8353e séance – matin
CS/13506

Échanges très vifs au Conseil de sécurité sur l’application du régime de sanctions frappant la République populaire démocratique de Corée

« Mensonges », « tricherie », « position destructrice ».  Les échanges entre les délégations des États-Unis et de la Fédération de Russie ont été d’une rare acrimonie aujourd’hui devant le Conseil de sécurité s’agissant de l’application du régime de sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC), alors que l’unité du Conseil avait jusqu’à présent prévalu sur ce sujet. 

À l’entame de cette séance, convoquée à la demande des États-Unis, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques, Mme Rosemary DiCarlo, a noté les récents développements positifs enregistrés dans la péninsule coréenne, tels que l’apaisement des tensions militaires, la réouverture des canaux de communication ou bien encore le récent sommet à Singapour entre les dirigeants de la RPDC et des États-Unis. 

Ces développements positifs devraient contribuer à un environnement propice à une dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule coréenne, a-t-elle espéré, en rappelant la gravité de la situation il y a encore un an.  Enfin, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques a encouragé tous les États Membres à pleinement mettre en œuvre les résolutions du Conseil. 

Cette question a été au cœur des échanges très vifs entre la délégation des États-Unis et celle de la Fédération de Russie, la première accusant ce pays de « tricher » et de s’employer « à court-circuiter » les sanctions, alors que la Russie avait voté à 11 reprises en faveur de ce régime.  La RPDC est frappée par le régime de sanctions le plus sévère au monde, ses exportations de pétrole étant notamment soumises à des quotas. 

« La Russie mène une campagne auprès du Conseil pour dissimuler les violations des sanctions commises par ce pays et d’autres États », a également affirmé la représentante américaine, qui a dit disposer de preuves « flagrantes et systématiques ».  Elle a aussi avancé que le Patriote, un navire russe, a transféré illégalement des produits pétroliers à un navire de la RPDC, plus tôt, cette année. 

La représentante américaine a accusé la Russie d’avoir fait pression sur le Groupe d’experts chargé d’assister le Comité des sanctions établi en vertu de la résolution 1718 (2006) pour que les preuves détaillées de violations russes des sanctions contre la RPDC soient effacées de leur dernier rapport, alors même que ces preuves figuraient dans une version initiale du document. 

Cette entrave était si « flagrante », a déclaré la représentante, que les États-Unis n’ont eu d’autre choix que celui de s’opposer à la publication du rapport.  Enfin, s’interrogeant sur les raisons pour lesquelles la Russie souhaite une suppression des sanctions, la déléguée a avancé que ce pays cherche à ce que le Transsibérien soit à terme connecté à la RPDC, dans le but d’étendre ses activités portuaires. 

Le délégué russe a vivement répondu à la déléguée des États-Unis, en accusant ce pays d’avoir transformé cette séance consacrée à la RPDC « en séance consacrée à la Russie » et de vouloir faire du Conseil de sécurité des Nations Unies « le Conseil de sécurité des États-Unis ».  Mon pays n’a pas fait pression sur le Groupe d’experts, a-t-il tranché. 

Le délégué russe a déploré que ce dernier soit devenu « l’otage de Washington » et jugé impartial son premier rapport.  Il a accusé la délégation des États-Unis d’avoir empêché la communication du dernier rapport au Conseil, qui prenait en compte les observations de la Russie, en l’exhortant à le publier, puisqu’il n’existe pas d’autres versions.  « La balle est dans votre camp. »

S’agissant du bateau russe Patriote, le Groupe d’experts a conclu qu’il n’a pas violé le régime de sanctions, pas plus que les entreprises russes, a-t-il expliqué.  « Qui répand des mensonges? »  Enfin, le représentant russe a invité le Conseil à contribuer au rapprochement des deux Corées par des mesures adaptées, en fustigeant la position « destructrice » des États-Unis. 

Si le délégué de la France a demandé que le rapport du Groupe d’experts soit publié rapidement, exprimant son « extrême vigilance » vis-à-vis de toute tentative d’« instrumentalisation », son homologue du Kazakhstan a jugé crucial que tous les faits présentés soient rigoureux et avérés.  Le représentant chinois, qui a affirmé que son pays ne permettrait jamais à ses citoyens et entreprises de violer les résolutions du Conseil, a, comme nombre de délégations, appelé à la préservation de l’unité du Conseil.

Enfin, alors que les leaders de la RPDC et de la République de Corée se rencontrent demain, le délégué de ce dernier pays a estimé que le « tournant » récent constaté dans la péninsule a pu être pris grâce à une combinaison d’« outils diplomatiques » et à un Conseil « uni ».  « La mise en œuvre scrupuleuse des sanctions et le dialogue sont des éléments qui se renforcent mutuellement, comme les deux roues d’une bicyclette tournant à l’unisson », a-t-il conclu. 

NON PROLIFÉRATION/RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE

Déclarations

« Il y a eu de récents développements positifs s’agissant des programmes nucléaire et balistique de la RPDC ces derniers mois », a déclaré Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques.  Le 20 avril, a-t-elle indiqué, la RPDC a annoncé une cessation immédiate de ses essais nucléaires et de ses tirs de missiles d’une certaine portée.  Elle a signalé que le pays aurait également démantelé son site d’essais nucléaires de Punggye-ri le 24 mai, sa structure de lancement de missile de Iha-Ri également en mai et son site de lancement satellitaire de Sohae en juillet, même si aucun expert international n’a pas pu vérifier ces activités. 

Au nombre des signes attestant de la poursuite d’une activité nucléaire et balistique de la RPDC, Mme DiCarlo a indiqué que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) n’est toujours pas en mesure de se rendre dans le pays et de vérifier la déclaration de la RPDC comme prévu par l’accord de garanties.  Dans son rapport soumis le 20 août, le Directeur général de l’AIEA a indiqué avoir observé des signes attestant de l’opération continue d’un réacteur de production de plutonium, d’un laboratoire radiochimique et d’une installation supposée d’enrichissement d’uranium à Yongbyon.

Elle a salué l’engagement du Chef de la RPDC de parvenir à une dénucléarisation de la péninsule coréenne et espéré que ces développements positifs, ainsi que les sommets importants entre les leaders des États-Unis et de la RPDC, contribueront à un environnement propice à la promotion d’une paix durable et à une dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule, conformément aux résolutions du Conseil. 

Rappelant qu’il y a un an la situation dans la péninsule était la plus périlleuse qui soit pour la paix et la sécurité internationales, Mme DiCarlo a estimé qu’il y avait eu des progrès s’agissant de la restauration de la confiance, de l’apaisement des tensions militaires et de la réouverture des canaux de communication.  Ce sont pour elle de bonnes bases pour parvenir à des avancées tangibles sur les questions clefs.  « Nous encourageons tous les États Membres à pleinement mettre en œuvre les résolutions du Conseil. »

Mme DiCarlo a indiqué que, selon la résolution 84 (1950) du Conseil, l’appui militaire fourni par les pays à la République de Corée doit être mis à disposition du « commandement unifié des États-Unis » qui, selon ce texte, est autorisé à utiliser le drapeau des Nations Unies au cours de ses opérations, aux côtés des drapeaux des nations participantes.  Le 25 juillet 1950, les États-Unis ont établi ce commandement unifié et utilisé pour la première fois le nom de commandement des Nations Unies.  Cependant, ce nom de « commandement des Nations Unies » ne veut pas dire que c’est une opération ou entité de l’ONU, a-t-elle expliqué.  « De plus, il n’a pas été créé en tant qu’organe subsidiaire du Conseil et n’est pas financé par le budget de l’ONU. »

Enfin, la Secrétaire générale adjointe a indiqué que le Chef de l’ONU compte œuvrer dans les prochains jours à une dénucléarisation de la péninsule et espère que le sommet intracoréen imminent et le sommet prévu RPDC-États-Unis contribuera à cet objectif. 

« Les sanctions sont simplement des mots sur une page, sauf si elles sont mises en œuvre », a déclaré Mme Nikky R. Haley (États-Unis).  Or, a-t-elle ajouté, si les sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ne sont pas mises en œuvre, il faut être en mesure de comprendre pourquoi, en particulier l’interdiction des importations et exportations en provenance et en direction du pays qui touche les produits pétroliers, limités à hauteur de 500 000 barils par an. 

La représentante a rappelé que la Fédération de Russie avait voté en faveur de ce régime de sanctions à 11 reprises.  Cependant, a-t-elle ajouté, la Russie demande aujourd’hui d’assouplir ces sanctions.  Pourquoi le pays fait-il marche arrière? s’est-elle interrogée.  Selon elle, la réponse est simple: la Russie « triche » et « s’emploie à court-circuiter » le régime de sanctions contre la RPDC.  La Russie, a-t-elle également affirmé, mène une campagne auprès du Conseil pour dissimuler les violations des sanctions commises par ce pays et d’autres États.  La représentante a dit disposer de preuves « flagrantes et systématiques » de ces violations.

La RPDC triche aussi, a poursuivi Mme Haley, surtout par le transbordement de marchandises interdites, en particulier le pétrole.  Le Patriote, un navire russe, a ainsi été filmé en train de transférer des produits pétroliers à un navire de la RPDC plus tôt cette année.  La représente a mentionné l’existence de 148 cas similaires de navires pétroliers fournissant des produits par transbordement illégal de navire à navire.  Il s’agit d’un dépassement de plus de 100% du quota de barils défini en 2018 pour le pays, a-t-elle déploré.

Quand nous avons demandé à l’ONU de faire inscrire sur la liste des violations des sanctions du Comité des sanctions des exemples comme celui du Patriote, a dénoncé la représentante, la Russie s’y est opposée.  Et lorsque la RPDC a commencé à fabriquer des missiles intercontinentaux, la Russie a aussi fait obstacle à l’application des sanctions pour limiter ce programme, s’est-elle encore insurgée. 

Mme Haley a accusé la Russie d’avoir fait pression sur le Groupe d’experts chargé d’assister le Comité des sanctions pour que les preuves détaillées de violations russes des sanctions contre la RPDC soient effacées de leur dernier rapport, alors même que ces preuves figuraient dans une version initiale du document.  Cette entrave était si « flagrante », a déclaré la représentante, que les États-Unis n’ont eu d’autre choix que celui de s’opposer à la publication du rapport.

La représentante a encore appelé à s’interroger sur les raisons pour lesquelles la Russie souhaite une suppression des sanctions.  Selon elle, le pays agit de la sorte pour que le Transsibérien soit à terme connecté à la RPDC, dans le but d’étendre les activités portuaires russes.  Dans ce contexte, Mme Haley a appelé à ne pas mettre fin aux sanctions contre la RPDC et a sommé la Russie de cesser de violer continuellement ces dernières.

M. OLOF SKOOG (Suède) a indiqué que l’unité du Conseil est cruciale pour parvenir à une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la péninsule coréenne.  Le Conseil doit rester soudé dans la mise en œuvre des sanctions, a-t-il dit.  Des violations préoccupantes du régime de sanctions se poursuivent, a-t-il noté, en louant le travail du Groupe d’experts et en fustigeant toute interférence dans ses activités.  M. Skoog a encouragé la poursuite du dialogue intracoréen et souligné l’importance du dernier sommet RPDC-États-Unis à Singapour.  L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) doit jouer un rôle dans la vérification de la dénucléarisation de la péninsule coréenne, a-t-il déclaré.  « Seule une diplomatie créative permettra de régler durablement la situation. »  Enfin, soulignant la gravité de la situation humanitaire en RPDC, le délégué de la Suède a demandé une meilleure mise en œuvre des exemptions humanitaires aux sanctions prévues par les résolutions du Conseil. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) s’est félicité que les évolutions des derniers mois ont contribué à réduire les tensions, citant la relance du dialogue intercoréen et l’intensification des échanges entre toutes les parties.  Il reste selon lui beaucoup à faire, a-t-il nuancé, en rappelant que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) avait indiqué, le mois dernier, que la Corée du Nord poursuivait son programme nucléaire, tout en violant les sanctions et les contournant en exploitant les lacunes du système ou des dispositifs de certains États, quand ce n’est pas leur manque de volonté.  « Il ne s’agit pas seulement des sanctions dans le domaine du pétrole: l’ensemble des sanctions est concerné, du charbon au secteur financier », s’est alarmé le délégué.

Aussi le Conseil de sécurité a-t-il besoin d’une mise en œuvre « stricte, entière et à l’unisson » des sanctions qui, plus que jamais, sont essentielles pour maintenir la pression sur la RPDC.  En outre, un suivi rigoureux des agissements nord-coréens est nécessaire, par le biais du Comité des sanctions et des experts qui lui sont rattachés.  La France a, à cet égard, regretté le blocage du dernier rapport du Groupe d’experts, chargé de surveiller la mise en œuvre des mesures de sanctions, et formé le souhait qu’il soit publié rapidement, exprimant son « extrême vigilance » vis-à-vis de toute tentative d’« instrumentalisation ».  M. Delattre a de plus considéré qu’il fallait être prêt à renforcer les sanctions au besoin et soutenir les discussions en cours sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne.

M. MA ZHAOXU (Chine) a souligné les changements positifs intervenus ces dernières années dans la péninsule coréenne, notamment la reprise du dialogue entre les États-Unis et la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Le représentant a appelé les deux pays à s’appuyer sur cette reprise du dialogue pour parvenir à une solution politique à la crise.  Il s’est également félicité des efforts de la RPDC pour démanteler son programme nucléaire.

Au vu de l’évolution de la situation depuis 2016, le représentant a appelé à respecter l’objectif de la dénucléarisation de la péninsule coréenne, condition selon lui sine qua non de la paix durable dans la zone.  À cette fin, il a estimé que la fin des tests balistiques et la clôture des sites balistiques en RPDC constituaient un pas en avant pour restaurer la confiance entre les parties et parvenir à cette dénucléarisation.  Le représentant a également appelé les parties à persévérer pour parvenir à une paix durable dans la péninsule, ajoutant que le recours à la force n’apporterait rien d’autre que des conséquences « désastreuses ». 

En tant que voisin proche de la péninsule, le représentant a estimé que la Chine maintenait des relations « responsables » avec les parties concernées, qui ont selon lui eu une influence positive dans la zone.  Il a plaidé en faveur de l’initiative de « suspension contre suspension » pour résoudre la question, à savoir, d’une part, la dénucléarisation de la péninsule par la RPDC, et d’autre part, la suspension des exercices militaires des États-Unis et de la Corée du Sud. 

S’agissant des transferts illégaux de pétrole vers la RPDC, le représentant a affirmé que la Chine ne permettrait jamais aux citoyens chinois et aux entreprises du pays de violer les résolutions du Conseil de sécurité, même si cette mesure coûte cher à son pays.  Enfin, il a espéré que les États-Unis et la RPDC maintiendront le dialogue actuel, jusqu’à ce que des résultats tangibles soient obtenus.  Il a également appelé le Conseil à faire preuve d’unité sur cette question. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé qu’il y a un an la situation dans la péninsule coréenne était extrêmement tendue et faisait craindre un affrontement militaire.  Depuis, les tensions sont allées en diminuant, a-t-il noté, en souhaitant que le sommet intracoréen de demain soit fructueux.  Il a exhorté le Conseil à rester uni dans la mise en œuvre de ses sanctions, loué le professionnalisme du travail accompli par le Groupe d’experts et jugé très préoccupantes les atteintes à l’unité du Conseil s’agissant de ce Groupe d’experts.  S’il est bien conscient des changements à apporter aux procédures de travail du Groupe d’experts, le délégué du Koweït a indiqué que, tant que ces changements ne seront pas apportés, il n’y a pas d’autre choix que de suivre les procédures existantes. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a appelé les membres permanents du Conseil de sécurité à faire preuve d’unité sur la question de la RPDC.  À ce titre, il a demandé à ce que les travaux du Groupe d’experts chargé d’assister le Comité des sanctions 1718 soient menés de manière « consensuelle ».  S’agissant des rapports du Groupe d’experts, le représentant a estimé qu’il convenait de respecter les informations fournies dans ces documents, tout en prenant en compte les préoccupations spécifiques de certains États Membres concernés.  Le représentant a rappelé que la position de son pays demeurait en faveur de la dénucléarisation de la RPDC.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a rappelé que l’unité du Conseil est cruciale sur ce dossier et indiqué qu’une chance de succès existe pour parvenir à un règlement de la situation dans la péninsule coréenne.  C’est pourquoi, je ne comprends pas les récentes atteintes portées à l’unité du Conseil, a-t-elle dit.  « Il n’y a pas d’équivalence entre la possession d’armes nucléaires et les manœuvres militaires conjointes dans la péninsule coréenne. » Elle s’est félicitée des assurances prodiguées par la délégation de la Chine aujourd’hui s’agissant de la mise en œuvre des sanctions.  Il faut une surveillance accrue des exportations de pétrole et de charbon de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), dans la mesure où les plafonds fixés par les résolutions du Conseil ont probablement été dépassés, a-t-elle dit. 

Mme Pierce a exhorté les cinq membres permanents à veiller à ce que les sanctions soient respectées.  Le rapport du Groupe d’experts doit être présenté dans sa version originale, a-t-elle déclaré, en soulignant l’importance cruciale de l’indépendance dudit Groupe pour la bonne mise en œuvre des sanctions.  Enfin, louant les contacts étroits noués entre la RPDC et les États-Unis, Mme Pierce a déclaré que la RPDC n’a pas encore pris les mesures décisives pour parvenir à une dénucléarisation de la péninsule coréenne. 

M. LEON H. KACOU ADOM (Côte d’Ivoire) s’est félicité des signes d’apaisement récemment observés dans la péninsule coréenne, qui témoignent selon lui du « nouvel état d’esprit » des principaux acteurs de la crise.  Pour le représentant, cette dynamique positive a culminé avec le sommet historique, organisé le 12 juin dernier à Singapour, entre les leaders des États-Unis et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Il a en outre dit attendre avec intérêt les conclusions du troisième sommet en moins d’un an, prévu du 18 au 20 septembre prochain, entre les dirigeants des deux Corées.  Le représentant a appelé les deux pays à maintenir le niveau de dialogue actuel, en vue de la signature d’un traité de paix entre les deux pays, qui constituerait selon lui un pas important vers la dénucléarisation de la péninsule.  Il s’est également dit satisfait de l’ouverture, le 14 septembre, d’un bureau de liaison commun, qui constitue pour lui un jalon important vers l’ouverture réciproque de représentations diplomatiques.

Toutefois, le représentant s’est dit préoccupé par l’impasse dans laquelle se trouve le Comité des sanctions, suite à la présentation du rapport à mi-parcours du Groupe d’experts chargé d’assister le Comité.  Ce rapport dont la publication se fait attendre, a-t-il poursuivi, est aujourd’hui source de dissensions entre certains membres du Comité.  Pour lui, le principal facteur de blocage est lié au calcul du quota de pétrole que la RPDC est autorisée à importer chaque année.  Le représentant a estimé que tous les membres devaient s’accorder par consensus sur cette question, de nature selon lui à freiner la mise en œuvre de la résolution 2397 (2017), la situation sur le terrain et les espoirs de dénucléarisation.  Il a ainsi appelé le Conseil à retrouver l’unité qui a longtemps prévalu entre ces membres sur la question.

Par ailleurs, le représentant s’est dit préoccupé par les informations faisant état de violations récurrentes par la RPDC des sanctions du Conseil, au travers d’opérations illicites de transbordement de produits pétroliers, de commerce illicite d’armes et de transactions financières illégales.  Il s’est également inquiété du prolongement des délais d’examen des exemptions à caractère humanitaire.  Le représentant a appelé à trouver le « parfait équilibre » entre la mise en œuvre des sanctions et les impératifs humanitaires, compte tenu de la forte sécheresse qui sévit en RPDC. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est dit très préoccupé par la grave menace à la paix et à la sécurité internationales que représente le programme nucléaire et de missiles balistiques de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  D’après lui, le Conseil de sécurité doit surveiller la situation de près et répondre de façon adéquate à toute violation, où qu’elle se produise.  Il a salué l’unité du Conseil à ce sujet, ainsi que les efforts diplomatiques de haut niveau déployés par les autorités sud-coréennes et américaines. 

Le représentant a également souligné que le régime des sanctions doit servir à amener le Gouvernement nord-coréen à la table des négociations, et qu’il ne doit pas provoquer une détérioration de la situation humanitaire dans le pays. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a vu cette réunion comme une occasion de marquer l’unité du Conseil par rapport à l’application du régime de sanctions des Nations Unies imposé à la RPDC.  « Ces mesures ne peuvent être efficaces que si elles sont appliquées pleinement et de manière honnête par tous les États. »  Le seul objectif de ces sanctions est de limiter les possibilités de financement des activités militaires illégales de la RPDC, a rappelé la représentante, ajoutant que dès qu’une solution politique sera trouvée par rapport au désarmement nucléaire et au programme de missiles balistiques, « ces mesures restrictives pourraient être allégées ».  Mais, pour parvenir à un tel accord politique, la RPDC doit prendre des mesures concrètes qui prouvent sa véritable volonté de dénucléariser, a-t-elle précisé.  Elle a regretté que Pyongyang n’ait toujours pas mis un terme à ses programmes de missiles nucléaires et balistiques et persiste à défier les résolutions du Conseil de manière de plus en plus sophistiquée.  Elle a estimé que, indépendamment de certaines difficultés politiques ou juridiques, tous les États doivent respecter leurs obligations prévues par les résolutions du Conseil de sécurité, ajoutant que la paix dans la péninsule coréenne ne peut se faire que par le dialogue. 

Appuyant également les efforts diplomatiques en cours, la représentante a espéré que le troisième sommet intercoréen, qui commence demain à Pyongyang, permettrait de relancer le dialogue dans la péninsule.  La Pologne soutient pleinement les travaux du Comité 1718 dont « le travail est essentiel pour parvenir à un désarmement total, vérifiable et irréversible dans la péninsule coréenne », mais est « déçue » que le rapport de mi-parcours de son Groupe d’experts n’ait pu être publié à ce jour, et « préoccupée » par le fait qu’un État Membre du Conseil ait activement interféré dans les conclusions de ce rapport après qu’il a été soumis au Comité.  « C’est tout simplement inacceptable », s’est-elle indignée, appelant à préserver l’indépendance et l’impartialité de ce Groupe d’experts.  « On peut ne pas être d’accord avec ses conclusions, mais cela ne doit pas se faire au détriment de l’indépendance du Groupe. »  De manière générale, la Pologne a plaidé pour plus de flexibilité pour les présidents des comités de sanctions et autres organes subsidiaires du Conseil de sécurité, des postes qui sont toujours occupés par des membres non permanents du Conseil.

M. KAREL J.G. VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a assuré du soutien des Pays-Bas aux efforts diplomatiques en cours avec la RPDC.  Il a espéré qu’il sera possible d’aller encore plus loin lors du prochain sommet intercoréen et lors du potentiel second sommet entre les États-Unis et la RPDC.  Parallèlement, il faut maintenir la pression sur la RPDC, a poursuivi le représentant.  Il a estimé qu’il était trop tôt pour parler d’allègement des sanctions et cela aussi longtemps que le pays poursuit ses programmes de missiles nucléaires et balistiques et persiste à chercher à « échapper aux sanctions » en vue de faire avancer ces programmes, mais également tant que certains pays ne respectent pas le régime de sanctions.  À cet égard, il s’est dit préoccupé par l’augmentation marquée des transferts de pétrole de bateau à bateau, ainsi que le recours aux sociétés écrans et aux diplomates nord-coréens pour échapper aux sanctions financières.  Il a également dénoncé les tentatives de la RPDC d’approvisionner certains acteurs au Moyen-Orient en armes et équipements militaires, ajoutant que ces questions devraient alarmer la communauté internationale. 

Compte tenu de ce qui précède, les Pays-Bas exhortent tous les États Membres à pleinement respecter le régime de sanctions des Nations Unies.  En tant que Président du Comité de sanctions 1718, il a assuré qu’il ferait son possible en ce sens.  M. van Oosterom a saisi cette occasion pour souligner l’importance du Comité 1718 et de son Groupe d’experts, rappelant que le régime de sanctions contre la RPDC est désormais le plus vaste et le plus compliqué de tous.  « Les rapports du Groupe d’experts sont la pierre angulaire » de ce régime de sanctions puisqu’ils servent de base à la prise de décisions du Comité et du Conseil de sécurité, a-t-il fait remarquer.  Il est donc important que ces rapports soient rendus publics pour maintenir la pression sur la RPDC, a estimé le représentant.

M. VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a réaffirmé son attachement à la pleine application des résolutions du Conseil de sécurité relatives à la situation dans la péninsule coréenne.  Il a réitéré que les sanctions ne doivent pas être une fin en soi, mais qu’elles doivent servir à rapprocher les parties de la table des négociations, et permettre un dialogue transparent où prime leur volonté.  Le représentant s’est dit préoccupé par le fait que l’imposition de sanctions affecte directement la population de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).

Le délégué a appuyé une solution dialoguée entre les parties qui conduise à la dénucléarisation totale de la péninsule coréenne.  À cet égard, il a salué les progrès réalisés dans le cadre du dialogue intercoréen et la Déclaration de Panmunjon pour la paix, la prospérité et l’unification de la péninsule coréenne du 17 avril 2018, et le rapprochement des familles organisé le 20 août dernier.  Enfin, il a espéré que la rencontre de haut niveau de Singapour entre la RPDC et les États-Unis permettra de conjuguer les efforts en ce sens. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a noté les développements historiques enregistrés récemment dans la péninsule coréenne qui attestent de la pertinence de la voie politique et diplomatique pour régler ce dossier.  « L’unité de ce Conseil doit être préservée pour parvenir à la dénucléarisation de la péninsule », a-t-il lancé.  Appuyant le Comité 1718, il a reconnu la complexité et l’ampleur de la charge du travail du Groupe d’experts assistant ce Comité.  S’il est possible que les conclusions de ce Groupe puissent être source de désaccords entre États Membres, il est crucial que tous les faits présentés soient rigoureux et avérés, a-t-il déclaré.  Il a ainsi exprimé certaines préoccupations s’agissant de certaines données statistiques prises en compte par le Groupe.  Aujourd’hui, la situation dans la péninsule coréenne est beaucoup plus favorable et cela doit nous inciter à nous concentrer sur la promotion de la bonne volonté et de concessions mutuelles, a conclu le délégué. 

M. SELLASSIE (Éthiopie) a appelé toutes les parties à maintenir la dynamique positive des derniers mois.  Selon lui, le Conseil de sécurité doit appuyer ces efforts, notamment dans la perspective de la tenue d’un troisième sommet intercoréen dans les prochains jours.  Face, par ailleurs, aux lacunes dans la mise en œuvre des sanctions du Conseil, le représentant a estimé que les travaux du Groupe d’experts du Comité des sanctions 1718 étaient d’une importance capitale pour veiller à la bonne application des sanctions.  Enfin, le représentant a appelé les membres du Conseil à préserver leur unité sur la question, en vue de parvenir à la dénucléarisation de la péninsule.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a indiqué que la convocation de cette réunion par les États-Unis est une bonne chose.  Mais pourquoi vous opposez-vous à l’adoption d’une déclaration présidentielle pour appuyer les développements positifs dans la péninsule coréenne? a-t-il lancé à la déléguée américaine.  Il a détaillé ces développements, dont l’établissement d’un bureau de liaison intercoréen, tout en notant les difficultés - « et c’est un euphémisme » - rencontrées dans le rapprochement entre la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et les États-Unis.  « Toute exigence formulée à l’adresse de la RPDC doit s’accompagner de concessions et non pas de promesses », a-t-il dit, en fustigeant la sortie des États-Unis de l’accord sur le programme nucléaire iranien. 

M. Nebenzia a estimé que les sanctions ne sont pas une fin en soi et ne doivent pas se substituer à la diplomatie.  S’agissant du rapport du Groupe d’experts du Comité des sanctions, il a accusé les États-Unis d’avoir voulu imposer leur propre vision des choses et de transformer cette séance consacrée à la RPDC « en séance consacrée à la Russie ».  Mon pays n’a pas fait pression sur le Groupe d’experts, a-t-il tranché, en déplorant que ce dernier soit devenu politisé et « l’otage de Washington ».  Son premier rapport ne respectait pas les critères d’impartialité prévus par le règlement encadrant le fonctionnement du Comité 1718. 

Le délégué a déclaré que les observations de son pays ont été bien reçues par le Groupe d’experts et que son pays n’a fait que répondre aux questions et aux accusations relayées par les États-Unis aujourd’hui.  La déléguée des États-Unis, dans son intervention, n’a pas dit que les experts américains avaient accepté notre position de compromis, a-t-il poursuivi.  « Que s’est-il passé dans les dernières heures? »  C’est vous qui avez empêché la communication du dernier rapport au Conseil, signé par tous les experts, y compris américains, parce ce que vous ne supportez pas que le rapport diffère de vos vues, a-t-il dit.  « La balle est dans votre camp. »

S’agissant du bateau russe Patriote, le Groupe d’experts a conclu qu’il n’a pas violé le régime de sanctions, pas plus que les entreprises russes, a-t-il expliqué.  « Qui répand des mensonges? »  Les développements récents doivent être pris en compte s’agissant de la question des sanctions, a-t-il dit.  Le commandement unifié des États-Unis battant pavillon de l’ONU a empêché toute mesure visant à restaurer des communications ferroviaires entre les deux Corées, a-t-il dit, en faisant allusion à des articles de presse selon lesquels l’ONU s’opposerait à des projets de coopération intercoréens.  « Ce commandement unifié serait-il le nouveau mur de Berlin? »  Il a dénoncé la manière agressive avec laquelle les États-Unis veulent se substituer au Conseil et le transformer en « Conseil de sécurité des États-Unis ».

M. Nebenzia a en outre indiqué que ce commandement, mis en place en 1950 à la suite de séances du Conseil que l’URSS avait boycottées, n’a plus aucun sens depuis que les deux Corées sont devenues Membres à part entière de l’ONU et que des efforts de paix sont en cours.  « Il faut un mécanisme de retrait de ce commandement ».

Enfin, le représentant a invité le Conseil à contribuer au rapprochement des deux Corées et à envisager la mise en place de mesures adaptées, en fustigeant la position « destructrice » des États-Unis qui voient dans le Comité 1718 une « matraque » à utiliser contre la RPDC sous couvert du Conseil et refusent que d’autres pays puissent avoir des relations humanitaires, sportives et diplomatiques avec la RPDC.  « Le consensus, même autour des questions techniques, est devenu impossible au sein du Comité », a-t-il conclu. 

« Nier, distraire et mentir, nous avons entendu cette rengaine à de nombreuses reprises », a déclaré Mme NIKKI HALEY (États-Unis) dans la foulée de l’intervention de son homologue russe, en référence aux agissements récents de la Fédération de Russie en Syrie, au Royaume-Uni et désormais, selon elle, en République populaire démocratique de Corée (RPDC).  « Vous avez été pris la main dans le sac », a-t-elle lancé à l’attention du pays.  « Mentir, tricher est devenu la norme de la culture russe », a martelé Mme Haley, avant de déclarer: si vous ne niez pas le contenu du rapport du Groupe d’experts du Comité des sanctions 1718, j’en conclus donc que vous ne vous opposez pas à la publication de ce rapport. 

Dix mois après sa dernière intervention en date au Conseil de sécurité, M. CHO TAE-YUL (République de Corée) a déclaré que des changements spectaculaires avaient eu lieu dans la péninsule coréenne et en Asie du Nord.  Les Jeux olympiques de Pyongyang, qui se sont déroulés en février dernier, ont fourni « une fenêtre d’opportunités » pour atténuer les tensions dans la sous-région et les dirigeants des deux Corées et les États-Unis n’ont pas manqué de la saisir.  Dans la foulée, deux sommets intercoréens se sont tenus en avril et mai après un hiatus de 11 ans, puis, en juin à Singapour, ce fut le tour du Sommet entre les États-Unis et la République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui a ouvert un nouveau chapitre dans les relations entre ces deux pays.  Aux « tensions qui ne cessaient de s’aggraver » succèdent maintenant des « efforts diplomatiques » de part et d’autre.  Ce tournant a pu être pris selon lui grâce à une combinaison d’« outils diplomatiques » et à un Conseil de sécurité « uni » dans sa réponse, faite de mise en œuvre intégrale du régime de sanctions par ses membres et d’ouverture au dialogue. 

Le représentant a annoncé que, dans quelques heures, le Président de la République de Corée, M. Moon Jae-in, se rendrait à Pyongyang pour le troisième Sommet intercoréen, qui devrait revigorer encore davantage le processus diplomatique actuel et déboucher sur un résultat significatif, lequel devrait aider en retour à relancer les négociations à l’arrêt entre les États-Unis et la RPDC.  « Aucun doute, la route qui s’ouvre devant nous sera semée d’embûches », a mis en garde le représentant.  Pour sa délégation, la mise en œuvre scrupuleuse des sanctions et le dialogue sont des éléments qui se renforcent mutuellement, « comme les deux roues d’une bicyclette tournant à l’unisson ».  M. Cho a ensuite estimé que le fait de débattre des actions du commandement de l’ONU sur un sujet spécifique qui ne fait pas partie de l’ordre du jour, en particulier lors de cette réunion publique du Conseil de sécurité, est « plutôt inopportun ».

« Nous sommes à un tournant critique », a estimé M. KORO BESSHO (Japon), appelant la République populaire démocratique de Corée (RPDC) à saisir l’opportunité qui lui est donnée, en procédant au démantèlement « complet, vérifiable et irréversible » de tous ses missiles balistiques et armes de destruction massive, dans le respect des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité sur la question.  Quant au Conseil, le représentant a appelé ses membres à ne pas dévier de leur détermination à mettre en œuvre intégralement les résolutions qu’ils ont adoptées.  « L’heure n’est pas encore à l’allégement ou à la levée des sanctions », a-t-il ainsi estimé, arguant du fait que la RPDC n’aurait alors plus aucune incitation à se dénucléariser.

Le représentant a dit partager l’avis des États-Unis, selon lequel la RPDC a dépassé son quota annuel de produits pétroliers raffinés pour 2018, tel que défini par la résolution 2397 (2017) du Conseil.  « Il est important que tous les États membres du Conseil cessent immédiatement de fournir du pétrole raffiné à la RPDC », a-t-il déclaré, ajoutant que son pays, aux côtés des États-Unis, se livrait à des activités aériennes de contrôle et de surveillance contre les activités maritimes illicites, notamment le transbordement de navire à navire. 

Condamnant les « efforts cyniques » visant à bafouer le régime de sanctions actuel, le représentant a appelé les membres du Conseil à maintenir leur unité sur la question et à ne pas perdre de vue l’objectif commun de parvenir à une dénucléarisation complète de la péninsule.

Dans une reprise de parole, le délégué russe a déclaré que son pays est prêt à accepter la publication d’un rapport recueillant les observations de son pays.  « C’est vous qui vous opposez à la publication de ce rapport, dont il n’y a pas d’autre version », a-t-il lancé à la délégation américaine, en l’exhortant à le rendre public. 

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