8434e séance – matin
CS/13636

Conseil de sécurité: Staffan de Mistura estime que des bases ont été posées pour avancer dans la création du comité constitutionnel pour la Syrie

Chaleureusement applaudi à l’issue de sa dernière présentation devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie a regretté, ce matin, l’insuffisance des progrès dans la constitution d’un comité constitutionnel, mais estimé que les bases avaient été posées pour avancer.  M. Staffan de Mistura a également souligné que tout succès à l’avenir, en particulier celui de son successeur, « dépendra de l’unité du Conseil », dénonçant son insuffisance depuis l’adoption de la résolution 2254 (2015), qui lançait un cadre politique pour sortir du conflit.

M. de Mistura a profité de cette dernière intervention pour faire le point sur la création du comité constitutionnel avalisé, fin 2017, par la Déclaration de Sotchi, rappelant notamment que la Fédération de Russie et les Nations Unies s’étaient entendues sur le fait que l’Envoyé spécial devait être en mesure d’en choisir les membres, l’objectif étant de déboucher sur la création d’un comité crédible et équilibré.

Depuis Sotchi, M. de Mistura a dit avoir organisé, à cette fin, « un marathon de consultations » avec les parties prenantes.  Il a expliqué que le Gouvernement et l’opposition avaient transmis 50 noms chacun, tandis que l’ONU avait proposé une « liste du milieu » qui visait notamment à assurer une représentation de 30% de femmes au sein du comité constitutionnel.  Cette liste, a-t-il indiqué, n’a pas plu à l’opposition qui a toutefois accepté de ne pas la remettre en cause pour aller de l’avant, mais a, en revanche, été rejetée par le Gouvernement syrien qui s’est aussi opposé au principe qu’elle soit proposée par l’ONU.

Après une intensification des efforts diplomatiques, les Ministères des affaires étrangères de l’Iran, de la Turquie et de la Fédération de Russie ont proposé mardi dernier une liste de 50 noms, mais après les avoir examinés, a fait savoir l’Envoyé spécial, les Nations Unies ont conclu que ces noms ne répondent pas tous aux critères nécessaires.  M. de Mistura a aussi dit être profondément préoccupé par les informations crédibles, qui se sont intensifiées ces derniers jours, faisant état d’intimidation et de coercition sur certaines personnes qui figurent sur la liste, voire sur leur famille en Syrie.

Malgré ces embûches, l’Envoyé spécial n’en a pas moins estimé que les progrès sont réels –« une liste est pratiquement mise sur pied et les règles de procédure se précisent »– et a espéré que le comité constitutionnel soit en mesure d’entamer ses travaux au début du Nouvel An.

« Mais par-dessus tout, et au-delà de tous mes efforts, rien ne peut se substituer aux réels efforts des pays exerçant une influence à se parler et à travailler de manière constructive, avec le Conseil de sécurité et au-delà, pour appuyer le processus de l’ONU », a affirmé l’Envoyé spécial.

Depuis 11 mois, la « prétendue » initiative russe de Sotchi n’a débouché que « sur une impasse » ont cependant accusé les États-Unis, pour lesquels « en aucun cas », le régime syrien ne devait pouvoir opposer son véto sur la composition ou les procédures du comité.

« Soyons clairs: il n’y aura pas d’argent pour la reconstruction; il n’y aura aucune légitimité pour le régime; il n’y aura aucune facilitation du retour des réfugiés, tant que le processus politique n’aura pas avancé », ont mis en garde les États-Unis, appuyés par le Royaume-Uni.

« Ce qui a été présenté à Genève est clairement inacceptable », a reproché à son tour la France, déplorant que les garants d’Astana aient proposé une liste « déséquilibrée », composée de personnalités qu’ils savaient inacceptables et qui mettent en péril toute la crédibilité du futur comité. 

Convaincue qu’il existe, aujourd’hui, « pour la première fois peut-être depuis 7 ans », une étroite fenêtre d’opportunités pour une vraie dynamique politique en vue d’un règlement du conflit syrien, la France s’est inquiétée du risque qu’elle ne se referme au vu des développements des derniers jours, appelant par ailleurs à prendre garde que la tragédie syrienne ne devienne pas « le tombeau des Nations Unies ». 

Face à ces critiques, la Fédération de Russie a regretté que certains membres du Conseil de sécurité ne tiennent pas compte des efforts engagés par les garants d’Astana pour former le comité constitutionnel, précisant que le 18 décembre, au cours de la réunion à Genève, Moscou, Téhéran et Ankara sont tombés d’accord pour convoquer la première session du comité constitutionnel syrien à Genève au début de 2019. 

« Certains se plaignaient de l’absence de comité, et maintenant que les listes ont été établies, ils les rejettent au prétexte qu’elles ne seraient pas équilibrées.  C’est à n’y rien comprendre », a commenté le représentant.

Également invités au débat, l’Iran et la Turquie ont, eux aussi, défendu les « résultats probants » obtenus grâce au processus d’Astana, la délégation iranienne exhortant de plus les États qui ont une influence sur les groupes armés de l’opposition d’obtenir qu’ils cessent les combats et rejoignent le processus politique. 

« À ce moment crucial de la crise syrienne, nous devons tous accepter qu’il n’y ait pas d’autres choix que de coopérer pour faciliter le processus politique syrien », a notamment souligné l’Iran.

Disant, elle aussi, souhaiter la création « le plus vite possible » du comité constitutionnel, la Syrie a souligné pour sa part que le processus devait se faire dans le respect des normes de transparence et de non-ingérence dans les affaires internes de Damas, jugeant « inadmissible » d’imposer des « conclusions » aux travaux du comité: c’est lui qui décide de son propre calendrier et de ses propres échéances, a argué la délégation.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. STAFFAN DE MISTURA, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, qui effectuait sa dernière présentation devant le Conseil de sécurité, a remarqué qu’après sept ans et demi, le conflit syrien dure depuis plus longtemps que la Seconde Guerre mondiale.  Aucun effort n’a pu enrayer la logique belliqueuse malgré plusieurs cessez-le-feu, et le champ de bataille l’a toujours emporté sur les pourparlers de paix, a-t-il déploré. 

Insistant sur l’importance d’un véritable processus politique, M. de Mistura a rappelé que la résolution 2254 avait ébauché les pistes en confiant au peuple syrien le soin de choisir son propre avenir, tout en insistant sur l’importance cruciale d’un cessez le feu.  Depuis, a-t-il indiqué, la donne a pu changer, mais pas suffisamment: des vies ont pu être sauvées en améliorant l’accès humanitaire mais les besoins des civils sont loin d’être satisfaits.  L’opposition a été convoquée et réunie sans parvenir à faire que les parties s’acceptent mutuellement et commencent à négocier.  Et d’autres principes fondamentaux ont aussi été posés, dont la participation des femmes, sans déboucher pour autant sur un véritable mécanisme.  De même, la participation de la société civile a été défendue mais reste systématiquement remise en cause. 

Il a ensuite indiqué que le travail de mise en place d’un comité constitutionnel pour dessiner un projet de réforme constitutionnelle, était pratiquement achevé, mais qu’il faut aller plus loin.  Nous savons tous ce qui est nécessaire pour établir un environnement sûr, calme et neutre en Syrie et y tenir des élections, mais nous n’avons pas été capable d’entamer le travail qui pourra véritablement en faire une réalité. 

« Je regrette profondément ce qui n’a pas pu être réalisé, a déclaré M. de Mistura, et j’estime que le Conseil de sécurité doit partager ce sentiment. »  « Ne vous leurrez pas, a-t-il poursuivi, comme pour moi, le succès de mon successeur dépendra de l’unité du Conseil de sécurité et sa capacité à exercer une véritable pression sur les parties pour les inciter à entamer un dialogue authentique, à négocier, et à faire preuve du compromis nécessaire pour répondre aux griefs du peuple syrien et mettre en œuvre la résolution 2254. » 

Poursuivant, l’Envoyé spécial a rappelé qu’au début 2017, la Fédération de Russie, l’Iran et la Turquie s’étaient engagés, à Astana, à coopérer en faveur de la désescalade, la Jordanie, les États-Unis et la Fédération de Russie ayant fait de même plus tard dans l’année pour répondre à la situation dans le sud-ouest du pays.  Il a évoqué des résultats « mitigés » qui ont néanmoins permis de sauver des vies, notamment grâce à la création d’une zone démilitarisée à Edleb où vivent trois millions de civils.  Il a, en revanche, jugé inacceptable que des dizaines de milliers de personnes aient disparu ou soient toujours derrière les barreaux.  De ce fait, les conditions n’ont jamais été réunies suffisamment longtemps pour pouvoir assurer un cessez-le-feu dans l’ensemble du pays, ni pour mettre en œuvre les mesures de confiance envisagées dans la résolution 2254, a-t-il regretté.

Rappelant que les pourparlers de Genève ont permis d’aboutir à 12 principes essentiels qui présentent une vision d’avenir pour la Syrie, M. de Mistura a souligné que seul un processus guidé par les Syriens permettra de garantir leur concrétisation. 

Il est ensuite revenu sur l’adoption, fin 2017, de la Déclaration de Sotchi qui définit 12 principes censés servir de base à un règlement politique du conflit, à commencer par la formation d’une comité constitutionnel, chargé de rédiger un projet de réforme constitutionnel en tant que contribution au processus politique.  L’Envoyé spécial a insisté sur le fait que même si le comité constitutionnel a la capacité d’être une pierre angulaire clef de tout processus politique, il n’est pas la seule.  De plus, a-t-il ajouté, la Fédération de Russie et les Nations Unies s’étaient entendues sur le fait que l’Envoyé spécial jouirait de la prérogative de finalisation du comité constitutionnel et devait être en mesure d’en choisir les membres sur la base d’une liste soumise par les parties, entre autres, l’objectif étant de déboucher sur la création d’un comité crédible et équilibré.

Depuis Sotchi, M. de Mistura a dit avoir organisé, à cette fin, « un marathon de consultations » avec les Syriens et les partenaires internationaux.  Il a expliqué que le Gouvernement et l’opposition avaient transmis 50 noms chacun, et qu’il avait été accepté d’établir une « liste du milieu » comportant elle aussi 50 noms, pour un total de 150 membres.  Un comité rédactionnel de 45 membres serait également formé en identifiant 15 membres de chaque groupe.

Il y a cinq mois, a-t-il poursuivi, l’ONU a proposé une « liste du milieu » qui visait notamment à assurer une représentation de 30% de femmes au sein du comité constitutionnel.  Cette liste n’a pas plu à l’opposition qui a toutefois accepté de ne pas la remettre en cause pour aller de l’avant.  Le Gouvernement, en revanche, a rejeté cette liste et le principe qu’elle soit proposée par l’ONU et a prévenu qu’il proposerait d’autres noms.  Afin de répondre aux préoccupations de ce dernier, sans « perdre » l’opposition, ni nuire à la légitimité du processus, les Nations Unies ont indiqué qu’elles accepteraient toute proposition « modeste, crédible et équilibrée ».

Au cours des dernières semaines, les efforts diplomatiques se sont intensifiés, débouchant sur la tenue, mardi à Genève, d’une réunion avec les Ministères des affaires étrangères de l’Iran, de la Turquie et de la Fédération de Russie qui ont fait une contribution significative en proposant une liste 50 noms.  Après l’avoir examiné, a fait savoir l’Envoyé spécial, les Nations Unies ont toutefois estimé que ces noms ne répondent pas tous aux critères nécessaires et que des efforts supplémentaires sont nécessaires.  M. de Mistura s’est cependant dit confiant qu’il sera possible de se mettre d’accord sur un seuil de représentativité de 75% et sur les modalités d’une présidence partagée.  Il est également essentiel, a-t-il ajouté, de déterminer le processus de sélection du comité rédactionnel.

Les progrès sont réels: une liste est pratiquement mise sur pied et les règles de procédure se précisent, mais, des efforts supplémentaires sont nécessaires, a-t-il de nouveau insisté, espérant que le comité constitutionnel soit en mesure d’entamer ses travaux au début du Nouvel An. 

Soulignant que le comité constitutionnel devra obtenir la « bénédiction » du Conseil de sécurité et que seules les Nations Unies ont la légitimité et le mandat pour réunir ledit comité, l’Envoyé Spécial a appelé à déployer des efforts parallèles en vue du cessez-le-feu, de la libération des détenus et du rétablissement de la confiance.  Il a dit être profondément préoccupé par les informations crédibles qui se sont intensifiées ces derniers jours, faisant état d’intimidation et de coercition sur certaines personnes qui figurent sur la liste, voire sur leur famille en Syrie.  La création de ce comité constitutionnel sera une nouvelle épreuve de volonté politique, a-t-il souligné.

Au-delà du Gouvernement et de l’opposition, M. de Mistura a ensuite salué les contributions des 519 interlocuteurs syriens, dont 220 femmes, de la société civile, d’ONG et de groupes d’experts, « qui ont eu le courage d’établir des liens au-delà des lignes de conflit ».  Il a exhorté les membres du Conseil de sécurité et les parties au conflit à entendre davantage la voix des civils syriens, à les protéger et à les inclure au processus.  Il a également appelé à appuyer le rôle « crucial » que jouent les femmes dans le cadre du processus politique syrien, citant notamment le Conseil consultatif des femmes, « modèle de rassemblement de Syriens d’origines différentes », pour appuyer le processus de médiation et y contribuer de nouvelles idées. 

Mais par-dessus tout, et au-delà de tous mes efforts, rien ne peut se substituer aux réels efforts des pays exerçant une influence à se parler et à travailler de manière constructive, avec le Conseil de sécurité et au-delà, pour appuyer le processus de l’ONU, a affirmé l’Envoyé spécial.  C’est ce Conseil qui a donné pour mandat à l’ONU, de faciliter le processus politique intersyrien afin d’assurer la mise en œuvre de la résolution 2254, seule façon, a-t-il insisté, pour les Syriens de se prononcer sur leur avenir. 

Staffan de Mistura a conclu en remerciant les membres du Conseil qui, malgré leurs divisions, ont soutenu sa mission.  Il s’est ensuite levé pour serrer la main de chacun d’entre eux, avant d’être chaleureusement applaudi.

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a assuré que Washington reste attachée à la « destruction permanente » de l’État islamique et d’autres groupes terroristes en Syrie et dans le monde.  « Comme nous l’avons dit, nous utiliserons tous les instruments [à notre disposition] pour faire pression en vue d’obtenir le retrait des forces soutenues par l’Iran.  Et les États-Unis continueront de promouvoir une solution diplomatique pacifique à la crise syrienne, dans le respect de la volonté du peuple syrien et conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations Unies », a déclaré le représentant.  Nous continuerons à collaborer avec nos alliés pour lutter contre le terrorisme et avec les États « ayant les mêmes idées », l’ONU et l’opposition syrienne, pour tenter de mettre un terme diplomatique à ce conflit, a-t-il dit.

En janvier, a rappelé M. Hunter, la Fédération de Russie, en étroite consultation avec l’ONU, a publié la Déclaration de Sotchi, qui appelait à la création, à Genève, d’un comité constitutionnel dirigé par l’Envoyé spécial afin de redynamiser les efforts de l’ONU pour mettre en œuvre la résolution 2254, « bloquée par un manque de participation réelle du régime d’Assad ».  Cette Déclaration, a-t-il noté, indiquait « clairement » que les 150 membres du comité constitutionnel auraient une représentation équivalente entre le régime, l’opposition syrienne et les organisations indépendantes, et que ses activités, son calendrier et ses procédures de vote seraient déterminés par l’Envoyé spécial lui-même. 

En aucun cas, le régime syrien ne devait se voir accorder un veto sur la composition ou les procédures du Comité, a poursuivi le représentant.  De son côté, la Fédération de Russie avait convenu que l’ONU aurait le pouvoir de gérer le Comité afin de recueillir l’« imprimatur de légitimité » du Conseil de sécurité « en tant que contribution crédible de Moscou à la paix en Syrie ».  Depuis 11 mois, a déploré la délégation américaine, la « prétendue » initiative russe de Sotchi n’a débouché que « sur une impasse ».  « Nous ne sommes plus qu’à 11 jours de la fin de l’année et nous approchons rapidement de la dernière chance du régime syrien et de la Fédération de Russie de respecter cet engagement », a fait observer le représentant.

Selon lui, en dépit des efforts déployés de part et d’autre, les garants d’Astana n’ont pas réussi, jusqu’à présent, à convaincre le régime d’Assad d’accepter la « liste équilibrée » préparée par l’ONU.  « Un comité qui n’est ni équilibré ni représentatif du peuple syrien, y compris de l’opposition, ne peut être considéré comme légitime », a-t-il tranché.  Les États-Unis sont prêts, avec leurs alliés et partenaires du groupe restreint, à soutenir les efforts menés par l’ONU pour relancer un processus politique et isoler davantage le régime sur les plans diplomatique et économique.  « Soyons clairs: il n’y aura pas d’argent pour la reconstruction; il n’y aura aucune légitimité pour le régime; il n’y aura aucune facilitation du retour des réfugiés, tant que le processus politique n’aura pas avancé », a mis en garde M. Hunter.

Pour M. FRANÇOIS DELATTRE (France), la situation dans le nord-est de la Syrie appelle aujourd’hui toute l’attention du Conseil de sécurité.  Rappelant que la priorité de la France est la lutte contre le terrorisme, et de contrer toute potentielle résurgence dans cette région, il a affirmé que Daech continue d’être une menace au Levant et que l’organisation terroriste peut continuer de s’y appuyer sur un territoire réduit, en particulier en Syrie.  Il a indiqué que les tensions croissantes sur le terrain pourraient fournir des opportunités aux groupes terroristes, avertissant du risque réel d’un basculement dans la violence et d’une reprise d’exactions de grande ampleur.

Le nord-est syrien ne doit pas venir s’ajouter à la longue liste des régions de la Syrie qui ont dû faire face à une catastrophe humanitaire, a-t-il argué, affirmant que de nouvelles hostilités y auraient des conséquences désastreuses.  S’agissant d’Edleb, où « le maintien durable de la cessation des hostilités est essentiel », la France appelle la Fédération de Russie et la Turquie à tout faire pour préserver le calme sur le terrain, « comme elles s’y sont engagées ».

M. Delattre a ensuite indiqué que les États partenaires de la coalition internationale et la France sont en conversation avec Washington sur le calendrier et les conditions de mise en œuvre de la décision de retrait des Forces américaines engagées face à Daech en Syrie, annoncée par le Président américain.  La France, a-t-il indiqué, sera attentive à ce que la sécurité de tous les partenaires soit assurée, y compris les Forces démocratiques syriennes.  Pour M. Delattre, la protection des populations du nord-est de la Syrie et la stabilité de cette zone doivent être prises en compte par les États-Unis pour éviter tout nouveau drame humanitaire et toute résurgence du terrorisme.  Il a tenu à souligner que c’est grâce à l’action de la coalition internationale depuis 2014 et aux forces locales iraqiennes d’une part, kurdes et arabes syriennes d’autre part, que Daech a été affaibli et a perdu pour l’essentiel son emprise territoriale.

Passant ensuite aux efforts « intenses » déployés ces dernières semaines sur le volet politique, il a tout d’abord remercié Staffan de Mistura pour les quatre années d’efforts incessants consacrés à résoudre l’une des crises les plus graves de la période contemporaine.

Il a noté que les dernières semaines ont été l’occasion d’une mobilisation diplomatique « sans relâche » en faveur de la formation d’un comité constitutionnel équilibré et inclusif sous l’égide des Nations Unies, rappelant que l’objectif « clair et réaliste » était de parvenir à la réunion de ce comité avant la fin de l’année.  Il a regretté que les dernières discussions de Genève « n’ont hélas pas permis de trouver une issue favorable » alors même qu’il y avait une unité de vue, « rare sur le dossier syrien », pour avancer sur le volet constitutionnel du processus politique.  Notant que Staffan de Mistura aura « jusqu’au bout », inlassablement, consacré tous ses efforts à la formation de ce comité, M. Delattre a estimé qu’il s’agit de la première contribution essentielle à un processus politique légitime et viable de règlement de la crise syrienne. 

Il a imputé la situation actuelle au régime syrien « qui n’a pas cherché à donner le moindre signe d’engagement, », ainsi qu’à la Fédération de Russie et à l’Iran qui ne sont pas parvenus à le convaincre que c’était dans son intérêt comme celui des Syriens.

Les garants d’Astana, a-t-il déploré, ont proposé au cours des derniers jours une liste non concertée et déséquilibrée, composée de personnalités qu’ils savaient inacceptables et qui mettent en péril toute la crédibilité du futur comité.  Jusqu’au bout, a affirmé le représentant, ces pays ont considéré qu’il leur revenait de déterminer seuls la composition du comité et aux Nations Unies d’en prendre acte sans plus de discussion.  « Ce qui a été présenté à Genève est clairement inacceptable et a clairement été considéré comme tel. »

N’entendant fermer aucune porte, la France appelle à mettre en œuvre, dès janvier, toutes les modalités de la résolution 2254, « qui reste notre seule feuille de route pour permettre un règlement politique de la crise syrienne ».  Pour y parvenir, il faut, selon M. Delattre, réaffirmer le caractère central de la médiation des Nations Unies, ajoutant que la seule issue possible passe par un processus constitutionnel crédible et des élections libres et impartiales, sous supervision de l’ONU et avec la participation de tous les Syriens, qu’ils se trouvent en Syrie ou en dehors. 

Il a insisté sur les mesures de confiance prévues par la résolution 2254, « autant d’actions concrètes indispensables pour établir un environnement sûr et neutre, où tous les Syriens auront une place ».  Il a également insisté sur l’aspect incontournable qu’est la lutte contre l’impunité.

La pleine application de cette résolution impliquera aussi de parvenir à un cessez-le-feu durable et de garantir la protection des populations par l’accès libre et sans entrave de l’aide humanitaire partout en Syrie, a encore souligné le délégué.

« La tragédie syrienne, par sa terrible ampleur humaine mais aussi par ce qu’elle révèle de notre impuissance collective, est et restera l’un des marqueurs de notre génération », a affirmé M. Delattre, avant d’appeler à prendre garde que cette tragédie ne devienne pas « le tombeau des Nations Unies ». 

Alors que les risques restent immenses à Edleb et ailleurs, le représentant s’est dit convaincu qu’il existe aujourd’hui pour la première fois peut-être depuis 7 ans, une étroite fenêtre d’opportunité pour une vraie dynamique politique en vue d’un règlement du conflit syrien.  Mais cette fenêtre d’opportunité risque de se refermer au vu des développements des derniers jours, s’est-il préoccupé.  Il est donc plus important et urgent que jamais que chacun prenne aujourd’hui ses responsabilités, et il revient en particulier aux garants d’Astana de se montrer à la hauteur des engagements qu’ils ont pris et d’en assurer la pleine mise en œuvre. 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a appuyé les efforts de l’ONU pour créer le comité constitutionnel et souligné la nécessité d’en faire une entité crédible, inclusive et acceptable pour tous les Syriens, y compris l’opposition.  « Un comité qui ne remplirait pas ces conditions n’aurait pas de légitimité internationale », a-t-il souligné.  Il a également souhaité qu’au moins 30% des membres du comité et de ses sous-comités soient des femmes, avant d’exhorter l’ONU à ne ménager aucun effort pour que ce comité devienne réalité.  Ce comité n’est pas une fin en soi mais fait partie d’un processus politique plus large sur la base de la résolution 2254 (2015) et du Communiqué de Genève, a-t-il ajouté. 

Le délégué s’est dit ensuite consterné par la situation épouvantable régnant dans les prisons syriennes et a exhorté l’Envoyé spécial à accorder la priorité à la question des personnes disparues et des détenus, en tant que partie intégrante du processus politique.  M. van Oosterom a appuyé le renvoi de la situation en Syrie à la Cour pénale internationale (CPI), avant de juger nécessaire d’amorcer une transition crédible et inclusive avant l’octroi de toute aide de l’Union européenne à la reconstruction de la Syrie.  Enfin, le délégué a indiqué qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit syrien. 

M. TAYE ATSKE SELASSIE MADE (Éthiopie) s’est félicité de la décision de l’Envoyé spécial de faire tout son possible « jusqu’au dernier jour de son mandat » pour former un comité constitutionnel « crédible et inclusif », « pierre angulaire » pour revitaliser le processus politique.  « C’est précisément ce qu’il a fait, en s’engageant dans un dialogue avec les parties syriennes, les garants d’Astana, les membres du « Small Group » et autres parties prenantes, a observé le représentant.  Néanmoins, comme l’a souligné l’Envoyé spécial sortant, « il reste un effort supplémentaire à fournir dans cet effort digne d’un marathon », a-t-il déclaré. 

Le délégué s’est ensuite dit encouragé par les changements sur le terrain, et le calme relatif qui règne actuellement en Syrie, même si des millions d’habitants sont en proie à une crise humanitaire, dont des personnes déplacées et des réfugiés.  Après avoir souhaité que les parties coopèrent de manière constructive avec le nouvel Envoyé spécial, le représentant a appelé les États Membres exerçant une influence sur les acteurs locaux à soutenir eux aussi la paix durable en Syrie.  À cet égard, a insisté l’Éthiopie, l’unité du Conseil de sécurité, « en particulier de ses membres permanents », est cruciale pour réaliser des progrès dans la résolution de cette crise.

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a appelé à la formation d’un comité constitutionnel inclusif et crédible, sous la houlette de l’ONU, dans le respect des normes internationales de transparence.  Il a rappelé qu’il n’y aurait pas de solution militaire à la crise, avant d’affirmer que tous les efforts visant à inspirer la confiance entre les parties au conflit doivent être encouragés.  Tant qu’Edleb est relativement stable grâce à l’accord signé entre la Turquie et la Fédération de Russie, « un espoir demeure », a estimé le représentant, qui a plaidé pour la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a estimé important de continuer de travailler à la création du comité constitutionnel, qui permettra d’établir une nouvelle loi fondamentale pour la Syrie.  Il reste aussi d’avis que ce comité doit être équilibré et inclusif, y compris dans les arrangements concernant sa présidence, la rédaction du projet de constitution et la viabilité du processus électoral.  À cet égard, la délégation apprécie le travail de consultation et les missions de bons offices de l’Envoyé spécial, pour le suivi de la Déclaration finale de Sotchi du 30 janvier 2018 et pour la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Il a également salué le fait que le Secrétaire général ait, selon lui, apprécié la « valeur » du processus d’Astana, notamment auprès de l’opposition syrienne.

Le représentant a aussi estimé que le processus d’Astana avait montré des résultats positifs, notamment en renforçant le cessez-le-feu et en assurant le suivi du mécanisme qui a conduit aux pourparlers de Genève.  Pour autant, le Kazakhstan déplore la poursuite des bombardements et des combats aux alentours des zones démilitarisées, et appelle à accorder plus d’attention aux besoins de plus de 40 000 personnes à Roukban et aux 6 000 personnes piégées à Hajin.  Le représentant s’est aussi inquiété des « nouvelles provocations chimiques et victimes civiles ». 

M. OLOF SKOOG (Suède) a appelé toutes les parties à œuvrer à une désescalade, à faire preuve de retenue et à s’acquitter de leurs obligations en vertu du droit international.  Il s’est dit préoccupé par la poursuite des opérations militaires menées par les forces du Gouvernement syrien et par les annonces faites par la Turquie d’une possible opération militaire dans le nord-est de la Syrie.  Le délégué a souligné la nécessité de progresser sur la voie d’une solution politique, avant de regretter que le comité constitutionnel n’ait pas encore été établi.  Nous faisons pleinement confiance à l’ONU pour que la composition et les règles de procédure de ce comité soient parfaitement légitimes, a-t-il déclaré, ajoutant que le Gouvernement sera pleinement responsable de tout échec dans la création dudit comité.  Le délégué a indiqué que le relèvement du pays est un élément clef d’une paix durable et promis l’assistance de la Suède, à condition qu’une transition politique inclusive soit bien entamée.  Enfin, le représentant a souhaité le renvoi par le Conseil de la situation en Syrie à la Cour pénale internationale. 

Pour M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne), l’accord de cessez-le-feu d’Edleb a permis une avancée positive mais il s’est interrogé sur sa pérennité et la capacité des parties de le respecter.  Il a noté que la situation est aujourd’hui particulièrement inquiétante dans le nord-ouest du pays ainsi qu’au nord-est où la tension reste vive entre la Turquie et les forces kurdes des Unités de protection du peuple (YPG).  Il a exhorté les parties à éviter de prendre des initiatives qui contribueraient à déstabiliser davantage la Syrie. 

Déplorant que le processus politique n’ait pas encore pris racine, et que le comité constitutionnel n’ait pas encore été créé, le représentant a souligné qu’il n’y aura pas de règlement militaire du conflit.  Il faut viser un accord politique intrasyrien comme l’a souligné l’Envoyé spécial, a-t-il affirmé.  Il a exhorté les garants d’Astana à honorer leurs engagements et à protéger les civils, soulignant que toute solution politique doit se faire dans le cadre de la résolution 2254.  Il a appelé à créer le comité constitutionnel sans plus tarder et à prendre des mesures pour engager une transition politique négociée, appelant les autorités syriennes à faire preuve de bonne foi et à négocier sans condition préalable. 

M. HAITAO WU (Chine) a déclaré que ces derniers mois, la situation avait bien progressé en Syrie, avec les rencontres entre l’Envoyé spécial et les garants du Processus d’Astana.  Il est à souhaiter que de tels échanges se poursuivent dans le contexte où « le peuple syrien aspire à la paix », a-t-il dit.

Le représentant a également déclaré qu’alors que le mémorandum d’accord sur Edleb avait permis un cessez le feu et la réalisation des progrès politiques, la communauté internationale, à savoir les Nations Unies et le Conseil de sécurité, se doit de soutenir ce nouvel élan, notamment en renforçant sa coopération et ses discussions avec le Gouvernement syrien. 

Il a également appelé le Conseil de sécurité à maintenir son unité et parler d’une seule voix pour pousser au règlement politique de la crise.  Parallèlement, la lutte contre les groupes reconnus comme terroristes par le Conseil de sécurité, doit se poursuivre, notamment pour éviter que ces entités ne perturbent le processus politique engagé. 

S’il a pris note que les garants d’Astana ont tout mis en œuvre pour veiller à l’organisation de la toute première réunion du comité constitutionnel, M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a toutefois constaté que la situation est actuellement dans l’impasse.  Si elle est à ce point « épineuse », c’est d’abord parce que chaque partie veut servir ses intérêts, a estimé le représentant, qui a souhaité que la troisième liste de noms proposés ne s’écarte pas de l’objectif commun de constituer un comité constitutionnel crédible.  Il a donc encouragé l’Envoyé spécial à veiller à ce que la composition de cet organe fasse l’objet d’un consensus entre les trois parties qui doivent y siéger.  Par ailleurs, le représentant a considéré que la coopération entre les principaux alliés des parties nationales au conflit est cruciale pour le développement futur de la Syrie.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué les développements récents concernant la formation d’un comité constitutionnel en Syrie, une évolution positive qu’il a attribuée en grande partie aux efforts de l’Envoyé spécial pour le pays et à l’esprit de compromis des garants du processus d’Astana.  Le représentant a estimé que, pour contribuer efficacement à la paix, le futur comité constitutionnel devait avant tout être représentatif de tous les segments de la société syrienne, y compris les femmes, et être régi par des principes de fonctionnement « transparents et démocratiques ».  Il a espéré que le futur comité puisse ainsi contribuer à l’élaboration d’une nouvelle Constitution et ouvre la voie à des élections libres, sous la supervision de l’ONU et dans le plein respect de la souveraineté du pays. 

Pour y parvenir, le représentant a jugé important de prendre des mesures préalables pour instaurer un climat de confiance, y compris davantage d’efforts pour identifier les personnes disparues, remettre aux familles les dépouilles des défunts et libérer les détenus et personnes disparues.  Il a également insisté sur l’importance de garantir l’accès des victimes à la justice pour les « crimes atroces » commis durant le conflit.  Enfin, le représentant a appelé le Conseil à s’assurer du maintien du cessez-le-feu à Edleb, dans le cadre de l’accord conclu entre la Fédération de Russie et la Turquie en septembre, afin notamment de prévenir une « nouvelle tragédie humaine ».

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a regretté l’absence de progrès suffisants sur le front constitutionnel, notant qu’il ne reste plus que quelques jours avant la date butoir de fin de décembre imposée par le Président Putin lui-même.  Elle a exhorté le régime d’Assad à redoubler d’efforts pour atteindre cet objectif.

À l’instar de la France, la représentante a estimé que la liste proposée par les garants d’Astana était « déséquilibrée », en appelant à des consultations supplémentaires.  Alors qu’approche le troisième anniversaire de la résolution 2254, ce texte reste le meilleur accord obtenu à ce jour au Conseil.  Tout en reconnaissant que la communauté internationale dans son ensemble aurait pu avancer d’avantage, elle a estimé que l’échec revient avant tout au Gouvernement syrien, l’accusant d’échouer à protéger son peuple et de refuser d’œuvrer à la mise en œuvre de la résolution 2254. 

Le problème central ici, c’est l’autorité syrienne qui refuse de traiter des griefs légitimes du peuple Syrien: c’est ainsi que le conflit a commencé et cela en demeure un élément central, a affirmé la représentante.  Mais quoiqu’il se passe sur place, quelles que soient les modalités provisoires, la Syrie ne verra pas de reconstruction, ni de réinsertion internationale tant que le processus politique n’aura pas avancé.  Et une telle situation n’aidera pas Damas à gouverner, ni à répondre aux aspirations légitimes du peuple syrien.  Sans gouvernement véritablement représentatif, a-t-elle insisté, il n’y aura jamais de fin aux souffrances des Syriens.

Saluant par ailleurs les récents progrès importants réalisés sur le terrain face à Daech, grâce à la coalition, elle a appelé à ne pas perdre de vue la menace que ce groupe continue de faire peser.

M. VASSILY A.  NEBENZIA (Fédération de Russie) a regretté que plusieurs membres du Conseil de sécurité ne tiennent pas compte des efforts engagés par les garants d’Astana pour former le comité constitutionnel.  Il a souligné que les listes du Gouvernement et de l’opposition avaient été communiquées à l’Envoyé spécial dès l’été dernier.  Et le 18 décembre, au cours de la réunion à Genève, Moscou, Téhéran et Ankara sont tombés d’accord pour convoquer la première session du comité constitutionnel syrien à Genève au début 2019.  Il s’est dit convaincu que ces mesures poseront les bases d’un processus de paix stable, avant de remercier M. Staffan de Mistura de sa contribution unique.  Notant que « certains ne sont pas satisfaits des résultats de cette collaboration russo-turco-iranienne », il a critiqué le fait que ceux-ci se plaignaient de l’absence de comité, et que maintenant que les listes ont été établies, ils les rejettent au prétexte qu’elles ne seraient pas équilibrées.  « C’est à n’y rien comprendre », a commenté le représentant.

Soulignant la nécessité de régler la crise humanitaire en Syrie, M. Nebenzia a rappelé que la levée des sanctions imposées par certains pays à la Syrie n’était envisageable pour eux que lorsqu’il y aurait des progrès dans le dossier syrien.  « Maintenant que c’est le cas, nous espérons qu’ils ne reviendront pas en arrière », a mis en garde la délégation russe.  La situation en Syrie a, selon elle, « changé pour le mieux » et des mesures positives ont été observées de la part des États voisins qui veulent normaliser leurs relations avec Damas. 

Revenant à la question de la formation du comité, le représentant a argué que la liste qui sera légitime ne sera pas celle fournie par le « Small Group », mais celle qui sera établie par Damas et l’ensemble des parties syriennes.  « Nous sommes convaincus que le dernier mot revient aux Syriens eux-mêmes », a-t-il insisté en conclusion.

M. JUAN MARCELO ZAMBRANA TORRELIO (Bolivie) a salué l’amélioration tangible de la situation sur le terrain en Syrie, au cours des dernières mois, grâce aux efforts des trois garants du processus d’Astana, qui ont notamment permis d’établir des zones de désescalade, en plus des accords bilatéraux conclus entre la Fédération de Russie et la Turquie, ainsi qu’entre la Fédération de Russie et les Etats-Unis.  Plus récemment, l’accord signé entre Moscou, Istanbul, Berlin et Paris, le 27 octobre dernier, a selon lui permis d’améliorer l’accès humanitaire aux populations dans le besoin. 

Le représentant a en outre salué les efforts de l’Envoyé spécial, dans le cadre des pourparlers inter-syriens de Genève, dont la dernière itération a consacré la volonté des parties de s’engager sur la voie d’un processus politique.  Le délégué a espéré que ces évolutions positives puissent se traduire prochainement par l’établissement d’un comité constitutionnel, en vue de consolider la « paix relative qui prévaut actuellement sur le terrain ».

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a accueilli avec préoccupation l’annonce du Président turc, le 12 décembre 2018, de lancer de nouvelles offensives en Syrie, contre les combattants kurdes des Unités de protection du peuple (YPG), qualifiés d’organisation terroriste séparatiste par Ankara.  La Côte d’Ivoire exhorte les autorités turques à privilégier la voie des négociations, gage d’une stabilité durable dans la région, afin de prévenir une nouvelle flambée de violences qui occasionnerait des déplacements massifs de populations et aggraverait la situation humanitaire déjà alarmante. 

Par ailleurs, conformément à la résolution 2254 (2015), elle appelle les parties syriennes à créer les conditions permettant aux réfugiés et aux personnes déplacées de retourner, de leur plein gré, en dignité et en toute sécurité, dans leur région d’origine, et aux régions touchées par le conflit de se relever.

La délégation ivoirienne souscrit à l’appel lancé à Istanbul, les 27 et 28 octobre 2018, au cours du Sommet quadripartite, relatif à la mise en place effective du comité constitutionnel et à la rédaction d’une nouvelle constitution, d’ici à la fin de l’année 2018.  Ce comité constitutionnel permettra, selon le délégué, de relancer le processus politique qui se trouve dans l’impasse et d’ouvrir la voie à l’organisation d’élections libres et impartiales, sous la supervision des Nations Unies.

M. BACHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a déclaré qu’il est impossible de réduire la « crise syrienne » à quelques « remarques de forme » prononcées au Conseil de sécurité, lesquelles passent sous silence les agissements de certains États pour déclencher cette crise dans l’espoir, a-t-il accusé, de servir leurs intérêts géopolitiques au Moyen-Orient.  Il s’en est tout particulièrement pris au Qatar et à l’Arabie saoudite, qui auraient dépensé, selon lui, 137 milliards de dollars pour détruire son pays, et auxquels il a imputé l’apparition de l’État islamique en Iraq et en Syrie.  Il est temps que certains cessent de se « dissocier » de la réalité et renoncent à leurs illusions, en comprenant qu’ils n’ont rien obtenu en « parrainant » le terrorisme, a exhorté le représentant. 

M. Ja’afari a réitéré la disposition du Gouvernement syrien à prendre part à une solution politique fondée sur le principe selon lequel le peuple syrien est le seul à pouvoir décider de son propre avenir.  L’aboutissement d’une telle solution suppose aussi une coopération étroite avec le Gouvernement syrien et une mobilisation de la communauté internationale pour l’aider à mettre fin au terrorisme qui sévit encore dans le pays.  Près de huit ans après la fin de cette « sale guerre imposée à son pays », M. Ja’afari a jugé qu’il était justifié de s’intéresser à l’écart entre les discours et les actes de certains États Membres, résumant son propos par le proverbe suivant: « Entre dire et faire, il y a la mer! ».  Il a fustigé Israël, mais aussi l’opposition syrienne, responsable d’après lui de l’apparition des organisations terroristes en Syrie.  Le délégué a alors énuméré une liste de dirigeants de l’opposition « dite » modérée, qui auraient été « génétiquement modifiés dans les laboratoires étrangers » pour peser de tout « leur poids militaire, politique et médiatique » sur le conflit en cours en Syrie. 

La délégation s’est dite ensuite soucieuse que soit mis sur pied le comité constitutionnel « le plus vite possible », en rappelant cependant que cela devait être fait dans le respect des normes de transparence et de non-ingérence dans les affaires internes de Damas.  Il est « inadmissible », a-t-il dénoncé, d’imposer des « conclusions » aux travaux du comité: c’est lui qui décide de son propre calendrier et de ses propres échéances, a argué M. Ja’afari.  Son pays, a-t-il assuré, a toujours fait preuve de sérieux pour promouvoir un processus politique, quitte à ce que la lutte contre le terrorisme soit « la première étape » d’un tel processus.  Se félicitant de constater que la reconstruction a déjà été lancée par les Syriens fidèles à leur patrie, le représentant a, en conclusion, encouragé tous les Syriens à adhérer à la recherche d’une solution « dans la patrie », « et non à Istanbul ou à Washington », en insistant à nouveau sur le fait que toutes les questions d’ordre constitutionnel relèvent strictement de la souveraineté syrienne. 

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a déclaré que, depuis le début du conflit en Syrie, son pays avait toujours soutenu qu’il n’y a pas d’autre solution, que politique, au différend.  Or aujourd’hui, des progrès ont été faits en ce sens.  Dans ce contexte, la communauté internationale doit faciliter ce processus, et non en dicter le déroulement, a estimé le représentant. 

C’est sur cette base, et en tant qu’un des trois garants du processus d’Astana que l’Iran attache une grande importance au comité constitutionnel et qu’il considère qu’il s’agit là, d’une étape majeure du processus politique en Syrie.  Dans ce contexte, et alors que des progrès ont été faits dans l’établissement de ce comité, « il faut les poursuivre, mais avec patience, prudence et persévérance, tout en gardant à l’esprit qu’à ce moment crucial de la crise syrienne, nous devons tous accepter qu’il n’y ait pas d’autres choix que de coopérer pour faciliter le processus politique syrien », a souligné le représentant. 

Il faut aussi, a appelé le délégué, que tous les États qui ont une influence sur les groupes armés de l’opposition obtiennent qu’ils cessent les combats et rejoignent le processus politique.  « Cela est crucial pour avancer et obtenir des gains dans ce processus », a conclu le représentant, qui a par ailleurs appelé à la levée des sanctions pour permettre le redémarrage de l’économie syrienne et l’assistance humanitaire. 

M. RAUF ALP DENKTAŞ (Turquie) a dit son appréciation pour le travail sans relâche abattu par M. de Mistura tout au long de son mandat pour résoudre la crise syrienne.  Il a ensuite affirmé que depuis le début du conflit, son pays avait toujours soutenu que l’option militaire ne permettrait pas à la Syrie de sortir de la crise.  Cette dernière ne pourrait être résolue que par un dialogue politique, sous la médiation des Nations Unies et en ligne avec la résolution 2254(2015), a-t-il insisté.

En tant qu’un des garants d’Astana, la Turquie considère que sans être une alternative au Processus de Genève « qu’il ne fait que compléter », le Processus d’Astana avait permis d’obtenir des résultats probants.  Celui-ci a notamment permis d’obtenir un cessez-le-feu, la libération de prisonniers et de travailler à la finalisation du comité constitutionnel.  Avec les autres garants, la Turquie déploiera d’autres efforts pour faire en sorte que ce comité tienne sa première réunion en janvier 2019, a assuré le représentant avant d’appeler la communauté internationale à appuyer ce Processus.

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