8631e séance – après-midi
CS/13971

Le Conseil de sécurité proroge pour une nouvelle période d’un an les mesures contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains en Libye

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, prorogé pour une nouvelle période d’un an, les dispositions prises depuis 2015 contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains « ayant le territoire libyen et le large des côtes libyennes comme destination, zone de transit ou point de départ ».

En adoptant à l’unanimité de ses 15 membres la résolution 2491 (2019), présentée par le Royaume-Uni, le Conseil a donc reconduit l’autorisation donnée aux États Membres d’inspecter les bateaux naviguant en haute mer au large des côtes libyennes s’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner qu’ils sont utilisés pour le trafic de migrants ou la traite d’êtres humains en provenance de la Libye.

Les États Membres peuvent saisir des navires inspectés dont ils ont la confirmation qu’ils sont utilisés à des fins de trafic ou de traite et tous les États du pavillon sont tenus de coopérer et de répondre rapidement aux demandes qui leur seraient faites.

Dans le rapport* dont était saisi le Conseil de sécurité, le Secrétaire général indique qu’entre le 1er septembre 2018 et le 31 juillet 2019, 82 236 réfugiés et migrants ont rejoint l’Europe par la mer, soit 26% de moins qu’en 2018.  En revanche, poursuit-il, avec 2 130 arrivées et 333 décès enregistrés sur la route maritime entre la Libye et l’Europe, le taux de décès a plus que doublé au premier semestre 2019, avec un décès pour six personnes arrivées en Europe, contre un pour 14 en 2018.

Le Secrétaire général, profondément préoccupé par les conditions dans lesquelles les personnes secourues et interceptées en Méditerranée sont débarquées et systématiquement détenues en Libye, parle d’une situation « intolérable ».  D’autant qu’avec le déclenchement de l’offensive en avril 2019, « la Libye ne remplit pas les conditions qui lui permettraient d’être considérée comme un lieu sûr ou comme un pays tiers sûr aux fins du débarquement après un sauvetage en mer », met en garde le Chef de l’Organisation.

S’exprimant après l’adoption de la résolution, l’Allemagne a jugé « indispensable » de reconduire le dispositif existant compte tenu de la situation sur le terrain, précisant néanmoins que la suspension des opérations SOPHIA et EUNAVFOR-MED n’était que temporaire et que l’Europe était toujours restée présente dans la zone.   Mais la Côte d’Ivoire s’est inquiétée de la faiblesse des moyens en navires engagés, souhaitant la relance de l’opération SOPHIA, « comme l’a souhaité le Secrétaire général ».

« On ne mesure pas à quel point cette situation est abominable », a insisté pour sa part la Guinée équatoriale, pour qui il est nécessaire d’améliorer les opérations de surveillance en Méditerranée afin de mettre fin au calvaire des migrants.

La France a cependant rappelé que cette action collective, renouvelée par l’adoption de la résolution, s’inscrivait dans le cadre du droit de la mer pour lutter contre la criminalité organisée et la traite des êtres humains, et qu’à ce titre, elle devait être respectée par tous.   De son côté, la Fédération de Russie a insisté sur la nécessité de traiter des causes profondes, économiques et sociales, à l’origine de ces migrations ainsi que des conditions dans lesquelles les migrants sont accueillis et traités en Libye.  La situation qui prévaut dans ce pays devra trouver une issue, a ajouté le représentant russe, en accord avec le Royaume-Uni qui a estimé qu’« il n’y a pas de solution militaire » au conflit en Libye.

Enfin, la Chine attend le rapport d’étape qui sera présenté en avril par le Secrétaire général pour que soient réexaminées les dispositions de la résolution, espérant que des mesures « plus efficaces » seront trouvées pour faire face au problème en Méditerranée.  D’ici là, le Koweït a appelé l’ONU à veiller à ce que les migrants aient accès à des refuges sûrs en attendant que leur soit accordé le droit d’asile ou que soit organisé leur rapatriement.

*S/2019/711

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES – (S/2019/711)

Textes du projet de résolution (S/2019/788)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 2240 (2015), 2312 (2016), 2380 (2017) et 2437 (2018), ainsi que la déclaration de sa présidence en date du 16 décembre 2015 (S/PRST/2015/25),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Libye,

Accueillant avec satisfaction le rapport du Secrétaire général daté du 5 septembre 2019 (S/2019/711),

Conscient que la Charte des Nations Unies lui confie la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,

Se félicitant des mesures prises pour mettre en œuvre la résolution 2240 (2015) et souhaitant qu’elles continuent d’être appliquées,

Réaffirmant qu’il faut mettre fin à l’expansion actuelle du trafic de migrants et de la traite des êtres humains en Méditerranée au large des côtes libyennes et au danger qu’ils représentent pour la vie humaine et, à cette fin précise, agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Condamne tous les actes de trafic de migrants et de traite d’êtres humains ayant le territoire libyen et le large des côtes libyennes comme destination, zone de transit ou point de départ, qui fragilisent davantage le processus de stabilisation de la Libye et mettent en péril les vies de centaines de milliers de personnes;

2.    Décide de reconduire les autorisations visées aux paragraphes 7, 8, 9 et 10 de la résolution 2240 (2015), pour une nouvelle période de douze mois à compter de la date d’adoption de la présente résolution, réaffirme les dispositions du paragraphe 11 de ladite résolution et réaffirme également ses résolutions 2240 (2015), 2312 (2016), 2380 (2017) et 2437 (2018), ainsi que la déclaration de sa présidence publiée sous la cote S/PRST/2015/25;

3.    Réitère, à compter de la date d’adoption de la présente résolution, les demandes formulées au paragraphe 17 de sa résolution 2240 (2015), et prie le Secrétaire général de lui faire rapport, six mois puis onze mois après la date d’adoption de la présente résolution, sur l’état d’avancement de son application, en particulier pour ce qui est des paragraphes 7 à 10 de sa résolution 2240 (2015);

4.    Entend suivre la situation et, le cas échéant, envisager de reconduire pour des périodes supplémentaires les autorisations découlant de la présente résolution;

5.    Décide de rester saisi de la question.

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