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Forum de Paris sur la Paix: 100 ans après la Grande Guerre, dans un monde de nouveau chaotique, le Secrétaire général défend le multilatéralisme

On trouvera ci-après l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, au Forum de Paris sur la Paix, aujourd’hui, à Paris:

Il y a 10 ans, en 2008, mourrait à l’âge de 110 ans le dernier combattant français connu de la Grande Guerre, M. Lazare Ponticelli.  Chaque 11 novembre, M. Ponticelli, immigré italien, honorait la promesse faite à ses camarades tombés trop jeunes au combat.  Il se rendait au monument aux morts pour penser à eux.

À la toute fin de sa vie, il avait finalement accepté de témoigner dans les écoles.  Et son témoignage commençait ainsi - et je cite: « D’abord, je n’ai jamais su pourquoi on se battait… ».

Ce « pourquoi » a recouvert avec le temps l’élan patriotique et le sacrifice des morts.  Mais l’horreur des grands conflits mondiaux ne peut être oubliée.  Une horreur que la reproduction de Guernica de Picasso me rappelle toujours quand je passe devant elle pour me rendre au Conseil de sécurité des Nations Unies.

Une horreur ne doit jamais l’emporter face à l’espérance.  L’espérance avec laquelle j’accueille mes hôtes dans la salle de réunion du 38e étage du Siège des Nations Unies, ornée d’une tapisserie de Matisse « Polynésie, le Ciel », aux bleus profonds et apaisants.

C’est cette même espérance qui est à l’origine de l’essor du multilatéralisme au XXe siècle.  En 100 ans, la volonté de régler les conflits de façon pacifique par des règles communes s’est muée en un système universel d’institutions dans les domaines politiques, économiques, sociaux et environnementaux.

Il repose sur des valeurs affirmées dans le Préambule de la Charte des Nations-Unies et la Déclaration universelle des Droits de l’homme adoptée ici-même à Paris il y a 70 ans.  Mais cette espérance est aussi manifeste dans la réconciliation franco-allemande et dans la construction européenne.

Je suis très heureux de m’exprimer ainsi après le Président Macron et la Chancelière Merkel.  Plus que tout, 100 ans après, à quelques kilomètres de la clairière de Rethondes, ce Forum de Paris sur la Paix avec son enthousiasme pour des solutions collectives prend tout son sens.  Je veux remercier très vivement le Président Macron de cette féconde initiative.

Ces 100 années nous semblent une éternité.  Et pourtant, si l’on y songe, c’est une infime fraction de l’histoire mondiale.  Ne serait-elle d’ailleurs qu’une simple réaction à la dévastation des deux guerres mondiales?  Je pense que non.

Celles-ci ont provoqué un rappel à l’essentiel.  Dans son livre Les Somnambules –que la Chancelière Merkel a référé-, l’historien Christopher Clark a réexaminé les origines de la Première Guerre mondiale.  Il complète l’analyse des rivalités nationales en insistant sur l’aveuglement des dirigeants politiques.  Enfermés dans des perceptions faussées de leurs adversaires, coupés des réalités du monde et des peuples, ils précipitèrent la guerre illimitée.

Bien des éléments aujourd’hui me semblent emprunter et au début du XXe siècle, et aux années 30, laissant craindre un engrenage imprévisible.

Le premier élément est la crise financière de 2008.  Rappelons-nous: 10 ans après le krach boursier de 1929 débutait la Seconde Guerre mondiale.  Force est de constater que la leçon a été retenue en 2008.  Une grande dépression a été évitée par un arsenal budgétaire et monétaire sans précédent pour soutenir la demande et sauver le système financier.

Et pourtant, malgré le retour à la croissance de l’économie mondiale, la facture a été réglée dans les votes de l’année 2016 des deux côtés de l’Atlantique, et plus largement en Europe et dans le monde.  Revanche du politique sur la rationalité macro-économique, qui traduit la déstabilisation des classes moyennes, le blocage de la mobilité sociale par la stagnation des salaires, les inégalités croissantes et une indignation des peuples face à « la trahison des élites ».  D’ailleurs le mot historique « trahison des clercs » qui a été aujourd’hui prononcé par le Président Macron dans le discours de notre cérémonie officielle.

Deuxième élément: les années 30 virent des démocraties emportées par une vague totalitaire.  On n’est pas dans la même situation aujourd’hui mais on constate une polarisation de la vie politique et de la société elle-même, qui érode dangereusement les droits et libertés fondamentales, les principes démocratiques et l’état de droit.

Les systèmes politiques et les constitutions sont mis à l’épreuve des préjugés identitaires, du terrorisme, et de la corruption de l’information.  Reposant sur les multiples fils du « vivre ensemble » et de la culture, ils sont fracturés par le « vivre en parallèle », et la fusion des passions ethniques, religieuses et nationales.  Ces passions aigres ont nourri les replis nationalistes et l’antisémitisme dans les années 30.   Ne le perdons jamais de vue – surtout aujourd’hui.

L’affaiblissement de l’esprit de compromis propre aux démocraties, et l’indifférence à l’égard des règles collectives sont les poisons du multilatéralisme.  J’en vois malheureusement des signes réels: Le premier est la division du Conseil de sécurité notamment sur le conflit syrien, qui signe le retour des systèmes d’alliance au Moyen-Orient et surtout le sacrifice de la population syrienne.

Le deuxième est une dynamique de confrontation commerciale, qui signe le retour du bilatéralisme contre le multilatéralisme commercial incarné par l’Organisation mondiale du commerce et son Organe de règlement des différends.  Souvenons-nous là encore des années 30 et de leurs cortèges de dévaluations compétitives qui provoquèrent l’effondrement des trois quarts des échanges et des paiements mondiaux en une décennie.

Le troisième est la crise de confiance traversée par l’Union européenne.  Et bien qu’aujourd’hui je sois Secrétaire général des Nations Unies, je n’oublie pas me origines européennes.  La construction européenne ne saurait perdre l’adhésion des populations européennes.  C’est une hypothèque qu’il est urgent et possible de lever.  « Too meaningful to fail », serais-je tenté de dire à mes anciens collègues européens.

Je ne suis pas fataliste.  Je me dois en conséquence d’essayer de prouver pourquoi le multilatéralisme n’est plus seulement une espérance mais plus que jamais une nécessité.  En premier lieu, le multilatéralisme a pour lui des résultats indéniables.  Bill Gates rappelait récemment que la mortalité infantile a baissé de plus de moitié depuis 1990.  Ce n’est pas seulement l’action des organisations multilatérales, c’est naturellement aussi l’action des États mais ce ne serait pas possible sans les organisations internationales.  Nous voyons aussi que l’extrême pauvreté a baissé de 36% à 8%.

Les campagnes de vaccination de l’OMS ont permis d’éradiquer la variole.  Aujourd’hui, nous sommes très proche d’éradiquer la poliomyélite.  7.6 millions de décès du SIDA ont été évités grâce à un meilleur accès au traitement.  Une fois de plus, largement dû aux organisations multilatérales.

Dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité, plus d’un million d’hommes et de femmes de 125 pays ont servi en 70 années dans les missions de maintien de la paix pour contenir l’extension des crises, protéger les civils et soutenir les processus politiques.

Les Casques bleus sont notre marque dans le monde.  Une présence au moindre coût.  Le Governement Accountability Office du Congrès américain estime ainsi qu’une opération américaine en République centrafricaine aurait coûté 10 fois plus cher aux États-Unis que la Mission des Nations Unies, la MINUSCA.

Oui, pour un jeune centrafricain, le multilatéralisme représente une nécessité et une espérance.  Pareil pour les 65 millions de réfugiés et déplacés dans le monde.  Mes 10 années comme Haut-Commissaire aux réfugiés m’ont convaincu que l’épreuve du déracinement ne pouvait être évitée que par la prévention des conflits, et une meilleure intégration des actions de développement et de protection des droits de l’homme dans nos efforts en faveur de la paix.

Le cadre multilatéral s’avère également indispensable pour régler les crises de prolifération nucléaires.  C’est bien l’unité du Conseil de sécurité dans les cas iranien et nord-coréen, qui ont ouvert la possibilité d’une solution négociée tant en 2015 qu’en 2018.

A contrario, une intervention unilatérale ou d’un groupe d’États n’est pas en soi un gage d’efficacité et d’économie.  L’intervention en Iraq fournit bien une preuve par la négative en faveur du multilatéralisme.  Il faut enfin reconnaître combien les conventions internationales ont facilité les interdépendances entre les peuples.

Nous n’y pensons plus, mais n’oublions pas l’existence d’un droit de la mer codifié dans la Convention de Montego Bay, ou de l’existence d’une Organisation de l’aviation civile internationale – sans laquelle probablement le transport aérien ne serait pas possible.

L’histoire ne joue pas ici aux dés puisque le « père » de notre droit international –le Hollandais Grotius– a le premier formulé au XVIe siècle le principe de la liberté des mers – d’ailleurs à ce moment-là contre l’Espagne et le Portugal.  Principe qui était le corollaire de la liberté du commerce, reconnue bien avant l’existence de l’OMC.

Les Nations Unies demeurent aujourd’hui le centre où s’harmonisent les efforts vers la paix et le développement durable.  Lors du récent débat de l’Assemblée générale en septembre dernier à New York, 126 chefs d’État et de gouvernement m’ont fait l’honneur de leur présence au Siège.   Mes services ont organisé sur une semaine 566 réunions de haut niveau, et 1676 rencontres bilatérales.  Il y aurait un certain vertige à penser que cela ne soit que des paroles.

Les gouvernements ne pourront répondre aux attentes de protection de leurs populations en l’absence de coopération internationale.  Le récent débat de l’Assemblée générale m’a convaincu que la prise de conscience est large.  Les thèmes mentionnés plus de 100 fois dans les discours des chefs de délégation furent tous globaux: le Programme de développement durable à l'horizon 2030 (158 fois), le changement climatique (146), le terrorisme (123), les migrations (100).

Le premier de ces « comptes à rebours » –selon le mot juste de mon ami Hubert Védrine– est naturellement le défi climatique.  L’horloge tourne déjà.  Si nous ne changeons pas de cap dans le futur immédiat, nous perdrons le contrôle de la situation.  À quelques jours de la COP24, je le dis clairement: nous –dirigeants mondiaux– ne pouvons être des somnambules.

Il ne sert à rien de construire des châteaux de sable avant une grande marée en prétendant être des ingénieurs.  Ce ne sont pas des jeux d’enfants.  Nous jouons avec l’avenir de nos enfants.  Le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat devrait nous servir de réveil.  Les réalités sur le terrain dépassent les prévisions les plus pessimistes.

Le changement climatique va malheureusement bien plus vite que nous.  Les désastres naturels deviennent plus fréquents, plus intenses, plus destructeurs.  La banquise de l’Arctique rétrécit, la désertification progresse et les coraux blanchissent.

Le deuxième défi est celui de la démographie et des migrations.  Il a fallu du Big Bang jusqu’à 1820 pour atteindre le milliard d’habitants sur la terre.  Aujourd’hui, nous approchons les huit milliards d’habitants, et la moitié de la croissance de la population mondiale sera en Afrique.  Dans un contexte de réchauffement climatique, d’inégalités et de conflits, les migrations resteront un phénomène durable.  

Il faut retrouver la raison dans ce débat sur les migrations.  Sans coopération internationale, et si nous nous replions derrière nos frontières nationales, nous sacrifierons nos valeurs collectives, et nous perpétuerons la tragédie des migrants exploités par les pires des trafiquants.

Notre troisième défi est technologique.  Après l’invention de l’imprimerie, les révolutions numériques font du virtuel un nouveau territoire.  Il nous est donné de connaître l’une des révolutions qui accouchent d’un monde nouveau.  La transformation digitale bouleverse nos économies et sociétés.  Bientôt, l’intelligence artificielle redéfinira le marché de l’emploi, et la nature du travail lui-même.

Immense opportunité, l’Internet sert hélas aussi à manipuler l’information.  La cybercriminalité s’y répand.  Les groupes terroristes y développent leur discours de haine et y recrutent des jeunes en rupture.  Le principal risque aujourd’hui est l’écart entre les innovations et notre cadre juridique dont les concepts de base échappent à la dématérialisation.

La combinaison de ces trois défis survient à un moment de grande anxiété et de désordre géopolitique, qui accroît les risques de confrontation.  Car le temps d’une hyperpuissance en capacité de réassurer l’économie mondiale ou garantir la sécurité internationale est révolu.

Notre monde semble chaotique pour le moment.  Mais il évolue vers une multipolarité multidimensionnelle.  Et il serait faux de considérer que cette multipolarité en elle-même est la solution.  Sans système multilatéral et sans respect des règles internationales, le risque est alors un retour aux seuls rapports de force, aux mécanismes d’incitation/sanction, et à une spirale de conflits larvés.

C’est pour cela que je ne me résigne pas à voir un assaut sur le multilatéralisme quand il est le plus nécessaire.  Je crois au contraire à un multilatéralisme réformé, fort et en mouvement. C’est le sens de mon action en tant que Secrétaire général des Nations Unies.  Je ne peux ici d’ailleurs détailler l’ensemble des réformes que mes collègues et moi-même entreprenons dans cette direction.  Mais permettez-moi d’adresser aux personnels de nos organisations ma reconnaissance.  Ils travaillent dans les lieux où personnes d’autres ne vont, sur les missions les plus dangereuses.

Je crois profondément que ce multilatéralisme ne peut être fort que de ses États.  Seuls des États solides ont l’énergie de s’engager, puis d’expliquer aux citoyens la règle qu’ils ont accepté de s’imposer avec les autres États.

J’en sais moi-même la difficulté comme ancien Premier Ministre: une règle multilatérale est un compromis qui est plus difficile à réformer qu’une loi nationale.  Souvent, les peuples voient ce qu’elle impose, non ce qu’elle préserve.  Il est donc essentiel que les États renouvellent leur pacte citoyen.

Il faut reconnaître avec Jürgen Habermas qu’une démocratie moderne respire grâce à un flux continu de communications entre société civile et autorités politiques.  Un flux qui doit participer directement à la formation des décisions politiques.

Ayant grandi sous une dictature, je le sais d’expérience.  Ce principe devient aussi de plus en plus valable au niveau global.  Il nous faut un multilatéralisme inclusif en étroite relation avec la société civile et la communauté des affaires.  Le renouvellement du pacte citoyen ne peut en outre faire l’impasse sur la question centrale des inégalités.

Et je félicite le Président Macron d’en avoir fait la priorité de la présidence française du G7 en 2019.  La lutte contre les inégalités dans le monde, la lutte pour l’éradication de la pauvreté doit constituer la boussole de l’action des organisations multilatérales.  Elle est au cœur du Programme 2030 et de ses objectifs de développement durable.

Dans ce contexte, ma mission est simple: faire des Nations Unies une organisation plus efficace pour mieux servir les populations pour qui nous sommes une nécessité et une espérance.  Par conséquent, la réforme du Secrétariat des Nations Unies a été une priorité dès mon arrivée et notre Organisation doit devenir exemplaire.

En particulier, elle doit être respectueuse de la diversité géographique, et de l’égalité hommes/femmes.  Nous sommes convaincus que les femmes ont en main une clef essentielle de notre développement et de la paix.  Et c’est pour cela que nous avons atteint la parité dans le management supérieur de l’Organisation un an après mon entrée en fonction.  Je poursuivrai dans le sens de cette modernisation sans relâche, et je vous demande de m’accorder votre confiance et votre appui.

La prévention et la résolution des conflits restent en tête de mes préoccupations, dans le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Nous ne devons jamais nous résigner à la souffrance des victimes de violences et d’actes terroristes, que ce soit en Syrie, au Yémen, au Mali ou au Myanmar.  Nos organisations doivent agir en réseau pour cela.  Un multilatéralisme en réseau.  C’est le sens de notre partenariat privilégié avec l’Union africaine et l’Union européenne.  Ou avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.

À cette heure, les Casques bleus de la MONUSCO, l’Organisation mondiale de la Santé et l’UNICEF, appuyés par la Banque mondiale, avec des ONG comme Médecins Sans Frontières agissent main dans la main avec le Gouvernement congolais pour éviter la contagion d’Ebola dans l’est de la République démocratique du Congo.  

Il n’y a plus de solution sans une effective réponse multilatérale aux défis de notre temps.

Sur les trois défis existentiels que j’ai mentionnés, nous aurons dans les prochains mois des échéances clefs: Premièrement, il y a trois ans ici à Paris, les États avaient montré qu’un accord international est encore possible sur l’un des sujets les plus complexes — le changement climatique.  Ce train ne repassera pas.  Cet accord est notre horizon indépassable.  La COP24 en Pologne constitue une étape clef dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris.

Je vais organiser un sommet du climat en 2019 pour susciter des contributions nationales plus ambitieuses à la réduction des émissions de carbone, et in fine limiter le réchauffement climatique à 1,5°C.  Mais aussi pour remplir la promesse faite de mobiliser 100 milliards de dollars par an en faveur des pays en développement. 

Au-delà, n’oublions pas que les océans occupent 73% de la surface de la terre, et absorbent le tiers des émissions de carbone générées par les activités humaines.  Je demande aux États Membres de se montrer ambitieux dans la négociation d’un instrument normatif de préservation de la biodiversité en haute mer.  À terme -et c’est une grande préoccupation du Président Macron-, la codification des grands principes du droit de l’environnement apporterait prévisibilité et clarté.

Deuxièmement, les mouvements migratoires.  Je me rendrai à Marrakech en décembre pour l’adoption d’un pacte global sur les migrations.  Ce sera le premier cadre international sur cette question, sans être juridiquement contraignant.  Mais il fournira une vision commune susceptible de contrer les préjugés infamants contre les migrants, tout en constituant une base de coopération internationale pour une migration sûre, ordonnée et régulière.

L’exemple récent des lignes directrices sur le déplacement interne montre l’intérêt des textes de soft law.  Sans être contraignantes, elles sont devenues utiles aux gouvernements dans leurs politiques de protection et d’intégration, et dans leur coopération internationale.

Dans le même temps, je réitère mon appel à préserver l’intégrité du régime international de protection des réfugiés.  Il reste pour moi –comme le droit international humanitaire- un étalon de mesure de notre humanité.

Troisièmement, la révolution technologique.  Je pense sincèrement que les évolutions technologiques sont un allié de taille dans la mise en œuvre de notre Programme de développement durable à l'horizon 2030.  Nous aurons demain un Forum de la gouvernance d’Internet à l’UNESCO sur l’Internet de la confiance.

Le symbole me frappe: la confiance dans les potentialités de la révolution numérique doit favoriser l’éducation et l’appétit de culture, non la haine et l’exclusion.  À l’ère des données, nous devons trouver un équilibre entre innovation et régulation.  Ce travail est clairement devant nous.

Je crois que certains domaines ne sauraient s’affranchir des règles de base du droit international.  Mon Programme de désarmement souligne l’urgence et la nécessité de porter attention aux usages militaires des nouvelles technologies.  Imaginez les conséquences d’un système autonome capable de repérer et d’attaquer de lui-même des êtres humains.

J’invite les États à interdire ces armes qui sont politiquement inacceptables et moralement révoltantes.  Mais au vu du rythme des innovations, nous devons aussi nous autoriser des formes allégées de régulation dans d’autres domaines du monde digital.  Ce qu’elles perdent alors en force contraignante doit être compensé par un suivi rigoureux des engagements ainsi pris.

J’ai créé récemment un Panel de haut niveau sur la coopération digitale comme catalyseur de ce processus.  Je souhaite que les Nations Unies soient une plateforme où les gouvernements, les entreprises, la société civile et les chercheurs peuvent se mettre d’accord sur des codes de bonne conduite, des lignes directrices et des engagements volontaires.  Au final, il s’agit que la révolution digitale devienne une force positive au service du progrès.

Le multilatéralisme qui fait partie de notre quotidien risque de devenir périssable quand il est le plus nécessaire.  Il fut un legs inestimable: un sursaut par lequel la dévastation se fit adhésion à une humanité commune.  Votre présence pour défendre un multilatéralisme en action est une marque de confiance.  Sachez qu’elle me rend aussi confiant dans cet avenir, et plus encore déterminé.

Je vous remercie de votre attention et de votre engagement.

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