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Le Secrétaire général présente ses priorités sur les migrations, la lutte contre le harcèlement sexuel à l’ONU et la coopération numérique

Plaidoyer en faveur des migrants, guerre ouverte au harcèlement sexuel au sein de l’Organisation et initiative pour la coopération numérique: tels ont été les principaux thèmes développés, aujourd’hui, par le Secrétaire général de l’ONU, lors de sa première conférence de presse à New York depuis le 16 janvier dernier.

M. António Guterres s’est tout d’abord félicité que, demain, l’Assemblée générale devrait se mettre d’accord sur le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, lequel sera ensuite officiellement adopté à la Conférence intergouvernementale de Marrakech, prévue les 10 et 11 décembre prochains.  « Cette action présente un potentiel immense pour aider le monde à exploiter les atouts des migrations régulières tout en protégeant les gens des dangers auxquels ils s’exposent lors des migrations clandestines », a résumé le Chef de l’Organisation.

Au nombre de 250 millions et plus, les migrants, a poursuivi M. Guterres, sont un remarquable « moteur de croissance ».  Représentant 3% de la population globale, ils assument 10% du PIB mondial.  « Pourtant, plus de 60 000 déplacés sont morts depuis 2000, en mer, dans le désert et ailleurs », a-t-il déploré, avant de dénoncer la diabolisation et les attaques dont ces infortunés sont victimes.

Le pacte a trois objectifs principaux, a analysé le Secrétaire général: reconfigurer les politiques nationales de développement et la coopération internationale au développement afin de prendre en compte les migrations et créer pour les migrants des opportunités professionnelles et une vie digne dans leurs propres pays; renforcer la coopération internationale pour faire échec aux passeurs et protéger leurs victimes; enfin, accroître les chances de la migration légale.

« Les États ont le droit et même la responsabilité de déterminer leurs propres politiques migratoires et de gérer leurs frontières de manière responsable.  Mais ils doivent le faire dans le plein respect des droits de l’homme », a souligné M. Guterres, en rappelant que « les demandeurs d’asile ont des droits dont le droit à ce que leur demande soit examinée ».  Et, une fois reconnus comme réfugiés, « ils sont protégés en vertu du droit international ».

Malheureusement, là où le Bangladesh a su faire preuve de « compassion » et de « générosité » envers les réfugiés rohingya, ailleurs, la fermeture des frontières et le déclin de la solidarité sont monnaie courante, a constaté le Secrétaire général, qui a rappelé que la grande majorité des réfugiés sont accueillis par des pays en développement.

Répondant à une journaliste qui faisait observer que « l’administration Trump » avait renoncé à adhérer au pacte pour des migrations, M. Guterres s’est dit convaincu que, dans le monde d’aujourd’hui, les politiques migratoires ne pouvaient plus être seulement « une affaire interne ».  Après tout, a-t-il relevé, les États-Unis sont, « par définition, le pays de l’immigration ».

Le numéro 1 de l’ONU a ensuite fait le point sur son action pour lutter contre le harcèlement sexuel au Secrétariat et dans le système des Nations Unies, un défi « profondément enraciné » dans des « déséquilibres de pouvoir historiques ».  « Nous vivons dans un monde dominé par les hommes, et dans une culture dominée par les hommes », a-t-il constaté.

Au Secrétariat, M. Guterres a dit avoir pris des mesures « sans précédent », notamment en créant une équipe spéciale au sein du Bureau des services de contrôle interne (BSCI), chargée des enquêtes relatives aux plaintes de harcèlement sexuel.  En outre, la semaine dernière, la Commission des questions administratives et budgétaires a approuvé sa proposition de créer six postes d’enquêteurs supplémentaires, qui viennent s’ajouter à ceux pour lesquels des entretiens sont conduits en ce moment même avec des candidats, dont deux tiers de femmes.

« Toutes les allégations de harcèlement sexuel sont désormais considérées comme relevant de la catégorie 1, ce qui signifie qu’elles feront l’objet d’une enquête de la part du BSCI sans passer au préalable par les échelons intermédiaires qui étaient disponibles jusqu’à présent », a-t-il déclaré, notant que le Secrétariat s’était fixé un délai de trois mois pour finaliser chaque enquête.

Outre la permanence téléphonique « Speak Up », disponible 24 heures sur 24 pour signaler en toute confidentialité des cas de harcèlement sexuel et demander conseil, le Secrétaire général a annoncé le lancement d’une nouvelle base de données interinstitutions, pour empêcher que les harceleurs soient réembauchés par d’autres fonds, agences et programmes des Nations Unies, « comme cela est parfois arrivé par le passé ».  « La tolérance zéro dans les mots doit signifier une tolérance zéro dans les actes », a-t-il tranché.

M. Guterres a fait aujourd’hui une toute autre annonce aux médias: la création d’un « Groupe de haut niveau sur la coopération numérique », formé de personnalités de premier plan des mondes de la technologie, des politiques publiques, des sciences et des universités, et qui sera coprésidé par Melinda Gates de la Fondation Bill, et Jack Ma, Président du Groupe Alibaba.

« L’ampleur et le rythme des changements provoqués par la technologie numérique sont sans précédent, mais les moyens et niveaux actuels de coopération ne sont pas à la hauteur du défi », a expliqué le Secrétaire général pour justifier cette initiative, destinée à faire de l’innovation technologique un moyen d’accélérer les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable et de l’Accord de Paris sur les changements climatiques.

Chargé d’établir une « cartographie des tendances » de la technologie numérique, le Groupe aura pour tâche d’identifier les lacunes et les opportunités et présentera ses recommandations dans neuf mois.

Interrogé sur l’état d’avancement de la réforme budgétaire au Secrétariat, dont la délégation américaine se serait attribuée le mérite, selon une journaliste, M. Guterres a remercié chaque État Membre pour sa contribution, y compris les États-Unis.  S’il est clair que nous sommes en désaccord avec eux sur un certain nombre de questions, a-t-il reconnu, il n’en reste pas moins que notre coopération reste « constructive » pour plusieurs autres, s’agissant notamment des moyens d’améliorer les situations au Soudan du Sud ou en République démocratique du Congo (RDC).

S’agissant de la République démocratique du Congo (RDC), le Secrétaire général a dit avoir reçu la confirmation qu’il serait le bienvenu, dans le pays, très prochainement.  La raison que l’on a donnée pour le report de ma visite, a-t-il révélé, est que le Président Joseph Kabila est sur le point d’annoncer un certain nombre de décisions importantes et qu’il ne veut pas donner l’impression qu’il le fait sous la pression de la communauté internationale.  Ma visite a été reportée mais d’autres visites aussi, a souligné le Secrétaire général.  Si cela veut dire que le Président Kabila va prendre la « bonne décision » et qu’il veut donner l’impression qu’aucune pression internationale ne l’y a poussé, « je n’ai absolument rien contre le report de ma visite », a souri M. António Guterres.

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