Le 29 décembre, le Conseil adoptait en revanche à l’unanimité la résolution 2560 (2020).  D’une part, le Conseil appelait les États Membres à être plus actifs pour soumettre au « Comité 1267 » des demandes d’inscription sur la Liste des personnes devant être soumises à des sanctions.  D’autre part, il reconnaissait la nécessité de rendre les règles et procédures du Comité « plus équitables et plus efficaces », réaffirmait l’importance du Bureau du médiateur et demandait à l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions « d’étudier les procédures de dérogation au titre des dépenses » prévues dans la résolution 2368 (2017) et de formuler dans les neuf mois des recommandations à l’intention du Comité « pour établir s’il y a lieu de mettre à jour ces dérogations ».

Par ailleurs, le Conseil a examiné, le 6 août, les moyens de briser les liens entre terrorisme et criminalité transnationale organisée, lors d’une séance marquée par la participation de la Directrice exécutive de  l’Office  des  Nations  Unies contre la drogue et  le crime (ONUDC), Ghada Fathi Waly, qui rappelait que ces liens étaient souvent opportunistes et destinés à faciliter par des activités criminelles le financement du terrorisme.  Le Niger en rappelait l’illustration flagrante au Sahel.  Mme Waly notait toutefois que les organisations criminelles voyaient de moins en moins d’intérêt à coopérer avec les groupes terroristes et saluait les mesures prises par les États pour mettre en œuvre la résolution 2482 (2019) sur le financement du terrorisme, à la lutte contre lequel la France demandait d’accorder la priorité absolue.

Le Conseil a consacré trois séances à l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes (UNITAD), traitée sous la rubrique Iraq

La résolution relative aux sanctions contre les Taliban est traitée sous la rubrique Afghanistan.

Opérations de paix des Nations Unies

- 5 séances publiques: 30 mars, 4 juin, 7 juillet, 14 septembre, 4 novembre,

- 1 résolution: 2518 (2020)

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Consolidation et pérennisation de la paix; Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales; Les femmes et la paix et la sécurité

En 2020, le Département des opérations de paix dirigé par le Secrétaire général adjoint Jean-Pierre Lacroix a continué d’administrer 13 opérations de maintien de la paix mais ce nombre allait être ramené à 12 au 1er janvier 2021, avec la fermeture, le 31 décembre 2020, de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), dont le successeur, la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), est une mission politique spéciale.

La présidence chinoise du Conseil avait prévu d’organiser le 24 mars un débat ouvert sur les opérations de maintien de la paix, sous l’angle du renforcement des capacités, de la sûreté et de la sécurité, mais la suspension des travaux du Conseil du fait de la pandémie entraînait son annulation.  Le 30 mars, le Conseil n’en adoptait pas moins à l’unanimité sa résolution 2518 (2020), par laquelle il appelait à soutenir les opérations de maintien de la paix et à renforcer la sûreté et la sécurité de leur personnel.  Le Conseil invitait les États hôtes à faciliter l’accès et les déplacements du personnel de maintien de la paix, à enquêter rapidement sur toutes les attaques le visant et à en poursuivre les responsables.  Il demandait aussi d’améliorer et harmoniser les normes médicales pour le personnel, y compris pour les évacuations sanitaires, en demandant par ailleurs aux États Membres de garantir au personnel féminin des opérations un environnement de travail sûr.

Le 7 juillet, un autre débat ouvert, présidé par la Ministre allemande de la défense, Annegret Kramp-Karrenbauer, tenu en VTC et auquel une trentaine d’États Membres et l’Union européenne apporteraient des contributions écrites, était consacré aux « opérations de paix et droits humains ».  La Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, déclarait que ces derniers étaient au cœur du mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales du Conseil et se félicitait que 12 des opérations de paix de l’ONU disposaient d’une composante « droits de l’homme ».  Les États-Unis rappelaient que les 154 États signataires de la Déclaration d’engagements communs concernant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, adoptée en 2018, y affirmaient que des progrès durables devaient être enregistrés dans le domaine du respect des droits de l’homme pour promouvoir des solutions politiques aux conflits.  Mais la Fédération de Russie ou encore l’Afrique du Sud dénonçaient la politisation excessive des questions de droits de l’homme, tandis que la Chine et Saint-Vincent-et-les Grenadines appelaient à mieux respecter le contexte local de chaque mission et à hiérarchiser les priorités. 

Le 14 septembre, le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix dressait un bilan annuel de ses opérations, qualifiées par la France de « véritable ADN de l’ONU ».  M. Lacroix notait l’appui efficace apporté par les missions aux processus politiques et à la mise en œuvre des accords de paix malgré « les circonstances difficiles liées à la COVID-19 ».  Il citait aussi les « progrès tangibles » réalisés au cours des dernières années dans les domaines cruciaux de la performance, de la parité des sexes, du professionnalisme et de la sécurité, tout en appelant à poursuivre les efforts.  Il plaidait notamment pour un renforcement des partenariats avec les organisations régionales et les pays fournisseurs de contingents, ainsi que pour une intégration plus approfondie des composantes civile et militaire des missions et de l’équipe pays.  Les États-Unis insistaient sur le développement d’une culture de la performance au sein des missions.  La République dominicaine mettait l’accent sur la formation et l’équipement des Casques bleus.  La Fédération de Russie critiquait les pays qui demandent une extension des mandats tout en réduisant leur financement et leur personnel et suggérait une « réduction des tâches secondaires et non essentielles des soldats de la paix », citant celles liées aux droits de l’homme, aux questions sociales et à l’égalité des sexes.  « Les mandats ne doivent pas être populistes, mais clairs et réalistes », ajoutait-elle.

Par ailleurs et comme chaque année, le Conseil a eu l’occasion d’échanger avec les commandants de forces des opérations de paix ainsi qu’avec les commandants de police.

Le 4 juin, il entendait ainsi les chefs des composantes militaires des opérations de paix au Mali, au Soudan du Sud et sur le Golan.  Alors que venaient de décéder les deux premiers Casques bleus victimes de la COVID-19, la séance portait principalement sur les moyens de protéger le personnel des missions et d’éviter la transmission aux populations, d’aider les autorités nationales dans leur réponse à la pandémie et de protéger les communautés vulnérables tout en mettant en œuvre les mandats.  Dans le sillage de la résolution 2518 (2020), la Chine rappelait la nécessité d’améliorer le système d’évacuation médicale des Casques bleus et de veiller au déploiement d’installations médicales appropriées.  La Fédération de Russie faisait part de son inquiétude de voir la pandémie utilisée comme prétexte pour entraver des développements positifs sur le terrain et jugeait essentiel de continuer à encourager les parties à trouver des solutions politiques.  L’appel au cessez-le-feu du Secrétaire général lui apparaissait comme « une très bonne base pour de tels efforts ».

Le 4 novembre, ce sont les commandants de police des opérations des Nations Unies en République centrafricaine, au Mali, en Haïti et au Soudan du Sud que le Conseil entendait, en même temps que le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et des institutions chargées de la sécurité du Département des opérations de paix, Alexandre Jouev.  Les échanges et questions portaient sur le rôle et la part des effectifs féminins de la police, la culture de performance ou encore les conditions de sécurité.

Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales

- 5 séances publiques: 30 janvier, 6 février, 28 mai, 8 septembre, 4 décembre

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/11

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Opérations de paix des Nations Unies des Nations Unies; Paix et sécurité en Afrique; Libye; Mali; Ukraine

Sous l’impulsion des présidences mensuelles, le Conseil a continué d’élargir le spectre des organisations régionales ou thématiques avec lesquelles il a tenu des réunions.  Il a ainsi accueilli pour la première fois, en janvier, sous présidence vietnamienne, le Secrétaire général de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) avant qu’une séance en VTC soit organisée en septembre, sous présidence nigérienne, avec l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).  Il a poursuivi son dialogue avec l’Union européenne, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe(OSCE) et l’Union africaine. 

Le 30 janvier, la première réunion jamais organisée entre le Conseil de sécurité et l’ASEAN était l’occasion de mettre l’accent notamment sur la contribution de longue date aux opérations de paix de l’ONU de l’organisation régionale, dont le Secrétaire général, Lim Jock Hoi, rappelait aussi les méthodes de travail fondées sur la recherche du consensus par le dialogue et la consultation.  Certains membres du Conseil abordaient également la question du Myanmar et des tensions en mer de Chine méridionale mais se heurtaient à l’opposition de la Chine et de la Fédération de Russie, qui estimaient que ces questions n’étaient pas à l’ordre du jour. 

Le 6 février, à l’occasion de l’intervention annuelle du Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) devant le Conseil, le Premier Ministre et Ministre de l’Europe de l’Albanie, Edi Rama, affirmait son intention de maximiser la coopération pratique entre l’OSCE et l’ONU, d’œuvrer à ce que « la coopération entre grandes puissances » remplace la « compétition entre grandes puissances » et de défendre le multilatéralisme.  C’était une nouvelle fois l’occasion d’évoquer le rôle de la mission spéciale de l’OSCE en Ukraine et, pour les membres du Conseil, celle d’une passe d’arme de plus entre les membres « occidentaux » et la Fédération de Russie.  Pour sa part le Niger évoquait la coopération entre l’OSCE et les organisations régionales et sous-régionales africaines en rappelant que les dynamiques sécuritaires en Afrique subsaharienne ont des conséquences sur la paix et la sécurité en Europe. 

Le 28 mai, l’intervention annuelle du Haut Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, permettait de rappeler « l’ardent soutien » de l’Union européenne à l’ONU, « cœur battant du multilatéralisme ».  M. Borrell rappelait notamment le rôle joué par l’Union européenne pour faire appliquer l’embargo décidé par le Conseil sur les livraisons d’armes en Libye, notamment par le biais des inspections en haute mer menées par la jeune opération IRINI.  Il demandait le renouvellement, prévu en juin, de la résolution autorisant ces inspections, de même que la reconduction de l’autorisation des points de passage pour l’aide humanitaire à la frontière syrienne, qui expirait début juillet.  Les membres du Conseil faisant partie de l’Union européenne soulignaient les avantages de la coopération entre l’ONU et l’UE, « partenaires naturels dans la recherche de solutions durables aux problèmes du monde ».  Ils rappelaient aussi, tout comme le Royaume-Uni, l’importance du Plan d’action global commun relatif au programme nucléaire iranien, qualifié de « chef d’œuvre de la diplomatie européenne » par l’Allemagne, laquelle soulignait que l’UE avait été renforcée « par la force du droit et non par la loi du plus fort ».  La France rappelait par ailleurs que les États Membres de l’UE formaient, combinés, le premier contributeur financier de l’ONU ainsi que le principal pourvoyeur d’aide humanitaire dans le monde.  Récemment sorti de l’Union européenne, le Royaume-Uni mettait en avant l’efficacité de la coopération UE-ONU dans le maintien de la paix au Sahel. 

Le 8 septembre, le Conseil réalisait une nouvelle « première » avec la réunion, sous forme de VTC, consacrée à la coopération entre l’ONU et l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), alors que cette organisation multirégionale de 82 membres célébrait ses 50 ans.  La Secrétaire générale de l’OIF, Louise Mushikiwabo, annonçait son ambition de faire de l’Organisation un « acteur de poids » du maintien de la paix, et rappelait le lancement, le 25 septembre 2019, de la « Plateforme francophone au Conseil de sécurité », un cadre visant à amplifier la voix francophone dans l’enceinte de cet organe dont 7 des 15 membres étaient en 2020 « membres de la Francophonie ».  Le dialogue à distance était l’occasion de rappeler le rôle de l’OIF dans la diplomatie préventive et l’appui aux processus électoraux et de plaider en faveur d’une participation plus importante des personnels francophones –notamment féminins- aux opérations de maintien de la paix, dont 7 sur 13 étaient déployées dans l’espace francophone.

Le 4 décembre, un débat organisé par la présidence sud-africaine du Conseil avec la participation de plusieurs chefs d’État était consacré à la coopération entre l’ONU, l’Union africaine et les organisations régionales et sous-régionales africaines, laquelle n’avait, selon le Secrétaire général, « jamais été aussi forte ».  Le Président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, en regrettait d’autant plus les « contradictions » d’un Conseil de sécurité dont l’ordre du jour comptait 50% de questions touchant à l’Afrique alors que le continent ne comptait toujours pas de membre permanent.  Le Président du Niger, Mahamadou Issoufou, déplorait plus encore que la voix des États africains ne soit pas toujours prise en compte et citait l’intervention militaire occidentale de 2011 en Libye, à laquelle ils étaient hostiles et dont les conséquences pour les pays voisins, dont le sien, sont désormais connues.  Plusieurs membres non africains du Conseil plaidaient pour un dialogue permanent entre le Conseil de sécurité et l’Union africaine, afin de profiter des « avantages comparatifs » de celle-ci et d’appliquer le principe des « solutions africaines aux problèmes africains » soutenu par la Chine et la Fédération de Russie.  La Belgique soulignait toutefois que la « subsidiarité » des tâches ne devait jamais être synonyme d’inaction. 

Le même jour, le Conseil adoptait une déclaration présidentielle dans laquelle il félicitait l’Union africaine pour sa contribution croissante au maintien de la paix et de la sécurité et pour ses efforts, et ceux des organisations sous-régionales, dans la prévention, l’apaisement par la médiation et le règlement des conflits sur le continent africain.  La déclaration revenait sur l’éternelle question du financement pérenne des opérations africaines menées avec l’accord du Conseil de sécurité pour redire qu’il « incombe aux organisations régionales de mobiliser les ressources humaines, financières, logistiques et autres dont elles ont besoin, notamment grâce aux contributions de leurs membres et à l’appui de leurs partenaires ».  Le Conseil notait néanmoins qu’un « appui accru est nécessaire pour renforcer les opérations de paix de l’Union africaine » et encourageait « la poursuite du dialogue » entre l’ONU et l’Union africaine.

Une seconde déclaration présidentielle adoptée le même jour sous la même rubrique mais dédiée à la situation au Burundi est traitée sous ce pays. 

NON-PROLIFÉRATION

Non-prolifération – armes de destruction massive

- 1 séance publique: 25 février

Voir aussi: Non-prolifération (Iran), Non-prolifération (RPDC), Organes subsidiaires

Dans la perspective de la dixième Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), alors prévue en avril-mai 2020, le Conseil entendait, le 25 février, la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement des Nations Unies, Izumi Nakamitsu, qui appelait les États à en assurer le succès au risque de remettre en cause la valeur du TNP et de renforcer encore les divisions actuelles.  Les membres du Conseil saluaient le rôle du TNP, « du système de non-prolifération international ».  Plusieurs rappelaient l’importance de ses trois piliers et mettaient en avant la responsabilité particulière des cinq membres permanents du Conseil, qui sont aussi les cinq États officiellement doté de l’arme nucléaire au sens du TNP.  Présidente du Comité des sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC), l’Allemagne rappelait que la RPDC avait acquis des armes nucléaires au mépris total du TNP et de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité.  Elle appelait en outre les États-Unis et la Fédération de Russie à faire preuve de leadership, mais les deux pays se renvoyaient la responsabilité des risques d’une nouvelle course aux armements.  La France souhaitait l’entrée en vigueur rapide du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et le lancement des négociations pour un traité interdisant la production de matières fissiles. 

La pandémie de COVID-19 a provoqué le report de la dixième Conférence d’examen au premier semestre 2021. 

Non-prolifération – Iran

- 3 séances publiques: 30 juin, 14 août, 22 décembre

Voir aussi: Non-prolifération – armes de destruction massive; Maintien de la paix et de la sécurité internationales; Yémen

Le 30 juin, le Conseil procédait au premier examen semestriel de l’année de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015), par laquelle il avait entériné, le 18 juillet 2015, le Plan d’action global commun (PAGC, plus connu sous l’acronyme anglais JCPOA) -« l’Accord de Vienne »- sur le nucléaire iranien.  Aux termes de cet accord se rapprochait la date de la levée automatique de l’embargo sur les ventes d’armes à l’Iran, qui devait intervenir au « cinquième anniversaire de la date d’adoption du Plan d’action », la date d’adoption étant celle à laquelle prenait effet le PAGC, soit 90 jours après son approbation par le Conseil, autrement dit: le 18 octobre 2020.  En présence du Secrétaire d’État des États-Unis et du Ministre iranien des affaires étrangères, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Rosemary DiCarlo, répétait que le PAGC restait essentiel pour l’architecture mondiale de non-prolifération nucléaire et pour la sécurité régionale et internationale. 

Résolument opposé à la levée des sanctions, Mike Pompeo avertissait le Conseil qu’il se trouvait devant un choix: « défendre la paix et la sécurité internationales ou laisser expirer l’embargo sur les armes et trahir les plus beaux idéaux de l’ONU ».  Les États-Unis, ajoutait-il, « préféreraient de très loin collaborer avec le Conseil pour proroger l’embargo sur les armes pour protéger la vie humaine, notre sécurité nationale et celle de tous les membres du Conseil ».  Conscients comme la Secrétaire générale adjointe que l’Iran avait à son tour pris des mesures « incompatibles » avec le PAGC, les pays européens parties à l’Accord de Vienne faisaient toutefois valoir que le retrait des États-Unis de l’Accord deux ans plus tôt et l’imposition de sanctions unilatérales avaient empêché l’Iran de remplir ses propres obligations.  Qualifiant de « simpliste » l’approche des États-Unis, accusés de faire de l’Iran « le bouc émissaire pour tout ce qui se passe dans la région », la Fédération de Russie dénonçait la « politique d’asphyxie maximale » qu’ils imposaient à l’Iran « comme si on pressait le genou sur le cou de quelqu’un ». 

Les États-Unis présentaient dans les jours suivants un projet de résolution qui visait à proroger au-delà des cinq années prévues dans l’Accord de Vienne et jusqu’à ce que le Conseil en décide autrement, l’embargo sur les armes et les sanctions individuelles encore en vigueur. 

Le 14 août, le texte était rejeté, n’ayant obtenu que 2 voix en sa faveur ‑États-Unis et République dominicaine- pour 11 abstentions et les votes contre de la Chine et de la Fédération de Russie. 

Dans leurs explications de vote, les États-Unis se disaient « écœurés, mais pas surpris » de voir le Conseil « valider le premier sponsor du terrorisme d’État au monde, juste pour sauver la face et protéger un accord politique raté et déficient » et ajoutaient: « Là où le multilatéralisme échouera, nous, nous réussirons. »  Les pays européens, qui s’étaient tous abstenus, n’en dénonçaient pas moins le comportement « déstabilisateur » ou « irresponsable » de l’Iran au Moyen-Orient et dans la région du Golfe.  La Chine relevait que « l’unilatéralisme ne suscite aucun engouement et que l’intimidation ne triomphera pas ».  La Fédération de Russie avertissait qu’elle s’opposerait « systématiquement aux tentatives visant à imposer, par l’intermédiaire du Conseil de sécurité », un embargo sur les armes à destination de l’Iran, celui prévu par la résolution 2231 (2015) étant « temporaire » et n’ayant « jamais été destiné à être prolongé ». 

Chine et Fédération de Russie mettaient par ailleurs en doute la légalité du texte américain, estimant que, puisque les États-Unis s’étaient retirés depuis deux ans du PAGC, ils ne pourraient prétendre actionner la procédure de rétablissement des sanctions prévue par l’Accord en cas de « non-respect notable d’engagements » de la part d’un signataire, procédure connue en anglais sous le nom de « snapback ».

Les États-Unis avaient annoncé à plusieurs reprises qu’ils invoqueraient ce mécanisme.  De fait, le 20 août, ils adressaient une lettre en ce sens au Président du Conseil de sécurité « en tant que participants au Plan d’action global commun », afin de déclencher la procédure de rétablissement des sanctions, qui supposait la saisine du Conseil de sécurité et le vote par celui-ci d’une résolution dans un délai de 30 jours.  Aucune mesure n’était prise au Conseil et, le 18 octobre, l’embargo international sur les armes était officiellement levé.  Le même jour, les États-Unis imposaient de nouvelles sanctions unilatérales encore plus dures. 

Le 22 décembre, les différents acteurs campaient sur leurs positions.  Les membres européens parties à l’Accord de Vienne faisaient ouvertement part de leur espoir de voir la prochaine Administration américaine réintégrer rapidement le PAGC et estimaient que les autres signataires de l’Accord avaient démontré leur détermination à travailler diplomatiquement pour le préserver.  L’Iran affirmait avoir fait preuve d’une retenue et d’une patience « stratégiques » face à la « pression maximale » des États-Unis et à leur « harcèlement généralisé » de ses partenaires commerciaux.  Il dénonçait l’incapacité « totale » des gouvernements européens à respecter leurs engagements et justifiait une nouvelles fois ses « mesures correctives » en rappelant leur conformité à l’Accord de Vienne et leur complète réversibilité.  Il ajoutait qu’il n’accepterait aucune révision, renégociation ou extension des dispositions du Plan qui seraient contraires à la résolution 2231 (2015) et affirmait en particulier son « droit inhérent » à l’élaboration légitime d’un programme de missiles balistiques. 

Non-prolifération - République populaire démocratique de Corée (RPDC)

- 1 séance publique: 30 mars

- 1 résolution:  2515 (2020)

Le Conseil n’a pas traité du programme nucléaire de la RPDC durant l’année écoulée.  Il a seulement, le 30 mars, prorogé à l’unanimité jusqu’au 30 avril 2021 le mandat du Groupe d’experts chargé d’assister le Comité des sanctions 1718, qui surveille l’application des sanctions imposées au pays.  La résolution 2515 (2020) était la toute première à être adoptée par correspondance en application des mesures prises pour permettre au Conseil de travailler pendant la pandémie.  Elle n’a été suivie d’aucune explication de vote.

Armes légères et de petit calibre (ALPC)

- 1 séance publique: 5 février

Le 5 février, le Conseil a examiné le rapport biennal du Secrétaire général sur les armes légères et de petit calibre (ALPC).  La Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, Izumi Nakamitsu, rappelait que la majorité des actes de violence dans les situations de conflit et de postconflit étaient perpétrés à l’aide de telles armes, dont elle estimait le nombre à un milliard dans le monde.  Les ALPC contribuent en particulier à aggraver plusieurs crises qui sont traitées par le Conseil de sécurité, faisaient aussi observer Mme Nakamitsu ainsi que plusieurs des membres du Conseil.  Étaient notamment cités l’entrée continue d’armes en Libye malgré l’embargo, la situation au Sahel et les flux d’armes au Soudan du Sud.  Les membres africains du Conseil rappelaient la priorité accordée par l’Union africaine à cette question et son initiative « Faire taire les armes », appuyée en 2019 par le Conseil dans sa résolution 2457 (2019).  Plusieurs membres jugeaient encore insuffisant le mécanisme international de traçage des armes et le Royaume-Uni appelait à l’universalisation du Traité sur le commerce des armes.  La Chine préconisait un renforcement des législations nationales et du règlement politique des conflits.  Après avoir rappelé leur soutien à différents programmes de gestion des stocks d’armes, les États-Unis demandaient au Secrétaire général d’établir une distinction claire entre la possession légale d’armes légères par des civils, l’utilisation illégale de telles armes en dehors des conflits et le trafic illicite des ALPC qui alimentent les conflits et l’instabilité. 

JUSTICE INTERNATIONALE

Élection de juges à la Cour internationale de justice (CIJ)

- 1 séance publique: 11 novembre (reprise le 12 novembre)

Le 11 novembre, le Conseil de sécurité entamait, simultanément avec l’Assemblée générale, le processus triennal d’élections de cinq juges à la Cour internationale de justice (CIJ) pour un mandat de neuf ans.  Le lendemain, à l’issue d’un second tour de scrutin, rendu nécessaire pour harmoniser les choix des deux organes, quatre des cinq juges sortants étaient réélus: M. Yuji Iwasawa (Japon); Mme Xue Hanqin (Chine); M. Peter Tomka (Slovaquie) et Mme Julia Sebutinde (Ouganda).  M. Georg Nolte (Allemagne) était élu pour remplacer M. Giorgio Gaja (Italie), qui ne se représentait pas.  Le mandat des cinq juges prendra effet le 7 février 2021.

Promotion et renforcement de l’état de droit - Coopération entre le Conseil de sécurité et la Cour internationale de justice (CIJ)

- 2 séances publiques: 18 décembre, 21 décembre

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/13

Le 18 décembre, à l’initiative de la présidence sud-africaine, le Conseil échangeait avec le Président de la CIJ, M. Abdulqawi Ahmed Yusuf.  Bien que le Président de la Cour rencontre chaque année le Conseil lors d’une séance privée à l’occasion de l’examen du rapport de la CIJ par l’Assemblée générale, le juge Yusuf rappelait que la vitalité de la coopération entre les deux organes était plus d’ordre qualitatif que quantitatif.  Il invitait le Conseil à demander plus souvent un avis consultatif à la Cour, à lui rendre visite tous les trois ans (la dernière remonte à 2014) et à obtenir des États qu’ils acceptent la juridiction obligatoire de la CIJ, ce qui n’était le cas au sein du Conseil que du Royaume-Uni parmi les membres permanents, et de l’Allemagne, la Belgique, l’Estonie et la République dominicaine parmi les membres élus.  Plusieurs des membres élus suggéraient que le Conseil fasse appel plus souvent à la CIJ.

Suite à cette réunion, le Conseil publiait le 21 décembre une déclaration présidentielle dans laquelle il saluait la « contribution décisive de la Cour à l’état de droit au niveau international et le rôle clef qu’elle joue dans le règlement des différends interétatiques ».  Il se disait déterminé à tout mettre en œuvre pour « interagir avec la CIJ, dans le cadre des mandats conférés à l’un et l’autre organes » par la Charte. 

Cour pénale internationale (CPI)

Les exposés de la Procureure de la CPI devant le Conseil sont traités sous la rubrique des pays concernés.  Voir: Soudan, Libye

Le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux

- 4 séances publiques: 28 février, 5 juin, 25 juin, 14 décembre

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/4

- 1 résolution: 2529 (2020)

Voir aussi: Bosnie-Herzégovine

Créé par la résolution 1966 (2010), le « Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux » a commencé ses travaux en 2012 et repris progressivement l’ensemble des activités du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), fermés respectivement fin 2015 et fin 2017.  Créé pour une période initiale de quatre ans, reconductible ensuite automatiquement tous les deux ans sauf décision contraire du Conseil, le Mécanisme, conçu comme « une petite entité efficace à vocation temporaire, dont les fonctions et la taille iront diminuant », fait l’objet, comme les tribunaux avant lui, d’un examen semestriel par le Conseil, auquel participent son Président, le juge Carmel Agius, et son Procureur, Serge Brammertz, ainsi, généralement, que des représentants des principaux pays concernés: la Serbie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine et le Rwanda. 

Le Mécanisme doit en outre remettre tous les deux ans au Conseil un rapport sur l’avancement de ses travaux depuis l’examen précédent.  C’est pour le prier de lui présenter un tel rapport avant le 15 avril 2020 que le Conseil adoptait, le 28 février, une déclaration présidentielle.

L’examen semestriel du 5 juin était marqué par l’actualité après l’arrestation en France, le 16 mai, de Félicien Kabuga, et la confirmation, quelques jours plus tard, du décès d’Augustin Bizimana, deux présumés acteurs majeurs du génocide de 1994 et qui figuraient parmi les huit derniers fugitifs rwandais.  Le juge Agius et M. Brammertz soulignaient la résilience de la juridiction face à une forte réduction du budget et à la pandémie, qui retardait les travaux du Mécanisme, y compris le procès en appel de Ratko Mladić.  Plusieurs membres du Conseil regrettaient le manque de coopération de certains pays concernant les six derniers fugitifs recherchés dans la cadre du génocide rwandais, d’une part, et la persistance de la glorification des criminels de guerre par toutes les parties dans les Balkans occidentaux, préjudiciable à tout espoir de réconciliation durable. 

Le 25 juin, le Conseil renouvelait pour deux ans le mandat du procureur Brammertz, mais la résolution 2529 (2020) n’était adoptée que par 14 voix pour, la Fédération de Russie s’abstenant.

Le 14 décembre, le Président du Mécanisme expliquait que celui-ci avait pu poursuivre ses travaux et devrait « achever une grande partie de ses travaux judiciaires en cours d’ici à mai 2021 », notamment le procès en appel de Ratko Mladić, dont l’état de santé préoccupait la Fédération de Russie.

AUTRES QUESTIONS THEMATIQUES

Exposés de hauts dirigeants des Nations Unies

- 1 séance publique: 18 juin

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales

Le 18 juin, le Conseil entendait le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi.  Celui-ci décrivait les répercussions sur la vie des 80 millions de réfugiés et des migrants de la pandémie de COVID-19, qu’il présentait comme « une crise de protection » en expliquant que les flux de réfugiés se poursuivaient alors que 75% des États avaient fermé leurs frontières sans prévoir, pour les deux tiers d’entre eux, la moindre exception pour les demandeurs d’asile.  « Le monde attend de vous l’unité, au moins là où l’humanité est la plus blessée et la plus piétinée », lançait M. Grandi aux membres du Conseil, auquel il demandait de se faire l’écho de l’appel à un cessez-le-feu mondial lancé le 23 mars par le Secrétaire général.  La Belgique voyait dans le nombre de déplacés « le baromètre de l’incapacité collective des États membres du Conseil à prévenir, contenir et résoudre les conflits ».  La majorité des États appelaient à une répartition plus équitable du fardeau, les uns en mettant en avant leur contribution financière au HCR, les autres en rappelant que ce sont les pays pauvres qui accueillent le plus de réfugiés ou déplacés.

Protection des civils en période de conflit armé

- 4 séances publiques: 21 avril, 29 avril, 27 mai, 17 septembre

- 1 déclaration présidentielle: PRST/2020/6

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales

Par deux fois, en avril et septembre, le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) M. Qu Dongyu, et le Directeur exécutif du PAM, M. David Beasley, sont venus alerter le Conseil de sécurité d’un risque imminent de « pandémie de la faim » risquant de se cumuler à la pandémie de COVID-19, notamment dans les pays en conflits.  Le débat annuel sur le sujet a quant à lui été l’occasion de dénoncer les atteintes au droit international humanitaire, y compris dans le contexte des nouvelles formes de conflit.  Les réunions ont été tenues sous forme de VTC et limitées aux membres du Conseil.

Le 21 avril, MM. Beasley et Qu Dongyu faisaient état d’une « augmentation substantielle » des personnes frappées d’insécurité alimentaire aiguë au cours des quatre dernières années et précisaient que près de 60% des personnes ainsi affectées l’avaient été dans des contextes de conflit ou d’instabilité.  À cause du coronavirus, 130 millions d’autres personnes pourraient être poussées au bord de la famine d’ici à la fin de 2020, ajoutait M. Beasley.  Lors du débat, plusieurs délégations citaient la situation humanitaire dramatique au Yémen et en Syrie.  Elles en appelaient au respect du droit international humanitaire, en particulier de la résolution 2417 (2018), qui condamnait l’utilisation de la famine comme méthode de guerre ainsi que les « refus illicites d’accès humanitaire » et la privation des civils des biens indispensables à leur survie par l’entrave intentionnelle à « l’acheminement des secours destinés à lutter contre l’insécurité alimentaire provoquée par les conflits ».  La Fédération de Russie dénonçait comme « cause profonde » de telles situations « l’ingérence dans les affaires intérieures » et citait les cas de la Syrie, du Yémen, de l’Iraq et de la Libye.  L’Allemagne mettait en avant les mécanismes d’alerte rapide. 

Le 29 avril, Le Conseil adoptait une déclaration présidentielle dans laquelle il « condamnait fermement l’utilisation de la famine comme méthode de guerre et le refus illicite de l’acheminement de l’aide humanitaire et de l’accès du personnel humanitaire aux populations civiles en période de conflit armé ».  Il soulignait par ailleurs que ces conflits pouvaient provoquer des déplacements forcés qui, eux-mêmes, pouvaient avoir des effets dévastateurs sur la production agricole, la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des populations déplacées et des communautés qui les accueillent.  Il rappelait l’interdiction des déplacements forcés de civils en temps de conflit armé.

Le 17 septembre, à l’occasion d’un débat consacré à la mise en œuvre de la résolution 2417 (2018), les mêmes intervenants tiraient à nouveau la sonnette d’alarme.  Ils étaient rejoints par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence Mark Lowcock, qui déplorait que, « comme toujours, les plus vulnérables paient le prix le plus élevé ».  M. Lowcock rappelait les « liens clairs » entre les conflits armés et la violence et l’insécurité alimentaire, établis par le texte « historique » adopté le 24 mai 2018.  Le débat était l’occasion d’énumérer les zones de conflit les plus touchées par le phénomène.  Plusieurs pays demandaient aux donateurs, y compris les institutions financières internationales, voire le secteur privé, d’intensifier leur assistance aux pays affectés.  Toutefois, la Fédération de Russie affirmait que les conflits armés n’étaient pas la seule cause de l’augmentation du nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire et citait en particulier « les mesures économiques unilatérales », qui sapent le droit développement des pays et leurs capacités.  L’Afrique du Sud soulevait également la question et notait que la solution au problème de la faim induite par les conflits devait aussi être recherchée dans le développement, et pas seulement dans le domaine politique.  La République dominicaine faisait observer que l’on était, « une fois de plus », en train d’essayer de résoudre un problème « qui aurait pu être évité » en renforçant les capacités locales pour créer de la résilience et briser la dépendance à l’aide humanitaire.

Entre-temps, le 27 mai, à l’occasion du débat annuel sur la protection des civils en période de conflit armé, le Secrétaire général demandait aux États de combler les lacunes nationales et de lancer une action internationale coordonnée pour renforcer cette protection, y compris face à l’utilisation de drones armés, de systèmes d’armes létaux autonomes ou encore face aux cyberattaques sur des infrastructures civiles essentielles.  Le Président du CICR, Peter Maurer, rappelait au Conseil que ce n’était pas à lui de dire aux organisations humanitaires qui a besoin d’une aide mais qu’il devait plutôt permettre à ces dernières de mener en toute transparence leurs évaluations indépendantes des besoins.  Mais la Fédération de Russie estimait inutile d’élaborer de nouveaux concepts juridiques internationaux « qui prétendent combler de soi-disant manquements », en arguant que les problèmes de mise en œuvre du droit international humanitaire ne découlaient pas de sa faiblesse mais d’une réticence à appliquer concrètement ses principes et normes.  Elle jugeait en outre « incomplet » l’appel au cessez-le-feu mondial lancé le 23 mars par le Secrétaire général, du fait qu’il n’appelait pas à la levée des sanctions, qui altèrent pourtant les capacités des États à lutter contre la COVID-19.  Les États-Unis se félicitaient de la politique révisée du Département des opérations de paix sur la protection des civils.  L’Allemagne et la France réitéraient leur appel visant à mettre fin aux attaques contre les personnels humanitaire et médical.

Le sort des enfants en temps de conflit armé

- 3 séances publiques: 12 février, 26 juin, 10 septembre

- 2 déclarations présidentielles: PRST/2020/3, PRST/2020/8

Le 12 février, à l’occasion de la Journée internationale contre l’utilisation d’enfants soldats et en présence du roi et de la reine des Belges, dont le pays assurait la présidence du Conseil, ce dernier adoptait une déclaration présidentielle.  Le Conseil s’y félicitait de l’élaboration d’un Guide pratique à l’intention des médiateurs pour une meilleure protection des enfants dans les situations de conflit armé et invitait le Secrétaire général, qui venait de le lui présenter officiellement, à en assurer la diffusion la plus large possible.  Le Secrétaire général rappelait que près de 250 millions d’enfants vivent dans des pays affectés par un conflit et qu’en 2018, plus de 12 000 enfants avaient été tués ou mutilés dans ce cadre, soit le chiffre le plus élevé depuis 1996.  Il notait aussi que, malgré de réels progrès, les chiffres relatifs aux graves violations contre les enfants durant les conflits continuaient de croître.  Lors du débat, les membres du Conseil évoquaient notamment la situation des enfants pris au piège des conflits à travers le monde.

Le 26 juin, une VTC permettait au Conseil de discuter du rapport annuel de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, Virginia Gamba.  Le rapport faisait état de trois développements positifs en 2019: l’adoption à travers le monde par diverses parties en conflit de plus de 30 mesures pour mieux protéger les enfants; la tenue de sept dialogues et processus de paix différents relatifs aux enfants en situation de conflit armé; et la libération de quelque 13 200 enfants par des parties en conflit, en particulier, dans le cadre d’accords de paix.  Mme Gamba n’en dressait pas moins un tableau sombre de la situation et demandait aux États de soutenir le travail du Mécanisme de surveillance et de communication de l’information en lui allouant des fonds conséquents.  Pour sa part, la Directrice exécutive de l’UNICEF appelait notamment à la libération de tous les enfants en détention du fait de leur recrutement, rôle ou association avec des parties à un conflit, en rappelant qu’ils étaient « avant tout des victimes, y compris ceux qui ont pu commettre des crimes ».  Certaines délégations soulignaient en outre l’impact négatif de la pandémie sur le sort des enfants et la Fédération de Russie demandait au Secrétaire général et à sa Représentante spéciale d’accorder à l’avenir une attention particulière aux effets néfastes des sanctions unilatérales « illégales » sur les enfants dans les conflits armés. 

Le 10 septembre, au lendemain de la première célébration de la « Journée internationale pour la protection de l’éducation contre les attaques », la présidence nigérienne du Conseil organisait une réunion publique sur le thème des « attaques contre les écoles, une violation grave des droits des enfants ».  Mme Gamba s’alarmait de « l’émergence d’une tactique de guerre, en particulier dans le Sahel, qui cible les écoles précisément parce qu’elles sont des écoles et en particulier lorsqu’elles sont fréquentées par des filles ».  Lors du débat, il était largement fait référence à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles de 2015, désormais signée par 105 États et dont plusieurs membres du Conseil demandaient l’universalisation.  La Fédération de Russie faisait toutefois valoir que ce document était le fruit d’un « groupe restreint » de pays et déplorait en outre que le texte adopté n’aborde pas la question du rapatriement des enfants qui se trouvent dans des zones de conflit. 

Pendant la même séance, le Conseil adoptait une déclaration présidentielle dans laquelle il réitérait sa « ferme condamnation des attaques commises ainsi que des menaces d’attaque proférées, en violation du droit international humanitaire applicable, contre des écoles, des enfants, des enseignants ».

Les femmes et la paix et la sécurité

- 4 séances publiques: 17 juillet, 28 août, 29 octobre, 30 octobre

- 1 résolution: 2538 (2020)

Voir aussi: Consolidation et pérennisation de la paix; Opérations de paix des Nations Unies

Pour cause de pandémie, les deux débats annuels du Conseil de sécurité consacrés à ce thème, qui attirent traditionnellement plusieurs dizaines de délégations, ont dû être remplacés par des réunions tenues en visioconférence, limitées aux présentateurs et aux membres du Conseil, parfois représentés au niveau ministériel.  Conformément aux procédures prévues, les autres États Membres ou organisations régionales adressaient des contributions écrites: ils étaient 44 lors du débat du 17 juillet, et 65 le 29 octobre.  Le Conseil a adopté une résolution spécifiquement consacrée à la participation des femmes dans les opérations de maintien de la paix mais a échoué à en adopter une à l’occasion du vingtième anniversaire de la résolution pionnière 1325 (2000).

Lors de la séance du 17 juillet, consacrée aux violences sexuelles en période de conflit, la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question, Pramila Patten, faisait observer que si la pandémie avait considérablement affecté la lutte contre ce type de violences, elle n’avait pas changé les besoins des survivants.  Le Président du Conseil et représentant de l’Allemagne jugeait « douloureusement lents » les progrès de la lutte contre ces violences.  La plupart des membres du Conseil mettaient l’accent sur la lutte contre l’impunité et l’autonomisation des survivants, deux axes jugés essentiels dans le cadre de la nouvelle décennie d’actions décisives que Mme Patten appelait de ses vœux.  D’autres membres rappelaient que les femmes ne sont pas seulement des victimes, mais sont aussi des piliers des communautés et que leur égale représentation et leur pleine participation aux processus de prise de décisions sont des préalables à la réponse à la violence sexuelle en période de conflit.  La Fédération de Russie estimait que l’éradication des crimes de guerre allait de pair avec le règlement même du conflit armé, la violence sexuelle étant une composante « sale mais inaliénable » de ces conflits.

Le 28 août, le Conseil adoptait sa résolution 2538 (2020), par laquelle il appelait les États Membres, le Secrétariat de l’ONU et les organisations régionales à « renforcer leurs efforts collectifs pour promouvoir la participation pleine, effective et réelle des femmes en tenue et des civiles aux opérations de maintien de la paix à tous les niveaux et dans toutes les fonctions, y compris à des postes d’encadrement de haut niveau ».  Le Conseil rappelait sa résolution 2242 (2015), dans laquelle il demandait la mise en place d’une stratégie visant à doubler « à l’horizon 2020 » le nombre de femmes Casques bleus et policières des opérations de maintien de la paix des Nations Unies et reconnaissait leur « rôle indispensable » pour en améliorer l’efficacité et la crédibilité auprès du public. 

La participation des femmes aux processus de paix, y compris les opérations de maintien de la paix, était de nouveau largement évoquée lors de la séance du 29 octobre, à la veille du vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000).  « Les chiffres montrent bien que, là où les femmes ont participé aux pourparlers de paix, les résultats ont été meilleurs », affirmait la Directrice d’ONU-Femmes, Phumzile Mlambo-Ngcuka, qui déplorait que les négociations de paix soient « toujours structurées de façon à donner la haute main à ceux qui ont incité aux violences » et appelait à combler les multiples lacunes dans l’application de la résolution.  Les membres du Conseil affirmaient leur soutien à la promotion des femmes dans les processus de paix tout en mettant en garde contre les risques de retour en arrière.

Ces mêmes membres du Conseil ne parvenaient toutefois pas à s’entendre pour faire adopter un document permettant de marquer l’anniversaire de la résolution 1325 (2000).  Le 30 octobre, le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie était rejeté faute de voix.  Il n’était soutenu que par cinq membres (Fédération de Russie, Afrique du Sud, Chine, Indonésie et Viet Nam) alors que les 10 autres s’abstenaient.  Lors de sa conférence de presse de clôture, la présidence russe défendait son « texte commémoratif, qui n’avait pas vocation à marquer une percée » et dénonçait la « tendance inquiétante de certains pays » d’établir une « sorte de monopole sur les droits des femmes et de nier aux autres » le droit d’apporter leur contribution. 

Les jeunes et la paix et la sécurité

- 2 séances publiques: 27 avril, 14 juillet

- 1 résolution: 2535 (2020)

Voir aussi: Maintien de la paix et de la sécurité internationales; les femmes et la paix et la sécurité

Le 27 avril, la présidence dominicaine organisait un débat ouvert sur le thème « Vers le cinquième anniversaire du programme pour les jeunes et la paix et la sécurité: accélérer l’application des résolutions 2250 (2015) et 2419 (2018) ».  La séance, à laquelle participaient le Secrétaire général et plusieurs représentants de la jeunesse, avait lieu en VTC mais 44 autres États Membres viendraient apporter des contributions écrites.  M. Guterres déclarait que le monde ne pouvait se permettre « une génération perdue de jeunes », ni prendre le risque que les jeunes soient mis en échec par la COVID-19.  Il appelait les États à investir dans la participation des jeunes aux processus de prise de décisions.  Les pays africains membres du Conseil mettaient en avant le poids démographique des jeunes sur leur continent et le Niger s’inquiétait de l’attraction exercée, en particulier au Sahel, par l’extrémisme sur une jeunesse ayant perdu ses illusions par manque d’opportunités.  L’Indonésie estimait que la participation des jeunes pouvait rendre plus légitime et pérenne les efforts de paix.  La France saluait leur rôle dans la réponse à la pandémie et au changement climatique.  Toujours réticente face à ces questions thématiques, la Fédération de Russie déclarait que la participation des jeunes à toute activité politique devrait être fondée sur leurs connaissances et compétences professionnelles et non pas motivée par « la volonté d’embellir les statistiques ou de remplir certains quotas ».

Le 14 juillet, le Conseil adoptait -sous l’intitulé « maintien de la paix et de la sécurité internationales »- la résolution 2535 (2020), par laquelle il demandait à tous les acteurs concernés « d’envisager des moyens d’accroître la représentation inclusive des jeunes dans la prévention et le règlement des conflits, ainsi que dans la consolidation de la paix ».  Co-auteur du texte avec la France, la République dominicaine déclarait que le programme pour les jeunes et la paix et la sécurité était « indissociable du programme pour les femmes et la paix et la sécurité », ajoutant que l’influence de la jeunesse était « proportionnelle à la participation pleine et effective des jeunes femmes ».

Exposés des présidents des organes subsidiaires du Conseil de sécurité

- 2 séances publiques: 23 novembre, 16 décembre

Voir aussi: Terrorisme; tous les pays pour lesquels il existe un Comité des sanctions du Conseil de sécurité

Les exposés concernant un comité des sanctions spécifique à un pays précis sont traités sous le pays concerné.

Le 23 novembre, les présidents des comités des sanctions liés aux questions de terrorisme expliquaient au Conseil l’impact qu’avait eu la pandémie sur la conduite de leurs activités en 2020, en particulier le report des visites de la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, cet « outil unique » qui permet, à la demande des États, d’auditer les dispositifs nationaux de lutte antiterroriste et de formuler des recommandations concernant leurs besoins d’assistance technique.  Ils assuraient que la mise en place de réunions virtuelles avait permis de maintenir un dialogue étroit sur le niveau de la menace terroriste mondiale et d’actualiser les listes de sanctions. 

Les présidents attiraient également l’attention sur les évolutions menaçantes du terrorisme: son financement, difficile à juguler à long terme; la mainmise technologique et idéologique sur les réseaux sociaux où les jeunes, frappés par le chômage et gagnés par le ressentiment, sont la proie des recruteurs; ou encore le renforcement des capacités opérationnelles de Daech en Asie et en Afrique.  Ils appelaient à des réponses coordonnées de la part des États Membres.  Mais si les États-Unis appelaient à utiliser davantage les compétences de la société civile pour lutter contre les discours de haine et si le Royaume-Uni jugeait contre-productif la répression de la minorité ouïghour en Chine, la Fédération de Russie demandait que l’accent soit mis sur « des problèmes plus urgents que la protection des droits de l’homme dans le contexte de la lutte contre le terrorisme », comme le rapatriement des combattants terroristes étrangers et des membres de leur famille depuis la Syrie et l’Iraq.

Le 16 décembre, ce sont les présidents d’organes subsidiaires appelés à quitter le Conseil le 31 décembre –à savoir les ambassadeurs représentants de l’Afrique du Sud, de l’Allemagne, de la Belgique, de l’Indonésie et de la République dominicaine, qui dirigeaient au total sept Comités de sanctions et trois autres organes subsidiaires- qui présentaient le bilan de leur action.  Ils plaidaient en général pour un renforcement de la transparence dans les travaux et pour associer aux réunions informelles divers États intéressés, notamment ceux de la région.  La Belgique mettait en avant la charge de travail pour de petits États et invitait à une meilleure répartition des présidences, incluant les membres permanents.

Méthodes de travail

- 1 séance publique: 15 mai

Voir aussi: Impact de la pandémie de COVID-19 sur les méthodes de travail du Conseil; Maintien de la paix et de la sécurité internationales

Le 15 mai, les membres du Conseil tenaient leur séance annuelle consacrée aux méthodes de travail du Conseil.  Les conditions liées à la pandémie ne permettaient pas d’ouvrir le débat, tenu en VTC, aux autres États Membres, mais une quarantaine d’entre eux apporteraient des contributions écrites.  Sept semaines après leur mise en place, les adaptations liées à la COVID-19 dominaient les discussions.  Les membres du Conseil estimaient que, dans l’ensemble, l’efficacité, l’efficience et l’agilité du Conseil avaient été préservées et que ce dernier avait démontré sa résilience.  Le Royaume-Uni regrettait néanmoins que la plate-forme technique mise en place ne permette pas la participation directe des autres États Membres et la France déplorait que le multilinguisme ait été la victime du nouveau processus de travail puisque les réunions ne se tenaient alors qu’en anglais, un problème qui serait réglé par étapes au cours de l’été. 

Les participants abordaient aussi la question plus habituelle de l’équilibre à trouver au sein du Conseil entre transparence et efficacité.  La France remarquait une nouvelle fois que le Conseil était revenu « très public », ayant consacré en 2019 deux fois plus de temps aux séances publiques qu’aux négociations à huis clos, et mettait en parallèle la baisse de la « production » du Conseil ‑résolutions ou déclarations diverses‑ tout en admettant qu’il existait aussi à celle-ci des raisons politiques.  La Chine et la Fédération de Russie demandaient que le Conseil se concentre « sur les problèmes majeurs de grande urgence qui représentent des menaces pour la paix et la sécurité internationales » et évite de se « transformer en une sorte d’épicerie où on trouverait de tout » en examinant des « sujets thématiques inscrits à l’ordre du jour de l’Assemblée générale, du Conseil économique et social ou d’autres organes de l’ONU ».  Au nom des membres élus du Conseil, le Viet Nam demandait « un plus grand partage des charges et une répartition plus égale du travail entre tous les membres du Conseil », y compris pour les fonctions de rédacteur des projets de résolution, la Fédération de Russie ajoutant qu’en fait « trois membres permanents sont toujours, aujourd’hui, rédacteurs uniques pour la plupart des situations spécifiques à un pays ».  Les membres élus demandaient aussi des procédures « plus claires et plus équitables » dans les régimes de sanctions adoptés par le Conseil.

Rapport annuel

- 1 séance publique: 14 juillet

Le 14 juillet, le Conseil de sécurité adoptait son projet de rapport annuel à l’Assemblée générale à l’occasion de sa première réunion officielle depuis le 12 mars, tenue physiquement mais dans la salle du Conseil économique et social, plus vaste que celle du Conseil de sécurité.  Le représentant de l’Allemagne, Président du Conseil, déclarait à cette occasion que la diplomatie trouvait sa raison d’être dans les contacts personnels et les pourparlers en coulisses, lesquels permettent de créer une bonne atmosphère même dans les situations où cela est difficile.  Le rapport, qui couvrait la période du 1er janvier au 31 décembre 2019, était présenté au Conseil par le représentant de la Fédération de Russie. 

 

 

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À l’intention des organes d’information. Document non officiel.