SC/13446

Déclaration publique du Président du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé

À sa soixante-treizième séance, le 7 août 2018, le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé est convenu, à l’occasion de l’examen du sixième rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé en République démocratique du Congo (S/2018/502), d’adresser les messages ci-après, sous la forme d’une déclaration publique de son Président,

à toutes les parties au conflit armé en République démocratique du Congo, en particulier aux Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), à la Force de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI), à Nduma défense du Congo-Rénové (NDC-R), à Kamuina Nsapu, à Bana Mura et à divers groupes Maï-Maï, et aux Forces démocratiques alliées (ADF), dans laquelle il:

a)  Condamne vigoureusement toutes les violations et atteintes qui continuent d’être commises sur la personne d’enfants en République démocratique du Congo, les prie instamment de prévenir et faire cesser immédiatement toutes les violations du droit international applicable concernant le recrutement et l’utilisation d’enfants, les enlèvements, les meurtres et atteintes à l’intégrité physique, les viols et autres formes de violence sexuelle, les attaques portées contre des établissements scolaires et des hôpitaux et le refus de l’accès humanitaire, et de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international;

b)  Leur demande de continuer à donner suite aux conclusions précédentes du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé concernant la République démocratique du Congo (S/AC.51/2017/17, S/AC.51/2009/3, S/AC.51/2011/1 et S/AC.51/2014/3);

c)  Souligne que tous les auteurs de tels actes doivent être rapidement traduits en justice et être amenés à répondre de leurs actes, notamment grâce à la conduite d’enquêtes et de poursuites judiciaires systématiques et menées dans un délai raisonnable, et note que certains des actes susmentionnés, notamment le recrutement et l’utilisation d’enfants par les forces armées nationales ou par des groupes armés non étatiques, sont interdits et constituent des crimes au regard de la loi no 09/001 sur la protection de l’enfance, adoptée par le Gouvernement congolais le 10 janvier 2009;

d)  Note en outre que, le 19 avril 2004, le Gouvernement congolais a saisi le Procureur de la Cour pénale internationale de la question de la situation en République démocratique du Congo et que certains des actes mentionnés au paragraphe 6 a) peuvent constituer des crimes au regard du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel la République démocratique du Congo est partie;

e)  Leur demande instamment de libérer immédiatement et sans condition les enfants qui se trouvent dans leurs rangs et de prendre immédiatement des mesures pour prévenir et faire cesser le recrutement et l’utilisation d’enfants;

f)  Se déclare gravement préoccupé par le grand nombre de cas de viols et d’autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants, notamment des enfants déplacés, les exhorte à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants par des membres de leurs groupes respectifs, et souligne qu’il importe que les auteurs de violences sexuelles et sexistes sur la personne d’enfants aient à répondre de leurs actes;

g)  Se déclare profondément préoccupé par le grand nombre d’enfants tués ou blessés, victimes directes ou indirectes des hostilités entre les parties au conflit armé et d’attaques lancées sans discrimination contre la population civile, notamment de l’emploi excessif de la force et d’attaques visant des enfants au Kasaï et du recours aux enfants comme boucliers humains, et engage vivement toutes les parties à respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire, en particulier les principes de discrimination et de proportionnalité et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter ou, en tout état de cause, réduire au minimum les dommages infligés aux civils ou aux biens de caractère civil;

h)  Leur demande de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter le caractère civil des établissements scolaires et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de prévenir et faire cesser les attaques ou menaces d’attaque contre ces institutions et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires à des fins militaires en violation du droit international applicable;

i)  Leur demande de permettre et de faciliter l’acheminement sans entrave et en toute sécurité de l’aide humanitaire aux enfants, conformément aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies en la matière, de respecter le caractère exclusivement humanitaire et impartial de l’aide et les activités de tous les organismes humanitaires des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires, sans distinction;

j)  Se dit extrêmement préoccupé par la présence continue, en République démocratique du Congo, d’un nombre croissant de groupes armés, en particulier les Forces démocratiques de libération du Rwanda, Nduma défense du Congo-Rénové (NDC-R), Kamuina Nsapu, Bana Mura, divers groupes Maï‑Maï, la Force de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI), les Forces démocratiques alliées (ADF) et d’autres groupes armés, leurs activités déstabilisatrices et leurs conséquences néfaste sur les enfants;

k)  Demande en outre à tous les groupes armés non étatiques de s’engager publiquement à prévenir et à mettre fin à toutes les violations et atteintes commises sur la personne d’enfants, et à rapidement élaborer, adopter et exécuter des plans d’action conformément aux résolutions 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011), 2068 (2012), 2143 (2014), 2225 (2015) et 2427 (2018) du Conseil de sécurité s’ils sont inscrits sur la liste consignée dans l’annexe I du rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé;

l)  Rappelle à cet égard que quatre de ces groupes armés non étatiques, les Forces démocratiques de libération du Rwanda, la Force de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI), l’Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (APCLS) et les Maï-Maï Lafontaine et Simba, et d’anciens éléments des Patriotes résistants congolais (PARECO) et de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), sont inscrits depuis au moins cinq ans sur la liste consignée dans l’annexe I du rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé ;

m)  Constate avec satisfaction les progrès faits par les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) pour ce qui est de concrétiser les volets relatifs à la cessation et à la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants de leur plan d’action visant à prévenir et à faire cesser le recrutement et l’utilisation d’enfants ainsi que les violences sexuelles et autres violations graves commises sur la personne d’enfants et demande au Gouvernement de pérenniser les progrès enregistrés dans l’exécution du plan d’action en ce qui concerne la cessation et la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants en mettant en place des instructions permanentes sur l’évaluation de l’âge, en systématisant les procédures prévues dans le plan d’action et en luttant contre l’impunité dont pourraient bénéficier ceux qui recrutent ou utilisent des enfants, notamment dans les rangs de ses propres forces de sécurité;

n)  Engage vivement le Gouvernement congolais à concrétiser rapidement, intégralement et effectivement les volets du plan d’action relatifs à la cessation et à la prévention des violences sexuelles commises par les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), notamment à lutter contre l’impunité, y compris au niveau provincial ;

o)  Note avec satisfaction les activités de la conseillère du Président de la République démocratique du Congo chargée de la lutte contre la violence sexuelle et contre le recrutement d’enfants, et l’encourage à continuer de promouvoir une coordination et une coopération étroites entre les autorités nationales et les partenaires internationaux qui luttent contre la violence sexuelle et le recrutement et l’utilisation d’enfants en République démocratique du Congo;

p)  Prend note avec satisfaction du fait que le Gouvernement congolais ait adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et aux Lignes directrices pour la protection des écoles et des universités contre l’utilisation militaire durant les conflits armés et appelle de ses vœux leur application rapide, et l’encourage à veiller à ce que les attaques menées contre des établissements scolaires fassent l’objet d’enquêtes et que leurs auteurs soient dûment poursuivis ;

q)  Engage le Gouvernement à s’employer à offrir aux enfants touchés par des conflits armés des possibilités de réintégration et de réadaptation à long terme et durables, qui tiennent compte de la problématique femmes-hommes et des questions liées à l’âge, notamment dans les domaines de l’accès aux soins de santé, du soutien psychosocial et des programmes éducatifs, et à sensibiliser les populations, en travaillant avec elles, en vue de prévenir la stigmatisation de ces enfants et de faciliter leur retour, tout en tenant compte des besoins respectifs des filles et des garçons, afin de contribuer au bien-être des enfants et à une paix et une sécurité durables ;

r)  Demande instamment à ceux qui sont ou seront engagés dans des pourparlers et des accords de paix de veiller à ce que des dispositions relatives à la protection de l’enfance, y compris la libération et la réintégration des enfants, aux droits et au bien-être des enfants et à l’apprentissage de l'autonomie, y soient intégrées, et à ce que l’avis des enfants soit pris en compte dans ces processus, dans la mesure du possible;

s)  Rappelle que, dans sa résolution 2424 (2018), le Conseil de sécurité a reconduit jusqu’au 1er juillet 2019 les mesures d’embargo sur les armes, d’ordre financier et d’interdiction de voyager énoncées dans ses résolutions 1596 (2005), 1649 (2006), 1698 (2006) et 1807 (2008) s’appliquant aux personnes et, selon le cas, aux entités désignées par le Comité créé par la résolution 1533 (2004), dont les suivantes:

i)   Les personnes et les entités qui recrutent ou utilisent des enfants pour le conflit armé en République démocratique du Congo, en violation du droit international applicable;

ii)  Les personnes et les entités qui préparent, donnent l’ordre de commettre ou commettent en République démocratique du Congo des actes qui constituent des violations des droits de l’homme ou atteintes à ces droits ou des violations du droit international humanitaire, selon le cas, notamment des actes dirigés contre des civils, y compris des meurtres et atteintes à l’intégrité physique, des viols et d’autres violences sexuelles, des enlèvements, des déplacements forcés et des attaques contre des établissements scolaires ou des hôpitaux;

iii) Les personnes ou les entités qui font obstacle à l’accès à l’assistance humanitaire ou à sa distribution en République démocratique du Congo;

t)  Rappelle en outre que, le 1er février 2018, le Comité a jouté les noms de quatre personnes sur sa liste relatives aux sanctions, deux étant inscrits en application du paragraphe 7 e) de la résolution 2293 (2016). Le 13 août 2010, le Comité avait actualisé sa liste de personnes et d’entités visées par l’interdiction de voyager ou le gel des avoirs imposés aux paragraphes 13 et 15 de la résolution 1596 (2005), tels que prorogés au paragraphe 3 de la résolution 1896 (2009), en y ajoutant des accusations de recrutement et d’utilisation d’enfants portées contre neuf individus dont le nom y figurait déjà, et, entre le 1er décembre 2010 et le 30 juin 2014, y avait inscrit le nom de sept autres personnes et de deux entités qui avaient recruté ou utilisé des enfants ou leur avaient infligé des violences;

u)  Rappelle que le Groupe de travail est disposé à communiquer au Conseil de sécurité les informations voulues pour l’aider à prendre des mesures ciblées à l’encontre des auteurs de violations répétées;

et aux notables locaux et aux chefs religieux, dans laquelle il:

v)  Souligne leur contribution importante au renforcement de la protection des enfants en temps de conflit armé;

w)  Les exhorte à condamner publiquement les violations et les atteintes commises sur la personne d’enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, le viol et les autres formes de violence sexuelle, les enlèvements, les attaques et les menaces d’attaques dirigées contre des établissements scolaires et des hôpitaux, tout en continuant de militer pour les faire cesser et les prévenir, et à se concerter avec le Gouvernement, l’Organisation des Nations Unies et les autres parties prenantes compétentes pour appuyer la réinsertion et la réadaptation, dans leurs communautés respectives, des enfants touchés par le conflit armé, notamment grâce à une campagne de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.

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