SC/14370

Le Conseil de sécurité précise sa vision de la réforme du secteur de la sécurité, « cruciale » pour la consolidation de la paix

 Le Conseil de sécurité a adopté, aujourd’hui, à l’unanimité de ses membres, sa résolution 2553 (2020) dans laquelle il expose les grands axes de sa vision de la réforme du secteur de la sécurité (RSS), en plaidant pour une appropriation nationale et une participation accrue des femmes, tout en invitant l’ONU à adopter une approche « globale, intégrée et cohérente ».  L’adoption de ce texte a suivi un débat organisé en VTC qui aura vu plusieurs ministres des affaires étrangères et le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine prendre la parole.  Plusieurs intervenants ont souligné la nécessité d’un financement pérenne d’une telle réforme.  

Dans cette résolution, la première depuis la résolution 2151 (2014) sur ce thème, le Conseil de sécurité rappelle que la réforme du secteur de la sécurité est au lendemain des conflits, « cruciale du point de vue de la consolidation de la paix et de la stabilité, de la réduction de la pauvreté, de la promotion de l’état de droit et de la bonne gouvernance, de l’extension de l’autorité légitime de l’État et de la prévention de la reprise des conflits ».  

Le Conseil souligne « l’importance cardinale » de l’appropriation nationale des mécanismes de réforme du secteur de la sécurité, le point de vue des pays hôtes devant être pris en compte dans l’élaboration des mandats.   Il décide aussi de continuer d’inscrire des éléments de réforme du secteur de la sécurité dans les mandats des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales des Nations Unies, et de leur accorder « le degré de priorité voulu ». 

La réforme du secteur de la sécurité doit être complémentaire et adossée à des processus politiques nationaux ouverts à toutes les composantes de la société, estime le Conseil.  Il note également que la participation « pleine, égale et effective » des femmes au secteur de la sécurité contribue à la mise en place d’institutions inclusives, responsables et légitimes protégeant plus efficacement les populations.  Il encourage donc les États Membres à éliminer les obstacles à la participation égale des femmes.  

Le Conseil décide aussi de renforcer le rôle du Secrétariat en matière de réforme du secteur de la sécurité, « compte tenu des mandats propres à chaque pays ».  Le Secrétaire général devra lui présenter, en septembre 2021, un rapport sur les mesures qu’il aura prises pour consolider l’approche globale de l’ONU en la matière. 

Lors du débat, la Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique, Mme Bintou Keita, a rappelé que la réforme du secteur de la sécurité était « un travail de longue haleine », dont le succès dépend de la robustesse du contrat social et de la confiance de la population.  C’est que la RSS constitue, comme l’a fait observer la Tunisie, un « processus délicat » essentiel à l’instauration de la confiance. D’où la nécessité d’une véritable appropriation nationale, qui suppose, a fait valoir le Niger, que les programmes soient élaborés, gérés et mis en œuvre par les acteurs nationaux « plutôt que par des intervenants extérieurs ».   L’aide apportée « ne doit pas être vue comme une tentative d’imposer des recettes toutes faites de l’extérieur, au risque de voir cette aide rejetée et mal perçue », a appuyé la Fédération de Russie.  

Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de paix, M. Alexandre Zouev, a rappelé que les Nations Unies aidaient plus de 15 pays à réformer leur secteur de la sécurité.  « Les partenariats stratégiques sont la clef pour promouvoir une aide efficace », a-t-il ajouté, en notant le renforcement de la coopération régionale avec l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ou encore l’Union européenne.   

Encore faut-il, pour assurer l’efficacité des partenariats, qu’ils soient bien coordonnés.  La représentante du Soudan du Sud, pays qui a opéré une réforme de son secteur de la sécurité avec le soutien d’une Mission des Nations Unies, a fait état de « graves lacunes » dans la coordination et le financement du programme. 

La question du financement a été amplement discutée.  Le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, M. Smaïl Chergui, a insisté sur la nécessité d’un financement prévisible et durable, tant la réforme du secteur de la sécurité est un processus « politiquement complexe » et « souvent coûteux ». L’Afrique du Sud a, elle aussi, demandé un « financement pérenne ».  « La question de la prise en charge du financement des programmes de soutien à la réforme du secteur de la sécurité doit être discutée », a confirmé l’Allemagne.  Mais les États-Unis ont jugé que les pays concernés doivent non seulement soutenir verbalement l’amélioration de la gouvernance et la réforme du secteur de la sécurité, ils doivent aussi « aligner leurs ressources nationales sur les promesses qu’ils font ».  Pour eux, si l’engagement du gouvernement est cohérent et clair, le succès s’ensuit inévitablement.  En revanche, sans appropriation nationale et sans engagements financiers durables, la réforme du secteur de la sécurité peut en effet échouer. 

Pour être réellement nationale, l’appropriation de la réforme doit concerner tout le pays.  La société civile du pays concerné doit donc pouvoir pleinement participer à la réforme, y compris les femmes, dont le rôle doit être accru, comme l’a demandé notamment l’Afrique du Sud et comme l’a recommandé Mme Keita.   

Texte du projet de résolution (S/2020/1158)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant que la Charte des Nations Unies lui assigne la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,

Rappelant ses résolutions 2151 (2014), sur la réforme du secteur de la sécurité, et 2282 (2016), sur l’examen du dispositif de consolidation de la paix de l’Organisation des Nations Unies, ainsi que les déclarations de sa présidence du 21 février 2007 (S/PRST/2007/3), du 12 mai 2008 (S/PRST/2008/14) et du 12 octobre 2011 (S/PRST/2011/19),

Rappelant sa résolution 2282 (2016), dans laquelle il a rappelé la résolution 70/1 de l’Assemblée générale, intitulée « Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030 », dans laquelle avait été adoptée une série complète d’objectifs et de cibles à caractère universel, qui étaient ambitieux, axés sur l’être humain et porteurs de changement,

Considérant que le développement, la paix et la sécurité, et les droits humains sont intimement liés et se complètent,

Soulignant que la réforme du secteur de la sécurité au lendemain des conflits est cruciale du point de vue de la consolidation de la paix et de la stabilité, de la réduction de la pauvreté, de la promotion de l’état de droit et de la bonne gouvernance, de l’extension de l’autorité légitime de l’État et de la prévention de la reprise des conflits et soulignant également à cet égard que des institutions de sécurité qui soient professionnelles, efficaces et responsables et des institutions chargées de faire respecter la loi et de rendre la justice qui soient accessibles et impartiales sont tout aussi nécessaires pour jeter les bases de la paix et du développement durable,

Réaffirmant la nécessité d’adopter une démarche globale en matière de consolidation et de pérennisation de la paix, ainsi que des mesures d’intégration des questions de genre, notamment au moyen d’une réforme du secteur de la sécurité s’inscrivant dans le cadre plus général de l’état de droit,

Rappelant que le pays concerné a le droit souverain et la responsabilité première d’arrêter les modalités et les priorités nationales de la réforme du secteur de la sécurité, ledit pays devant s’approprier cette entreprise, qui doit répondre à ses besoins et à sa situation particulière et se dérouler à sa demande et en étroite consultation avec lui, et préconisant la participation de l’ensemble des parties prenantes à la réforme du secteur de la sécurité et le développement des compétences des pays dans ce domaine,

Considérant que la direction et la volonté politiques des autorités nationales sont critiques pour le progrès de la réforme de la sécurité, réaffirmant que les autorités nationales doivent jouer un rôle moteur dans l’élaboration d’un projet national inclusif de réforme du secteur de la sécurité qui prévoie la participation pleine et entière des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, et soulignant que la coordination de l’exécution de ce projet, l’affectation de ressources nationales aux institutions de sécurité nationales et le suivi des retombées de cette réforme font partie intégrante de la prise en main et de la direction de la réforme du secteur de la sécurité par les pays,

Réaffirmant sa volonté de remédier aux effets des conflits armés sur les femmes, les jeunes et les enfants, et rappelant ses résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1888 (2009), 1960 (2010), 2106 (2013) 2122 (2013), 2242 (2015), 2467 (2019) et 2493 (2019) sur les femmes, la paix et la sécurité, ses résolutions 1265 (1999), 1296 (2000), 1674 (2006), 1738 (2006) et 1894 (2009) sur la protection des civils en période de conflit armé, ainsi que ses résolutions 2250 (2015), 2419 (2018) et 2535 (2020) sur les jeunes, la paix et la sécurité, et ses résolutions 1261 (1999), 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011), 2068 (2012) et 2143 (2014) sur les enfants et les conflits armés,

Conscient du rôle que les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales des Nations Unies jouent s’agissant d’aider, selon ce que prévoient leur mandat, les autorités des pays à mettre au point des stratégies, des priorités et des programmes nationaux inclusifs aux fins de la réforme du secteur de la sécurité et à contribuer, selon que de besoin, à coordonner l’aide internationale en faveur de cette réforme, dans le respect des priorités nationales et d’une manière qui prenne en compte l’appui international afin d’aider efficacement les pays à instaurer une paix durable, et soulignant qu’il importe de doter les missions de maintien de la paix et les missions politiques spéciales d’un financement et/ou de ressources suffisants, prévisibles et durables qui leur permettent de s’acquitter de leur mandat et de contribuer à la réforme du secteur de la sécurité,

Rappelant les rapports du Comité spécial des opérations de maintien de la paix créé par l’Assemblée générale, qui donne au Secrétariat des directives concernant la réforme du secteur de la sécurité et l’élaboration d’une politique de l’Organisation en la matière,

Se déclarant préoccupé par l’éventail de difficultés que rencontrent les institutions de sécurité lorsqu’elles sont faibles et dysfonctionnelles, qui empêchent notamment l’État d’instaurer une paix durable, d’assurer la sécurité publique, d’asseoir l’état de droit et de garantir l’accès à la justice sur tout le territoire, notant qu’il est important d’assurer une gouvernance et une tutelle appropriées du secteur de la sécurité pour veiller à ce que les institutions chargées de la sécurité assurent la sécurité et protègent la population, notant également que s’il n’est pas remédié aux carences qui existent au niveau opérationnel et sur les plans de la gouvernance et de la responsabilité, les résultats obtenus grâce aux activités de maintien de la paix peuvent être compromis et les missions de maintien de la paix et missions politiques spéciales risquent de devoir revenir dans leurs anciennes zones d’opérations, et considérant que, dans certains pays sortant d’un conflit, une réforme efficace et inclusive du secteur de la sécurité a joué un rôle essentiel dans le processus politique, la réconciliation nationale, la justice transitionnelle, la stabilisation et la reconstruction,

Réaffirmant qu’un secteur de la sécurité représentatif, réactif, efficient, efficace, professionnel et responsable, fonctionnant sans discrimination et dans le plein respect des droits humains et de l’état de droit, est la clef de voûte de la paix et du développement durable, et est important pour la prévention des conflits et la consolidation et la pérennisation de la paix,

Conscient que la réforme du secteur de la sécurité est un élément essentiel de l’action de consolidation de la paix menée par l’Organisation des Nations Unies et notant le précieux travail qu’accomplit la Commission de consolidation de la paix en sa qualité d’organe consultatif intergouvernemental spécialement chargé d’intégrer une approche stratégique dans les initiatives internationales en faveur de la consolidation de la paix, y compris l’appui des Nations Unies à la réforme du secteur de la sécurité, et de les rendre cohérentes,

Rappelant que l’essentiel de l’aide apportée par les Nations Unies dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité en application de mandats du Conseil de sécurité est fournie et destinée à des pays d’Afrique et que certains pays d’Afrique deviennent d’importants fournisseurs d’assistance de ce type, et saluant à cet égard les importants efforts que l’Union africaine et les organisations sous-régionales déploient et les moyens qu’elles mettent en œuvre pour appuyer et orienter l’entreprise de réforme du secteur de la sécurité menée par les pays,

Notant l’appui fourni par les acteurs bilatéraux, les organisations régionales, les institutions financières multilatérales et les organisations spécialisées, y compris les universités et les instituts de recherche, aux fins de l’entreprise de réforme du secteur de la sécurité et d’autres initiatives menées dans ce domaine, et conscient qu’il importe d’établir des partenariats stratégiques et d’assurer un financement coordonné si l’on veut renforcer l’efficacité de l’appui international fourni, lequel doit être conforme aux priorités nationales en matière de réforme du secteur de la sécurité et en tenir compte,

Insistant sur l’importance du principe d’appropriation nationale et le rôle que joue, selon qu’il convient, la coordination entre les différents acteurs qui appuient les réformes du secteur de la sécurité au moyen de contributions bilatérales et multilatérales, soulignant le rôle essentiel que peuvent jouer les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales des Nations Unies dans le renforcement de cette coordination eu égard au projet et aux priorités des pays, et sachant qu’il faut que l’appui apporté à la réforme du secteur de la sécurité obéisse aux principes de transparence, d’inclusion et de responsabilité et soit conforme aux priorités nationales,

Considérant la réforme du secteur de la sécurité comme primordiale, en tant qu’élément clef des mandats des missions de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, mettant en avant le rôle que les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales jouent dans la promotion de solutions politiques, soulignant qu’il importe que l’Organisation des Nations Unies aide les gouvernements qui en font la demande, selon qu’il convient, y compris au moyen de ses opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales, à renforcer la gouvernance du secteur de la sécurité et à mettre en place des institutions de sécurité inclusives, représentatives, accessibles et capables de s’adapter aux besoins de la population, et soulignant le rôle important qui revient à la Commission de consolidation de la paix et au Fonds pour la consolidation de la paix pour ce qui est d’appuyer la réforme du secteur de la sécurité,

Rappelant l’importante contribution qu’apporte l’Organisation des Nations Unies en soutenant les pays dans les efforts qu’ils déploient pour améliorer la gouvernance du secteur de la sécurité et se doter d’institutions de sécurité durables, et saluant l’action que mène l’Organisation, en particulier le Département des opérations de paix, dont le Groupe de la réforme du secteur de la sécurité et l’Équipe spéciale interinstitutions pour la réforme du secteur de la sécurité, en vue de se doter d’une politique globale encore plus robuste dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité, moyennant l’élaboration de directives spécialisées à l’échelle du système, le développement des capacités civiles, la mise en place de mécanismes de coordination et l’instauration de partenariats stratégiques avec des organisations régionales et sous-régionales, en particulier l’Union africaine,

Soulignant l’importance d’une coordination étroite des différentes activités relatives à la réforme du secteur de la sécurité menées par l’Organisation des Nations Unies, au Siège et sur le terrain, en particulier entre les missions établies par le Conseil de sécurité et les équipes de pays des Nations Unies, et notant le rôle que la Cellule mondiale de coordination des questions relatives à l’état de droit joue, dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité, en renforçant les interventions intégrées et les stratégies communes des Nations Unies au niveau des pays, et engageant les diverses entités des Nations Unies dont le mandat s’étend à la réforme du secteur de la sécurité à faire usage des mécanismes de coordination existants, lorsqu’il y a lieu,

Estimant que, dans certaines situations, la réforme du secteur de la sécurité englobera les services de défense, de police, des systèmes judiciaire et pénitentiaire, de gestion des catastrophes, de gestion des frontières, des douanes et d’immigration, ainsi que d’autres acteurs de la sécurité coutumiers ou traditionnels, tels que définis par chaque État Membre, et soulignant qu’il importe de réfléchir à des initiatives portant sur la gouvernance stratégique, la gestion et la tutelle du secteur de la sécurité, le but étant d’assurer la viabilité à long terme de ce secteur compte tenu de la situation et des besoins particuliers du pays considéré,

Réaffirmant l’importance de l’état de droit, élément clef de la prévention des conflits, du maintien de la paix, du règlement des conflits et de la consolidation de la paix, rappelant la déclaration de sa Présidente en date du 21 février 2014 (S/PRST/2014/5), redisant que la réforme du secteur de la sécurité doit s’inscrire dans le cadre de l’état de droit, et notant à cet égard la contribution importante que des services de police efficaces, professionnels et responsables, qui assurent la sécurité de la population, peuvent apporter à l’instauration de la confiance entre les autorités publiques et le public et au rétablissement de l’état de droit dans les pays sortant d’un conflit,

Considérant que la réforme du secteur de la sécurité est un élément essentiel des processus politiques des États sortant d’un conflit et du renforcement des institutions chargées de faire respecter l’état de droit, et que la mise en place d’une gouvernance représentative, efficace et responsable du secteur de la sécurité, qui réponde aux besoins de l’ensemble de la population en matière de sécurité et de justice, et le développement de capacités permettant aux institutions nationales de sécurité de s’acquitter durablement de leurs responsabilités en matière de protection de tous les civils sont des éléments essentiels au transfert des responsabilités en matière de sécurité envers l’État hôte, selon ce que prévoient les mandats, et à la réduction progressive des effectifs et au retrait des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales,

Conscient des liens qui existent entre la réforme du secteur de la sécurité et d’autres éléments importants pour la stabilisation et la reconstruction, entre autres la réconciliation nationale, la justice transitionnelle, le désarmement, la démobilisation, la réinsertion et la réadaptation à long terme des ex-combattants et de toutes les personnes concernées, en particulier les femmes, les jeunes et les enfants, la gestion nationale des armes légères et de petit calibre, l’application des embargos sur les armes, la réduction de la violence armée et de la criminalité organisée et les mesures de lutte contre la corruption, la protection des civils, en particulier des femmes, des jeunes et des enfants, l’égalité des sexes et les questions relatives aux droits humains,

1.    Réaffirme l’important rôle que joue la réforme du secteur de la sécurité dans la consolidation et la pérennisation de la paix, y compris la prévention des conflits, et dans la stabilisation et la reconstruction des États qui sortent d’un conflit, et décide de continuer, selon qu’il conviendra, d’inscrire, dans les mandats des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales des Nations Unies, des éléments de réforme du secteur de la sécurité et d’accorder à ces éléments le degré de priorité voulu ;

2.    Réaffirme l’importance cardinale de l’appropriation nationale des mécanismes de réforme du secteur de la sécurité, réaffirme également qu’il appartient au pays concerné de déterminer, le cas échéant, l’assistance à la réforme du secteur de la sécurité dont il a besoin, et considère qu’il importe de tenir compte du point de vue des pays hôtes dans l’élaboration des mandats des opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales des Nations Unies dans ce domaine;

3.    Encourage les États Membres qui entreprennent de réformer le secteur de la sécurité à prendre l’initiative de définir un projet national et une stratégie associant toutes les parties et prenant en compte les besoins et les aspirations de l’ensemble de la population, et note le rôle important qui revient à l’Organisation des Nations Unies, notamment à la Commission de consolidation de la paix, aux États Membres et aux organisations régionales et sous-régionales pour ce qui est d’assister les États à cet égard;

4.    Estime que la réforme du secteur de la sécurité doit être complémentaire et adossée à des processus politiques nationaux d’envergure ouverts à toutes les composantes de la société, y compris à la participation de la société civile, venant jeter les fondements de la stabilité, de la paix et du développement social et économique à la faveur de la promotion de l’état de droit, de la justice, du dialogue national et de la réconciliation, et décide d’accorder la priorité aux activités liées à la gouvernance et à la réforme du secteur de la sécurité qui contribuent directement à ces entreprises;

5.    Réaffirme que la promotion de la participation pleine, égale et effective des femmes au secteur de la sécurité contribue grandement à la mise en place d’institutions inclusives, responsables et légitimes qui protègent plus efficacement les populations et favorisent une paix et un développement durables, et se déclare préoccupé par le fait que les femmes continuent de se heurter à des obstacles de taille lorsqu’elles essaient de participer sur un pied d’égalité aux institutions du secteur de la sécurité, où elles sont souvent sous-représentées, et, à cet égard, encourage les États Membres à élaborer des stratégies et des programmes de réforme du secteur de la sécurité adaptés au contexte qui, entre autres, tiennent systématiquement compte des questions de genre, éliminent les obstacles juridiques, institutionnels et réglementaires à la participation égale des femmes au secteur de la sécurité et permettent à celles-ci d’être mieux représentées dans ce secteur à tous les niveaux;

6.    Considérant que les jeunes devraient prendre une part active à l’instauration d’une paix durable et œuvrer à la prévention des conflits, à la consolidation de la paix et au relèvement, notamment à la promotion de l’état de droit, de la justice et de la réconciliation, et que l’importance démographique de la jeunesse actuelle est un atout qui peut contribuer à instaurer durablement la paix et la prospérité économique, si tant est que des politiques inclusives soient en place;

7.    Souligne que la réforme du secteur de la sécurité est essentielle pour lutter contre l’impunité des violations des droits humains et atteintes à ces droits et des violations du droit international humanitaire, le cas échéant, et faire en sorte que leurs auteurs répondent de leurs actes, et concourt au respect de l’état de droit et à l’accès à la justice;

8.    Engage les États Membres qui entreprennent de réformer le secteur de la sécurité à institutionnaliser la protection de l’enfance, notamment en l’incluant dans l’instruction militaire et les consignes, ainsi que les directives militaires, si nécessaire, et en mettant en place des groupes de la protection de l’enfance au sein des forces nationales de sécurité, des mécanismes efficaces de détermination de l’âge permettant de prévenir tout recrutement de mineurs, des dispositifs de contrôle permettant d’exclure des rangs des forces nationales de sécurité quiconque a exercé des sévices sur la personne d’enfants, et des mesures destinées à protéger les écoles et les hôpitaux contre toute attaque et à empêcher que les écoles soient utilisées à des fins militaires en violation du droit international applicable;

9.    Souligne qu’il importe que la réforme du secteur de la sécurité prenne davantage en compte, entre autres activités, celles de maintien de l’ordre, d’administration de la justice et d’administration pénitentiaire, de défense, de gestion des frontières et de maintien de leur sécurité, de maintien de la sûreté maritime et de protection civile, notamment en mettant en place des forces de police professionnelles, accessibles et responsables qui contribuent à renforcer la capacité d’adaptation de la population, ainsi que les institutions de tutelle et d’administration, et insiste pour que les activités d’appui menées par les Nations Unies sur le terrain et au Siège soient intégrées à l’échelle du secteur et au niveau des différentes composantes;

10.   Est conscient de la nécessité de mettre en place une gouvernance et une réforme intégrant plus efficacement toutes les activités liées à la sécurité, en définissant clairement les fonctions et attributions des différentes institutions de sécurité concernées, et salue à cet égard le rôle de premier plan que jouent les acteurs de la défense nationale pour ce qui est de protéger la souveraineté et l’intégrité des États et leurs populations;

11.   Encourage les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales des Nations Unies à continuer de concourir à l’action menée pour renforcer la confiance entre les acteurs et institutions chargés de la sécurité nationale et la population;

12.   Souligne qu’il importe que les organes compétents des Nations Unies qui entreprennent de planifier les activités prescrites aux missions en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité attachent toute l’importance voulue à l’appui aux mesures nationales de réforme du secteur de la sécurité en tenant compte des besoins particuliers du pays hôte et de sa population, notamment en établissant des partenariats avec les autres acteurs internationaux et régionaux qui fournissent une assistance dans ce domaine aux autorités nationales;

13.   Souligne également qu’il importe de contribuer plus activement aux initiatives globales visant à améliorer la gouvernance et l’efficacité générale du secteur de la sécurité et à consolider les fondements des institutions chargées de la sécurité dans chaque composante, et de veiller à ce que les partenariats stratégiques et les mécanismes de coordination accordent la priorité à l’appui et au financement des initiatives portant sur la gouvernance du secteur de la sécurité, et note qu’il est possible de renforcer la gouvernance et les institutions de ce secteur en favorisant la tenue de dialogues inclusifs sur la sécurité nationale, l’examen régulier du secteur de la sécurité nationale et l’évaluation de ses besoins, l’adoption d’une politique et d’une stratégie de sécurité nationale, d’une législation sur la sécurité nationale et de plans relatifs au secteur de la sécurité nationale, le contrôle des dépenses publiques consacrées au secteur de la sécurité et le contrôle, la gestion et la coordination des activités relatives à la sécurité nationale;

14.   Souligne en outre que, pour gérer la transition d’une mission de maintien de la paix ou mission politique spéciale en ce qui concerne les activités relatives à la réforme du secteur de la sécurité, il faut d’abord évaluer en temps utile, en concertation avec le pays hôte et en étroite coordination avec l’équipe de pays des Nations Unies, l’assistance dont celui-ci aura besoin après l’expiration du mandat de la mission, afin de permettre aux acteurs de la consolidation de la paix et du développement de procéder à la planification stratégique nécessaire et de lever des fonds en conséquence, dans le cadre d’un partenariat étroit avec les autorités nationales et les organisations et populations locales, notamment les femmes et les jeunes, selon que de besoin, et de transférer au plus vite des compétences techniques aux responsables et experts du pays hôte, de sorte à assurer le succès durable de la transition;

15.   Note que l’Organisation des Nations Unies est particulièrement bien placée pour aider les États Membres à coordonner des mesures liées à la gouvernance et à la réforme du secteur de la sécurité qui soient conformes à une ambition et à des priorités nationales inclusives, comme l’exigent certaines situations, et qu’elle a une vaste expérience et des avantages comparatifs en la matière, puisqu’elle travaille en étroite collaboration avec les acteurs internationaux et régionaux compétents, et demande instamment à tous les acteurs concernés d’aligner l’appui qu’ils apportent sur les priorités nationales de manière transparente et coordonnée afin d’assurer l’efficacité souhaitée et de renforcer l’impact de l’appui international aux efforts nationaux de réforme du secteur de la sécurité;

16.   Encourage les États Membres à rester mobilisés et à faciliter les débats sur les moyens de renforcer la stratégie et le rôle de l’Organisation dans ce domaine crucial, y compris par l’intermédiaire du Comité spécial des opérations de maintien de la paix de l’Assemblée générale et de la Commission de consolidation de la paix;

17.   Note que la Police des Nations Unies peut contribuer grandement, y compris en coordonnant l’assistance internationale, à faciliter la réforme des institutions nationales de police et à renforcer leurs capacités dans tous les domaines, en insistant sur l’action de proximité et en mettant notamment en place de puissants mécanismes de gouvernance, de tutelle et de responsabilisation dans le cadre d’un système judiciaire et pénitentiaire qui fonctionne;

18.   Est conscient que les opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales des Nations Unies pour ce mandatées et l’Équipe spéciale interinstitutions pour la réforme du secteur de la sécurité doivent contrôler et évaluer encore plus activement les initiatives de l’Organisation des Nations Unies en matière de réforme du secteur de la sécurité afin d’assurer l’efficacité, la coordination et la cohérence de l’appui que l’Organisation et d’autres partenaires régionaux, bilatéraux et multilatéraux offrent aux autorités nationales;

19.   Encourage les États Membres à verser des contributions volontaires à l’appui des mesures liées à la réforme et à la gouvernance du secteur de la sécurité, et à faire en sorte que des ressources suffisantes soient allouées aux initiatives visant à renforcer la gouvernance de ce secteur, notamment celles qui portent sur l’ensemble de celui-ci, et, lorsque c’est possible et s’il en est convenu, par l’intermédiaire du Fonds pour la consolidation de la paix, compte tenu des priorités fixées par les autorités nationales;

20.   Décide de continuer de renforcer le rôle du Secrétariat de l’Organisation en matière de réforme du secteur de la sécurité et prie à cet égard le Secrétaire général d’envisager les mesures ci-après compte tenu des mandats propres à chaque pays:

a)    Consolider l’approche globale, intégrée et cohérente de l’Organisation des Nations Unies en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité;

b)    Élaborer des directives supplémentaires, notamment sur la prise en compte systématique des questions de genre, à l’intention de certains fonctionnaires de l’Organisation, notamment ses représentants et envoyés spéciaux, et aider l’ensemble des représentants concernés de l’Organisation à comprendre comment mener à bien les activités prescrites en matière de réforme du secteur de la sécurité;

c)    Inciter ses représentants spéciaux et envoyés spéciaux et les coordonnateurs résidents des Nations Unies à prendre pleinement en compte la portée stratégique de la réforme du secteur de la sécurité, notamment à l’occasion des missions de bons offices, s’il y a lieu, et à prendre dûment acte du rôle que jouent les missions politiques spéciales des Nations Unies, selon ce que prévoient leur mandat, s’agissant de promouvoir des initiatives de prévention opérationnelles et structurelles, en exécutant des activités et des mesures visant à réformer le secteur de la sécurité;

d)    Encourager ses représentants spéciaux œuvrant dans les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales des Nations Unies à tenir pleinement compte de la gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité, selon ce que prévoit leur mandat, dans leurs missions de bons offices, et à examiner la contribution de la réforme du secteur de la sécurité aux efforts déployés par les missions pour faire avancer les processus de paix, étendre l’autorité de l’État et créer des conditions propres à mieux protéger les civils;

e)    Mettre l’accent, dans les rapports qu’il lui fait périodiquement au sujet de telle ou telle opération établie par le Conseil, sur les informations les plus récentes concernant l’état d’avancement de la réforme du secteur de la sécurité là où elle a été prescrite, notamment en mettant au point, pour chaque pays, des critères de référence permettant d’évaluer l’efficacité de l’assistance fournie par l’Organisation, selon qu’il convient, et l’exécution par les pays hôtes de leurs engagements en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité, et de recenser les obstacles susceptibles de nuire à la réforme, et en tenant compte de l’approche globale, intégrée et cohérente de l’Organisation en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité, selon ce que prévoient les mandats, afin de lui permettre de mieux contrôler les activités relatives à la réforme du secteur de la sécurité;

f)    Mettre l’accent, dans les rapports que le Conseil l’a chargé de lui faire périodiquement au sujet de telle ou telle opération, sur l’action menée pour faciliter la coordination de l’appui international à la réforme du secteur de la sécurité, et y faire figurer des informations actualisées sur l’appui fourni par l’ensemble des acteurs concourant à la réforme du secteur de la sécurité, afin de lui permettre de mieux contrôler les activités relatives à la réforme du secteur de la sécurité;

g)    Encourager, à toutes les phases des processus de paix appuyés par l’Organisation, y compris lors de la réduction progressive des effectifs et le retrait des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, les équipes de pays des Nations Unies et les autres partenaires multilatéraux et bilatéraux à concourir en temps utile et de manière coordonnée au transfert des activités liées à la réforme du secteur de la sécurité et à offrir une assistance aux partenaires de la consolidation de la paix concernés, de façon à assurer un soutien adéquat aux autorités nationales;

h)    Continuer de tirer parti des notes d’orientation techniques intégrées et des modules de formation correspondants, ainsi que d’autres outils, si nécessaire, afin de permettre aux organismes des Nations Unies de contribuer de manière cohérente et coordonnée à la réforme du secteur de la sécurité, et définir les modalités de l’assistance apportée collectivement aux autorités nationales aux fins de la mise en œuvre de cette réforme, en préconisant l’affectation de ressources aux efforts déployés en ce sens par les équipes de pays des Nations Unies et les composantes consolidation de la paix des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales des Nations Unies;

i)    Continuer d’assurer la prise en compte de la gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité dans les partenariats stratégiques, tels que celui avec l’Union africaine, et, selon qu’il conviendra, les mécanismes de partenariat existants, afin de renforcer l’approche globale de l’Organisation en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité et de favoriser la cohérence stratégique de l’action menée, notamment en officialisant les partenariats, en répartissant clairement les responsabilités et en intégrant les objectifs de la réforme du secteur de la sécurité dans les phases de planification et de transition des missions;

j)    Donner aux hauts responsables des équipes de pays des Nations Unies les moyens d’absorber les fonctions de consolidation de la paix, y compris les éventuelles activités liées à la réforme du secteur de la sécurité, après le retrait des missions mandatées par le Conseil de sécurité;

k)    Veiller à ce que l’assistance liée à la réforme du secteur de la sécurité soit fournie compte tenu, le cas échéant, des embargos sur les armes décidés par le Conseil, y compris des dérogations qui pourraient avoir été accordées expressément pour soutenir la réforme du secteur de la sécurité;

21.   Souligne qu’il importe de nouer des partenariats et de coopérer avec les organisations et les accords régionaux et sous-régionaux visés au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies pour contribuer à la réforme du secteur de la sécurité et inciter les régions à s’investir davantage dans cette entreprise;

22.   Engage le Secrétaire général à continuer de promouvoir la coopération entre l’Organisation des Nations Unies et l’Union africaine, conformément au Cadre commun Organisation des Nations Unies-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité (2017) et au Cadre Union africaine-Organisation des Nations Unies pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et du Programme de développement durable à l’horizon 2030 (2018), de façon à renforcer l’application, sur l’ensemble du continent, du cadre d’orientation de l’Union africaine sur la réforme du secteur de la sécurité, lequel est adossé à l’Architecture africaine de paix et de sécurité et vient l’étayer, et engage tous les partenaires à continuer d’aider l’Union africaine à se doter de moyens accrus à cette fin, saluant les efforts déployés par l’ensemble des partenaires internationaux pour aider les États Membres, selon que de besoin, à honorer les engagements qu’ils ont pris au titre d’instruments régionaux;

23.   Rappelle qu’il importe que les États Membres, les organisations régionales et sous-régionales, les organisations spécialisées, y compris les universités et les instituts de recherche, et les parties concernées, y compris les organisations de femmes et de jeunes, mettent en commun les données et enseignements tirés de leur expérience, leurs bonnes pratiques et leurs compétences en matière de réforme du secteur de la sécurité et, à cet égard, préconise le renforcement des échanges et de la coopération Sud-Sud;

24.   Souligne l’importance d’une participation effective des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, à toutes les étapes de la réforme du secteur de la sécurité, eu égard au rôle essentiel qu’elles jouent dans la prévention et le règlement des conflits et dans la consolidation de la paix, afin d’accroître leur participation et leur représentation dans toutes les institutions du secteur de la sécurité, et estime qu’il est nécessaire de répondre aux besoins particuliers des femmes et des filles officiellement associées aux forces ou groupes armés, ainsi que des épouses et des veuves d’ex-combattants, et de renforcer les mesures de protection des civils, notamment en formant le personnel de sécurité comme il se doit, en recrutant plus de femmes dans le secteur de la sécurité et en mettant en place des procédures de contrôle efficaces permettant d’exclure les auteurs de violences sexuelles de ce secteur et de les amener à répondre de leurs actes;

25.   Prie le Secrétaire général de lui présenter, en septembre 2021, un rapport sur les mesures qu’il aura prises pour consolider l’approche globale de l’Organisation des Nations Unies en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité, afin d’éclairer ses délibérations sur cette question,

26.   Décide de rester activement saisi de la question.

Mme BINTOU KEITA, Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique, a souligné l’importance de la réforme du secteur de la sécurité (RSS) dans différents pays en crise ou sortie de crise, comme en Afghanistan, en Sierra Leone ou au Libéria.  La RSS est durable quand elle se fonde sur une véritable participation des citoyens, des femmes notamment, a-t-elle dit, ajoutant: « C’est un travail de longue haleine. »  Elle a rappelé que la RSS était mentionnée dans l’Accord de paix au Mali, 600 000 dollars ayant été apportés par les partenaires du Mali pour sa mise en œuvre. 

Les opérations de paix onusiennes appuient les grands axes de la RSS, tels que la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) ou la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a rappelé Mme Keita, qui a toutefois fait observer que la RSS n’était pas toujours durable car le contrat social est fragile et qu’il existe une défiance de la population vis-à-vis des forces de sécurité.  En République démocratique du Congo, le manque de consensus rend ainsi les choses difficiles dans ce domaine.  

La Sous-Secrétaire générale a appelé de ses vœux une compatibilité des approches dans le domaine de la RSS pour le bénéfice des populations, tout en reconnaissant « honnêtement » la difficulté de cette tâche.  Elle a donc préconisé des évaluations et mises en œuvre harmonisées de la RSS, en déclarant que les femmes et les minorités ne pouvaient en être écartées. 

La RSS est aussi une occasion de traiter des inégalités de genre en mettant en place des institutions sécuritaires égalitaires et plurielles, a poursuivi la Sous-Secrétaire générale.  Mme Keita a appelé à lutter contre les stéréotypes, en augmentant le nombre de femmes en uniforme, en écartant les auteurs de violences sexuelles des rangs des forces de sécurité et en assurant un établissement des responsabilités en cas de violence sexuelle.  

Enfin, Mme Keita a recommandé de considérer la réforme du secteur de la sécurité comme un ensemble de processus politiques, de reconnaître le rôle systématique de coordination de l’ONU pour harmoniser les priorités nationales et le soutien international et enfin de favoriser un plus grand rôle des femmes.  

Selon M. ALEXANDRE ZOUEV, Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de paix, aider les pays à mettre en place les réformes est important.  Le Conseil de sécurité avait adopté en ce sens la résolution 2151 (2014), qui affirme que la réforme du secteur de la sécurité est essentielle pour la sécurité et le développement, a-t-il rappelé. 

 Au fil des ans, le soutien du Secrétaire général a facilité l’engagement politique dans ce domaine, et les Nations Unies aident plus de 15 pays à accomplir cette réforme via notamment les missions politiques spéciales, a rappelé M. Zouev.  Outre les exemples déjà mentionnés, les Nations Unies soutiennent les processus au Burkina Faso et en Gambie, avec des programmes consultatifs mettant l’emphase sur l’inclusion et la participation des femmes.   M. Zouev a aussi cité la réforme du secteur de la sécurité en Libye, y compris pour l’accord de signature du cessez-le-feu au Yémen et en en Somalie, où l’ONU a fourni des conseils stratégiques sur l’architecture sécuritaire.   

Le Sous-Secrétaire général a d’autre part estimé que les partenariats stratégiques étaient la clef pour promouvoir une aide efficace pour réformer le secteur de la sécurité.  Les Nations Unies continuent ainsi de renforcer la coopération régionale avec l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union européenne ou encore l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OCSE), entre autres.  L’assistance se fait via l’équipe spécialisée interinstitutions, une plateforme que M. Zouev a qualifiée d’essentielle pour garantir la cohérence et fournir une aide coordonnée en partenariat, depuis peu, avec la Banque mondiale, pour mettre en œuvre des mécanismes de financement.  Des problèmes persistent toutefois dans ce domaine, a concédé M. Zouev. 

 Jugeant essentiel d’augmenter les ressources destinées à évaluer les besoins, M. Zouev a recommandé que les bureaux régionaux disposent de capacités accrues pour l’analyse des vulnérabilités et des risques, afin de nourrir une stratégie en la matière.  Les ressources financières étant essentielles, le Sous-Secrétaire général en a réclamé davantage pour nourrir les réformes du secteur, via des mécanismes de financement conjoints ou des fonds idoines.  Enfin, les partenariats avec l’Union africaine ou l’Union européenne sont essentiels, a dit M. Zouev, qui a conclu en déclarant que des rapports faisant le bilan de ces soutiens devraient être soumis au Conseil de sécurité.  

M. SMAÏL CHERGUI, Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, a déclaré que le thème du débat était d’actualité pour l’Union africaine, étant donné la reconnaissance croissante parmi ses États membres du rôle central de la gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité (RSS) dans la construction d’accords de paix durables.   Une RSS efficace contribue à la réalisation de l’aspiration d’une Afrique pacifique et sûre, dans laquelle toutes les armes resteront silencieuses et dans laquelle les droits de l’homme, la démocratie et l’égalité des sexes sont garantis, conformément à l’Agenda 2063 du continent, a-t-il ajouté.  

La principale feuille de route de l’Union africaine sur les mesures pratiques pour faire taire les armes en Afrique d’ici à 2020 reconnaît également que l’échec de la transformation des forces de défense et de sécurité en institutions de sécurité nationale professionnelles et disciplinées, soumises à une surveillance et un contrôle civils, conduit souvent à une reprise des conflits, perpétuant ainsi des cycles de violence et perturbant les efforts de stabilisation et de consolidation de la paix, a rappelé M. Chergui.  

Or, a poursuivi le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, on observe que le déficit de gouvernance de la sécurité constitue « une cause majeure fondamentale » de la plupart des conflits politiques et armés en Afrique.   Cela explique l’inclusion de dispositions des réformes du secteur de la sécurité dans les textes de la plupart des accords de paix et des règlements politiques à travers le continent africain.   La politique de l’Union africaine sur la reconstruction et le développement post-conflit donne priorité au rétablissement et au renforcement de la capacité des institutions de sécurité, y compris la défense, la police et les services correctionnels par la conception et la mise en œuvre de politiques connexes.   À cet égard, la récente création du Centre de reconstruction et de développement post-conflit par l’Union africaine vise à fournir un appui technique en RSS et aux programmes de désarmement, démobilisation et réintégration aux États membres et aux communautés économiques régionales.   Il est à espérer que l’ONU et ses partenaires travaillent en étroite collaboration avec le Centre pour renforcer ses capacités, a commenté M. Chergui.   

M. Chergui a expliqué que l’Union africaine aidait ses États membres à entreprendre un dialogue visant à créer des institutions de sécurité professionnelles et responsables.   Ces programmes de soutien à la RSS sont actifs à  Madagascar, en Somalie, en Gambie, au Mali, en République centrafricaine, en Guinée Bissau et en Éthiopie, a-t-il précisé, ajoutant que, dans tous ces efforts, l’appropriation nationale était  fondamentale.  Il a également mis en avant l’importance du rôle des femmes et des jeunes dans la sécurité, la gouvernance et le maintien de la paix. 

Cependant, la RSS est un processus « politiquement complexe », à long terme et souvent coûteux, a rappelé M. Chergui.   La nécessité d’un financement prévisible et durable demeure donc une préoccupation, tout comme pour les opérations de soutien à la paix de l’Union africaine.   L’Union africaine note également l’absence de mécanismes garantissant que les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration seront menés dans le cadre d’accords de paix et d’efforts de stabilisation.  

Ce sont des domaines sur lesquels l’Union africaine met l’accent et dans lesquels elle souhaite une coopération renforcée avec l’ONU et la communauté internationale, a fait remarquer M. Chergui.  L’Union africaine, a-t-il ajouté, s’est engagée à fournir un soutien accru aux efforts des États membres et des communautés régionales dans les années à venir.   Elle a élaboré une stratégie triennale pour la RSS (2021-2023) dans l’élaboration de laquelle l’ONU et ses partenaires ont joué un rôle déterminant.  L’Union africaine attend maintenant et avec intérêt une coopération et une coordination renforcées pour sa mise en œuvre, a conclu M. Chergui. 

Mme NALEDI PANDOR, Ministre des relations internationales et de la coopération de l’Afrique du Sud, a souligné la nécessité pour l’État de protéger sa population par le biais d’un secteur de la sécurité robuste.  La réforme du secteur de la sécurité est un moyen d’enraciner la démocratie dans un pays, comme le montre l’expérience de l’Afrique du Sud, a-t-elle déclaré.  Elle a ajouté que l’Afrique du Sud, pays contributeur de troupes, avait contribué à la formation du personnel de la RSS en République démocratique du Congo, au Lesotho, au Burundi ou encore au Soudan du Sud.  

Tout en notant que cela fait longtemps que le Conseil s’est penché sur cette question, la Ministre a fait état de progrès dans la hiérarchisation des priorités en la matière.  Les opérations de paix ont de plus en plus mandat d’appuyer la réforme du secteur de la sécurité, tandis que les accords de paix incluent des dispositions sur ce sujet comme au Mali, en Colombie ou encore au Soudan du Sud, s’est félicité Mme Pandor. 

La Ministre a souligné la nécessité d’évaluer la mise en œuvre de ces dispositions, de mieux aligner le soutien international et les priorités nationales et de remédier au manque de coordination.  Elle a rappelé le principe d’appropriation nationale qui régit la RSS, avant de plaider pour un rôle accru des femmes.  Enfin, rappelant que son pays est membre avec la Slovaquie du Groupe des amis de la RSS, la Ministre a demandé un financement pérenne de la réforme du secteur de la sécurité, ainsi qu’une attention accrue du Conseil sur cette question essentielle.  

Mme SOPHIE WILMES, Ministre des affaires étrangères de la Belgique, a relevé plusieurs éléments saillants concernant la réforme du secteur de la sécurité.  Le premier concerne l’approche holistique, que son pays soutient.  Les efforts seraient vains sans une telle approche: l’armée, la police, la justice doivent respecter les principes démocratiques et le développement durable.  Le second principe concerne l’exclusivité.  Trop souvent, les réformes du secteur relèvent de la compétence exclusive de l’exécutif et cette lacune doit être comblée, en incluant la société civile, les femmes et les jeunes, a estimé la Ministre.  

Mme Wilmes a salué le rôle de médiateur et de facilitateur de l’Union africaine.  L’Union européenne  et la Belgique prennent aussi leurs responsabilités, cette dernière appuyant les efforts au Sahel et dans la région des Grands Lacs, où l’armée, la coopération régionale et la justice travaillent en synergie.  Cette expérience sur le terrain nourrit la réflexion de la Belgique, a expliqué la Ministre, qui a estimé qu’aujourd’hui plus que jamais, les partenariats devraient être étendus à d’autres organisations sous-régionales africaines et, en Europe, à l’OSCE.  

M. REIN TAMMSAAR, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Estonie, a observé qu’il était « de plus en plus admis » que le dialogue sur la réforme du secteur de la sécurité ne peut atteindre son plein potentiel et son efficacité s’il est uniquement limité au domaine post-conflit.   Il doit plutôt y avoir une vision holistique de la RSS tout au long du cycle du conflit.   Pour le Vice-Ministre, le renforcement « précoce » des capacités peut empêcher les pays et les communautés de retomber dans la violence après la fin d’un conflit actif.  Il est dans ce contexte d’une grande importance d’avoir une vision globale de la société et de l’ensemble du système.  Pour M. Tammsaar, cet objectif ne peut être atteint que par l’appropriation locale, nationale et régionale du processus de réforme.   

 Le Vice-Ministre a également noté que l’une des principales lacunes identifiées par l’ONU dans les processus de RSS était le manque d’inclusion des femmes dans le secteur de la sécurité et les processus de renforcement des institutions, ainsi que dans les dialogues menant à la consolidation et au maintien de la paix.   L’Estonie juge « important », non seulement d’inclure les femmes dans les processus formels et les organes officiels liés au secteur de la sécurité, mais aussi de veiller à ce que la RSS soit conçue pour être sensible au genre.    Il est, dans ce contexte, essentiel d’avoir des directives claires sur la manière d’inclure les femmes dans les processus de réformes de la sécurité  comme du domaine judiciaire, ainsi que dans les processus de dialogue politique sur le maintien et la consolidation de la paix.   Les femmes et les filles étant souvent affectées de manière disproportionnée par les conflits armés, a rappelé le Vice-Ministre, pour qui il est donc « extrêmement important » de faire entendre leur voix 

M. MOHAMED ALI NAFTI, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Tunisie, a rappelé que la priorité devait être d’aider les pays sortant des conflits à assurer la sécurité et à régler les causes profondes des conflits, pour éviter tout retour de la violence.  La réforme du secteur de la sécurité doit être dirigée par le pays concerné en vue de répondre aux besoins locaux, a-t-il déclaré, en soulignant l’importance du principe d’appropriation nationale de la réforme. 

Le Vice-Ministre a demandé une participation accrue des femmes et des jeunes à la réforme du secteur de la sécurité et souhaité une coopération « constante » entre l’ONU et les autres partenaires internationaux en la matière.  Il a en outre souhaité un financement pérenne de la RSS, avant de mentionner l’initiative de l’Union africaine de « Faire taire les armes ».  Il a rappelé que la RSS était une condition préalable aux efforts de consolidation de la paix et à une bonne gouvernance.  La RSS est essentielle à l’instauration de la confiance, a conclu le Vice-Ministre, en reconnaissant qu’il s’agissait d’un « processus délicat ».  

Mme KEISAL MELISSA PETERS, Ministre des affaires étrangère de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a jugé que dans les pays touchés par un conflit, en particulier ceux qui subissent les effets délétères de l’activité des groupes armés, la réforme du secteur de la sécurité avait un impact normatif important: à mesure que les personnes chargées de protéger les civils, de faire respecter l’état de droit et d’assurer la sécurité s’organisent et se professionnalisent, une « culture de la sécurité » se répand de façon positive dans toute la société. 

Cette réparation du tissu social ne peut être facilitée que par des institutions efficaces, transparentes et responsables qui répondent aux besoins des citoyens, a poursuivi Mme Peters.  Il est donc essentiel que tous les efforts de gouvernance et de réforme du secteur de la sécurité soient fondés sur des consultations publiques inclusives qui permettent l’engagement de tous les segments de la société, ainsi que les organisations régionales et sous-régionales et les autres partenaires qui aident les États membres dans leur programme de réforme. 

Pour maximiser l’impact de la gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité, ces initiatives doivent être liées à des efforts de développement plus larges, a recommandé la Ministre.  Il s’agit de renforcer le système judiciaire et législatif, d’améliorer la formation et l’éducation et de s’attaquer aux obstacles structurels à la participation sociale, économique et politique.  Les effets des facteurs d’insécurité contemporains, tels que les changements climatiques, la dégradation de l’environnement, les crises sanitaires et la cyberactivité, ne doivent pas être négligés, a-t-elle précisé.  

Cependant, tous ces changements sociaux positifs ne peuvent jamais être imposés de l’extérieur, a insisté Mme Peters.  Ils doivent émerger de « manière organique », de l’intérieur de l’État, avec le soutien des acteurs qui ont l’expertise et la compréhension contextuelle des dynamiques de sécurité locales et régionales.  Rejetant une approche « unique » de la réforme du secteur de la sécurité, Mme Peters a recommandé que les mesures prises soient spécifiques à chaque pays. 

Soulignant l’importance du cadre politique de l’Union africaine sur la réforme du secteur de la sécurité sur le continent africain, notamment via son Agenda 2063, Mme Peters a encouragé une collaboration plus étroite entre les Nations Unies et l’Union africaine pour apporter une aide à la réforme du secteur de la sécurité sur le continent et a plaidé pour un financement prévisible, fiable et durable de ces réformes. 

M. NIELS ANNEN, Ministre d’État au Ministère des affaires étrangères de l’Allemagne, a déclaré que la question de la réforme du secteur de la sécurité était devenue une « question clef » requérant l’attention de la communauté internationale.   Il a suggéré que les missions créées par le Conseil de sécurité apportent leur appui aux programmes de RSS, y compris en ce qui concerne les armes légères et de petit calibre.  La question de la prise en charge du financement de ces programmes de soutien doit être discutée, a précisé le Ministre. 

En deuxième lieu, l’Allemagne propose une meilleure coordination entre toutes les initiatives visant à la réforme du secteur de la sécurité, y compris émanant des institutions onusiennes et du secteur privé.   Enfin, il faut une appropriation nationale des efforts, afin que chaque couche de la société s’en empare pour en assurer le succès.   Pour M. Annen, la RSS est « le lien magique » entre la consolidation de la paix et la suite.   C’est pourquoi le Conseil de sécurité doit traiter de cette question transversale dans le cadre de son mandat, a-t-il conclu. 

M. MAHENDRA SIREGAR, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a indiqué que la pandémie de COVID-19 soulignait la nécessité d’une gouvernance adéquate du secteur de la sécurité.  Les institutions sécuritaires ont dû aller au-delà de leur mandat afin d’appuyer la riposte à la pandémie, a-t-il fait observer. 

M. Siregar a déclaré que la RSS devait être dirigée et contrôlée au niveau national et répondre aux besoins spécifiques nationaux, sachant qu’il n’existe pas de recette unique pour toutes les situations.  Il est par conséquent essentiel que les pays hôtes jouent un rôle de chef de file dans la planification et la mise en œuvre de la réforme, a-t-il ajouté, en demandant une participation de la société civile et des femmes.  

Le Vice-Ministre a réclamé un soutien accru de l’ONU à la réforme du secteur de la sécurité dans les pays en proie à un conflit, en rappelant que la plupart des missions onusiennes avaient désormais mandat pour fournir un appui à cette réforme.  « Le Conseil doit faire en sorte que les mandats soient clairs, réalistes et atteignables », a ajouté le Vice-Ministre, qui a aussi rappelé que ces missions devaient être dotées des ressources nécessaires. 

M. Siregar a jugé crucial un partenariat fort avec les autres acteurs, tels que les organisations régionales et les institutions financières internationales.  Enfin, il a indiqué que son pays avait réussi à mener à bien sa propre réforme du secteur de la sécurité dans le cadre plus large des réformes de démocratisation entamées au début des années 2000.  « Nous sommes disposés à partager notre expérience et bonnes pratiques au sein du Groupe des amis de la RSS dont nous sommes membres », a-t-il conclu. 

La République dominicaine a loué les progrès rapides de l’appui à la réforme du secteur.  Toutefois, de grands défis persistent, a relevé la délégation et, lorsque les secteurs de la sécurité fonctionnent mal, les populations perdent confiance en les institutions.  Pour parvenir à des structures nationales pérennes, il faut donc que l’état de droit soit respecté, et les autorités nationales doivent en tenir les rênes.  

Pour la République dominicaine, la réforme du secteur de la sécurité doit être menée dans le cade de consultations inclusives réalisées avec la société civile, les femmes  et les jeunes.  Il faut passer d’une perspective de sécurité stricte à une perspective davantage centrée sur l’individu, a ajouté la délégation, qui a appelé à davantage actualiser les initiatives de réformes dans les rapports de mission. 

Pour la Fédération de Russie, contrôler l’ensemble des secteurs de la sécurité est  essentiel pour ramener la paix et instaurer la confiance des citoyens et contribuer aux efforts de réconciliation.   Mais alors que l’appui des Nations Unies et l’assistance technique des partenaires extérieurs soient importants, il ne faut pas oublier que c’est à l’État concerné que revient la responsabilité première d’entreprendre ses réformes, sur la base de ses propres priorités et tenant compte de ses spécificités.   Cette aide ne doit pas être vue comme une tentative d’imposer des recettes toutes faites de l’extérieur, au risque de voir cette aide rejetée et mal perçue, a prévenu la délégation.  La Fédération de Russie considère toutefois que les Missions des Nations Unies peuvent jouer un rôle d’appui aux programmes de RSS, tout comme la Commission de consolidation de la paix.  

La France a rappelé que, dans tous les pays, la confiance de la population dans son gouvernement dépend de la capacité de celui-ci à garantir la sécurité. C’est encore plus vrai après un conflit, quand les populations traumatisées par des cycles de violence ont besoin d’institutions de sécurité solides, dotées de personnels formés et compétents, agissant dans le cadre du droit et respectant les droits de l’homme, pour se projeter dans l’avenir, et le reconstruire.  

La délégation a ensuite précisé trois points.  En premier lieu, les opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales contribuent souvent à la stabilisation des États hôtes dans le long terme, mais il faut pour cela qu’elles disposent d’un mandat qui les y autorise.  La France, qui a porté une ambition forte dans ce sens pour les Missions en République démocratique du Congo, en République centrafricaine et au Mali, appelle à encourager activement les efforts des services chargés de la réforme du secteur de la sécurité.  

Deuxièmement, la France défend une vision de la réforme du secteur de la sécurité qui tient le plus grand compte des spécificités de chaque pays, en s’appuyant en premier lieu sur la volonté politique de l’État hôte et en second lieu sur la coordination des acteurs internationaux.  Pour la délégation, qui a cité en exemple le Mali, c’est la conjonction de ces volontés qui permet de donner des bases solides à un processus efficace de réforme du secteur de la sécurité.  

Enfin, la France considère comme un facteur de succès les initiatives menées à l’échelle des pays et des missions, qui permettent de faire coïncider parfaitement la réforme avec les besoins identifiés sur place.  La délégation a jugé à cet égard essentiel de pouvoir s’appuyer sur des indicateurs pertinents et adaptés à chaque mission, comme c’est le cas avec la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). 

Le Viet Nam a expliqué que les pays sortant d’années, voire de décennies, de guerres et de conflits étaient inévitablement confrontés à d’énormes problèmes dans le contexte de sécurité post-conflit, ainsi qu’à un passé obsédant.  Il peut s’agir, entre autres, de problèmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des anciens combattants, de réconciliation, de justice et de nombreuses lacunes du nouveau secteur de la sécurité.  La délégation a appelé à y remédier efficacement, afin de renforcer la confiance et la paix dans lesdits pays, et au sein de leur population.  

Pour le Viet Nam, la réforme du secteur de la sécurité peut jouer un rôle essentiel pour renforcer la paix après les conflits, promouvoir la réconciliation et la reconstruction nationales et réduire les risques de rechute.  Elle devrait donc s’attaquer aux conséquences des conflits sur les groupes les plus vulnérables de la société, en particulier les femmes et les enfants, en tant que victimes et participants aux conflits armés.   À cet égard, le Viet Nam soutient les réformes identifiées et menées au niveau national.  Ces réformes peuvent avoir un impact positif à long terme et doivent être activement soutenues par les Nations Unies et la communauté internationale.  

La délégation a aussi souligné la nécessité d’une représentation égale et d’une pleine participation des femmes  car elles offrent une perspective unique sur la paix et les conflits, ainsi que dans les processus de prise de décisions et de consolidation de la paix.  

Les États-Unis ont jugé une gouvernance efficace du secteur de la sécurité essentielle à la croissance, la stabilité et la sécurité à long terme de tout pays.   De même, une réforme réussie du secteur de la sécurité dans un pays donné doit englober tous les éléments de ce secteur, y compris l’armée, la police, la sécurité des frontières et la justice.   Si l’on constate qu’une RSS efficace renforce les institutions, conduisant à une transparence et une responsabilité accrues, on constate aussi que la corruption et une politique insuffisante sapent les efforts de réforme, en particulier au niveau stratégique, a ajouté la délégation.  Il est donc essentiel que les dirigeants nationaux montrent leur attachement à la réforme à long terme du secteur de la sécurité, et la transparence et la responsabilité qui y sont liées.  

Alors que l’ONU peut jouer et joue un rôle important dans la promotion de la gouvernance et de la RSS, les États-Unis restent d’avis que l’appropriation du processus au niveau national et local est primordiale.   Les gouvernements locaux, la société civile et les organisations non gouvernementales apportent des contributions essentielles aux réformes initiales et à une gouvernance réussie à long terme.   Il est important que les pays, non seulement expriment leur soutien verbal à l’amélioration de la gouvernance et de la RSS, mais alignent aussi leurs ressources nationales sur les promesses qu’ils font, a ajouté la délégation.   Sans appropriation nationale et sans engagements financiers durables, la RSS peut en effet échouer, alors que si l’engagement du gouvernement est cohérent et clair, le succès s’ensuit inévitablement.  

Les États-Unis sont profondément attachés à la justice et à la responsabilité, y compris la gouvernance et la réforme du secteur de la sécurité.  Ils voient dans le cas du Libéria un bon exemple.  Ce pays, après s’être remis de 14 ans de guerre civile, a résisté à un retour au conflit et continue de progresser dans la reconstruction d’un secteur de la sécurité responsable, impartial et fonctionnel, a expliqué la délégation, qui a rappelé que les États-Unis avaient fourni plus de 4 milliards de dollars d’aide pour soutenir la stabilisation et le développement du Libéria au cours des 20 dernières années et continueraient de le soutenir, comme ils soutiennent d’autres États qui mettent en œuvre des réformes du secteur de la sécurité.   Les États-Unis utiliseront leur voix au Conseil de sécurité pour faire pression en faveur de secteurs de sécurité solides qui rendent compte à leur population et contribuent à construire une paix à long terme, a conclu la délégation.  

Pour le Niger, la transformation du secteur de la sécurité « reste plus que jamais nécessaire, face à l’évolution du monde, et aux enjeux nouveaux auxquels nos États font face ».  Ces réformes sont d’une importance cruciale au Niger, au regard des difficultés liées à l’insécurité qui sévit dans la zone sahélienne depuis bientôt une décennie.  La délégation a détaillé, dans le cadre du Programme de Renaissance, le volet consacré à la sécurité des personnes et des biens, dont les objectifs sont la redéfinition et la mise en œuvre d’une politique de sécurité nationale tenant compte des dimensions politiques, économiques et militaires ; la consolidation de l’autorité de l’État à tous les niveaux ; et la poursuite et le renforcement de la coopération en matière de sécurité avec les pays voisins.  

Entouré par trois foyers de tension -Boko Haram au Sud, la crise libyenne au Nord et celle au Mali à l’Ouest-, le Niger a érigé en priorité le renforcement des capacités du secteur de la sécurité, pour mieux adapter ces instruments de sécurité aux menaces actuelles, dominées par l’expansion du terrorisme dans l’espace sahélien, a expliqué la délégation.  Au travers des mécanismes sous-régionaux, le Niger a mis l’accent sur le renforcement d’une coopération transfrontalière accrue avec les pays limitrophes et les États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), pour mieux promouvoir la réforme du secteur de sécurité dans un contexte de plus en plus globalisé.   Enfin, le Niger juge essentiel que la politique et le programme de réforme du secteur de la sécurité soient élaborés, gérés et mis en œuvre par les acteurs nationaux plutôt que par des « intervenants extérieurs ».  

Le Royaume-Uni a dit avoir beaucoup investi dans la gouvernance et la réforme du secteur de la sécurité, dans son propre pays et à l’étranger.  Partant du principe qu’un secteur de la sécurité démocratique, responsable et efficace protège les citoyens, la délégation a jugé la RSS pertinente, non seulement pour la reconstruction après un conflit mais aussi pour leur prévention.   

Lorsque la confiance de la population est ébranlée, l’instabilité rôde ; la police est souvent le premier point de contact entre un État et ses citoyens, mais lorsqu’on laisse la corruption et les abus s’épanouir, ce contrat social commence à s’éroder, a poursuivi la délégation.  Le Royaume-Uni a fait observer que, trop souvent, des institutions du secteur de la sécurité étaient utilisées comme des instruments de répression, dont les conséquences sont tristement connues.  La réforme du secteur est donc d’une grande importance pour la consolidation et le maintien de la paix.  Elle devrait être abordée dans le cadre d’un ensemble plus large de garanties institutionnelles -notamment les processus de réforme du droit, les travaux visant à renforcer les traductions en justice en cas d’abus, l’indépendance judiciaire et l’accès à la justice des citoyens.  

Pour le Royaume-Uni, le travail des Nations Unies sur la réforme du secteur de la sécurité constitue un élément clef des efforts internationaux pour renforcer l’état de droit.  C’est pourquoi le Royaume-Uni soutient les efforts de l’ONU, notamment le Mécanisme financé par le Programme mondial pour l’état de droit du PNUD, qui a permis aux Nations Unies d’obtenir des résultats en Afghanistan, en Libye et en République centrafricaine.   

Pour la Chine, la stratégie de réforme du secteur de la sécurité doit être accompagnée d’une stratégie du développement, qui s’attaque aux causes profondes des conflits et réduise la pauvreté, ceci afin de ramener la paix et la sécurité.  Dans le même temps, les Missions des Nations Unies peuvent jouer un rôle d’appui et d’assistance aux pays concernés, tout comme les organisations régionales et sous-régionales.   Ces entités peuvent notamment permettre un échange des expériences.   Enfin, les programmes de RSS étant sous-financés, la communauté internationale doit se saisir de cette question, a plaidé la délégation. 

Mme BEATRICE WANI-NOAH, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Soudan du Sud, a souligné la nécessité de créer un environnement sécuritaire propice, ajoutant que cette tâche incombait aux gouvernements.  La Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) a fait de son mieux pour mettre en œuvre le volet protection des civils de son mandat mais beaucoup reste encore à faire, a-t-elle estimé. 

La Ministre a dénoncé la circulation d’armes légères dans son pays et souhaité un réajustement du mandat de la MINUSS afin de la rendre plus réactive dans ce domaine.  Si les autorités du Soudan du Sud travaillent d’arrache-pied pour mettre en œuvre la réforme du secteur de la sécurité, elles ont besoin d’un appui international pérenne, a ajouté Mme Wani-Noha, qui a relevé de graves lacunes dans la coordination et le financement dudit soutien. 

La Ministre a également réclamé un soutien accru au programme de désarmement, démobilisation réintégration (DDR), qui permet un dialogue avec les groupes armés qui pourraient menacer la stabilité du pays.  L’ONU devrait jouer un rôle de coordination accru dans le soutien au Soudan du Sud, y compris aux arrangements sécuritaires transitoires, pour remédier aux difficultés logistiques, a encore estimé la Ministre, pour qui il faut accélérer le déploiement des forces de sécurité dans le pays, parallèlement à la poursuite du processus de DDR. 

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