Soixante-troisième session,
7e & 8e séances plénières – matin & après-midi
FEM/2176

Commission de la condition de la femme: examen de six rapports nationaux et discussion sur « les femmes et les filles d’ascendance africaine »

Chaque jour dans le monde, 137 femmes sont tuées par un membre de leur famille.  Ces chiffres macabres d’ONU-Femmes datant de 2017 laissent voir l’ampleur du fléau de la violence sexuelle et sexiste, l’un des sujets phares abordés ce matin par les six délégations (Cabo Verde, Honduras, Panama, Arabie saoudite, Slovaquie et Algérie) qui ont conclu la série d’exposés volontaires lancée hier après-midi sur le thème « Autonomisation des femmes et lien avec le développement durable ». 

Ces pays ont ainsi présenté des initiatives mises en place chez eux pour lutter contre un phénomène qui touche également « les femmes et les filles d’ascendance africaine ».  Ces dernières étaient au cœur du sujet de la table ronde de l’après-midi, au cours de laquelle les intervenants ont souligné le racisme qui est à la base de cette violence et des discriminations à l’égard des femmes.

« La violence à l’égard des femmes et des filles touche toutes les générations, ne connaît pas de frontières géographiques et est considérée comme un obstacle majeur à la réalisation des droits de la personne et à la concrétisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 », reconnaît l’Assemblée générale dans sa résolution 70/1.  Ainsi, pas moins de 70% des femmes dans le monde ont subi au cours de leur vie de la violence physique ou sexuelle de la part de leur partenaire intime, alors qu’au moins 200 millions de femmes et de filles ont subi une forme de mutilation génitale.

En plus de la violence physique qui est la plus médiatisée, car la plus visible, on note également la violence psychologique, y compris le harcèlement qui prend de l’ampleur dans les environnements numériques.  Un tableau sombre qui oblige donc les pays à agir. 

C’est ainsi qu’au Honduras, un programme pour l’égalité des genres appelé « Ciudad Mujeres » met en place les moyens de lutte contre la violence à l’encontre des femmes dans les cinq départements les plus affectés du pays, par le biais d’un « mécanisme pour les femmes ».  En Slovaquie, un numéro de téléphone vert permet aux femmes en détresse de communiquer 24 heures sur 24, tandis que le projet « Her Story » a permis de publier des manuels scolaires promouvant l’égalité des sexes. 

Au Panama, l’arsenal juridique a été modifié afin de punir plus sévèrement les auteurs de ces crimes, notamment pour les cas de féminicides.  De même, le pays accorde du prix à l’autonomisation économique des femmes et entend les aider à s’émanciper de la dépendance économique de leurs conjoints qui, dans certains cas, sont également leurs bourreaux.  Autre exemple au Cabo verde où, après avoir purgé leur peine, les auteurs de violence sont astreints à un programme de réhabilitation pour empêcher une rechute dans la spirale de la violence.

ONU-Femmes a recensé 144 pays qui ont adopté des lois sur la violence domestique et 154 sur le harcèlement sexuel.  Cependant, même lorsque des lois existent, cela ne signifie pas qu’elles sont conformes aux normes et recommandations internationales ou qu’elles sont appliquées.  Le Programme d’action de Beijing de 1995 identifie pourtant les mesures spécifiques que les gouvernements doivent prendre pour prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes et des filles. 

Ces dernières années, toujours selon ONU-Femmes, les voix des survivants et des activistes, à travers des campagnes telles que #MeToo, #TimesUp, #Niunamenos, #NotOneMore, #BalanceTonPorc et d’autres, ont atteint un crescendo qui ne peut plus être réduit au silence.  Il est question de braquer les projecteurs sur les histoires des filles et femmes.

C’est pour répondre à ce besoin de sensibilisation, en particulier aux problèmes des femmes et filles d’ascendance africaine, que la déléguée d’Afrique du Sud, intervenant au cours de la table ronde de l’après-midi, a suggéré la création d’une « instance permanente des personnes d’ascendance africaine ».  Elle a mis sur le compte de l’esclavage, de la traite des Noirs et de la colonisation, la perpétuation jusqu’à aujourd’hui de la discrimination à l’égard de ces personnes.  Plusieurs intervenants, dont deux expertes, ont plaidé pour améliorer la collecte de données sur ce fléau, des données qui doivent être « ventilées » et « ethnico-épidémiologiques ».

La Coordonnatrice générale du Réseau des femmes africaines, latino-américaines, afro-caribéennes et de la diaspora a observé que la violence à l’égard de ces femmes revêt des composantes racistes, et que « ces jeunes filles finissent par en avoir assez d’être noires », ce qui leur occasionne énormément de problèmes psychologiques et d’estime de soi.  Ayant 50% de moins de chances d’avoir un emploi que les autres femmes, les femmes d’ascendance africaine sont surreprésentées parmi les travailleuses domestiques, a-t-elle aussi remarqué.  Un problème auquel on peut remédier en commençant par améliorer le taux de scolarisation des filles d’ascendance africaine, ce que fait le Brésil par le biais de politiques de discrimination positive.

Demain, vendredi 14 mars, à 15 heures, la Commission de la condition de la femme tiendra un débat interactif sur les synergies et les financements pour faire avancer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles. 

SUITE DONNÉE À LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET À LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE » (E/CN.6/2019/2 et E/CN.6/2019/5)

Réalisation des objectifs stratégiques, mesures à prendre dans les domaines critiques et autres mesures et initiatives (E/CN.6/2019/3)

Thème de l’évaluation: autonomisation des femmes et lien avec le développement durable (conclusions concertées de la soixantième session) (E/CN.6/2019/4)

Dialogue interactif

Cabo Verde

Mme MARITZA ROSABAL PEÑA, Ministre de l’éducation, de la famille et de l’inclusion sociale de Cabo Verde, a déclaré que les femmes représentent 52,9% des pauvres du pays et 53,7% des chômeurs.  De plus, 58,4% des femmes du pays sont inactives, dont 22% à cause du poids des tâches ménagères.  En matière de participation, les femmes représentent 23% des parlementaires de Cabo Verde. 

Le Gouvernement a introduit les objectifs de développement durable dans les plans nationaux, en veillant à avoir des indicateurs sensibles au genre pour évaluer les efforts du pays en matière d’autonomisation des femmes et des filles, a indiqué la Ministre.  Dans les plans stratégiques de développement des municipalités comme dans les plans d’action des ministères, l’aspect genre occupe désormais une place prépondérante.  Mme Peña a précisé que le budget national tient également compte de la sexospécificité.  Désormais, la plupart des programmes sociaux, comme l’accès au logement pour les plus démunis, ciblent en priorité les femmes.  Dans le domaine scolaire, par exemple, aucune jeune femme ne peut plus être mise en congé du fait d’une grossesse.

La Ministre a également donné des exemples de ce qui s’est amélioré sur les plans juridique et judiciaire.  Dans le cadre de la lutte contre les violences sexistes, les enquêtes criminelles sont obligatoires en cas de crime sexiste, a-t-elle indiqué.  Elle a aussi parlé d’un programme de réhabilitation des personnes condamnées pour ce type de crime, récemment lancé par le Gouvernement. 

Après cette présentation, la déléguée de l’Espagne a demandé quel rôle les partenaires internationaux pourraient jouer pour renforcer l’autonomisation des femmes de Cabo Verde.  Cabo Verde, a répondu la Ministre, est récemment passé dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire et, de ce fait, il ne peut plus bénéficier de certaines facilités propres aux pays les moins avancés.  Elle a néanmoins souhaité que l’Espagne, « un partenaire traditionnel de Cabo Verde », poursuive sa collaboration avec le pays.  Le Gouvernement entend également exploiter les possibilités offertes par la coopération triangulaire, a ajouté la Ministre.

Le représentant de l’Uruguay, « autre pays du Sud », est intervenu pour saluer sa collaboration avec Cabo Verde.  « Nous remercions l’Uruguay qui nous a ouvert la voie », a réagi la Ministre de Cabo Verde, avant d’expliquer que ce pays avait en effet offert son assistance technique pour l’amélioration du cadre réglementaire de protection des femmes à Cabo Verde, ce qui avait permis à celui-ci de « gagner du temps ».

Honduras

La Ministre en charge de l’Institut national des femmes du Honduras, Mme ANA AMINTA MADRID, est venue brosser un tableau des acquis et des efforts en cours au Honduras pour l’autonomisation des femmes en lien avec le développement durable.  Le Honduras a une feuille de route détaillée pour son développement durable qui intègre la dimension parité entre les sexes, a d’abord expliqué la Ministre. 

La délégation a fait une présentation ce matin en utilisant un support vidéo, préparé en collaboration avec les organisations de la société civile, pour dévoiler les différents domaines d’action des politiques publiques, notamment à travers un programme appelé « Ciudad Mujeres ».  Ce programme prévoit des actions non seulement pour la lutte contre les violences faites aux femmes et la lutte contre le mariage et les grossesses précoces, mais aussi en faveur de la jouissance des droits économiques et de l’accès au microcrédit, à l’éducation et à la formation professionnelles pour les femmes.  Il comprend aussi des directives pour le renforcement des cadres normatifs et législatifs et pour les investissements dans le domaine de la santé, y compris sexuelle et reproductive, et la planification familiale, ainsi que des actions de lutte contre le trafic de femmes.  Depuis l’entrée en vigueur de ce programme, le nombre de morts violentes de femmes a baissé de 45%, mais 52% de cas de plus de violence domestique ont été rapportés.

Une des représentantes de la délégation du Honduras qui vient de la société civile a mis en exergue le rôle de cette dernière dans ces efforts.  Il va falloir, selon elle, créer des mécanismes pour garantir l’application effective des nouvelles lois, ce qui suppose un engagement de la part de tous les acteurs du secteur public.  Si la représentante de la société civile hondurienne a salué la volonté politique de l’État de mettre en application le cadre normatif, elle a relevé que les droits sexuels et reproductifs sont toujours débattus.  À son avis, de nouvelles mesures s’imposent pour appliquer les lois dans ce domaine.  Par ailleurs, il faut créer des mécanismes pour venir en aide aux femmes victimes de violence, mais le pays se heurte à des problèmes de financement, a-t-elle regretté. 

Commentant ces exposés, la représentante de la République dominicaine a salué les progrès réalisés par le Honduras en matière d’égalité entre les sexes.  Elle a demandé à la Ministre de donner plus d’informations sur le programme « Ciudad Mujeres ».  Son homologue du Panama a également salué le travail accompli par l’Institut national des femmes au Honduras.  Elle a demandé des précisions sur la façon dont le Gouvernement aborde la mise en œuvre au niveau local des programmes nationaux en faveur des femmes.

Dans sa réponse, la Ministre du Honduras a expliqué que l’initiative « Ciudad Mujeres » est le programme qui permet de mettre en application la politique sur le genre du Gouvernement dans tous les secteurs.  Les 14 institutions qui y participent déclinent ainsi les nouvelles orientations et politiques de parité hommes-femmes dans le travail et dans l’éducation, de réduction de la violence à l’égard des femmes et du nombre de grossesses précoces, d’accès aux services de santé et à l’aide à l’enfance.  L’Institut national des femmes, qui est chargé de cette politique, participe de manière active à l’ensemble de ce processus.  Un « mécanisme pour les femmes » est chargé plus spécifiquement de la lutte contre la violence à l’égard de femmes et les grossesses précoces dans les cinq départements les plus frappés par ces phénomènes.  Une action est également menée au niveau des villes pour qu’elles disposent de budgets adéquats leur permettant d’intégrer une approche sexospécifique et de soutenir les orientations fixées par le programme « Ciudad Mujeres ».

Panama

Mme LIRIOLA LEOTEAU, Directrice de l’Institut national des femmes du Panama, a expliqué que les programmes nationaux ont été alignés sur les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le Gouvernement du Panama a aussi pris un ensemble de mesures, telles que la création d’une plateforme nationale en faveur des femmes.  Elle a parlé de « la fenêtre d’opportunités en faveur des femmes », un mécanisme présent dans toutes les provinces, et notamment près des communautés autochtones, afin de rapprocher les femmes des services sociaux essentiels.  Désormais, les services publics ayant un rôle à jouer pour l’égalité des sexes sont prioritaires pour recevoir des fonds publics, a ajouté Mme Leoteau, avant de signaler que la présence de femmes aux postes de direction a été renforcée dans l’administration. 

Dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes, les lois ont été revues afin de punir plus sévèrement les auteurs de ces crimes, notamment pour les cas de féminicides.  Les femmes politiques sont spécialement protégées afin de promouvoir leur engagement dans la vie publique.  De même, les femmes victimes de violence reçoivent un soutien pour qu’elles puissent quand même poursuivre leurs études et s’insérer dans le monde de l’emploi.  Le Panama accorde du prix à l’autonomisation économique des femmes et entend les aider à s’émanciper de la dépendance économique de leurs conjoints qui, dans certains cas, sont également leurs bourreaux.  Un tel constat a été fait grâce au travail de la police spécialisée en violence sexiste, qui a pu établir un profil des auteurs de violence. 

La présentation du Panama s’est terminée par une courte vidéo, en espagnol, mettant en exergue le dynamisme des femmes rurales.  La délégation de El Salvador a ensuite voulu savoir si les programmes sous-régionaux de soutien à l’entrepreneuriat féminin étaient aussi mis en œuvre au Panama.  Effectivement, a réagi la Directrice de l’Institut national des femmes du Panama, en précisant que le Panama met en œuvre le même programme qui a été lancé par le Conseil des ministres d’Amérique centrale.  Néanmoins, ce programme a été modifié pour tenir compte des spécificités de son pays, a-t-elle indiqué. 

La représentante de la République dominicaine a pour sa part salué les efforts déployés par le Panama, avant de s’enquérir des mesures de prise en charge des victimes de violence sexiste.  La Directrice de l’Institut national des femmes du Panama a répondu que les centres de soutien aux victimes ont, en leur sein, des personnels formés à cette tâche.  Elle a salué leur professionnalisme qui a contribué à faire baisser le taux de féminicide dans le pays.  À une question de la délégation du Honduras sur le fonctionnement des mécanismes locaux de soutien aux femmes, la délégation du Panama a expliqué que le Gouvernement avait établi des partenariats avec toutes les parties prenantes, notamment les organisations de la société civile, avant de confirmer « la volonté politique ferme du Panama d’améliorer la condition de la femme ». 

Arabie saoudite

Dans leur présentation conjointe, la Secrétaire d’État du Conseil des affaires de la famille de l’Arabie saoudite, Mme HALA ALTUWAJRI, et la Princesse HAIFA AL MOGRIN ont affirmé que le programme « Saudi Vision 2030 » est un programme ambitieux qui repose sur une société dynamique et une économie qui offre des chances à tous, notamment grâce à un environnement de travail adapté aux femmes.  Elle a fait état de différentes initiatives gouvernementales dont le but est d’accroître la part des femmes dans le secteur du travail à tous les niveaux. 

Les politiques et mesures adoptées par le Gouvernement saoudien sont intersectorielles et portent notamment sur le renforcement du cadre normatif.  Le Ministère du travail et du développement social a notamment interdit les inégalités salariales, tandis que le programme de transformation sociale à l’horizon 2020 contient des initiatives pour encourager les femmes à devenir économiquement indépendantes.  Ainsi, leurs moyens de transport sont pris en charge et des crèches sont mises en place.  De plus, au niveau universitaire, de nouveaux masters leur sont ouverts et 47% des diplômés sont des femmes. 

La Secrétaire d’État a signalé une hausse de la participation des femmes au marché du travail de 130% dans le secteur privé depuis 2016, ainsi qu’une augmentation de 113% de la représentation des femmes dans le système judiciaire depuis 2017.  En 2017, le pays a aussi connu une hausse de 150% des femmes occupant des postes diplomatiques.  Le Gouvernement encourage les femmes à occuper des postes de haut niveau, a insisté la délégation, qui a aussi reconnu le rôle de la société civile, notamment l’Assemblée Ennahdha, qui offre aux femmes les compétences nécessaires pour devenir les leaders de demain.

L’autonomisation des femmes est promue par le biais de différents programmes politiques et en veillant à lever les obstacles sur le marché du travail, a résumé la représentante saoudienne qui n’a pas manqué de rappeler qu’en 2017, un décret a été passé pour lever l’interdiction de conduire pour les femmes.  Il existe également une plateforme d’audit qui veille au plein respect des règles en matière d’égalité entre les sexes dans le milieu du travail.  Elle a également indiqué que le congé de maternité est de 10 semaines, prorogeable d’un mois, et qu’il existe l’option d’un congé de parenté partiellement payé de trois ans.  La Secrétaire d’État a également parlé des prêts et des financements spécifiques accordés aux entreprises de femmes qui souhaitent devenir indépendantes économiquement. 

S’agissant de la collecte des données, Mme Altuwajri a précisé que l’Observatoire national pour les femmes en est chargé.  C’est un cadre de référence qui épaule les politiques nationales de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la réalisation des objectifs de développement durable en tenant compte de la dimension du genre.  Il existe également une Commission de la femme dont le rôle est de mesurer et documenter la situation des femmes en Arabie saoudite.  Par ailleurs, le Bureau national de statistique développe désormais des données ventilées par sexes.  En conclusion, la Secrétaire d’État a affirmé que le Gouvernement saoudien cherche à promouvoir les mécanismes d’égalité entre les sexes en les rendant plus visibles sur les plans régional et international. 

Comment le Programme « Saudi Vision 2030 » défend-il le rôle des femmes dans les processus de prise de décisions et comment cadre-t-il avec les indicateurs de développement du Programme 2030? a demandé la représentante des Émirats arabes unis pour lancer la session de questions-réponses.  De son côté, la représentante des Maldives a souhaité connaître les mesures prises pour accroître la proportion des femmes sur le marché du travail à des poste de haut niveau.

Le Programme « Saudi Vision 2030 », a expliqué la délégation de l’Arabie saoudite, met l’accent sur l’inclusion des femmes à tous les niveaux, qu’il s’agisse de leur participation au marché du travail ou de leur carrière.  Elle a rappelé que l’Ambassadrice de l’Arabie saoudite en poste à Washington en ce moment est le fruit de cette vision qui doit permettre aux femmes de pouvoir prétendre à ce type de poste.  Elle a en même temps reconnu que la plupart des chômeurs dans son pays sont des femmes souvent instruites.  Il faut donc prévoir des mesures incitatives pour les femmes comme le travail à temps partiel ou à domicile, des formations professionnelles et la création de crèches, pour leur permettre de trouver un équilibre entre travail et famille.

Slovaquie

Mme LUBICA ROZBOROVA, experte du Département de l’égalité des sexes et de l’égalité des chances au Ministère du travail, des affaires sociales et de la famille de la Slovaquie, a présenté la stratégie nationale d’égalité des sexes 2014-2019 qui guide les actions du pays dans le cadre de l’autonomisation des femmes.  Cette stratégie s’accompagne d’un plan d’action national qui compte 64 actions prioritaires.  De plus, une nouvelle loi contre la discrimination prévoit des mesures de discrimination positive en faveur des femmes.

La lutte contre les violences faites aux femmes est coordonnée sur le plan national, avec notamment un numéro de téléphone vert pour permettre aux femmes en détresse de pouvoir communiquer 24 heures sur 24.  En outre, un projet « Her story » qui vise les élèves a permis de publier des manuels scolaires promouvant l’égalité des sexes.  Un documentaire et des courtes vidéos vont suivre afin de mieux sensibiliser les jeunes sur ces questions.  De nombreux projets nationaux en matière d’autonomisation bénéficient du soutien de l’Union européenne (UE), a souligné Mme Rozborova.

La délégation du Luxembourg a d’ailleurs voulu savoir de quels partenariats la Slovaquie bénéficie dans cette lutte contre les violences à l’encontre des femmes.  La déléguée de la Slovaquie a répondu en mentionnant de nouveau des fonds européens qui ont permis de lancer une campagne contre la violence sexiste dans les médias sociaux en avril 2017, une campagne qui ciblait les jeunes de moins de 20 ans. 

La préoccupation de la délégation de la Namibie s’est portée sur le partage des tâches domestiques et les mesures qui facilitent le travail des femmes.  La Slovaquie a répondu en citant des initiatives comme ce concours des meilleures entreprises qui vise à créer l’émulation chez les employeurs mettant en œuvre des mesures facilitant le travail des jeunes mères ou appliquant des politiques d’égalité salariale.  Un autre exemple est ce projet intitulé « Famille et travail » qui permet à l’État d’octroyer des subventions directes aux entreprises privées créant des crèches en leur sein.  En outre, les pères sont également encouragés à participer à la garde des enfants en bas âge, moyennant des allocations gouvernementales.  Ces incitations financières ont permis certaines avancées, puisqu’on est passé de 26 pères engagés dans ce programme en 2009 à 705 en 2018.

Algérie

La Ministre de la solidarité nationale, la famille et la condition de la femme de l’Algérie, Mme GHANIA EDDALIA, a abordé dans un premier temps les progrès engrangés par les femmes africaines « qui reflètent les espoirs de l’Afrique en termes de paix et de justice sociale », citant à cet égard les objectifs de l’Agenda 2063 et de la Décennie de la femme africaine 2010-2020 de l’Union africaine.

S’agissant de l’Algérie, la question des femmes a été intégrée dès 1962, date de l’indépendance, dans les politiques nationales, notamment par le renforcement des institutions et de la législation.  La Constitution algérienne, qui a été amendée en 2016, garantit l’égalité des chances dans le monde du travail, tandis que le Code pénal criminalise le harcèlement sexuel et la violence verbale, physique et psychologique. 

En outre, le nombre de femmes élues a augmenté en Algérie: elles représentent actuellement 30% des élus aux niveaux national et local.  Quatre partis politiques ont une femme à leur tête et il y a eu des candidates à la présidence, a précisé la Ministre.  En ce qui concerne la lutte contre la violence à l’égard des femmes, elle est menée sur tout le territoire par son ministère.  Par ailleurs, il existe des centres d’aide aux victimes de violence domestique et des centres de soins pour les femmes âgées.

Alors que 60% des diplômés universitaires sont des femmes en Algérie, l’État cherche à encourager l’entrepreneuriat des femmes, notamment par un programme de microcrédit ainsi qu’un programme national de soutien aux femmes rurales.  L’Algérie compte quatre femmes générales dans l’armée, et 24% de ses forces de sécurité sont des femmes, a poursuivi la Ministre.  Elle a souligné l’importance accordée par son gouvernement à la femme en tant qu’agent de la paix, en particulier au niveau du continent africain.  Elle a par ailleurs proposé de créer une banque de données, en coopération avec ONU-Femmes, pour disposer de statistiques ventilées par sexes, ce qui se fait déjà au niveau de chaque ministère. 

L’Algérie encourage les femmes à occuper des postes de responsabilité, a affirmé la Ministre en précisant que c’est d’ailleurs l’un de ses axes stratégiques.  En ce qui concerne le renforcement des mécanismes nationaux, l’Algérie dispose de différents outils pour promouvoir et protéger les femmes, à commencer par son Ministère de la solidarité nationale, la famille et la condition de la femme.  Il y a aussi le Conseil national pour les femmes, ainsi qu’une commission sectorielle traitant des questions sociales ou encore le Conseil national des droits de l’homme.  Le défi qu’il reste à relever en Algérie est de parvenir à la parité dans tous les domaines, a conclu la Ministre. 

Après avoir salué l’engagement politique du Gouvernement algérien en faveur de l’autonomisation des femmes et de la parité, la représentante de Cuba a voulu connaître les stratégies qui visent à augmenter la présence des femmes et des filles dans l’éducation supérieure.

La Ministre de l’Algérie lui a répondu que la politique algérienne en matière d’éducation se fonde sur le principe de l’éducation gratuite pour tous et la solidarité scolaire, et cela, du primaire jusqu’à l’université.  Cette stratégie a permis aux filles de poursuivre leur éducation « sans avoir à se poser de questions », y compris celles issues de milieux défavorisés que l’État soutient notamment par des cours supplémentaires et des bourses, ainsi que la gratuité des moyens de transport pour les étudiants universitaires.

Questions nouvelles, tendances, domaines d’intervention et approches novatrices en vue d’aborder les problèmes ayant une incidence sur la situation des femmes, notamment l’égalité des sexes

Dialogue interactif sur les femmes et les filles d’ascendance africaine

La table ronde de cet après-midi portait sur le rôle des femmes et des filles d’ascendance africaine dans la promotion de leur propre autonomisation et de l’égalité entre les sexes, ainsi que leur contribution au développement durable et au respect des droits humains.

« C’est pour nous, aujourd’hui, une opportunité de discuter des politiques et programmes pertinents dans deux champs de réflexion distincts », a expliqué le Président de la table ronde, M. MAURICIO CARABALI BASQUERO (Colombie), qui est l’un des vice-présidents de la Commission de la condition de la femme.  Tout d’abord, le renforcement de la participation politique et de l’autonomisation économique des femmes et des filles d’ascendance africaine, notamment par l’élargissement de l’accès à la protection sociale et aux services publics, à l’éducation, aux soins de santé et au logement.  Ensuite, répondre aux inégalités, à la discrimination et à la violence auxquelles font face femmes et filles d’ascendance africaine, y compris dans les problématiques interdépendantes de la langue, de l’origine sociale, de l’accès à la propriété et du handicap, entre autres. 

Mme DOMINIQUE DAY, membre du Groupe de travail d’experts des Nations Unies sur les personnes d’ascendance africaine, a commencé par souligner la vulnérabilité des femmes et des filles de cette catégorie, une vulnérabilité « démultipliée » par l’« intersectionnalité » lorsque les femmes vivent avec plus d’une cause d’oppression, par exemple celles qui sont noires mais également lesbiennes.  L’experte a attiré l’attention sur les « arrestations massives » qui ont eu lieu cette semaine en relation avec le scandale de pots-de-vin dans les procédures d’admission aux universités, qui a révélé que des parents achetaient le droit d’entrée dans des établissements prestigieux pour leurs enfants.  « L’accès à l’université, c’est l’accès au pouvoir », a-t-elle résumé, et « l’argent peut acheter le pouvoir ».  Dans le même ordre d’idées, elle a relevé combien le patriarcat et le racisme limitent l’accès de certaines personnes à leurs droits fondamentaux, de la santé jusqu’aux processus politiques.  Pour donner les moyens de lutter contre ces problèmes, Mme Day a vigoureusement plaidé en faveur de systèmes de collecte de données ventilées, même si elle a reconnu qu’il est difficile de simplement « quantifier » l’accès d’une personne à ses droits. 

Il faut des « données ethnico-épidémiologiques » ventilées, a renchéri Mme CAREN PAOLA YAÑEZ, Coordonnatrice générale du Réseau des femmes africaines, latino-américaines, afro-caribéennes et de la diaspora, en y voyant une première étape de la lutte contre la pauvreté subie par les femmes d’ascendance africaine.  Celles-ci sont en effet trois fois plus nombreuses à être pauvres dans les centres urbains par rapport aux autres femmes.  De plus, avec moitié moins de chances d’avoir un emploi que les autres femmes, les femmes d’ascendance africaine sont surreprésentées parmi les travailleuses domestiques, a-t-elle ajouté.  Elles sont aussi sous-représentées dans les systèmes politiques de nos régions, a-t-elle déploré.  Mme Yañez a également souligné que la violence à l’égard de ce groupe comporte des composantes racistes.  « Ces jeunes filles finissent par en avoir assez d’être noires, ce qui leur occasionne énormément de problèmes psychologiques et d’estime de soi. » 

Mme BATHABILE OLIVE DLAMINI, de l’Afrique du Sud, a mis sur le compte de l’esclavage, de la traite des Noirs et de la colonisation la perpétuation jusqu’à aujourd’hui de la discrimination à l’égard des personnes d’ascendance africaine.  Elle aussi a souhaité que soient levés les obstacles à la collecte de données ventilées, avant d’apporter son soutien à la création d’une « instance permanente des personnes d’ascendance africaine ».

Au Mexique, un cadre normatif interdit la discrimination et les entités fédérales ont adopté des lois correspondantes, a assuré Mme NADINE GASMAN, Présidente de l’Institut national des femmes (INMUJERES), tout en reconnaissant que la lutte contre les discriminations visant les femmes reste un « work in progress ».  Au Brésil, a enchaîné Mme ERONILDES VASCONCELOS CARVALHO, Secrétaire nationale des politiques en faveur des femmes, les politiques de lutte contre les discriminations à l’égard des femmes d’ascendance africaine se basent sur la reconnaissance de leur identité.  Par ailleurs, pour remédier à la faible scolarisation de ces filles, des politiques de discrimination positive ont été mises en place.

Au sujet de l’accès à l’enseignement supérieur, Mme VALDECIR NASCIMENTO, Coordonnatrice exécutive d’ODARA (Institut des femmes noires) au Brésil, a expliqué qu’au cours des 15 dernières années, son organisation s’était efforcée de promouvoir l’accès de tous à l’université, notamment des femmes noires.  Elle a accusé le nouveau Gouvernement de son pays d’être « raciste et fondamentaliste » et de pratiquer la discrimination raciale en se basant sur la religion.  Nous disposons, a-t-elle assuré, de données et d’instituts nationaux qui établissent de manière irréfutable que les personnes d’ascendance africaine sont les plus vulnérables au Brésil.  « Notre pays devrait avoir honte », a martelé la panéliste, en s’émouvant du fait que, chaque année, 32 000 personnes d’ascendance africaine sont tuées, la plupart du temps par la police.  Et maintenant l’État brésilien veut adopter une loi qui empêcherait de faire traduire devant les tribunaux les auteurs de ces meurtres, s’est-elle alarmée, en rappelant que celui de la militante LGBTQ Marielle Franco était toujours irrésolu.  Prévenant que nous allons « assister à un retour en arrière » dans son pays, elle s’est demandé comment ne pas créer une « société de laissés-pour-compte » dans de telles conditions. 

M. SAMI NEVALA, Directeur de programme au sein de l’Unité de la recherche et de la collecte de données de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, a expliqué qu’une fraction seulement des violences et des discriminations commises à l’encontre des femmes et des filles d’ascendance africaine était signalée.  Selon lui, le renforcement de l’autonomisation doit être une priorité et il faut multiplier les campagnes de sensibilisation pour dissuader les profilages raciaux et les délits de faciès. 

Pour sa part, Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a souligné l’impact que peut avoir non seulement le fait d’être noire, mais aussi d’être femme, ou encore d’appartenir simultanément à une minorité sexuelle.  Les femmes d’ascendance africaine sont sous-représentées au niveau politique, en raison d’un racisme qu’il faut déraciner, y compris au sein des institutions censées défendre les droits des femmes, dont l’ONU même, où la discrimination à leur égard existe, a déclaré la Directrice exécutive sous des applaudissements.  Elle a rendu hommage aux femmes noires qui militent dans certains des groupes les plus actifs de lutte contre le sexisme et le racisme.  « Les femmes d’ascendance africaine sont également les fers de lance du mouvement #MeToo », a poursuivi la Directrice exécutive.  Elle a ajouté qu’il faut continuer à s’organiser et à investir dans l’éducation « de nos filles » et dans une formation tout au long de la vie pour que celles-ci soient en mesure de constamment améliorer leur éducation. 

Lors de l’échange entre les panélistes et les délégations, le représentant du Brésil est intervenu pour condamner les actes de violence qui ont coûté, l’an dernier, la vie à Marielle Franco, assurant que traduire en justice ses meurtriers est une priorité de son gouvernement et de la ville de Rio de Janeiro.  Mais il a jugé tout à fait « irresponsable » d’accepter la présence de certaines délégations à la tribune.  « Nous comprenons l’émotion », néanmoins, nous ne pouvons prêter le flanc à de telles accusations, a tranché le délégué. 

Du côté des organisations non gouvernementales, la représentante de Bridge Foundation a expliqué qu’au nombre des initiatives prises par cette organisation de défense des droits des jeunes, figure celle lancée par trois déléguées canadiennes, et qui consiste à aider les jeunes d’ascendance africaine de Nouvelle-Ecosse à reprendre contact avec leurs familles et leurs racines dans leurs pays d’origine. 

La représentante de l’Association internationale des juristes démocrates a, pour sa part, critiqué l’incapacité des États-Unis à se pencher sur les causes sous-jacentes de la discrimination à l’égard des Noirs, en particulier des femmes.  Elle a cité en exemple Stacey Abrams, première Américaine noire à avoir obtenu l’investiture d’un des deux partis pour une élection de gouverneur, avant de mentionner le mouvement Black Lives Matter ou encore la Conférence nationale des avocats noirs, qui est présidée par une Noire.  S’exprimant au nom d’International Grail, une « Américaine congolaise du Bronx », comme elle s’est présentée elle-même, s’est demandé comment il serait possible d’apporter un soutien aux communautés issues de la diaspora africaine, en particulier aux États-Unis. 

La représentante de US Human Rights Network a quant à elle expliqué que l’esclavage connaît aux États-Unis une postérité dans le système carcéral, dans l’accès à l’éducation et aux emplois les mieux rémunérés.  Alors que les Africains-Américains ne forment que 13% de la population, ils représentent 30% de la population carcérale, a dénoncé l’intervenante.  Dans le domaine de la santé, les dépressions parmi les femmes noires sont de 50% supérieures au nombre de celles parmi les femmes blanches, a-t-elle poursuivi.  En outre, 27% des familles noires, souvent monoparentales, vivent en dessous du seuil de pauvreté alors qu’elles ne représentent que 11% des foyers monoparentaux.  C’est la raison pour laquelle elle a demandé l’adoption de « mesures spéciales » pour réduire les disparités dans les droits humains.

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