8251e séance – après-midi
CS/13329

Le Conseil de sécurité mesure avec les commandants de trois opérations de maintien de la paix de l’ONU les réponses à apporter aux défis sur le terrain

Les commandants des forces de trois opérations africaines de maintien de la paix de l’ONU ont souligné cet après-midi, au Conseil de sécurité, l’importance d’avoir des troupes pleinement opérationnelles et efficaces, capables de relever les nouveaux défis sur le terrain.  Cette réunion annuelle consacrée aux opérations de maintien de la paix a été marquée par un débat interactif au cours duquel les intervenants ont réfléchi aux moyens nécessaires pour conduire les opérations dans des conditions optimales.  Il s’agit aussi de mieux protéger les Casques bleus, trop souvent pris pour cibles par des groupes armés.

Alors que se tient cette semaine, à New York, la réunion annuelle des commandants des forces des opérations de maintien de la paix, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a expliqué que le programme permettait à ceux-ci de se tenir informés des grands débats qui se tiennent au Siège sur le maintien de la paix et des efforts entrepris pour être « plus efficaces et performants dans nos missions ».  Il a cité notamment l’initiative du Secrétaire général « Action pour le maintien de la paix », annoncée le 28 mars; les initiatives pour améliorer la conduite, la discipline, la sécurité, l’entraînement et la performance des Casques bleus; l’adaptation aux environnements complexes; ou encore les règles d’engagement.

Le général de corps d’armée Léonard Ngondi, commandant la force de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), a expliqué que le mandat de la MINUAD était suffisamment robuste pour lui permettre d’atteindre ses objectifs, et qu’il était réalisable « parce qu’il est bien compris et qu’il existe une volonté et des capacités ».  La mission utilise une approche intégrée dans la conduite de ses opérations en plus de la mise en œuvre du plan d’action du rapport Santos Cruz sur l’amélioration de la sécurité des Casques bleus.  Selon le général, la MINUAD « est en bonne voie vers sa trajectoire de sortie », mais elle a besoin d’un plan de transition très bien défini s’inspirant des leçons tirées de l’expérience des missions récemment achevées au Libéria et en Côte d’Ivoire.  

Au Mali, dans un environnement où la force et la population civile sont prises pour cible, l’impartialité de la force à l’égard des terroristes et des insurgés est mise à rude épreuve, a pour sa part témoigné le général Jean-Paul Deconinck, commandant la force de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  La MINUSMA s’efforce à juste titre de comprendre le caractère du conflit au Mali et dans le Sahel, mais il lui faut maintenant s’adapter au changement de l’environnement sécuritaire et opérationnel pour pouvoir aider le peuple et le Gouvernement du Mali et exécuter son mandat, a expliqué le général.  C’est dans ce sens que l’on parle de « maintien de la paix robuste », a-t-il ajouté, en souhaitant un autre état d’esprit: une force exige de ses dirigeants connaissances, compétences et expérience, et surtout qu’ils soient prêts à assumer leurs responsabilités, a-t-il plaidé.

Au Soudan du Sud, les combats gagnent en intensité à chaque fois que la prochaine série de pourparlers approche, a rapporté le général de corps d’armée Frank Mushyo Kamanzi, commandant la force de la Mission des Nations Unies dans ce pays (MINUSS).  Ils gagnent également en complexité, a-t-il ajouté, expliquant qu’on était passé « d’un conflit n’impliquant que deux parties à un conflit où le Gouvernement provisoire d’union nationale a l’avantage, mais fait face à une opposition politique et militaire de la part de multiples acteurs ».  La protection des civils reste notre tâche prioritaire, a assuré le général Mushyo Kamanzi, rappelant que la mission continue de protéger plus de 209 000 personnes déplacées.  Il a jugé impératif d’encourager toutes les parties à trouver une solution politique, ce qui permettra à la mission de mieux réaliser son mandat.

C’est bien avant, dans un objectif politique de pacification que doit s’inscrire le maintien de la paix, a relevé le représentant de la France.  Mais il a aussi fait observer que notre ambition de protéger les civils victimes des conflits, de la violence et des violations massives des droits de l’homme exige que nous soyons plus efficaces et plus à même de faire la différence sur le terrain, avant de rappeler l’important rôle de formation des forces de maintien de la paix africaines que joue son pays.

La question de la « robustesse » des mandats, au centre de nombreux débats, a été largement abordée.  Pour la Côte d’Ivoire, les violences perpétrées par des groupes armés contre les Casques bleus, les acteurs humanitaires et les populations civiles sont des défis récurrents qui invitent à élaborer des mandats dont le niveau de robustesse doit à la fois refléter la complexité et le caractère asymétrique de l’environnement dans lequel se déploie une mission de maintien de la paix. 

L’Éthiopie a elle aussi plaidé pour que les opérations de maintien de la paix disposent de mandats robustes et de concepts d’opérations clairs, mais elle a demandé en outre que les Casques bleus disposent d’une capacité suffisamment crédible pour dissuader et contrer les fauteurs de trouble.  Plaidant pour un partage du fardeau entre les Nations Unies et les opérations de paix de l’Union africaine, elle a de nouveau demandé que l’ONU fournisse à celle-ci l’appui financier et logistique nécessaire. 

Faisant entendre une note dissonante, la Fédération de Russie a appelé à beaucoup de prudence, jugeant peu convaincants les exemples de mandats robustes dont sont dotées les missions en République démocratique du Congo et au Mali.  La moindre erreur dans l’action peut conduire à des conséquences tragiques et saper le travail de l’Organisation, a-t-il averti.  

Mais le caractère « robuste » d’une mission ne signifie pas forcément le recours à la force, a expliqué le général Ngondi.

Plaidant pour une « nouvelle culture » de la performance, les États-Unis ont de leur côté jugé plus important que jamais d’évaluer si une mission représente bien l’instrument idoine pour relever tel ou tel défi.  Selon eux, les opérations de maintien de la paix doivent appuyer les objectifs politiques, pouvoir compter sur la coopération des pays hôtes, être dotées de mandats réalistes et de stratégies de sortie.

OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

Déclarations

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a indiqué que le programme organisé cette semaine pour les commandants des forces des opérations de maintien de la paix de l’ONU leur permettait de se tenir informés des grands débats qui se tiennent au Siège sur le maintien de la paix et de « la manière dont nous concevons et percevons les efforts que nous entreprenons pour être plus efficaces et performants dans nos missions ».

Les commandants ont donc des séances de travail sur les grandes priorités actuelles, a-t-il expliqué: l’initiative du Secrétaire général « Action pour le maintien de la paix », annoncée le 28 mars; les initiatives pour améliorer la conduite, la discipline, la sécurité, l’entraînement et la performance des Casques bleus; ou encore l’adaptation aux environnements complexes; les règles d’engagement.

Avant de leur céder la parole, M. Lacroix a remercié les commandants pour leur dévouement et leur contribution à l’exécution des mandats et pour « leur coopération étroite, qui nous permet de mettre en œuvre sur le terrain nos plans d’action et de réduire le nombre de décès de Casques bleus ».  

Le général de corps d’armée LEONARD NGONDI, commandant la force de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), a expliqué que, pour la MINUAD, l’environnement était déterminé par cinq aspects.  En premier lieu, le Gouvernement du Soudan exerce effectivement son autorité sur son territoire et cela aide à contrôler les groupes armés.  Toutefois, bien que la relation entre la mission et le Gouvernement soit cordiale, ce dernier restreint souvent la liberté de mouvement de la MINUAD, ce qui affecte les ressources et les services de la mission, en contradiction avec les dispositions sur le statut de la force.

Le deuxième aspect concerne l’existence de groupes armés à l’intérieur et à l’extérieur du territoire qui ne sont pas signataires du Document de Doha pour la paix au Darfour.  Les dirigeants de ces groupes doivent être persuadés de participer au dialogue.

En troisième lieu, il existe des conflits entre les communautés d’éleveurs et d’agriculteurs à propos des ressources naturelles.  La propriété foncière est au cœur du conflit au Darfour, a expliqué le général, pour qui, dans ce domaine, on ne trouvera de solution durable pour une coexistence pacifique entre les différentes communautés que par le dialogue.

Le quatrième aspect à prendre en compte est l’existence d’un banditisme et d’une criminalité provoqués par la pauvreté, le sous-développement, l’absence de lois -ou leur inadéquation- et l’absence de capacités à appliquer la loi.  Le remède repose dans le renforcement des capacités des institutions publiques, des organisations humanitaires et de la société civile afin de délivrer les services de base. 

Enfin, le dernier aspect est la prolifération des armes, qui exacerbe les activités de banditisme et criminelles.  À cet égard, la campagne de collecte d’armes en cours a réduit ces activités dans des proportions remarquables, a poursuivi le commandant de la force.  Toutefois, l’exercice est perçu comme discriminatoire.  C’est pourquoi la MINUAD encourage le Gouvernement à collecter les armes illégales uniformément.

Le commandant a ensuite abordé la question du mandat de la force de la MINUAD.  Est-il assez robuste?  Pour le général, le mandat de la MINUAD est suffisamment robuste pour lui permettre de réaliser ses objectifs.  La mission a toutes les composantes pertinentes et utilise une approche intégrée dans la conduite de ses opérations en plus de la mise en œuvre du plan d’action du rapport Santos Cruz sur l’amélioration de la sécurité des Casques bleus.

Une autre question consiste à se demander si le mandat est compréhensible et peut être mis en œuvre.  Le mandat de la MINUAD est ancré dans quatre piliers, a encore expliqué le général Ndongi: protection des civils, fourniture de l’aide humanitaire, médiation entre le Gouvernement du Soudan et les parties non signataires du Document de Doha pour la paix au Darfour, et aide aux mécanismes de résolution des conflits communautaires.  Ces piliers sont simples, compréhensibles et peuvent être mis en œuvre aussi longtemps que l’engagement et la volonté politique de toutes les parties au conflit existent, a-t-il estimé. 

Enfin, il y a la question du soutien apporté par le Conseil de sécurité à la mission pour l’aider à remplir son mandat.  Pour le général, il est, premièrement, recommandé que la stratégie de transition soit intégrée dans le futur renouvellement du mandat.  Les leçons tirées de l’expérience des missions au Libéria et en Côte d’Ivoire montrent qu’une bonne transition garantit que les résultats acquis pendant le mandat ne resteront pas vains.  Deuxièmement, le Gouvernement du Soudan devrait être persuadé d’adhérer aux dispositions de l’accord sur le statut des forces et accorder à la MINUAD la liberté de mouvement et de vol sans entrave dans la zone d’opérations.  Enfin, les dirigeants des groupes armés devraient être convaincus de participer au dialogue.   

Le général de division JEAN-PAUL DECONINCK, commandant la force de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), a prévenu que la « manière » dont nous comprenons la situation sécuritaire actuelle au Mali est tout aussi importante que ce qu’est la situation en soi.  Dans un environnement où la force et la population civile sont prises pour cible, l’impartialité de la force à l’égard des terroristes et des insurgés est mise à rude épreuve.  Comprendre le caractère d’un conflit au cours duquel des groupes et des stratégies se montrent hostiles à une opération de l’ONU doit déterminer notre réponse, tant dans le mandat que dans les règles d’engagement.  Nous devons nous adapter aux circonstances qui définissent les défis présents, a insisté le général. 

Nous devons, a poursuivi le commandant de la force, reconnaître l’importance de la région centrale du Mali dans sa relation avec l’Accord de paix et de réconciliation de 2015.  Le général, qui a aussi passé en revue la situation dans le nord, a expliqué que, dès sa création en 2017, le groupe « Jamaat Nosrat el-Islam wal-Muslimin » (JNIM) avait en son sein des groupes jihadistes de la région du centre, laquelle est une ligne de défaut où les tribus nomades et pastorales se disputent l’accès à l’eau et aux pâturages.  Ce qui s’est accéléré à partir de mars 2017, a encore expliqué le général, c’est une insurrection « clinique et calculée » contre l’État malien, avec son lot de tensions communautaires, de violations des droits de l’homme et de civils pris pour cibles.  Lien entre le nord et le sud du Mali, la région du centre est stratégiquement importante pour la stabilité du pays et l’ensemble de la région. 

La MINUSMA, a poursuivi le général, s’efforce à juste titre de comprendre le caractère du conflit au Mali et dans le Sahel mais il lui faut maintenant s’adapter au changement de l’environnement sécuritaire et opérationnel pour pouvoir aider le peuple et le Gouvernement du Mali et exécuter le mandat qu’elle tient de la résolution 2295.  C’est dans ce sens que l’on parle de « maintien de la paix robuste », a dit le général, qui a appelé à un autre état d’esprit: une force exige de ses dirigeants de bonnes connaissances, de bonnes compétences et de la bonne expérience, et surtout qu’ils soient prêts à assumer leurs responsabilités.  Nous devons aussi décentraliser certains processus de prise de décisions, a-t-il ajouté.

Dans un conflit complexe, les commandants doivent pouvoir être appuyés par des spécialistes du renseignement mais aussi par des Casques bleus bien formés, a plaidé le général Deconinck, en appuyant l’idée d’équipes mobiles de formation dans les pays contributeurs de troupes.  Le général a aussi parlé de la qualité du matériel médical, jugeant, dans ce contexte, trop restrictives les procédures de l’ONU pour les évacuations médicales.  Il n’a pas oublié d’insister sur le fait que les hélicoptères et les avions sont des multiplicateurs de force essentiels.  Il a aussi estimé que la composante militaire devrait davantage s’approprier la logistique opérationnelle pour pouvoir établir les priorités, contrôler le transport du matériel militaire et déterminer la composition des convois. 

Le général a conclu en soulignant qu’on ne saurait surestimer la valeur ajoutée qu’apportent les missions multidimensionnelles et intégrées.  Pour lui, la mission au Mali doit aussi inclure la dimension régionale pour traiter de la crise dans toute sa dimension, à savoir dans tous les pays de la région du Sahel.

Le général de corps d’armée FRANK MUSHYO KAMANZI, commandant la force de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), via visioconférence de Djouba, a rappelé que l’accord de paix signé en août 2015 avait tourné court en juillet 2016 et que le conflit au Soudan du Sud avait repris.  Le conflit, qui avait commencé dans les États du Haut-Nil, de Jongleï et de l’Unité, s’est alors étendu à d’autres parties du pays, dont l’Équatoria, une région agricole critique où une multitude d’acteurs sont aujourd’hui impliqués, a-t-il expliqué.

Le processus conduit par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), appelé Forum de haut niveau pour la revitalisation, a abouti à l’Accord de cessation des hostilités de décembre 2017.  Malheureusement, les combats entre l’APLS, l’APLS-dans l’opposition (dirigé par l’ancien Premier Vice-Président Riek Machar), l’APLS-dans l’opposition (dirigé par Taban Deng) et d’autres groupes armés se sont poursuivis, en violation de l’Accord a poursuivi le général.  

Les combats gagnent en intensité à chaque fois que la prochaine série de pourparlers approche, a constaté le général Mushyo Kamanzi.  Ils gagnent également en complexité.  « Nous sommes passés d’un conflit n’impliquant que deux parties à un conflit où le Gouvernement provisoire d’union nationale a l’avantage, mais fait face à une opposition politique et militaire de la part de multiples acteurs », a-t-il expliqué.  Le Gouvernement assoit son contrôle dans les États du centre et dans la capitale, Djouba, mais les groupes d’opposition restent actifs ailleurs. 

La protection des civils reste notre tâche prioritaire, a assuré le commandant de la force, et nous continuons de protéger plus de 209 000 personnes déplacées.  De plus, la présence de la Mission à Bunj rassure et appuie les 15 agences humanitaires qui assistent 13 000 réfugiés et les 11 agences qui travaillent avec 54 000 réfugiés dans les camps du Haut-Nil et de l’État de l’Unité respectivement.  Cette population n’a beau représenter que 40% de l’ensemble de la population déplacée, elle mobilise 40% de la force, a ajouté le général.

Les conditions sur le terrain et le climat au Soudan du Sud sont particulièrement exigeants, a souligné le général Mushyo Kamanzi.  Pendant la saison des pluies, de mai à octobre, la plupart des routes sont impraticables.  En conséquence, les forces doivent être dispersées pour maximiser la capacité de la Mission à appuyer les acteurs humanitaires, a-t-il précisé.  Il a dit avoir profité de l’arrivée récente des premiers éléments de la force de protection régionale pour renforcer les bases opérationnelles de Yambio et Tori et établir une nouvelle base à Yei, dans le sud du pays.

En outre, a poursuivi le général, dans l’exécution de son mandat, la MINUSS fait face à des obstructions, des refus d’accès et des violations de l’accord sur le statut des forces.  Il a jugé vital de maintenir une relation avec à la fois le Gouvernement et les groupes d’opposition, « tout en réalisant que toutes les parties sont responsables des violations de l’Accord de cessation des hostilités, des destructions et des atrocités perpétrées contre des civils ».

Nous continuons d’améliorer la sécurité et la performance des Casques bleus, a assuré M. Mushyo Kamanzi, en révisant notamment les procédures d’évacuation aérienne et en créant une équipe consultative sur la protection de la force.  La MINUSS, qui compte actuellement 13 700 Casques bleus sur un plafond de 17 000 autorisés par la résolution 2406 (2018), travaille étroitement avec le Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité.  

Il est impératif d’encourager toutes les parties à trouver une solution politique, ce qui permettra à la Mission de mieux réaliser son mandat, a conclu le général Mushyo Kamanzi.   

M. ALCIDE ILAHIRI DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire) a jugé indéniable que les opérations de maintien de la paix n’avaient pas vocation à se substituer aux autorités de l’État hôte mais plutôt à les appuyer, dans le cadre d’une stratégie de sortie de crise fondée sur un processus politique inclusif et crédible.  La qualité des relations entre le Représentant spécial du Secrétaire général, les commandants des forces et toutes les parties prenantes au processus de sortie de crise, y compris les populations locales, paraît essentielle, en ce sens qu’elle crée les conditions pour une acceptation et une appropriation nationale forte de l’action onusienne.

Les difficultés relevées par les commandants des forces nous fondent à croire que l’efficacité des opérations de maintien de la paix reste tributaire de la définition de mandats clairs, déterminant des objectifs réalisables, à partir d’analyses rigoureuses de l’environnement et des contraintes opérationnelles spécifiques de chaque mission, a poursuivi le représentanti e général Kamannj réce, ans ce domaine, on ne trouvera de .

Pour M. Djédjé, les violences inqualifiables perpétrées notamment par des groupes armés contre les Casques bleus, les acteurs humanitaires et les populations civiles, sont des défis récurrents qui nous invitent à élaborer des mandats dont le niveau de robustesse doit à la fois refléter la complexité et le caractère asymétrique de l’environnement dans lequel se déploie une mission de maintien de la paix.  Ces mandats doivent conférer aux forces onusiennes l’agilité, la flexibilité et la mobilité nécessaires pour se projeter dans les zones où ont lieu et où existent des signes avant-coureurs de violences contre les populations civiles.

Il importe également de relever que ces mandats doivent être flexibles et séquencés, pour permettre une adaptation progressive des priorités des missions aux évolutions du contexte socioéconomique et sécuritaire du pays hôte, a encore déclaré le représentant.  Tout aussi importante que la flexibilité et le réalisme des mandats, la mise à disposition des ressources humaines, financières et matérielles adéquates est essentielle pour garantir l’efficacité des opérations de maintien de la paix, a-t-il également rappelé.  

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a souligné que le maintien de la paix faisait partie intégrante de ce que représente l’ONU pour les peuples du monde entier.  Il s’est félicité du rapport du général Santos Cruz sur l’amélioration de la sécurité des Casques bleus et de l’initiative du Secrétaire général « Action pour le maintien de la paix ».  Le Royaume-Uni a trois priorités: le Conseil de sécurité doit envisager les conflits sur le long terme; le maintien de la paix doit être mieux coordonné avec le développement et la consolidation de la paix; l’accent doit être mis sur la responsabilisation.

Comment le plan d’action du Secrétaire général est-il mis en œuvre dans vos missions? a demandé le représentant à l’ensemble des commandants.  Ceux-ci ont-ils un avis sur ce qui devrait figurer dans ce cadre?  Plus spécifiquement, M. Allen a ensuite demandé au commandant de la force de la MINUAD quelle devait, selon lui, être la prochaine étape dans le travail de reconfiguration de la mission.  Au commandant de la force de la MINUSMA, il a demandé dans quelle mesure les acteurs militaires agissaient de concert avec la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S) et quels liens ils entretiennent avec les acteurs du développement.  Enfin, il a demandé au commandant de la force de la MINUSS s’il avait des exemples de pratique optimale qui pourraient être utiles pour aider d’autres missions à mieux réagir aux atteintes sexuelles.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a appelé à beaucoup de prudence face aux nombreuses demandes pour que les opérations de maintien de la paix soient dotées de mandats robustes.  La moindre erreur dans l’action peut conduire à des conséquences tragiques et saper le travail de l’Organisation, a-t-il averti, estimant qu’il devrait y avoir une évaluation objective de la manière de renforcer les mandats pour qu’ils fassent la différence.

Soyons francs, a dit le représentant: les exemples de mandats robustes en République démocratique du Congo et au Mali n’ont pas été convaincants et soulèvent de nombreuses questions juridiques, techniques, logistiques et humaines.  Celles-ci devraient selon lui être examinées dans un cadre intergouvernemental, avec la participation directe des pays fournisseurs de contingents et de personnel de police.

Pour la Fédération de Russie, l’incapacité à trouver des réponses valables aux causes des conflits et aux menaces du terrorisme ne devrait pas automatiquement mener à renforcer les mandats.  Nous devons être raisonnables pendant l’élaboration des mandats et ne pas surcharger les mandats des opérations de maintien de la paix par des tâches qui peuvent être accomplies par les organes spécialisés de l’ONU, a affirmé M. Polyanskiy.   

Pour le représentant, il faut, lors de la préparation des mandats des missions, prendre en compte les avis des pays contributeurs de troupes, celui des pays hôtes et celui des populations locales.  Un facteur important est une bonne préparation des Casques bleus, qui doivent être dotés d’équipements adéquats.  Ces activités doivent être menées dans le cadre d’accords conclus avec les États et pour protéger les civils.  M. Polyanskiy a aussi souligné l’importance de la collecte de renseignements, qui doit se faire uniquement dans le cadre agréé par les États Membres et avec le consentement du gouvernement hôte.  Il a également mis l’accent sur le respect des principes de base du maintien de la paix des Nations Unies, sans quoi les soldats de la paix pourraient être directement entraînés dans des conflits.

S’agissant enfin du rapport Santos Cruz, le représentant russe a dénoncé « des dispositions qui font polémique ».  Il ne faut pas adopter ses recommandations, a-t-il affirmé.  Il s’est également opposé aux tentatives de certains gouvernements à promouvoir des initiatives entre États comme les Principes de Kigali qui préconisent l’emploi de la force contre l’État hôte sous le prétexte de protéger les civils.  Cela fera des Casques bleus des parties au conflit, a prévenu le représentant.

M. WU HAITAO (Chine) a reconnu que les environnements actuels et les mandats des opérations de maintien de la paix étaient de plus en plus complexes.  Il faut, a-t-il dit, aider les opérations à mieux faire face aux défis et à s’acquitter de leurs responsabilités.  Certaines crises prolongées ont mené à la détérioration de la situation régionale, s’est-il inquiété.  Pour le représentant, la communauté internationale devrait prendre en compte tous les points chauds et les opérations de maintien de la paix devraient créer des conditions nécessaires pour régler la situation dans ces points chauds.

Il faut miser sur les principales tâches du maintien de la paix et respecter les principes en la matière, en tenant compte des ressources et des conditions sur le terrain, a poursuivi M. Wu.  Il faut également ajuster les tâches à chaque étape en fonction de l’évolution de la situation et élaborer une stratégie de sortie en temps voulu.

Selon le représentant, les pays fournisseurs de contingents devraient avoir plus d’occasions de participer aux discussions.  Il a plaidé pour la mise en place de règles de sécurité pour les soldats de la paix et pour le renforcement de l’alerte précoce, notamment dans les environnements à haut risque.  La Chine, a-t-il rappelé, est un grand fournisseur de contingents et le deuxième plus grand bailleur de fonds pour le budget des opérations de maintien de la paix.  Il a espéré que les recommandations du rapport sur la sécurité des Casques bleus seront prises en compte.  Enfin, a-t-il demandé, quels sont les principaux facteurs qui ont des incidences sur les capacités des Casques bleus à faire face aux menaces?

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a demandé au commandant de la force de la MINUAD quels étaient les défis à relever dans la réalisation du mandat?  Que doit faire le Conseil de sécurité pour aider la mission à exécuter son mandat?  Au commandant de la force de la MINUSMA, elle a demandé ce qu’il faudrait faire pour améliorer l’exécution du mandat, de quels types de matériels a besoin la Mission pour exécuter ses tâches et de qui dépend le succès de l’exécution des mandats des opérations de maintien de la paix.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a rappelé que son pays était fournisseur de contingents.  À ce titre, le Pérou estime que le Conseil de sécurité doit doter les opérations de maintien de la paix de mandats réalistes et flexibles et des ressources nécessaires pour surmonter les situations auxquelles elles sont confrontées.  Le représentant a appuyé la priorité accordée par le Secrétaire général à la sécurité des Casques bleus.  

Quelles mesures supplémentaires faudrait-il prendre pour accroître la coopération des pays hôtes et des organisations régionales et sous-régionales pertinentes? a ensuite demandé M. Meza-Cuadra.  Quelle est la meilleure façon de combler le fossé qui sépare le niveau des difficultés auxquelles les opérations de maintien de la paix font face et les capacités à leur disposition?  Quelle relation établissent les opérations avec les équipes de pays des Nations Unies?  Enfin, le représentant a souhaité que les commandants livrent leur opinion sur le caractère opportun des rapports d’évaluation.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a rappelé que le maintien de la paix est une activité qui est à la fois complexe, difficile et parfois frustrante, mais également indispensable.  Si le maintien de la paix doit avant tout s’inscrire dans un objectif politique de pacification, a-t-il noté, notre ambition de protéger les civils victimes des conflits, de la violence et des violations massives des droits de l’homme exige également que nous soyons plus efficaces et plus à même de faire la différence sur le terrain. 

S’adressant aux commandants présents dans la salle, le représentant a relevé que notre ambition collective devait être que « nos opérations, vos opérations », soient conduites et exécutées dans des conditions optimales.  Nous nous devons donc de vous donner les moyens et les ressources nécessaires pour accomplir sereinement et efficacement votre mission, a ajouté M. Delattre. 

Pour cela, il est nécessaire que les troupes que nous vous confions soient résolument opérationnelles et efficaces.  Pour la France, cela passe par une formation prédéploiement complète et de qualité, et elle est pleinement engagée en ce sens, formant près de 30 000 soldats africains francophones par an, lesquels fournissent de forts contingents pour les opérations de maintien de la paix. 

L’exigence d’avoir des troupes pleinement opérationnelles et efficaces passe également par de meilleurs équipements, adaptés au terrain et à la menace, ainsi que par une meilleure posture opérationnelle, a poursuivi M. Delattre.  Pour lui, une meilleure performance opérationnelle permettra de réduire de facto le nombre de Casques bleus tués en opérations.  La France soutient dans ce contexte le rapport Santos Cruz.

Le représentant s’est aussi dit persuadé qu’un maintien de la paix efficace passe par le renforcement des relations entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, et notamment par la montée en puissance des opérations africaines de paix qui est, pour la France, une priorité portée au plus haut niveau.  M. Delattre a invité les trois officiers supérieurs présents à donner leur avis sur ce dernier point, avant de leur demander comment mieux les aider.  Il a précisément demandé: « De quoi auriez-vous besoin pour mieux anticiper les menaces et les tirs indirects?  De quels dispositifs technologiques d’alerte avancée et de protection auriez-vous besoin? »

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a fait part de l’intention de son pays d’organiser, au mois de juillet, un séminaire de haut niveau sur le maintien de la paix et le renseignement, qui sera suivi d’une manifestation de haut niveau sur le maintien de la paix, au mois de septembre.  Le représentant s’est dit heureux de voir « que nous changeons la manière dont nous travaillons, que nous changeons notre état d’esprit et que nous sommes davantage capables d’agir de manière décisive ».  Mais, a-t-il tempéré, il y a encore beaucoup à faire.  Quand nous réexaminons une mission, attardons-nous sur les besoins opérationnels du terrain et, en l’occurrence, reconnaissons le caractère essentiel de la génération des forces, a-t-il expliqué. 

Les questions pressantes que les commandants de force ont soulevées aujourd’hui doivent être résolues, a insisté le représentant, et elles doivent l’être par une approche « véritablement intégrée » et ancrée dans les piliers militaire, civil et policier.  Une approche, a précisé M. van Oosterom, où la diplomatie, la défense et le développement sont pris ensemble; une approche où les piliers de l’ONU travaillent ensemble.

Le représentant a conclu en plaidant pour la place du renseignement dans le maintien de la paix.  Nous devons, a-t-il estimé, améliorer notre compréhension de l’environnement dans lequel opère une mission et des risques qu’elle court.  Le renseignement est et demeure la clef du succès dans un environnement complexe.  Les soldats de la paix doivent avoir « des yeux et des oreilles » pour rester alertes.  Le renseignement sauve des vies, a insisté le représentant.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a fait quelques suggestions sur les stratégies politiques correctes et l’approche opérationnelle.  En premier lieu, les Casques bleus ne peuvent pas et ne devraient pas rester indifférents face aux menaces contre eux-mêmes ainsi que contre les civils innocents qu’ils sont supposés protéger.  Deuxièmement, les Casques bleus devraient avoir des mandats robustes avec un concept clair des opérations et des règles d’engagement reposant sur l’analyse de la situation, l’évaluation des menaces et la planification.  Cela leur permettrait d’avoir une position forte pour se protéger eux-mêmes et protéger les civils face à des dangers mortels. 

Toutefois, avoir un mandat robuste n’est pas suffisant, a ajouté le représentant.  Les Casques bleus doivent avoir une capacité suffisamment crédible pour dissuader les fauteurs de trouble qui menacent le mandat de la mission et les civils, ainsi qu’eux-mêmes.  Ils doivent également être bien équipés pour pouvoir contrer les hostilités et remplir efficacement leur mandat dans un environnement asymétrique.  En outre, sur la base des principes de complémentarité et de la division du travail, l’ONU devrait être prête à partager le fardeau avec les opérations de paix menées par l’Union africaine, en leur fournissant l’appui financier et logistique nécessaire. 

Le représentant a ensuite demandé au commandant de la force de la MINUSMA les mesures et les stratégies que la Mission devrait adopter pour prévenir de nouvelles attaques dans le futur.  De quel genre d’appui la Mission a-t-elle besoin de la part du Conseil de sécurité, du Secrétariat et des États Membres?

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a insisté sur une coopération plus forte et plus effective entre les gouvernements, l’ONU et l’Union africaine, sans oublier les groupes sous-régionaux ou les pays qui ont de l’influence sur les acteurs concernés.  Le représentant a aussi insisté sur des activités comme la collecte des armes ou la réinstallation des déplacés, sans lesquelles aucune paix ne peut être durable.  Il a jugé cruciale la réforme du secteur de la sécurité et estimé que le défi était d’accélérer la consolidation de la paix, en se montrant plus proactif dans le renforcement des capacités, l’amélioration de la gouvernance, les projets à impact rapide ou de stabilisation communautaire, en collaboration avec les équipes de pays des Nations Unies. 

Passant à ses questions aux commandants de force, le représentant a voulu savoir comment modifier les mandats pour pouvoir s’attaquer réellement au renforcement des capacités et à la formation des forces armées et des institutions publiques, grâce à un programme à long terme sur la réforme du secteur de la sécurité.  Comment faire pour mettre fin, une fois pour toutes, à l’activisme des groupes armés et des milices?  Comment faire pour lancer dès le début d’une opération des stratégies globales de développement économique et de résilience?  Comment encourager la réconciliation communautaire et rétablir la confiance?  Et enfin, comment combler les lacunes en termes de capacités?

Mme AMY NOEL TACHCO (États-Unis) a jugé plus important que jamais d’évaluer si une mission représente bien l’instrument idoine pour relever tel ou tel défi.  Plaidant pour une « nouvelle culture » de la performance, la représentante a rappelé que l’Ambassadeur Nikki Haley avait présenté, l’année dernière, les principes qui devraient guider l’examen des opérations de maintien de la paix quand leurs mandats doivent être renouvelés.  Ces opérations, a-t-elle souligné, doivent appuyer les objectifs politiques, pouvoir compter sur la coopération des pays hôtes, être dotées de mandats réalistes et de stratégies de sortie.

Le mandat de la MINUSMA est-il bel et bien réaliste? a ensuite demandé la représentante.  Les soldats de la MINUSS sont-ils bien préparés sur le plan opérationnel, notamment en ce qui concerne la protection des civils?  Enfin, la situation sécuritaire au Darfour nécessite-t-elle une présence constante de la composante militaire ou les forces de police ne devraient-elles pas jouer un rôle accru? 

M. TALAL S. S. S. ALFASSAM (Koweït) a mentionné la nature des menaces auxquelles les Casques bleus font face puis a déclaré que les composantes militaires des opérations de maintien de la paix devraient recevoir davantage de soutien du Conseil sous la forme de mandats réalistes et réalisables.  Il s’est félicité de la coopération entre les opérations de maintien de la paix et le Secrétariat pour l’élaboration de critères de performance liés au budget et contenant des indices mesurables.  Une politique de tolérance zéro à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles est d’une importance primordiale, tandis que les stratégies de sortie doivent assurer une transition en douceur vers les conditions d’après-conflit, a-t-il également fait valoir.  

Le représentant a souligné la nécessité d’une transition souple et progressive des fonctions militaires aux tâches de stabilisation et de consolidation de la paix, citant le cas de la MINUAD dans ce contexte.  La composante militaire est un pilier permettant de parvenir à un accord entre les parties et contribue au maintien de la paix, a-t-il ajouté.  Il a en outre estimé qu’une coordination cohérente entre les parties était nécessaire.  Il a enfin rappelé que le rapport annuel du Comité spécial sur les opérations de maintien de la paix traitait des questions relatives à la composante militaire et que la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, discute actuellement des aspects financiers du maintien de la paix.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a salué les efforts renouvelés du Secrétaire général pour passer de la parole aux actes et hisser les opérations de maintien à la hauteur des défis du XXIsiècle.  Nous, les membres du Conseil de sécurité, devons aussi faire notre part, a reconnu la représentante, en précisant qu’il s’agit de donner à chaque mission un mandat réaliste et un financement adéquat, mais aussi d’être prêt à exercer des pressions politiques sur tous les acteurs et d’appuyer les efforts du système des Nations Unies dans son ensemble.  La coopération de l’ONU avec les organisations régionales et sous-régionales doit aussi être renforcée, a ajouté la représentante. 

De son expérience à la mission au Mali (MINUSMA), a-t-elle poursuivi, la Suède a compris que le lien entre maintien de la paix et renseignement était crucial pour prendre des décisions informées et assurer une bonne planification opérationnelle.  Il est crucial que les missions soient capables d’agir dès qu’elles reçoivent l’information.  Il est tout aussi important d’avoir un processus minutieux de sélection de la direction, y compris les commandants militaires et de police.  Une attention particulière, a insisté la représentante, doit être accordée à la volonté d’agir, de prendre l’initiative et d’assumer ses responsabilités.  Le personnel en uniforme doit avoir la formation, les compétences et les équipements adéquats et, pour ce faire, il faut appuyer le renforcement des capacités et communiquer sur tous les cas de mauvaise performance. 

Après avoir réitéré son attachement aux efforts de prévention et de lutte contre l’exploitation et les atteintes sexuelles commises par le personnel de l’ONU, la représentante a posé plusieurs questions: Que doivent faire le Secrétariat, les missions et les pays contributeurs de troupes pour augmenter le pourcentage de personnel féminin?  Quels sont les plus grands défis de la protection des civils et comment les relever?  Quel est le rôle du renseignement dans une opération de maintien de la paix et de quel genre de ressources une mission comme celle au Mali aurait besoin?  Quels sont les qualités et les défauts des brigades ou réserves régionales comme celles qui sont déployées dans les missions au Soudan du Sud et en République démocratique du Congo?

Mme CARLA CECILIA CARDONA MOSCOSO (Bolivie) a déclaré que les missions de maintien de la paix doivent subir des changements structurels pour s’adapter aux nouvelles menaces telles que le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.  La représentante a demandé au commandant de la force de la MINUSMA quelles mesures pourraient être mises en œuvre dans sa région à cet égard.  Les attaques persistantes contre les forces ont montré la nécessité de renforcer les principaux domaines d’intervention des missions de maintien de la paix, en particulier la capacité logistique et de protection des forces.  L’amélioration de la technologie rendrait les missions plus efficaces, a ajouté la déléguée qui a souligné l’importance de l’équipement et la formation des Casques bleus.  Ceci relève de la responsabilité de toute l’Organisation, et non seulement des pays fournisseurs de contingents.  

Elle a également mis l’accent sur la nécessité d’améliorer la souplesse institutionnelle et a demandé aux trois commandants des forces: Comment les recommandations contenues dans le rapport Santos Cruz pouvaient être mises en œuvre dans leurs missions respectives?  Elle a aussi demandé quelles mesures supplémentaires le Conseil pourrait prendre pour éviter les situations dans lesquelles l’inaction mettrait en danger la vie des Casques bleus.  Avant de terminer, elle a déclaré que le maintien de la paix ne doit jamais être un prétexte à l’intervention. L’unité entre tous les acteurs était essentielle pour renforcer chaque aspect de chaque mission, dans le strict respect de la Charte des Nations Unies et avec l’appui total des pays hôtes.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a souligné que l’on voit aujourd’hui des changements dans l’environnement sécuritaire, avec une augmentation des menaces et des attaques directes contre les soldats de la paix.  Il faut donc user de toutes les opportunités pour condamner de tels actes dans les termes les plus fermes.  Sans aucun doute, la sécurité des soldats de la paix est de la plus haute importance, a rappelé la représentante, ajoutant qu’il ne fallait pas oublier que c’est aussi l’un des facteurs clefs du succès des missions.

Sur la question des mandats, Mme Wronecka a demandé aux commandants si les mandats actuels des missions de maintien de la paix leur permettaient d’agir de manière proactive dans l’exercice de leur mission.  Si la réponse devait être affirmative, quels seraient alors, par ordre de priorité, les principaux défis, limites et fossés qui sapent l’efficacité de leur mission?  Dans le cas d’une réponse négative, elle les a invités à dire au Conseil de sécurité comment améliorer leur mission en leur permettant d’arriver au but ultime de toute mission, qui est sa propre fermeture. 

M. LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a remercié les membres du Conseil de sécurité pour leur engagement en faveur des Casques bleus et réitéré l’importance d’un soutien incessant du Conseil en faveur des efforts visant à rendre les opérations de maintien de la paix plus efficaces. 

Nous sommes déterminés à poursuivre la mise en œuvre du plan d’action, qui s’inspire du rapport Santos Cruz, a-t-il assuré, même si ce n’est pas la seule stratégie globale en matière de maintien de la paix. En effet, il est essentiel que les États Membres s’engagent en faveur de solutions politiques. En outre, le Département mise sur la formation et sur une meilleure gestion des blessés et des personnes décédées. 

M. Lacroix a insisté sur la nécessité d’œuvrer en partenariat étroit avec les gouvernements des pays hôtes et de faire preuve d’impartialité. « Le maintien de la paix, ce n’est pas la guerre », a-t-il souligné. L’emploi de la force ne peut se faire qu’en cas de légitime défense ou pour protéger le mandat contre ceux qui s’efforcent de saboter une solution politique.

Par ailleurs, le Secrétaire général adjoint a estimé qu’il était encore trop tôt pour évaluer les répercussions des examens stratégiques des missions. Il a dit partager les commentaires sur les manquements en termes de capacités dans différents domaines.  Selon lui, il faut « faire preuve d’imagination pour remédier à diverses situations ».  Enfin, il a estimé qu’il fallait, lorsque les Casques bleus ne sont pas la riposte adéquate à une situation, permettre à d’autres organisations de réagir. 

Le général de corps d’armée NGONDI, commandant la force de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), répondant à diverses questions, a fait observer qu’il existe des manquements dans la formulation des mandats et les processus de planification militaire.  Il faut des experts pour déterminer ce qui doit être fait, a-t-il ajouté.  Les commandants savent que chaque mission est particulière sur le plan des difficultés.  Le caractère « robuste » d’une mission ne signifie pas forcément le recours à la force, a-t-il également fait valoir.  Chacun doit mener une action rigoureuse en faveur des objectifs recherchés.

« La MINUAD est en bonne voie vers sa trajectoire de sortie », a-t-il assuré.  La mission a besoin d’un plan de transition très bien défini.  « Nous voulons passer le flambeau à quelqu’un, gouvernement, équipe de pays ou société civile, qui fournirait les services de base », a-t-il expliqué.  Avec environ 2,7 millions de déplacés, il faut se concentrer sur les endroits où les groupes armés pourraient mener des hostilités contre le gouvernement et être sur le terrain pour inciter les déplacés à revenir chez eux, a-t-il ajouté.  Les missions devant être intégrées, il faut prendre en compte leurs différentes composantes.  Leur succès dépend des activités des « échelons les plus bas »; dès lors, lors de la formulation des mandats et de l’examen des ressources, il faut couvrir toutes les activités. 

Nous savons là où les troupes sont nécessaires, là où il y a des combats, a expliqué le commandant de la force, le terrain a été cartographié.  Quand les parties auront rejoint la table des négociations et quand les hostilités auront cessé, alors la mission pourra se retirer.  La restructuration ne permet pas aux soldats de la mission d’être partout, a-t-il ensuite commenté, et il faut donc établir des priorités.  « Notre mandat est réalisable parce qu’il est bien compris et qu’il existe une volonté et des capacités », a-t-il conclu. 

Le général de division DECONINCK, commandant la force de la MINUSMA, a indiqué que la possibilité de réaliser leur mandat est une question ardue à laquelle il lui est difficile de répondre.  En tant que commandant de la force, il a expliqué avoir pour rôle de sécuriser le nord du Mali afin que les autorités et les forces de sécurité nationales puissent être redéployées.  Pour lui, cette mission est réalisable, mais il faut tenir compte d’une paix durable et de l’environnement asymétrique de ce conflit.

Le général a rappelé que sa mission travaille avec un déficit de 1 400 personnes par rapport au plafond autorisé, ce qui n’est pas rien.  Il a également indiqué que ces lacunes resteraient après lui, puisqu’il a lui-même trouvé la situation telle quelle.  Pour le général Deconinck, la constitution des forces est un aspect essentiel.  Il faut éliminer les tâches inutiles et bien équiper et former les soldats.

Le général a en outre jugé le renseignement crucial pour la mission, notamment pour prévenir les attaques.  Pour lui, le renseignement est capital et pourrait par exemple permettre de prévoir les localités susceptibles d’être attaquées.  Au sujet de la protection des forces, il a souhaité disposer de drones supplémentaires et d’un système de caméras. 

Interrogé sur la performance des troupes de la MINUSMA, le général a expliqué que sa mission la mesurait de manière continue.  Il a aussi parlé des « embouteillages d’acteurs » sur le terrain, mais a précisé que cela était utile pour la réussite de la mission au Mali, car l’opération française Barkhane, la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S), l’armée malienne et les soldats de la paix de l’ONU se doivent de coordonner au quotidien leurs actions.  Pour lui, la MINUSMA n’est pas la mission la plus dangereuse, comme on voudrait le faire croire.  Il a aussi déploré cette image qui ne facilite pas l’attrait de cette mission pour les femmes.

Le général de corps d’armée MUSHYO KAMANZI, commandant la force de la MINUSS, a expliqué que ses troupes servaient à la protection et la facilitation du travail des autres composantes de la mission.  Pour que l’action des troupes soit couronnée de succès, il faut que le mandat soit à la hauteur, notamment avec un nombre adéquat de soldats, a-t-il fait valoir.  Il a dit considérer le renseignement dans le cadre du maintien de la paix comme une pièce essentielle, car il permet de mieux gérer les ressources humaines et de préserver la vie des troupes et des civils.  Il a noté que du matériel de surveillance aérien pourrait par exemple permettre de prévenir les attaques contre les civils.

S’agissant de l’exploitation et des atteintes sexuelles, le général Mushyo Kamanzi a assuré que la politique de tolérance zéro du Secrétariat est appliquée au sein des contingents de la MINUSS.  Selon lui, c’est au commandement qu’il revient de mettre en œuvre cette politique, afin également de créer un environnement de confiance avec les populations et d’éviter d’en arriver à une situation où la confiance fait défaut, ce qui est préjudiciable pour le renseignement. 

Au sujet de l’augmentation des troupes féminines, le général a dit qu’en tant que commandant, il prenait les troupes qu’on met à sa disposition.  Pour lui, c’est aux États Membres, notamment aux pays fournisseurs de contingents, de promouvoir l’augmentation de la participation des femmes aux missions de maintien de la paix.

Réagissant à une question relative à la responsabilité des soldats dans la réussite de la mission, le général a enfin expliqué que les troupes sont censées créer des conditions pour faciliter la réussite des processus politiques.  De ce fait, le rôle de tous est crucial et c’est la symbiose des efforts qui peut conduire à la réussite du mandat de la mission, a-t-il conclu.

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