Soixante-quatorzième session,
31e & 32e séances plénières, matin & après-midi
AG/SHC/4273

Les mandats de pays continuent de polariser les débats à la Troisième Commission

L’examen de la situation des droits de l’homme au Burundi, en République islamique d’Iran et en Somalie a polarisé aujourd’hui les débats à la Troisième Commission, partagée entre les délégations qui dénoncent une « ingérence » dans les affaires intérieures des États, et les promoteurs d’un dialogue avec la communauté internationale. 

Cette divergence a été particulièrement marquée lors de l’examen de la situation au Burundi, le Mouvement des pays non alignés, entre autres, ayant notamment souligné que l’Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme devait être préféré aux mandats de pays.

Tel n’était cependant pas l’avis du Président de la Commission d’enquête sur le Burundi, qui a argué que l’EPU ne permet pas d’enquêter « en profondeur » sur les violations des droits de l’homme dans ce pays, et qu’il y a, en outre, des « motifs raisonnables » de croire que certaines d’entre elles constituent des crimes contre l’humanité. 

M. Doudou Diène a notamment fait état d’une intensification des restrictions des libertés publiques, dans un contexte pré-électoral, expliquant que les médias indépendants qui étaient encore présents au Burundi, comme Radio France Internationale (RFI) ont été mis en garde ou ont vu leur licence suspendue pour avoir diffusé des informations jugées « déséquilibrées ».  « Les autorités burundaises cherchent donc à supprimer toute voix critique, et le calme relatif qui règne au Burundi est basé, avant tout, sur la peur », a-t-il constaté. 

Le Président de la Commission a également indiqué que depuis mai 2018, nombre de violations, comme des exécutions extrajudiciaires, des arrestations arbitraires ou des violences sexuelles, ont continué d’être commises et qu’elles ont gardé une dimension « essentiellement politique » à l’approche des élections de 2020.  Ces violations visent principalement les opposants politiques ainsi que les membres de leur famille, et on peut en être victime si l’on refuse, par exemple, d’adhérer au parti au pouvoir ou de rejoindre la ligue des jeunes du parti, les Imbonerakure, a-t-il dit.

« Plutôt que de remplir leur obligation de mettre un terme aux violations en cours, les autorités préfèrent dénoncer toute mention de cette réalité, en répétant des accusations sans fondements de manipulation politique et de complot international contre le Burundi.  Or donner une voix aux victimes n’est pas une démarche politique et dénoncer la persistance des violations des droits de l’homme ne constitue pas une attaque à la souveraineté nationale », a déclaré M. Diène. 

Le rapport de la Commission a été fermement rejeté par le Burundi, qui l’a jugé à la fois « dénigrant et calomniant et téléguidé par des laboratoires étrangers », dénonçant en outre le fait qu’il incriminerait systématiquement les agissements du Gouvernement sans faire mention des crimes commis par les insurgés et les putschistes, « lesquels sont protégés par d’autres pays ». 

Les préparatifs électoraux étaient également à l’esprit de l’Expert indépendant chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie qui a averti que la situation sécuritaire et l’absence des cadres juridiques pourraient compromettre les préparatifs des scrutins de 2020 et 2021.

M. Bahame Tom Mukirya Nyanduga a aussi alerté que la violence fondée sur le sexe ainsi que la violence sexuelle liée aux conflits armés sont « endémiques » en Somalie, et s’est inquiété du fait que le Parlement fédéral n’a toujours pas adopté la loi sur les crimes sexuels, une impasse qu’il a attribuée aux « sentiments religieux ».  Il a aussi souligné que la tradition culturelle du « xeer » (le système juridique traditionnel) contribue à l’impunité.

La discrimination à l’encontre des femmes figurait également parmi les préoccupations soulevées par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, qui s’est inquiété de la réaction des autorités face aux manifestations contre le port obligatoire du voile.  M. Javaid Rehman a notamment cité le cas de l’avocate Nasrin Sotoudeh, qui a été condamnée à 38 ans de prison et 148 coups de fouet pour son travail de défense des femmes accusées d’avoir manifesté contre ce port.

Le Rapporteur spécial a également dénoncé la poursuite du recours à la peine de mort en Iran qui demeure l’un des plus élevés au monde, avec 253 personnes exécutées en 2018, y compris des délinquants juvéniles. 

« Ce rapport, ce mandat, ce spectacle n’ont rien à voir avec la cause des droits de l’homme », a réagi d’emblée la République islamique d’Iran, qui a fait valoir que si son gouvernement changeait sa position vis-à-vis des États-Unis ou de l’occupation israélienne, « tout cela disparaîtrait ». 

L’occupation israélienne était justement au programme du jour de la Troisième Commission, qui a également dialogué avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967.  Venu souligner que l’occupation ne va pas « mourir de vieillesse », M. Michael Lynk a notamment affirmé qu’elle ne cessera que dans le cadre d’une intervention « décisive » de la communauté internationale. 

À cet égard, il a recommandé de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour déterminer si cette occupation est « devenue illégale ».  Il a également appelé la communauté internationale à s’entendre sur une interdiction des exportations de tous les produits issus des colonies israéliennes et la publication d’une liste des entreprises impliquées dans les activités de colonisation. 

La Troisième Commission, qui a par ailleurs reçu l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar, poursuivra ses travaux demain jeudi 24 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Application des instruments relatifs aux droits de l’homme (A/74/40, A/74/44, A/74/48, A/74/55, A/74/56, A/74/146, A/74/148, A/74/228, A/74/233, A/74/254, A/74/256)

Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales (A/74/147, A/74/159, A/74/160, A/74/161, A/74/163, A/74/164, A/74/165, A/74/167, A/74/174, A/74/176, A/74/179, A/74/181, A/74/183, A/74/185, A/74/186, A/74/190, A/74/191, A/74/197, A/74/198, A/74/212, A/74/213, A/74/215, A/74/226, A/74/227, A/74/229, A/74/243, A/74/245, A/74/255, A/74/261, A/74/262, A/74/178, A/74/189, A/74/270, A/74/271, A/74/277, A/74/285, A/74/314, A/74/318, A/74/335, A/74/349, A/74/351, A/74/358, A/74/460)

Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux (A/74/166, A/74/188, A/74/196, A/74/268, A/74/273, A/74/275, A/74/276, A/74/278, A/74/303, A/74/311, A/74/342)

Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne (A/74/36)

Exposé du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967

M. MICHAEL LYNK, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, a tout d’abord indiqué que le Gouvernement israélien persiste à s’opposer à toute coopération avec son mandat, notamment en lui refusant un accès à son territoire ainsi qu’aux territoires palestiniens occupés.  Il a souligné que rien ne peut se substituer à une visite sur le terrain.  Ce refus de coopération ne sert les intérêts de personne, et encore moins la noble cause des droits de l’homme, a-t-il déploré.

Introduisant son rapport, il a indiqué que celui-ci se concentrait spécifiquement sur deux points: la situation dans la Bande de Gaza et la question de l’impunité.  S’agissant du premier point, il a estimé que mettre fin aux 12 années de blocus par terre, mer et air de ce territoire devrait être la priorité de l’agenda mondial.  Ce blocus n’est pas « qu’une tragédie, c’est une injustice, et une forme de punition collective, strictement interdite par l’article 33 de la quatrième Convention de Genève ».

Il a averti que la situation économique à Gaza ne cesse de se dégrader pour atteindre des niveaux « inimaginables ».  Pour preuve, le dernier rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) montre que quatre cinquièmes des employés à Gaza touchent moins que le salaire minimum, et que la part du secteur productif dans le PIB de Gaza a chuté de 28% à 13% entre 1994 et 2018, tandis que celle des produits manufacturés a baissé de moitié. 

Tout ceci s’ajoute aux conséquences désastreuses des guerres offensives menées contre Gaza depuis une décennie, sans compter les sérieuses coupures de l’aide humanitaire à destination de ce territoire.  Il a alerté que la moitié de la population de Gaza est confrontée à une insécurité alimentaire, que le système de santé est en déliquescence et que l’accès à l’électricité et à l’eau potable est incertain. 

Par ailleurs, depuis mars 2018, environ 200 manifestants palestiniens, la majorité non armés, ont été tués par des tireurs d’élite israéliens et 33 000 autres blessés.  La Commission d’enquête internationale indépendante sur les manifestations dans le Territoire palestinien occupé, qui a présenté son dernier rapport en mars dernier au Conseil des droits de l’homme, a virtuellement démontré que la plupart de ces victimes avaient été tuées en violation de leur droit à la vie et du principe de distinction contenu dans le droit international humanitaire, a-t-il expliqué.

Abordant la question de l’impunité, le Rapporteur spécial a regretté l’« énorme » manque de volonté de la communauté internationale de tenir Israël redevable pour ses graves violations des droits de l’homme.  Il a aussi cité un journaliste israélien, Gideon Levy, qui aurait écrit qu’« aucun pays ne dépend autant du soutien de la communauté internationale qu’Israël, à tel point qu’Israël s’autorise à défier le monde comme peu l’osent ».

M. Lynk a rappelé que depuis 40 ans, la communauté internationale n’a cessé de demander le respect par Israël des décisions de l’ONU, comme par exemple la résolution 446 (1979) du Conseil de sécurité, qui demande l’arrêt des colonies de peuplement.  À l’époque il y avait environ 80 000 colons, ils sont aujourd’hui 650 000, soit une inflation de 800%, a chiffré M. Lynk, déplorant cet état de fait.  Par ailleurs, cette question de l’impunité et du manque de reddition de comptes a été soulevée par divers rapports de l’ONU, notamment ceux traitant des conflits à Gaza de 2008-2009, de 2013, de 2014 et de 2019, qui montrent tous des violations flagrantes de « nos valeurs communes et du droit international humanitaire ».

Poursuivant, le Rapporteur a estimé qu’aucune autre occupation dans le monde moderne n’a pu se produire avec une communauté internationale aussi bien informée et alertée, non seulement sur les violations du droit international, mais aussi sur l’échelle des souffrances et de la dépossession subies par les populations vivant sous l’occupation, ainsi qu’au sujet des intentions d’annexation de l’occupant. 

Or, une communauté internationale responsable serait de longue date parvenue à la conclusion qu’Israël, la Puissance occupante, n’est pas sincère dans la recherche de la fin de l’occupation.  Elle comprendrait que son devoir n’est pas de veiller sur la gestion de cette occupation, mais d’y mettre un terme.  Une telle communauté internationale prendrait des mesures préventives appropriées et proportionnelles aux circonstances.  Si la Puissance occupante ne bouge pas, cette communauté internationale appliquerait de manière échelonnée ses contre-mesures jusqu’à ce l’occupation prenne fin, a déclaré M. Lynk.

Dans ces circonstances, M. Lynk a estimé que deux types de mesures pourraient être prises aujourd’hui pour apporter un peu d’espoir et de changement.  La première mesure est de s’entendre sur une interdiction des exportations de tous les produits issus des colonies israéliennes.  Continuer d’importer, dans les marchés internationaux, les produits et services en provenance de ces colonies est une manière de les soutenir et de perpétuer leur durabilité, en pleine violation du droit international et de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité.  La seconde mesure est de compléter et de publier, dans un délai court et raisonnable et de manière transparente, la liste des entreprises impliquées dans les activités de colonisation, a indiqué M. Lynk. 

Dialogue interactif

L’État de Palestine s’est félicité que le rapport mette l’accent sur la réduction de l’espace civil, l’absence de redevabilité, les arrestations administratives et l’impact des pratiques de la Puissance occupante sur l’environnement.  Les violations systématiques contre la population palestinienne sont bien connues.  Ce qui l’est moins, a-t-il fait valoir, c’est qu’une occupation ait lieu alors que la communauté internationale en a conscience et connaît la volonté de l’occupant de nier la souveraineté d’un État.  Malgré les preuves à sa disposition, la communauté internationale ne veut pas utiliser les outils politiques et juridiques qui permettraient de mettre fin à cette injustice, a-t-il déploré, jugeant que l’impunité est l’une des caractéristiques de cette occupation. 

Rappelant que, conformément à l’article 1 des Conventions de Genève, il convient de prendre des mesures, dont des sanctions, pour mettre fin à cette occupation; la délégation a demandé au Rapporteur spécial comment il comptait mettre en œuvre ses recommandations et quelles seraient les mesures envisageables.  Elle s’est également prononcée pour une étude des Nations Unies sur les activités d’annexion menées par Israël, avant de condamner le refus de cet État de coopérer avec le Rapporteur spécial. 

Le Venezuela, qui s’exprimait au nom du Mouvement des pays non alignés, a réaffirmé sa solidarité permanente avec le peuple palestinien qui, depuis plus de 50 ans, souffre de l’occupation militaire brutale de son territoire par Israël, aux dépens de ses droits fondamentaux, y compris le droit à l’autodétermination.  Il a condamné la campagne militaire israélienne qui a abouti à des crimes de guerre commis par la Puissance occupante.  Il a aussi rappelé la préoccupation du Mouvement à l’égard de la situation humanitaire, notamment dans la bande de Gaza.

Le Royaume-Uni a jugé décevant qu’Israël n’ait pas facilité l’accès aux territoires palestiniens occupés.  Il a dit qu’il demeurait préoccupé par les violences continues dans ces territoires et a condamné les activités de peuplement menées par Israël en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, ajoutant que les projets d’annexion nuiraient également aux efforts de paix.  Il s’est lui aussi inquiété de la situation humanitaire à Gaza et a réaffirmé son attachement à la solution des deux États. 

L’Union européenne s’est dite prête à travailler avec les deux parties et les partenaires internationaux pour relancer les négociations et parvenir à une paix juste et durable.  Dans ce contexte, elle a demandé au Rapporteur spécial de définir ses priorités pour l’année à venir. 

Les Maldives se sont déclarées préoccupées par la poursuite des activités israéliennes de peuplement en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.  Elles se sont aussi dites inquiètes de la détérioration des droits de l’homme dans l’État de Palestine et ont plaidé pour l’aboutissement de la solution des deux États. 

Appelant Israël à cesser ses attaques contre la population palestinienne, la Malaisie a demandé au Rapporteur spécial comment les États Membres pourraient garantir que soit reconnue la responsabilité de la Puissance occupante et que soient prévues des réparations. 

La République islamique d’Iran a relevé que le blocus imposé par Israël à Gaza depuis plus de 12 ans se poursuit, de même que les activités de peuplement illégales en Cisjordanie, à Jérusalem et au Golan.  Grâce à l’absence de réaction de la communauté internationale, a-t-elle encore accusé, Israël agit en toute impunité et un peuple est laissé pour compte. 

L’Irlande s’est déclarée préoccupée par l’expansion continue des colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, notant que cette politique empêche la mise en œuvre de la solution des deux États.  Elle a voulu savoir si le Rapporteur spécial était informé de nouveaux cas de torture de détenus palestiniens et si des poursuites étaient engagées.  Par ailleurs, comment la communauté internationale pourrait-elle freiner la réduction de l’espace accordé à la société civile?

La Fédération de Russie a exprimé son inquiétude face à la détérioration continue de la situation dans les territoires palestiniens et a condamné le recours d’Israël à la force contre la population palestinienne.  Elle a aussi jugé que les actions de peuplement sont illégales et constituent le principal obstacle à l’instauration de la paix dans la région.  Il n’y a pas d’autre solution que celle des deux États, a-t-elle insisté. 

À son tour, le Sénégal a dit l’urgence de mettre pleinement en œuvre la résolution 2334 du Conseil de sécurité sur les colonies de peuplement, se disant convaincu de l’impérieuse nécessité de parvenir à la création d’un État palestinien indépendant dans les frontières de 1967 et vivant côte-à-côte dans la paix avec Israël.

La Norvège s’est, elle aussi, élevée contre les activités israéliennes de peuplement, qui menacent les perspectives d’une solution négociée des deux États.  Elle a appelé Israël à redoubler d’efforts au titre du droit international des droits de l’homme, tout en faisant part de ses préoccupations au sujet des violations commises dans les zones sous contrôle du Hamas.  Cuba s’est ensuite inquiétée de la situation humanitaire dans la bande de Gaza, et a appelé à une paix juste et durable pour tous les peuples de la région. 

« Toute vision objective des tensions au Moyen-Orient doit partir du principe que la cause de ces problèmes est l’occupation par Israël des territoires palestiniens et du Golan syrien », a déclaré à son tour la République arabe syrienne.  Selon elle, l’absence de mécanisme idoine pour mettre en œuvre les résolutions pertinentes sur le conflit israélo-palestinien a abouti à cette situation.  De plus, l’Administration américaine a été encouragée à se dérober à ses responsabilités, comme le prouve le transfert de son ambassade à Jérusalem. 

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a dénoncé le « maquillage » auquel procède le rapport sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens, y voyant un exemple du « deux poids, deux mesures » en la matière.  Jugeant que l’indépendance et la souveraineté sont des prérequis pour ce genre d’examen, elle a appelé Israël à cesser ses activités d’occupation de territoires palestiniens. 

Appelant Israël à lever le blocus de Gaza et à aider la Palestine à développer son économie, la Chine a également invité la communauté internationale à œuvrer en faveur de la solution des deux États afin de parvenir à un règlement des différends par le dialogue et sur un pied d’égalité. 

L’Indonésie a constaté que la situation empire de jour en jour et a appelé la communauté internationale à agir à l’unisson pour mettre fin aux activités de peuplement d’Israël.  Abondant dans ce sens, l’Arabie saoudite a aussi appelé Israël à garantir le droit au retour des réfugiés palestiniens et à mettre en œuvre immédiatement les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

La communauté internationale doit aller au-delà des simples critiques pour contraindre Israël à cesser l’occupation, a fait valoir le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967.  « L’occupation ne va pas “mourir de vieillesse” et ne cessera que dans le cadre d’une intervention décisive de la communauté internationale », a-t-il notamment affirmé. 

Parmi les mesures de rétorsion qu’il a préconisées, il a cité les interdictions de vol, le gel de tout transfert d’armes ou encore le renvoi de la question à une instance compétente comme la CPI.  Il a recommandé de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour déterminer si cette occupation de 52 ans est « devenue illégale », évoquant notamment sa décision de 1971 concernant la Namibie.  L’Assemblée générale devrait aussi demander la tenue d’une enquête pour déterminer si l’occupation a franchi une ligne rouge. 

Le Rapporteur spécial a souligné qu’en vertu du droit international, l’occupation doit être temporaire, et qu’il ne doit pas y avoir d’annexion.  Il a informé, par ailleurs, les États Membres qu’il présentera en mars 2020 un nouveau rapport devant le Conseil des droits de l’homme qui traitera de la question des sanctions collectives.  Son prochain exposé devant la Troisième Commission abordera, quant à lui, la notion de redevabilité et les mesures pratiques à prendre par la communauté internationale.

Exposé du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran

M. JAVAID REHMAN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, a présenté une vue d’ensemble des problèmes les plus urgents qui se posent en matière de droits de l’homme en Iran.  Il a indiqué avoir eu des réunions « utiles » à Genève avec des représentants iraniens, tout en regrettant que ses demandes de visite du pays n’aient été acceptées.

Dans un premier temps, il a indiqué que la situation économique du pays est aggravée par l’impact des sanctions qui ont de graves conséquences sur la jouissance des droits économiques et sociaux. 

M. Rehman s’est ensuite particulièrement inquiété de la poursuite du recours à la peine de mort en Iran.  Bien que le nombre d’exécutions en 2018 ait été plus bas que les années précédentes, il demeure l’un des plus élevés au monde, avec 253 personnes exécutées en 2018.  Il a fait le lien entre cette baisse et l’amendement apporté en 2017 à une loi sur les stupéfiants, précisant que selon les estimations prudentes, 173 exécutions ont eu lieu à ce jour en 2019.  Il a dit être particulièrement préoccupé par les cas d’exécution de délinquants juvéniles.  En 2018, sept personnes ont été exécutées pour des crimes commis lorsqu’elles avaient moins de 18 ans, et deux jeunes de 17 ans ont été exécutés cette année, alors que le Gouvernement affirme que même si un enfant peut être condamné à mort, il ne pourra être exécuté qu’après avoir atteint la majorité de 18 ans.  D’après des informations jugées crédibles, au moins 90 personnes seraient dans le couloir de la mort pour des crimes commis lorsqu’elles avaient moins de 18 ans.

Par ailleurs, M. Rehman a observé une réduction des droits à la liberté de réunion et d’association, qui a particulièrement affecté les travailleurs, les enseignants, les étudiants, les minorités et les femmes.  Par exemple, des manifestants pour la protection des droits du travail dans l’usine de Haft Tappeh ont été arrêtés et détenus, tout comme des journalistes qui en ont parlé.  Des peines de prison allant jusqu’à 19 ans ont été prononcées dans cette affaire.  De même, des manifestations contre le port du voile obligatoire ont conduit à l’arrestation d’au moins 32 personnes depuis janvier 2018, dont certaines ont reçu des peines combinées allant jusqu’à 33 ans de prison.  M. Rehman a noté qu’une vaste discrimination à l’encontre des femmes se poursuit dans le droit et en pratique.

Les familles de défenseurs des droits de l’homme font aussi face à une pression de plus en plus importante de la part des autorités, et, dans certains cas, sont elles-mêmes arrêtées, a poursuivi M. Rehman.  Les inquiétudes de ce dernier concernent également les arrestations et détentions de binationaux et d’étrangers, parfois en dehors de toute procédure légale, d’avocats des droits de l’homme, ou encore de ceux qui travaillent dans le domaine culturel et des artistes.  Ainsi, entre septembre 2018 et juillet 2019, au moins huit avocats ont été arrêtés pour avoir défendu des prisonniers politiques et des défenseurs des droits de l’homme.  M. Rehman a notamment cité le cas de Mme Nasrin Sotoudeh, qui, le 11 mars dernier, a été condamnée à 38 ans de prison et 148 coups de fouet pour son travail de défense des femmes accusées d’avoir manifesté contre le port du voile.

Enfin, M. Rehman a évoqué la situation des minorités ethniques et religieuses, qui font face à des difficultés majeures dans la réalisation de leurs droits.  Les minorités représentent un nombre disproportionné d’exécutions sur la base de charges liées à la sécurité nationale et de prisonniers politiques.  Elles font également face à des incitations à la violence ou à la haine, à des difficultés socioéconomiques et à des pratiques discriminatoires.  Par ailleurs, l’absence de reconnaissance légale et constitutionnelle des communautés religieuses autres que les chrétiens, juifs et zoroastriens permet le déni de leurs droits fondamentaux.  « Les lois et politiques qui autorisent les pratiques discriminatoires à l’encontre des minorités ethniques doivent être revues ou complétement éliminées, conformément aux droits de l’homme », a souligné M. Rehman en conclusion. 

Dialogue interactif

« Ce rapport, ce mandat, ce spectacle n’ont rien à voir avec la cause des droits de l’homme », a déclaré d’emblée la République islamique d’Iran, qui a fait valoir que si son gouvernement changeait sa position vis-à-vis des États-Unis ou de l’occupation israélienne, « tout cela disparaîtrait ».  Dénonçant les pays qui « ferment les yeux sur les agissements de dictateurs », elle a demandé qu’on comprenne sa méfiance quand ces pays « se présentent comme des défenseurs des droits de l’homme ».  La République islamique d’Iran a eu « la témérité de choisir des dirigeants qui ne conviennent pas aux États-Unis », a-t-elle ajouté, déplorant que « ceux qui veulent exercer la démocratie sans dépendre des États-Unis risquent d’en payer le prix ». 

S’agissant des minorités ethniques et religieuses en Iran, elle a rappelé que les Iraniens de différentes communautés ont cohabité pendant des millénaires « de manière harmonieuse ».  De fait, a-t-elle renchéri, « cette réalité est difficile à comprendre pour ceux qui ont des communautés remplies de haine et où règne la discrimination raciale ».  Elle a également affirmé que de véritables fortunes sont en train d’être versées pour créer sur son territoire des conflits ethniques qui n’ont pas lieu d’être.

Revenant au rapport du Rapporteur spécial, elle a assuré que ce document à charge est « entaché d’informations erronées » et méprise la Charte des Nations Unies qui reconnaît la souveraineté égale de tous les États Membres.  Selon elle, les cas recensés par le rapport « ne sont pas plus graves que dans d’autres pays qui ne sont pas soumis à un rapport ».  Assurant que les Iraniens « peuvent se rendre aux urnes pour changer les choses », elle a affirmé ne pas avoir besoin de conseils en matière de droits de l’homme « donnés par des opportunistes ». 

L’Islande s’est déclaré préoccupée par la discrimination dont font l’objet en Iran les minorités ethniques et religieuses, notamment les Kurdes.  Elle s’est dite choquée que les autorités emprisonnent des femmes au seul motif qu’elles ne portent pas le hijab et que des enfants soient encore condamnés à la peine capitale.  Elle a demandé au Rapporteur spécial d’en dire davantage sur les mesures à prendre pour que l’Iran renonce à de telles pratiques. 

Partageant ces mêmes préoccupations, le Canada a encouragé le Gouvernement iranien à dialoguer avec la communauté internationale et à permettre au Rapporteur spécial de visiter le pays.  De plus, que peut faire la communauté internationale pour empêcher les arrestations arbitraires dans ce pays?

Préoccupée par l’instabilité du contexte régional, la Suisse a voulu savoir comment l’Iran peut concilier sa sécurité intérieure et sa politique étrangère avec le respect des droits fondamentaux de la population, en particulier des minorités religieuses et ethniques, y compris celles non reconnues en Iran.  Elle s’est aussi interrogée sur le point de savoir comment la communauté internationale peut assurer l’accès consulaire aux prisonniers binationaux. 

Le Venezuela, au nom du Mouvement des pays non alignés, s’est dit préoccupé par la poursuite de résolutions sélectives sur des pays, y voyant un instrument qui exploite les droits de l’homme à des fins politiques.  Il a fait part de sa préférence pour l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme. 

L’Irlande a appelé l’Iran à décider au plus vite d’un moratoire sur ses exécutions.  Elle a souhaité par ailleurs obtenir davantage d’informations sur Mme Nasrin Sotoudeh, l’avocate des droits de l’homme, actuellement détenue par l’Iran.  L’Union européenne a demandé au Rapporteur spécial d’en dire davantage sur ses recommandations concernant les exécutions de délinquants juvéniles et sur le respect du droit des femmes. 

De leur côté, les États-Unis ont demandé au Gouvernement iranien de protéger les droits de l’homme des membres des minorités religieuses, y compris la liberté de croyance.  Ils ont regretté la prise pour cible et l’arrestation arbitraire de défenseurs des droits de l’homme et la tenue de procès inéquitables.  Ils se sont aussi déclarés préoccupés par l’arrestation et le harcèlement des femmes pour des questions vestimentaires.  L’Allemagne a pour sa part appelé l’Iran à mettre un terme aux exécutions de mineurs et à respecter le droit à un procès équitable. 

Cuba a jugé que le motif de ce mandat est incompatible avec le dialogue constructif qui doit prévaloir dans les instances des droits de l’homme.  Elle a demandé aux États Membres d’empêcher la sélectivité et la manipulation utilisées dans le traitement de ces questions.  De son côté, la République arabe syrienne a estimé que la participation directe, à l’établissement de ce rapport, d’ONG qui ont des problèmes avec l’Iran est incompatible avec la Charte des Nations Unies.  Elle a en outre demandé au Rapporteur spécial son avis sur les sanctions unilatérales des États-Unis. 

La République tchèque s’est dite préoccupée par le maintien de la peine capitale, notamment pour les jeunes de moins de 18 ans, ainsi que par les restrictions imposées à la liberté d’expression et au droit à un procès équitable.  Elle a aussi demandé à la République islamique d’Iran de permettre au Rapporteur spécial de se rendre dans le pays, de même que le Royaume-Uni qui a appelé à garantir des procès équitables pour tous les détenus et à traiter les minorités religieuses sur un pied d’égalité. 

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a fait valoir que les sanctions imposées à l’Iran ont des répercussions sur le bien-être de millions d’Iraniens, exprimant par ailleurs son opposition aux mandats de pays.

La Chine s’est félicitée des progrès enregistrés par l’Iran dans le domaine des droits humains, notamment en ce qui concerne l’assistance aux personnes handicapées.  Elle a espéré que la communauté internationale traitera dorénavant cette situation de manière objective et impartiale.  Enfin, elle a préconisé le dialogue pour permettre à la région de maintenir sa stabilité. 

Le Bélarus a exprimé sa conviction que les procédures spéciales imposées à certains pays sont contre-productives pour analyser les droits de l’homme et souhaité à l’Iran un bon troisième cycle de l’Examen périodique universel en novembre.  L’Érythrée a elle aussi estimé que les résolutions par pays sont foncièrement injustes et a fait part de son appui au dialogue et à l’Examen périodique universel.

La Norvège a fait part de son extrême préoccupation face à la poursuite des exécutions en dépit des amendements apportés en 2017 à la loi antidrogue et au recours à la peine capitale contre des mineurs.  Elle a aussi pointé la poursuite des discriminations et des intimidations contre les communautés bahaï et les chrétiens convertis.  Elle a ensuite demandé au Rapporteur spécial comment il envisage d’établir un dialogue constructif avec les autorités iraniennes. 

Convaincu que tout examen des droits de l’homme doit se fonder sur une approche impartiale, le Burundi s’est opposé aux mandats par pays, qui institutionnalisent un traitement sélectif.  L’Examen périodique universel est, selon lui, le meilleur mécanisme pour garantir un traitement impartial et équilibré. 

Le ton pontifiant et l’attribution d’étiquettes n’ont jamais permis d’améliorer la situation des droits de l’homme, a argué à son tour la Fédération de Russie.  Plutôt que d’ostraciser les pays pris pour cible, la communauté internationale devrait les impliquer davantage dans un dialogue respectueux, en particulier si cela les concerne directement, a-t-elle ajouté.

Le Japon a constaté certains progrès dans le domaine de la protection des droits de l’homme en Iran, notamment en ce qui concerne les personnes handicapées.  Il a demandé au Rapporteur spécial ce que pourraient être ses futures collaborations avec le Gouvernement iranien. 

Relevant que l’Iran collabore avec l’Examen périodique universel, le Pakistan y a vu la preuve de son engagement à travailler avec ces mécanismes.  Il a toutefois considéré que les questions des droits de l’homme doivent être abordées au travers d’une approche non sélective. 

Reprenant la parole, la République islamique d’Iran a relevé qu’il y a des pays frappés par le racisme, le colonialisme et la torture.  Ces pays devraient être les moins bien placés pour donner la leçon aux autres en la matière car ils violent les droits de l’homme et les utilisent pour exercer des pressions sur leurs adversaires.  Elle s’est étonnée que les États-Unis, le Canada et l’Allemagne ne soient pas intervenus sur les pratiques d’Israël.  Par contre, a-t-elle regretté, l’Iran a été mis en avant dans le cadre d’un mandat clairement politisé. 

Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran a salué l’interaction ici avec le représentant de l’Iran, tout en réitérant son appel à un accès dans le pays. 

Il a de nouveau exprimé sa préoccupation au sujet des discriminations religieuses, et a réclamé par ailleurs la mise en place urgente d’un moratoire sur l’exécution de mineurs.  Il a encouragé la communauté internationale à examiner les recommandations qu’il a présentées à ce sujet au Conseil des droits de l’homme. 

Il a également demandé à l’Iran d’arrêter les pratiques discriminatoires à l’égard des femmes et des filles. 

S’agissant de l’emprisonnement des binationaux, il a décrié le non-respect des procédures et les arrestations arbitraires.  Il s’est également inquiété des confessions forcées et des pressions sur les minorités, y voyant des agissements à des fins politiques. 

Tout en saluant, par ailleurs, les mesures louables pour mettre fin au mariage d’enfants, il a demandé la modification de la loi pour la rendre conforme au droit international.  Il s’est en outre inquiété des pratiques quant au port du hijab et la réaction disproportionnée de la part des autorités à ce sujet.

Abordant le régime des sanctions, « une question très importante », il a reconnu leur impact sur une économie déjà en difficulté et leurs incidences sur une grande partie de la population iranienne, notamment la plus vulnérable.  Néanmoins, ces mesures ne sont qu’un facteur dans le déclin économique, a-t-il nuancé, rappelant à l’Iran qu’il y avait déjà des manifestations avant ces mesures de rétorsions.  Il a ensuite réitéré sa demande à se rendre dans le pays pour examiner de visu l’impact de ces sanctions sur les communautés.

Suite du débat général

Mme MAJDA MOUTCHOU (Maroc) a indiqué que de profondes réformes, normatives et institutionnelles, ont été entreprises dans la perspective de réhabiliter le champ des droits de l’homme.  Dans le cadre de son interaction avec les organes de traités et des procédures spéciales, le Maroc a reçu 11 titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, et 14 invitations ont été adressées à ces procédures spéciales pour visiter le Royaume.  En outre, a poursuivi Mme Moutchou, le Royaume s’est doté d’un important dispositif institutionnel assurant la reconnaissance, la protection et la promotion des droits de l’homme.  C’est dans ce contexte, a expliqué la représentante, que de nouvelles institutions consacrées aux droits de l’homme ont été créées, depuis les années 90, pour consolider les structures judiciaires et administratives déjà existantes.  Elle a notamment cité le Conseil des droits de l’homme, une institution nationale, pluraliste et indépendante, dotée de larges attributions et prérogatives conformément aux Principes de Paris.  Pour finir, Mme Moutchou a évoqué les avancées en matière de parité et d’égalité hommes-femmes consacrées par la Constitution ainsi que la nouvelle Stratégie nationale intégrée de la jeunesse (2015-2030).

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a réitéré sa position en faveur d’une vision intégrale de la migration internationale fondée sur les droits de l’homme qui rejette la pénalisation des migrants, indépendamment de leur statut migratoire, et considère comme droits à part entière la non-détention, la non-séparation familiale et l’accès à la justice.  Elle a aussi appelé à la reconnaissance des contributions des migrants au développement socioéconomique des sociétés d’accueil et à la création de la richesse globale. 

La représentante a indiqué que le Gouvernement salvadorien œuvre, aux niveaux national et régional, à l’analyse des causes profondes de la migration, parmi lesquelles les causes structurelles.  Il prend aussi des mesures à caractère économique, social, culturel et éducatif et dans le domaine des droits de l’homme pour créer des opportunités d’emploi, une main-d’œuvre qualifiée et ouvrir des canaux réguliers de flux migratoires aux fins d’éviter la séparation des familles.  Elle a appuyé à cet égard le Pacte mondial pour des migrations sûres, régulières et ordonnées qui a le mérite, selon elle, de jeter les bases d’un cadre de coopération régionale et internationale entre les pays d’origine, de transit et de destination. 

Mme SARAH S. F. A. O. ALZOUMAN (Koweït) a estimé que les mécanismes de promotion des droits de l’homme doivent respecter les contextes religieux et les traditions, « sans imposer tel ou tel concept ».  Elle a appelé à promouvoir le consensus concernant les principes de la Déclaration des droits de l’homme.  Le Koweït accorde une grande importance à cette question comme en témoigne sa Constitution et sa législation qui est conforme aux principes internationaux. 

La déléguée a ensuite souligné le rôle important des étrangers qui vivent et travaillent au Koweït et a affirmé que son gouvernement œuvre pour la garantie de leur protection et la défense de leurs droits, comme d’ailleurs pour l’ensemble des personnes qui vivent sur le sol koweïtien.

Mme MARILIA MANUEL (Angola) a affirmé que lorsque le multilatéralisme est respectueux de la légitimité de chaque État, il peut servir de base solide à l’égalité entre tous et à la promotion du bien-être universel.  Pour cette raison, l’Angola réitère son plein soutien au principe de représentativité universelle et géographique au sein du Conseil des droits de l’homme. 

Concernant la situation spécifique de l’Angola, la représentante a assuré que les droits de l’homme, qui ont toujours été à l’ordre du jour du Gouvernement, ont vu leur situation s’améliorer ces dernières années, tant sur le plan individuel que collectif.  Ainsi, les droits civils et politiques, l’accès à la justice et aux services de base, comme la santé, l’éducation, l’assainissement, entre autres, ont été améliorés pour le bien-être des populations.  L’an dernier, l’Angola a adopté sa Stratégie nationale pour les droits de l’homme 2019-2022, dans laquelle la promotion et la protection des droits de l’homme sont devenues un aspect de la sécurité nationale. 

En Angola, a poursuivi la déléguée, le cadre juridique a également été renforcé récemment avec la ratification de plusieurs conventions, dont la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, celle contre la torture et celle pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, ou encore la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et celle de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.  Des politiques et des mécanismes spécifiques pour la mise en œuvre des obligations découlant de ces instruments sont en cours d’élaboration, a assuré la représentante. 

M. SUPACHAI TEERAMUNGCALANON (Thaïlande) a indiqué que les lois en matière d’égalité entre les genres, sur la justice, l’éducation pour tous ou les communautés ont été révisées pour s’assurer que personne, en particulier les plus vulnérables, ne soit laissé pour compte.  De plus, le quatrième projet de plan sur les droits de l’homme 2019-2023 a été élargi à des catégories comme les défenseurs des droits de l’homme et les membres des médias.  Par ailleurs, le Programme de couverture maladie universelle, finalisé en 2002, est en cours d’amélioration pour garantir de meilleurs services.

M. Teeramungcalanon a également fait savoir qu’en tant que nouveau membre de l’ECOSOC, la Thaïlande cherche à adopter une approche globale, centrée sur les populations en matière de développement économique et social.  De fait, la Thaïlande est devenue le premier pays de sa région à s’être doté d’un plan national d’action sur les entreprises et les droits de l’homme, s’est-il félicité.  Elle a en outre accueilli le premier Forum sur la responsabilité des entreprises en matière de droits de l’homme, organisé en dehors des Nations Unies.  La Thaïlande a aussi déposé son instrument de ratification de la Convention n188 de l’Organisation international du Travail sur le travail dans la pêche, devenant le premier pays de la région à ratifier cet instrument. 

M. HERASYMENKO (Ukraine) a estimé que les procédures spéciales devraient offrir des conseils juridiques et pratiques aux pays concernés pour les aider à améliorer leur situation au titre des droits humains.  Il a rappelé à cet égard que l’Ukraine a cosigné une résolution, adoptée lors de la quarante-deuxième session du Conseil des droits de l’homme, relative à la contribution des procédures spéciales dans l’aide à la prévention des violations. 

Le délégué a ensuite indiqué que son pays s’emploie à améliorer sa législation nationale afin de traiter du sort des personnes disparues ou détenues arbitrairement.  Il a fait état d’un texte sur les personnes détenues illégalement en territoire occupé, actuellement à l’examen au Parlement ukrainien.  Selon le représentant, le mécanisme international visant à préciser le sort de ces personnes est bloqué par la Fédération de Russie et nul n’a accès à leurs lieux de détention. 

En dépit de l’agression militaire russe contre la Crimée et le Donbass, l’Ukraine reste attachée à la lutte contre la corruption notamment dans le système judiciaire, a-t-il ajouté, assurant que la société civile ukrainienne joue un rôle actif dans la supervision des réformes et continue d’être un acteur fondamental à cet égard. 

M. ROBERT ALEXANDER POVEDA BRITO (Venezuela) a affirmé que la récente élection du Venezuela au sein du Conseil des droits de l’homme discrédite la campagne menée contre son pays.  Il s’est félicité de la présence du Haut-Commissariat aux droits de l’homme au Venezuela, ce qui témoigne, a-t-il affirmé, du souhait de son gouvernement de nouer des relations avec ce bureau des Nations Unies.  Il a rejeté toute tentative d’utiliser ce bureau à des fins politiques ou dans le cadre de mesures unilatérales.  Le représentant a rappelé qu’en juin dernier, la Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, s’est rendue dans son pays.  Il a toutefois déploré que cette visite ait été suivie de la publication d’un rapport « biaisé », ne reflétant pas la teneur du dialogue engagé.  Le document comporte d’importantes lacunes dans sa méthodologie, utilise des sources subjectives et exclut presque toutes les informations fournies par l’État.  De plus, 80% des personnes interrogées étaient en dehors du Venezuela, a-t-il critiqué.

Mme ROSHELLE YANIQUE HENRY (Jamaïque) a déclaré que la Charte fondamentale des droits et libertés de la Jamaïque plaçait dans le Gouvernement la responsabilité de promouvoir le respect universel des droits de l’homme.  Elle l’oblige également à mettre sur pied des mécanismes pour s’assurer que ces droits soient bien réalisés.  La Charte fournit même à tout individu le moyen de saisir la Cour suprême s’il estime que ses droits sont violés. 

Pour traduire en mesures concrètes l’ordre juridique inscrit dans la Constitution, le Gouvernement a adopté le plan Vision 2030, qui rend prioritaire la réalisation des droits de l’homme pour tous.  Il a également ratifié sept des neufs principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, dont la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, celle relative aux droits de l’enfant et celle relative aux droits des personnes handicapées.

Mme CÉLINE PIERRE FABRE (Haïti) a appuyé le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) chargé de conseiller et d’appuyer son gouvernement dans la planification et la tenue d’élections libres, justes et transparentes afin de garantir l’état de droit, de promouvoir les droits de l’homme et de maintenir la stabilité politique.  Elle a reconnu que l’alternance démocratique est essentielle et qu’elle doit nécessairement se réaliser au travers d’élections inclusives, honnêtes et démocratiques. 

D’autre part, la représentante a dit l’attachement du Gouvernement au strict respect de la liberté d’expression du peuple haïtien dont « il comprend les nombreuses revendications relatives à ses conditions de vie ».  Haïti fait aussi « de son mieux » pour réduire l’extrême pauvreté en favorisant la création d’emplois et en créant des programmes d’aide sociale aux plus démunis.  Elle a estimé nécessaire un « apport international renforcé ». 

M. ARBA (Serbie) a indiqué qu’étant un pays multi-ethnique, la Serbie attache une attention spéciale aux droits des minorités, et tout particulièrement au droit de celles-ci d’utiliser leur langue et leur alphabet.  Ce droit est une condition préalable à la réalisation de nombreux autres droits, dont les droits à l’éducation, à l’emploi, ou encore à la participation à la vie politique.  Le rapport du Secrétaire général sur la promotion effective de la Déclaration sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, a relevé que des mesures pour améliorer la représentation des minorités nationales dans les organismes d’État en Serbie ont été renforcées ces récentes années, ainsi que l’accès des minorités nationales à l’éducation dans leur langue maternelle, a souligné M. Arba.  La Serbie attend donc que la minorité serbe dans les autres pays de la région bénéficient du même niveau de protection de leurs droits, notamment le droit d’utiliser le serbe et l’alphabet cyrillique.

Poursuivant, M. Arba est revenu sur les problèmes rencontrés par les populations non albanaises dans « ses provinces du sud du Kosovo et de Metohija ».  Il a déploré que la protection des droits de l’homme, tout particulièrement le droit des minorités, soit loin d’être satisfaisante et que les conditions sécuritaires n’aient pas été mises en place pour assurer le retour durable de plus de 200 000 déplacés internes.  Il a expliqué que la communauté serbe continue d’être la cible d’attaques ethniquement motivées et de crimes haineux, et que les minorités ethniques font face à des degrés divers de discrimination institutionnelles et sociétales en matière d’emploi, d’éducation, de services sociaux, ou encore d’utilisation de leur langue.  « Les droits de l’homme des Serbes, des Gorans et autres non albanais du Kosovo et Metohija sont menacés! » a-t-il accusé.

Exposé de l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar

Venue présenter le dernier rapport du Secrétaire général, Mme CHRISTINE SCHRANER-BURGENER, Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar, a souligné à la fois l’urgence et les opportunités que connaît le pays à l’approche des élections législatives prévues en 2020, notant que dans un contexte de tensions communautaires persistantes et de conflits ethniques, une action accrue est nécessaire pour s’attaquer aux causes profondes de la violence et de la discrimination institutionnalisée.

Elle a indiqué que dans l’État rakhine et ailleurs, le Gouvernement du Myanmar s’est engagé à mettre en œuvre efficacement les recommandations de la Commission consultative sur l’État rakhine dirigée par feu Kofi Annan (Commission Annan) et, plus récemment, la stratégie sur la fermeture des camps pour personnes déplacées à l’intérieur du pays.  De tels engagements ont été une première étape prometteuse.  Mais après deux ans, a-t-elle tempéré, il est grand temps pour les communautés touchées du Myanmar de voir des mesures concrètes et une véritable volonté politique sur la voie de l’édification d’une démocratie inclusive et dynamique. 

Une étape essentielle, a souligné Mme Schraner-Burgener, serait que les autorités civiles et militaires adoptent une position unifiée contre l’incitation à la haine, accompagnée de la promotion d’un processus électoral largement inclusif, transparent et accessible afin que celui-ci puisse servir d’élément unificateur à l’échelle nationale.

L’Envoyée spéciale a ensuite indiqué qu’elle prévoit d’effectuer sa neuvième visite au Myanmar au mois de novembre, afin de poursuivre son dialogue avec la Conseillère d’État Daw Aung San Suu Kyi et d’autres dirigeants.  Elle a expliqué que ses efforts continuent de mettre l’accent sur l’accès aux « programmes d’études birmans » dans les camps de réfugiés et sur l’amélioration des possibilités d’éducation dans l’État rakhine.  Un moyen de se prémunir, selon elle, contre une génération perdue.

Mme Schraner-Burgener a déploré, par ailleurs, que l’accès de l’ONU et de ses partenaires reste problématique, en particulier dans les zones touchées par la violence, comme dans les périphéries ouest et nord-est.  Mais il est également important de reconnaître les progrès accomplis et de contribuer à bâtir sur un élan positif.

Elle a cité, à cet égard, la signature par le Myanmar, en juin 2018, d’un mémorandum d’accord avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) visant à créer des conditions propices au rapatriement volontaire, sûr, digne et durable des réfugiés vers leur lieu d’origine ou de leur choix.  Cela constitue une étape importante, a-t-elle affirmé.  Elle a également souligné l’importance du soutien régional que procure l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) afin de s’attaquer aux causes profondes du conflit et de créer un environnement propice pour que les communautés touchées puissent reconstruire leur vie.  Il ne fait aucun doute que davantage de mesures sont nécessaires pour garantir les droits, la dignité et la sécurité de toutes les communautés de l’État rakhine, a-t-elle souligné. 

L’Envoyée spéciale s’est réjouie que le Gouvernement s’achemine vers l’adoption de propositions visant à simplifier et à accélérer le processus de vérification de la citoyenneté et de prise de décisions.  Celles-ci doivent cependant être « mises en œuvre maintenant ».  Toutefois, la loi de 1982 sur la citoyenneté devra être réformée car elle ne répond pas aux normes internationales dans des domaines clefs liés à la non-discrimination ainsi qu’à la prévention et la réduction de l’apatridie.  Les autorités ont également pris des mesures pour distribuer une fiche d’information aux réfugiés qui se trouvent au Bangladesh pour assurer une plus grande transparence du processus de rapatriement.  Un mécanisme public pour les plaintes a aussi été mis sur pied. 

« Soyons clairs », a-t-elle enchaîné, il incombe au Myanmar de créer des conditions durables propices au retour, afin que les réfugiés puissent rentrer volontairement, en toute sécurité et dans la dignité dans leurs foyers.  L’Envoyée spéciale a indiqué que selon des informations récentes, environ 300 réfugiés seraient rentrés à Rakhine de leur propre gré.  Le traitement qui leur sera assuré et la question de savoir s’ils pourront regagner leur lieu d’origine ou de leur choix seront un indicateur clef, a-t-elle affirmé.

Mme Schraner-Burgener a témoigné avoir ressenti des tensions communautaires marquées lors de ses visites sur le terrain.  Elle a appelé à mener un plus grand dialogue interreligieux et intercommunal, invitant le Gouvernement à contribuer à élargir l’espace pour cela.  Elle a également attiré l’attention sur les développements sécuritaires liés aux affrontements entre l’Armée arakanaise et la Tatmadaw qui ont exacerbé la situation précaire à Rakhine, mettant en lumière les griefs de longue date qu’entretiennent les bouddhistes rakhines à l’égard de la majorité bama.  Elle a déploré le peu de condamnation internationale face aux souffrances des civils rakhines. 

Elle a souligné que l’action de la communauté internationale doit encourager et promouvoir le bien-être de toutes les communautés touchées et contribuer à promouvoir la cohésion sociale.  Elle a par ailleurs déploré que la méfiance entre les organisations militaires et ethniques armées persiste, comme en témoigne l’annonce faite en septembre par la Tatmadaw que la dernière déclaration unilatérale d’un cessez-le-feu pourrait ne pas être prorogée dans de nombreuses zones affectées.

Dialogue interactif

Le Myanmar a souligné que la priorité de son gouvernement est de régler la situation humanitaire dans l’État rakhine et d’assurer le rapatriement des personnes déplacées aussi vite que possible.  À cette fin, le Gouvernement du Myanmar travaille étroitement avec le HCR, le PNUD et l’ASEAN pour faciliter la mise en œuvre de l’accord bilatéral entre le Myanmar et le Bangladesh.  « Les conditions préalables dictées par certains pays pour mettre la pression sur le Myanmar ne sont pas tenables », a-t-il fait valoir, jugeant que la mise en œuvre de l’accord bilatéral est le seul moyen de résoudre la question des déplacés. 

Concernant la question de la citoyenneté, il a précisé que celle-ci sera accordée selon la loi sur la citoyenneté de 1982.  Les rapatriés recevront une carte nationale de vérification à leur arrivée, après relevé des données biométriques.  Ces cartes sont délivrées dans l’ensemble du pays et pas seulement dans l’État rakhine, a-t-il précisé.  La délégation a ensuite appelé le Bangladesh à autoriser la visite de l’équipe de collecte et de vérification des preuves de la Commission d’enquête du Myanmar.  Une enquête militaire sur les allégations de violations commises dans l’État rakhine est en cours et une cour martiale devrait bientôt être établie.

La délégation a également expliqué avoir fortement avancé dans la mise en œuvre de la majorité des recommandations de la Commission consultative sur l’État rakhine, notamment sur celles relatives à la citoyenneté, la liberté de mouvement, la fermeture des camps de déplacés et la promotion de l’éducation et du secteur de la santé. 

Le Myanmar a assuré n’avoir jamais manqué de coopérer avec les mandats des Nations Unies et a, par ailleurs, affirmé être aujourd’hui « à un tournant de sa transition démocratique ».  Toutefois, la transition est encore incomplète et le « gouvernement démocratique » s’efforce de respecter ses engagements en faveur de la paix et de la réconciliation nationale, de la primauté de l’état de droit, du développement économique et social et de la révision de la Constitution, en vue de sa mise en conformité aux normes et principes démocratiques. 

Le Royaume-Uni a constaté que le Myanmar reste confronté à trois grands défis: la crise des Rohingya, le processus de paix et la promotion de la démocratie après des décennies de pouvoir militaire oppressant.  Quelle serait la meilleure façon de faire participer les Rohingya aux décisions qui les concernent? a voulu savoir l’Union européenne, qui s’est par ailleurs interrogée sur l’accès des Rohingya à une éducation inclusive.  Quelles mesures le Gouvernement du Myanmar devrait-il prendre en priorité pour améliorer la confiance de part et d’autre afin d’assurer les conditions pour un retour sûr? a demandé la Suisse, appuyée par le Canada.

Préoccupé face à l’absence de mesures concrètes du Gouvernement du Myanmar pour mettre fin à la crise, le Liechtenstein a demandé plus d’informations sur la fermeture de camps de déplacés dans l’État rakhine et sur l’incidence de la corruption dans l’établissement de l’état de droit au Myanmar.  L’Indonésie a plaidé pour la création d’un environnement propice au rétablissement de la confiance et au retour sûr, volontaire et dans la dignité des réfugiés rohingya.  Il est crucial, selon elle, que la communauté internationale maintienne un appui constructif pour permettre une solution durable. 

L’Allemagne a relevé que le rétrécissement de l’espace accordé à la société civile au Myanmar est de mauvais augure pour les élections à venir.  Elle a par ailleurs voulu savoir quand paraîtra le rapport du Mécanisme d’enquête indépendant.  De leur côté, les États-Unis ont appelé à établir les responsabilités pour les atteintes aux droits de l’homme dans le pays.  Il faut aussi améliorer les conditions de vie dans l’État rakhine afin de permettre le retour volontaire du million de réfugiés qui se trouvent actuellement dans le camp de Cox’s Bazar, au Bangladesh.  Dans cet esprit, ils ont souhaité savoir comment la communauté internationale pourrait se faire davantage entendre des autorités militaires du Myanmar. 

Le Bangladesh a demandé à l’Envoyée spéciale quelle était son expérience en matière de processus de dialogue interconfessionnel pour lutter contre les discours de haine et l’intolérance.  Accueillant avec satisfaction les engagements pris par l’ASEAN dans ce cadre, il a plaidé pour une amélioration de l’accès des entités onusiennes à l’État rakhine.  Enfin, il a appelé à l’application des recommandations de la Commission Annan, avec l’établissement d’une feuille de route pour régler la crise des Rohingya. 

L’Arabie saoudite a demandé des précisions sur l’éducation dispensée dans les camps de Cox’s Bazar, ainsi que sur le niveau de coopération entre le Myanmar et le Bangladesh.  En tant que présidente en exercice de l’ASEAN, la Thaïlande s’est déclarée prête à faciliter le processus de rapatriement des réfugiés rohingya, soulignant par ailleurs qu’une approche à long terme et des projets de développement sont nécessaires pour espérer régler la crise au Myanmar.

En réponse à ces questions, l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar a souligné qu’il est important de parler à l’unisson et avec synergie au sein du système des Nations Unies et indiqué que le Secrétaire général compte assurer le suivi du rapport Rosenthal.  Elle a insisté sur l’importance de la participation des Rohingya pour ce qui est de leur rapatriement, ainsi que sur la nécessité pour le Gouvernement du Myanmar d’engager un dialogue avec eux. 

Au sujet de l’éducation, Mme Schraner-Burgener a appelé à veiller à ce qu’il n’y ait pas une génération « perdue » à Cox’s Bazar.  Elle a indiqué que manuels scolaires et enseignants sont recherchés, mais que des défis se posent, notamment en raison du conflit armé. 

Pour ce qui est des conditions propices au rapatriement, Mme Schraner-Burgener a appelé le Myanmar à mettre en œuvre les recommandations de la Commission Annan.  Les camps de déplacés doivent être fermés dans l’État rakhine, la liberté de mouvement doit être assurée, ainsi qu’un accès aux moyens de subsistance, à l’éducation et à la santé.  Il faut également lutter contre la corruption, notamment dans le cadre de l’accès à la carte de citoyenneté que les déplacés doivent pouvoir obtenir en toute sécurité.  L’amendement de la loi sur la citoyenneté de 1982 est également nécessaire. 

Mme Schraner-Burgener a par ailleurs souligné que la responsabilisation est une question clef dans le cadre de la justice.  Nous devons veiller à ce que des actes atroces ne se reproduisent pas, a-t-elle insisté, se félicitant en outre du fait que l’armée a commencé à mener une enquête.

L’Envoyée spéciale a aussi insisté sur l’impératif d’amender la Constitution, tout en reconnaissant qu’à l’approche des élections, il n’est pas facile pour le Gouvernement d’y procéder.

Exposé du Président de la Commission d’enquête sur le Burundi

M. DOUDOU DIÈNE, Président de la Commission d’enquête sur le Burundi, a tout d’abord indiqué que dans sa résolution 42/26 du 27 septembre dernier, le Conseil des droits de l’homme a décidé de renouveler le mandat de la Commission pour un an supplémentaire, une décision qui témoigne de sa préoccupation face à la situation actuelle du Burundi.  Enquêter en profondeur sur les violations des droits de l’homme qui s’y commettent reste une tâche nécessaire que les autres mécanismes internationaux des droits de l’homme, comme l’Examen périodique universel, ne peuvent pas accomplir, a-t-il dit.

S’exprimant sur le rapport, il a indiqué que ce dernier démontre que la persistance des violations des droits de l’homme résulte de l’action des autorités.  Ces dernières, plutôt que de remplir leur obligation de mettre un terme aux violations en cours, de poursuivre leurs auteurs et d’accorder des réparations aux victimes, refusent de reconnaître la réalité et préfèrent dénoncer toute mention de cette réalité, en répétant des accusations sans fondements de manipulation politique et de complot international contre le Burundi.  Or, donner une voix aux victimes n’est pas une démarche politique et dénoncer la persistance des violations des droits de l’homme ne constitue pas une attaque à la souveraineté nationale, a déclaré M. Diène. 

Il a indiqué que depuis mai 2018, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des arrestations arbitraires, des actes de torture ainsi que des violences sexuelles ont continué de se commettre.  Ces violations ont gardé une dimension essentiellement politique et s’inscrivent dans le cadre des élections de 2020, a-t-il expliqué.  Elles visent principalement les opposants politiques, ou personnes assimilées comme tels, ainsi que les membres de leur famille.  On peut en être victime si l’on refuse par exemple d’adhérer au parti au pouvoir ou de rejoindre la ligue des jeunes du parti, les Imbonerakure.

Ces violences sont par ailleurs principalement commises dans les zones rurales et reculées.  Elles touchent également des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme.  Elles frappent aussi les Burundais rapatriés de Tanzanie qui font face à un climat d’hostilité et de suspicion de la part des Imbonerakure et des responsables administratifs locaux.  Il a affirmé qu’il y a des motifs raisonnables de croire que certaines de ces violations constituent des crimes contre l’humanité, tels que défini par le Statut de Rome.  Hier encore, a-t-il ajouté, nous avons été informés de développements particulièrement inquiétants dans le nord-ouest du Burundi au cours desquels il y aurait eu des pertes en vies humaines et des blessés lors de heurts armés.

Poursuivant son intervention, le Président de la Commission a déclaré que l’une des évolutions les plus frappantes depuis le dernier rapport est l’intensification des restrictions des libertés publiques, dans un contexte pré-électoral.  Les médias indépendants qui étaient encore présents au Burundi, comme Radio France Internationale (RFI), British Broadcasting Corporation (BBC) ou Voice of America, ont été mis en garde, ou ont vu leur licence révoquée ou suspendue pour avoir diffusé des informations jugées « déséquilibrées ».  Les activités des organisations non gouvernementales nationales et étrangères sont étroitement contrôlées et celles des partis politique d’opposition sont entravées.  Les autorités burundaises cherchent donc à supprimer toute voix critique, et le calme relatif qui règne au Burundi est basé, avant tout, sur la peur, a encore déclaré M. Diène. 

Sur les plans économique et social, les conséquences négatives de la crise de 2015 ont continué d’affecter la situation du pays.  Ainsi, le Burundi est classé 185e sur 189 dans l’indice de développement humain de 2018 par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la moitié de la population du Burundi a été affectée par la malaria depuis décembre 2018.  Cependant, le Gouvernement a refusé de déclarer une situation épidémique ce qui aurait pu lui permettre de bénéficier d’un soutien accru de la communauté internationale alors que des pénuries de médicaments ont régulièrement été rapportées.

Au vu de tous ces paramètres, la Commission d’enquête a pu identifier les facteurs de risque existants en utilisant le Cadre d’analyse des atrocités criminelles développé en 2014 par le Bureau des Nations Unies pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger.  Elle a pu identifier huit facteurs de risques, notamment un environnement politique, économique et sécuritaire instable; un climat général d’impunité; l’existence d’intention et de motifs de recourir à la violence, notamment la volonté du parti au pouvoir de s’y maintenir.  La Commission a également identifié l’absence de facteurs atténuants, tels qu’une société civile nationale solide ou des médias indépendants et diversifiés ou encore l’existence de facteurs déclencheurs de violence, en particulier la tenue des élections de 2020.  « Les risques sont réels et graves », a-t-il prévenu. 

M. Diène a souligné qu’il est du pouvoir du Gouvernement de modifier la trajectoire actuelle du Burundi vers une voie plus pacifique et respectueuse des droits de l’homme.  La mesure la plus urgente serait d’accepter de tenir un dialogue inclusif interburundais et mettre en œuvre les recommandations des rapports de la Commission.  Les mesures prises récemment pour traduire en justice certains membres des Imbonerakure sont pertinentes à cet égard, a-t-il estimé, avant d’appeler le Gouvernement à ouvrir le pays à l’assistance pour pouvoir bénéficier de l’appui international.

Dialogue interactif

Le Burundi a déclaré avoir reçu et examiné « de fond en comble » le « soi-disant rapport » de la Commission d’enquête sur le Burundi.  Il a dit le rejeter publiquement car il s’agit, selon lui, d’un document « biaisé, taillé sur mesure et destiné à déstabiliser le Burundi ».  Jugeant que le rapport est à la fois « dénigrant et calomniant et téléguidé par des laboratoires étrangers bien connus depuis 2015 », il a dénoncé les « allégations mensongères » qu’il contient et demandé à la Troisième Commission de ne lui donner aucun crédit.  Selon lui, on assiste à une « politisation à outrance » de la situation des droits humains, comme en atteste cette campagne de diffamation et cette tentative de déstabilisation. 

Pour le Burundi, l’échantillonnage du rapport « viole le principe du contradictoire » en incriminant systématiquement les agissements du Gouvernement sans faire mention des crimes commis par les insurgés et les putschistes, lesquels sont protégés par d’autres pays.  S’élevant contre le manque d’indépendance de la Commission d’enquête et de son Président, il a noté qu’aux paragraphes 94 et 95 du rapport, la Commission fait usage d’un langage complaisant à l’égard de l’opposition radicale.  « Pourquoi pour les crimes commis par l’opposition, la Commission n’a pas utilisé les mêmes sources que celles utilisées pour incriminer le Gouvernement et couvrir tous les crimes commis par les insurgés et les putschistes de 2015? », s’est-il interrogé.  Il a encore relevé qu’au paragraphe 98, la Commission demande de maintenir le Burundi à l’agenda du Conseil de sécurité, sortant de fait du périmètre de son mandat.  Il s’agit donc d’un rapport « politiquement orienté », ne serait-ce en raison du fait qu’il s’appuie sur des témoignages de réfugiés et qu’il charge le Gouvernement en couvrant les crimes de l’opposition. 

Le Maroc a appelé la communauté internationale à saisir la volonté du Burundi de coopérer pour l’aider à assurer une meilleure situation des droits de l’homme, déplorant par ailleurs la politisation des questions liées aux droits de l’homme.  Un avis partagé par le Mouvement des pays non alignés, qui, par la voix du Venezuela, a dénoncé la prolifération des résolutions par pays présentées à la Troisième Commission.  La politisation, la sélectivité et les « deux poids, deux mesures » ne sont pas pertinentes pour la protection des droits de l’homme, a renchéri la République populaire démocratique de Corée (RPDC).

Pour le Royaume-Uni, l’absence de progrès de la part du Burundi pour s’attaquer aux violations des droits de l’homme sur son territoire démontre l’importance du travail de la Commission d’enquête.  Il a voulu savoir quelles mesures pourraient encourager le Gouvernement burundais à aborder les huit risques majeurs évoqués dans le rapport.  À leur tour, Les États-Unis ont appelé le Gouvernement burundais à accorder un accès sans entrave aux observateurs internationaux et de veiller à ce que les élections programmées en 2020 soient libres et honnêtes, sans violence à l’égard des civils. 

Au nom d’un groupe d’États d’Afrique centrale, le Gabon a estimé qu’il incombe aux États de protéger les droits de l’homme au travers de mécanismes acceptés par tous.  Il a rappelé que le Conseil des droits de l’homme a été créé pour améliorer cette situation par le raffermissement des relations entre les États, le renforcement des capacités et l’Examen périodique universel.  Ce mécanisme reste le seul permettant de traiter de la situation dans chaque État sans politisation, a-t-il souligné. 

Quelles actions devraient être mises en œuvre pour que le Conseil des droits de l’homme utilise au mieux les analyses de la Commission d’enquête? s’est enquis l’Union européenne, après avoir appelé le Gouvernement burundais à ouvrir des enquêtes, à traduire les auteurs de ces actes devant la justice et à rouvrir la coopération avec les mécanismes des droits de l’homme. 

Le Nicaragua et l’Inde ont estimé que l’Examen périodique universel est le meilleur mécanisme pour évaluer la situation des droits humains dans les pays et les aider à améliorer leur situation en la matière.  À cette fin, la communauté internationale devrait se concentrer sur l’assistance technique et le renforcement des capacités, en concertation avec les États concernés, a ajouté la délégation indienne. 

Préoccupé par l’impunité généralisée qui règne au Burundi, la Norvège a exhorté le Gouvernement burundais à faire en sorte que tous les partis politiques du pays puissent participer librement aux élections de 2020. 

Observant en revanche avec satisfaction que le Gouvernement burundais fait des efforts à l’approche des élections de l’an prochain, Djibouti a estimé que cette volonté politique devrait être appuyée par la communauté internationale.  De son côté, la Fédération de Russie a constaté une tendance à la stabilisation politique au Burundi et s’est préoccupée des tentatives de « certaines forces » d’envenimer cette situation fragile, notamment au Conseil des droits de l’homme, « ce qui est particulièrement inquiétant en vue des élections de 2020 ».  Observant en outre que le rapport de la Commission d’enquête vient dédouaner l’opposition radicale, elle s’est interrogée sur l’utilité de cette structure, jugeant que son mandat devrait prendre fin et être remplacé par une instance technique. 

Le Cameroun a réitéré sa position en faveur d’une approche coopérative dans le traitement des droits de l’homme.  Toutes les parties intéressées ne peuvent y œuvrer sans la coopération du pays concerné, a-t-il dit, ajoutant que l’Examen périodique universel demeure leur seule mécanisme légitime pour traiter ces examens par pays. 

La République tchèque s’est inquiétée de l’augmentation des violations à l’approche des élections générales, tandis que l’Allemagne a exhorté le Gouvernement burundais à organiser des élections libre et honnêtes en 2020 et à ne pas réduire l’espace démocratique à cette occasion.  Que peut faire la communauté internationale pour favoriser un dialogue interburundais inclusif?

Cuba s’est déclarée favorable à des modalités de dialogue authentiques pour la promotion des droits de l’homme et a considéré que c’est l’Examen périodique universel qui garantit ce type d’aspiration. 

La Chine a appelé la communauté internationale à ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures du Burundi en vue des élections de 2020, rappelant elle aussi son opposition à la politisation des droits de l’homme, un avis également partagé par l’Érythrée pour qui l’EPU est le mécanisme le plus approprié.  Abondant dans ce sens, le Kenya a de plus estimé que c’est aux Africains de trouver des solutions aux problèmes qui les concernent.  L’examen des pratiques de certains pays en matière de droits de l’homme permettent d’exploiter la Troisième Commission à des fins politiques et sont contraires à l’approche de non-sélectivité et d’objectivité nécessaire pour ces questions, a renchéri la République islamique d’Iran

Mme FRANÇOISE HAMPSON, commissaire au sein de la Commission d’enquête sur le Burundi, a répondu aux questions et observations des membres de la Troisième Commission sur la déclaration de Doudou Diène, Président de la Commission.

Concernant la méthodologie de travail, elle a précisé que les preuves dont dispose la Commission ne sont pas recueillies par d’autres personnes, mais collectées directement auprès de personnes qui sont toujours au Burundi sur la base d’entretiens.  La Commission souhaiterait pouvoir se pencher sur les abus commis par des groupes armés ou des agents de l’État, mais, a regretté Mme Hampson, recueillir des informations de ce type s’avère difficile car la Commission n’a pas accès au pays.

Il y a eu cette année une restriction accrue de l’espace politique, a poursuivi Mme Hampson.  La presse est muselée et le Gouvernement burundais essaye de lui imposer un code de conduite pour les élections.  Elle a en outre fait observer que l’Examen périodique universel ne permet « malheureusement » pas de mener des enquêtes approfondies.

Elle a déploré le manque de coopération du Gouvernement, rappelant notamment la fermeture récente du bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  Et en 2018, le Gouvernement a refusé des visas à trois experts indépendants nommés pour apporter une assistance technique dans le cadre d’une résolution que le Burundi avait lui-même proposée. 

Réagissant aux réponses de Mme Hampson, le Burundi a rejeté « la tendance de certains pays à vouloir transformer des instances des Nations Unies en instances politiques ».  La politisation à outrance et la politique de sélectivité sont contraires aux principes d’universalité des droits humains.  Le Burundi a estimé être harcelé à causes d’appétits politiques et non d’une question des droits de l’homme.

Exposé de l’Expert indépendant chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie

M. BAHAME TOM MUKIRYA NYANDUGA, Expert indépendant chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie, a d’abord indiqué qu’il a séjourné dans le pays du 15 au 25 juillet 2019 et qu’il s’est entretenu avec plusieurs autorités nationales mais aussi avec les représentants du Bureau des Nations Unies et de la Mission de l’Union africaine, sans oublier les agences de l’ONU, les partenaires au développement, la société civile et les syndicats.  « Durant mon séjour, a-t-il expliqué, j’ai été tenu au fait des défis qui pourraient compromettre les préparatifs des élections de 2020 et de 2021, dont la situation en matière de sécurité et l’absence des cadres juridiques pour assurer des élections crédibles. » 

Revenant sur l’insécurité qui a un impact sur les droits de l’homme, l’Expert indépendant a dénoncé les attaques terroristes, les affrontements entre les différents clans et les conflits dans les régions du Somaliland.  Quant aux futures élections, il a dit avoir appris que les 15 chapitres controversés du projet de constitution ont enfin été finalisés.  Le projet, qui devrait être adopté en juin 2020, ne parle pas de la représentation des femmes et des groupes marginalisés.  C’est la loi électorale, dont on attend toujours l’adoption, qui prévoit un quota de 30% de femmes.  En revanche, la loi sur les partis politiques, adoptée en 2016, a fait qu’aujourd’hui 57 partis sont enregistrés.  Les gens à qui j’ai parlé, a encore indiqué l’Expert indépendant, se félicitent tous de l’introduction d’un système électoral proportionnel. 

La violence sexuelle et fondée sur le sexe ainsi que la violence sexuelle liée aux conflits armés sont « endémiques » en Somalie, a par ailleurs alerté l’Expert indépendant.  Les victimes en sont principalement les femmes et les filles issues des clans minoritaires, pour la plupart des déplacées.  Une Charte des femmes somaliennes a été adoptée en mars dernier et consacre la centralité de la femme, comme partenaire égale, dans la gouvernance, le développement et le rétablissement de la paix.  Grâce à l’ONU et à l’appui des donateurs, le Ministère fédéral des femmes et des droits de l’homme met en œuvre un programme conjoint pour veiller à ce que le pays honore ses obligations en matière de droits des femmes. 

En attendant, le Parlement fédéral n’a toujours pas adopté la loi sur les crimes sexuels, une impasse qu’il faut attribuer aux « sentiments religieux », a estimé l’Expert indépendant.  Il a invoqué les mêmes raisons pour expliquer pourquoi les lois sur le viol et autres crimes sexuels adoptés dans le Somaliland et dans le Puntland ont du mal à être appliquées.  La tradition culturelle du « xeer » contribue à l’impunité, a martelé l’Expert indépendant.  Au niveau institutionnel, a-t-il poursuivi, l’on attend toujours la mise sur pied de la Commission nationale des droits de l’homme.  Le Gouvernement fédéral a certes créé 16 centres alternatifs de règlement des différends mais ces centres ne traitent pas des crimes.  Quant aux enfants, leurs droits sont violés par les Chabab mais aussi par les agences gouvernementales du maintien de l’ordre. 

L’Expert indépendant a tout de même reconnu les efforts déployés par le Gouvernement fédéral avec l’aide de l’UNICEF et l’élaboration d’un projet de loi global sur les enfants.  La Somalie a aussi ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant et celle sur les droits des personnes handicapées.  Elle est d’ailleurs sur le point de mettre sur pied une autorité nationale pour les personnes handicapées.  La Somalie a aussi signé mais pas encore ratifié la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.  Mais, a pressé l’Expert indépendant, il lui reste beaucoup d’autres textes internationaux à signer sur les femmes et les personnes déplacées. 

Quant à la liberté d’expression, il a constaté que les journalistes et les médias connaissent toujours des problèmes.  Le Tribunal militaire a par exemple condamné un policier pour le meurtre d’un journaliste mais il continue aussi de prononcer la peine de mort, malgré l’adoption par la Somalie d’un moratoire. 

Venant à une économie caractérisée par le manque d’opportunités d’emploi, l’Expert indépendant s’est particulièrement alarmé du fait que, selon l’Auditeur général, une grande partie de l’argent des donateurs est détournée.  Il a dit avoir appris que le Parlement fédéral a l’intention de voter une loi sur la création d’une agence anticorruption. 

En Somalie, a-t-il conclu, l’exercice des droits de l’homme, la croissance économique, l’amélioration des conditions de vie et la bonne gouvernance dépendent beaucoup de la création d’une architecture de sécurité viable.  Il a insisté sur le renforcement des capacités des Forces nationales somaliennes mais aussi sur l’unification de toutes les forces régionales sous le parapluie d’une armée nationale, en particulier si la Somalie veut triompher des Chabab. 

Dialogue interactif

Même si la situation des droits de l’homme en Somalie semble enregistrer des progrès, Djibouti a souhaité savoir quelles pourraient être les conséquences d’un retrait prématuré de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans ce pays d’une part, et sur la tenue des élections d’autre part.  Ne pensez-vous pas qu’une rationalisation des postes pourrait accroître l’impact des activités dans le domaine des droits de l’homme? a-t-il ensuite demandé.

Les États-Unis ont noté avec satisfaction que la Somalie prépare des élections nationales en 2020 et poursuit sa transition.  Ils ont cependant estimé que la poursuite de violences et la prise pour cibles de journalistes indépendant sont des signes inquiétants.  Ils ont demandé comment pourrait être assurée une plus forte participation des femmes au sein des institutions du pays. 

La Norvège a souhaité savoir quels partenariats permettraient de renforcer la participation des femmes aux efforts de consolidation de la paix et de démocratisation en Somalie, tandis que le Royaume-Uni a demandé une évaluation des mesures prises pour promouvoir l’inclusion lors des prochaines élections.  La délégation s’est également dite préoccupée par les victimes civiles, les violences sexuelles et sexistes et la présence d’enfants au sein de groupes armés, une inquiétude également partagée par l’Union européenne qui a voulu savoir comment la communauté internationale pourrait appuyer davantage les efforts de lutte contre les violences faites aux femmes et les mutilations génitales. 

La Chine a salué les résultats obtenus par la Somalie en termes de relèvement économique, tout en constatant que le terrorisme reste une menace.  Dans ce contexte, elle a souhaité encourager l’Expert indépendant à consulter le Gouvernement somalien afin de parvenir à de nouveaux progrès en matière de développement. 

Répondant tout d’abord à Djibouti, l’Expert indépendant chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie a rappelé avoir lancé, l’an dernier, des mises en garde quant à l’impact sur les droits de l’homme d’un retrait de la MANUSOM, et a souligné l’importance pour les forces somaliennes et internationales de conserver les territoires libérés pour éviter de nouvelles attaques des Chabab.

Il a rappelé qu’après le processus électoral de 2016-2017, qui a pu se dérouler grâce à l’utilisation du suffrage indirect, les Chabab avaient visé des représentants élus.  Il sera dès lors nécessaire d’assurer la sécurité des bureaux de vote lors des prochaines élections qui doivent se faire au suffrage universel direct, sans quoi les Chabab pourront les attaquer.

Sur la question de la rationalisation des postes et emplois dans les entités onusiennes et de l’Union africaine, il a appelé à faire la distinction entre doublon et complémentarité.  Des réunions conjointes ont lieu et ces modalités fonctionnent très bien, a expliqué M. Mukirya Nyanduga.

Sur les mesures à prendre pour la participation des femmes, il faut être conscient des améliorations signalées après le processus électoral 2016-2017, a souligné M. Mukirya Nyanduga.  Le nombre de femmes au Gouvernement a augmenté, s’établissant désormais à cinq et des femmes ont aussi été élues représentantes.  Malheureusement, le quota de 30% n’a pas été inscrit dans la Constitution, a-t-il regretté, espérant que cela soit désormais inclus dans la loi électorale.

Pour ce qui est de la lutte contre les mutilations génitales féminines, la violence sexuelle et la violence sexiste, M. Mukirya Nyanduga a expliqué avoir dialogué avec le Gouvernement de ces problèmes qui sont profondément enracinés en Somalie, de par la culture traditionnelle.  Deux choses sont possibles.  Tout d’abord, agir sur la législation, mais il semble y avoir des résistances de mouvements religieux au sein même du Parlement, et M. Mukirya Nyanduga a conseillé à ce propos d’essayer de s’inspirer des meilleures pratiques dans les pays musulmans.  Ensuite, il conviendrait de mettre en œuvre un plaidoyer au niveau des communautés de base. 

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