8217e séance – matin
CS/13266

Conseil de sécurité: nombreux appels à ne pas retarder davantage la mise en œuvre de la résolution 2401 pour une aide humanitaire immédiate en Syrie

« Humiliant », « ironie terrible », « horreurs diaboliques » - certains membres du Conseil de sécurité n’ont pas mâché leurs mots, aujourd’hui, pour exprimer leurs vives préoccupations face à la situation humanitaire en Syrie, en particulier dans la Ghouta orientale, en pointant le défaut d’application de la résolution 2401 (2018).  Adopté il y a un peu plus d’un mois, le 24 février, ce texte exigeait une cessation des hostilités d’au moins 30 jours partout en Syrie pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire et les évacuations sanitaires.

« La crise en Syrie est avant tout une grave violation de la norme bien établie de protection des civils et de leurs biens en temps de guerre », a dénoncé le Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, M. Stephanus Abraham Blok, qui présidait la séance.  Il a jugé « humiliant » que le Conseil soit incapable de faire respecter les normes du droit international humanitaire. 

Dénonçant un « mépris total » pour les civils, le Ministre néerlandais a accusé le régime syrien et ses alliés, « dont la Fédération de Russie », d’avoir piégé des centaines de milliers de civils dans la Ghouta orientale en poursuivant sans relâche leur offensive. 

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, venu présenter le rapport du Secrétaire général, a averti que ces derniers mois ont compté parmi les pires pour de nombreux civils en Syrie.  Outre le cas de la Ghouta orientale, il s’est attardé sur les situations qui prévalent à Afrin, à Raqqa, ainsi que dans la province d’Edleb « où la situation demeure catastrophique ».

M. Mark Lowcock a notamment signalé que, depuis l’adoption de la résolution 2401 (2018), les opérations militaires dans la Ghouta orientale ont fait plus de 1 700 morts, les attaques contre des infrastructures civiles et médicales continuant de plus belle.  Il a aussi signalé que des tirs de roquettes provenant de cette région ont fait des dizaines de morts à Damas. 

À cela s’ajoute le déplacement de dizaines de milliers de civils originaires de la Ghouta orientale, dont 52 000 qui sont hébergés dans le Rif-Damas dans des abris surpeuplés -des abris non gérés par l’ONU qui manquent d’eau, de systèmes d’assainissement et de sanitaires-, sans oublier les risques de violence sexiste et la situation des enfants non accompagnés.

Les « transferts de civils de la Ghouta orientale » ont d’ailleurs été vivement dénoncés par le représentant de la France qui y a vu une part intégrante de la stratégie militaire du régime syrien pour faire capituler l’opposition. 

Le représentant français a présenté la résolution 2401 (2018) comme toujours pertinente dans la mesure où la cessation des hostilités de 30 jours n’a pas eu lieu et, donc, la mise en œuvre des dispositions du texte n’a pas encore commencé.  Les principaux coauteurs de la résolution, le Koweït et la Suède, ont misé sur la mise en œuvre de cette résolution qui est « la seule voie pour améliorer la situation humanitaire ».  Ces deux délégations ont évoqué plusieurs mesures qui permettraient de garantir la protection des civils. 

« L’ironie terrible du moment actuel doit être reconnue, car au cours des 30 jours qui ont suivi l’exigence de l’imposition du cessez-le-feu, les bombardements n’ont fait que s’intensifier », a déploré la représentante des États-Unis, qui a accusé la Russie d’avoir négocié de manière « cynique » un cessez-le-feu qu’elle a immédiatement bafoué et d’avoir de surcroît l’« audace » d’affirmer qu’elle est le seul État à le respecter. 

De l’avis de la délégation américaine, un Conseil responsable exprimerait son indignation devant le fait qu’au moins 1 700 civils ont été tués lors d’une campagne militaire lancée alors qu’un cessez-le–feu a été exigé.  « C’est une farce, un moment de honte qui appelle à réfléchir à ce qui se produit lorsque nous ne faisons pas preuve d’unité », s’est-elle exclamée.

Soucieuse également de l’acheminement de l’aide humanitaire sur le terrain, la représentante du Royaume-Uni a exhorté la Russie à user de son influence pour faciliter les choses.  Elle a affirmé que « les 100 000 civils qui se trouvent encore dans la Ghouta orientale, manquant de tout, savent pertinemment comment les civils d’Alep ont été punis en décembre 2016 ».

« Certains membres du Conseil préfèrent passer leur temps à faire des discours enflammés, sans doute pour cacher le fait qu’ils ne peuvent pas mettre en œuvre la résolution 2401 (2018) », a rétorqué le représentant de la Fédération de Russie en affirmant que son pays était « le seul membre du Conseil à prendre des mesures concrètes pour appliquer ladite résolution », moyennant la distribution de repas chauds et d’eau sur le terrain.

Ce dernier a aussi souligné que près de 120 000 personnes, « toutes volontaires », avaient quitté la Ghouta orientale en exprimant la difficulté qu’il y avait à vivre sous le joug des extrémistes.  Il a aussi qualifié de mensonges les informations circulant sur le recours à la torture, précisant que la sécurité est garantie par les autorités syriennes, le Centre pour la réconciliation et le Croissant-Rouge arabe syrien.

« La Ghouta orientale ne s’est pas effondrée, elle a été libérée, comme avait été libéré l’est d’Alep », a déclaré pour sa part le représentant de la Syrie en affirmant que « c’est le terrorisme qui s’est effondré ».  Il a accusé les « groupes terroristes » d’avoir utilisé les civils comme boucliers humains et d’avoir pris le contrôle de l’assistance humanitaire pour la distribuer à leurs partisans ou la vendre sur des marchés, ainsi que d’avoir pilonné les passages sûrs ouverts par le Gouvernement.

« Après 49 rapports, des centaines de briefings et des milliers d’heures de réunions, certains refusent encore de reconnaître que la crise humanitaire en Syrie est le résultat d’un investissement dans le terrorisme », a plaidé le délégué.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Rapport du Secrétaire général sur l’application des résolutions du 2139 (2014), 2165 (2014), 2258 (2015), 2191 (2014), 2393 (2017), 2332 (2016) et 2393 (2017) du Conseil de sécurité (S/2018/243)

Déclarations

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, intervenant par visioconférence depuis Genève, a indiqué que ces derniers mois ont compté parmi les pires pour de nombreux civils en Syrie.  Il a signalé que depuis l’adoption de la résolution 2401 (2018), le 24 février, les opérations militaires, notamment les frappes aériennes, dans la Ghouta orientale avaient tué plus de 1 700 personnes et que des attaques contre des infrastructures civiles continuent d’être signalées, dont au moins 28 installations médicales qui ont été touchées depuis la mi-février. 

Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la fréquence des attaques contre les centres et les personnels médicaux durant les deux premiers mois de l’année a triplé comparativement à 2017.

Il a aussi signalé que ces dernières semaines, au moins 78 personnes avaient été tuées à Damas et 230 autres blessées par des tirs provenant de la Ghouta orientale, notamment lorsqu’une roquette a frappé le marché de Kashkul, à Jaramana City, faisant au moins 35 morts. 

Des dizaines de milliers de civils ont été déplacés et les informations indiquent que 80 000 d’entre eux ont été transportés vers la ville de Damas et Rif-Damas, et que 20 000 combattants et civils ont été transporté vers le nord-ouest du pays. 

En outre, 52 000 civils originaires de la Ghouta orientale sont hébergés à Rif-Damas dans des abris surpeuplés, manquant d’eau, de systèmes d’assainissement et de sanitaires, sans oublier les risques de violences sexistes et la situation des enfants non accompagnés.

Depuis le 13 mars, a-t-il poursuivi, l’ONU, qui n’est pas responsable de la gestion de ces sites, s’est mobilisée en coordination avec le Croissant-Rouge arabe syrien pour fournir un appui à ces populations évacuées, moyennant notamment la distribution de vivres, l’installation de toilettes et l’acheminement de camions-citernes. 

En outre, l’ONU se tient prête à acheminer de quoi nourrir 16 500 personnes à Douma, mais les lettres de facilitation doivent toujours être signées par le Gouvernement syrien.  L’ONU et ses partenaires, a-t-il souligné, doivent bénéficier d’un accès sans entrave à toutes les personnes affectées par la situation dans le Ghouta orientale.

Outre la Ghouta orientale, environ 183 500 personnes ont été déplacées par les hostilités dans le district d’Afrin et les villages qui les hébergent, notamment Tal Refaat, Nubul et Zahraa, sont surpeuplés.  Il a annoncé qu’il y a deux jours, le 25 mars, un convoi interagences avait livré une aide pour 50 000 personnes à Tal Refaat, mais que d’une manière générale, les partenaires humanitaires peinent à atteindre cette région, d’autant plus que l’accès des personnes déplacées d’Afrin à la ville d’Alep est actuellement limité.  Il s’est notamment préoccupé de la question des évacuations médicales des personnes gravement malades vers des hôpitaux à Alep, quatre décès étant à déplorer faute de soins appropriés. 

Il a par ailleurs rapporté qu’entre 50 000 et 70 000 personnes se trouveraient encore dans la ville d’Afrin.  Le Gouvernement turc s’étant montré disposé aux opérations transfrontalières mandatées par le Conseil, l’ONU prévoit d’y acheminer des convois dans un avenir proche.

Tournant ensuite son attention sur la province d’Edleb, « où la situation demeure catastrophique », M. Lowcock a indiqué qu’aux 400 000 personnes déplacées depuis la mi-décembre, s’ajoutent des milliers de personnes venant de la Ghouta orientale dont la majorité ne parvient pas à trouver un abri. 

Il a fait état d’une recrudescence de la violence ces derniers jours, précisant que selon des sources locales, le 20 mars, des frappes aériennes contre un abri de déplacés aux alentours du village de Haas aurait fait au moins 10 morts. 

Des dizaines d’autres ont été tuées le lendemain lors de frappes contre le village Kafr Battikh, et le surlendemain, 35 personnes ont trouvé la mort lorsque le marché de Harim a été pris pour cible.  Des tirs ont également repris dans le sud de la Syrie depuis le 12 mars, notamment aux alentours de la ville de Deraa où aucun tir n’avait été signalé depuis la création d’une zone de désescalade l’an dernier.  Il s’agit donc d’une évolution des moins bienvenues, a-t-il dit.

M. Lowcock a par ailleurs fait savoir que le 19 mars, l’ONU avait reçu, après une longue attente, l’autorisation des autorités syriennes pour le déploiement, à Raqqa, d’une mission d’évaluation du Service de la lutte antimines de l’ONU, du Département de la sûreté et de la sécurité des Nations Unies, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et de l’Organisation mondiale de la Santé. 

Selon l’équipe du Département de la sûreté et de la sécurité, qui a pu s’y rendre le 22 mars, même si la ville est considérée « calme et stable », des risques considérables persistent en raison de la présence de mines et d’engins explosifs, entre autres.  Il a indiqué qu’une mission d’évaluation humanitaire est en cours de préparation et que les autorisations avaient été reçues pour organiser des convois humanitaires depuis Damas vers la frontière jordano-syrienne.

Le Secrétaire général adjoint a aussi expliqué que l’ONU était parvenue à fournir une aide à 137 000 personnes grâce à des convois interagences à destination de Tel Refaat, Dar Kabira et Douma.  « Mais nous ne distribuons que des miettes, un convoi par-ci, par-là souvent; est-ce là une coïncidence, juste avant les exposés mensuels sur la situation humanitaire devant le Conseil de sécurité? »  Or, 5,6 millions de Syriens qui ont des besoins aigus ne peuvent subsister de miettes, a-t-il déploré.

M. Lowcock a ensuite fait savoir qu’il y a quelques jours, le Gouvernement syrien et d’autres parties avaient demandé à l’ONU d’appuyer davantage l’aide humanitaire destinée à la Ghouta orientale.  L’ONU compte donc déployer une équipe d’experts en situation d’urgence et a confirmé une nouvelle allocation de 20 millions de dollars du fonds humanitaire pour la Syrie afin d’appuyer les opérations dans la Ghouta orientale ainsi que les personnes déplacées d’Afrin.

Après avoir attiré l’attention sur l’exposition de photos d’enfants syriens prises par un photographe néerlandais travaillant pour « Save the Children », M. STEPHANUS ABRAHAM BLOK, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, a exprimé son émotion en tant que père devant ces photos, avant d’en brandir un exemplaire devant les membres du Conseil.  « Ces images ne devraient laisser personne indifférent », a-t-il dit. Malgré nos différences, « il faut au moins que nous nous mettions d’accord sur la nécessité de protéger les enfants ».  Pour lui, la crise en Syrie est avant tout une grave violation de la norme bien établie de protection des civils et de leurs biens en temps de guerre. 

« Nous, communauté internationale », a rappelé le Ministre, avons accepté de « réguler la conduite de la guerre » et la première mesure en ce sens avait été prise en Russie, il y a près de 150 ans, lorsqu’à Saint-Pétersbourg, les « armes causant des souffrances inutiles » ont été interdites.  Depuis lors, le droit international humanitaire s’est considérablement développé, avec les Conventions de La Haye et de Genève, dont « l’impératif » a toujours été de protéger les civils en temps de conflit, de leur épargner une catastrophe, de les sauver et de préserver leur dignité. 

Ce que nous voyons en Syrie est tout à fait le contraire, s’est alarmé le Ministre, en dénonçant un « mépris total » pour les civils.  Dans la Ghouta orientale, a-t-il précisé, le régime syrien et ses alliés dont la Fédération de Russie, qui ont piégé des centaines de milliers de civils, poursuivent sans relâche leur offensive, à coups de bombardements dans les zones peuplées, d’attaques contre les hôpitaux et le personnel médical, d’affamement de la population et d’armes chimiques. 

À Afrin, a poursuivi le Ministre, les effets de l’offensive menée par la Turquie sont clairs.  « Nous demandons à ce pays de ne pas étendre ses activités militaires à d’autres zones frontalières en Syrie ou en Iraq », a plaidé le Ministre. 

Il a rappelé qu’il y a quatre semaines, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 2401 (2018), demandant aux parties au conflit de lever tous les sièges et d’autoriser l’accès humanitaire.  Il n’y a rien là d’exceptionnel, s’est impatienté le Ministre, devant des obligations élémentaires du droit international humanitaire, développées ces dernières décennies pour « instaurer des normes minimales à la décence humaine dans les conflits ».  Il a donc jugé « humiliant » que le Conseil de sécurité soit incapable de faire respecter ces normes. 

« Nous devons, a martelé le Ministre, réaffirmer ces normes et appliquer les résolutions pertinentes. »  « Nous devons, a-t-il ajouté, renforcer la résolution 2401 (2018), en surveillant la cessation des hostilités et en exigeant l’accès des missions d’établissement des faits dans les sites et abris collectifs.  Nous devons mettre fin à la culture de l’impunité, pour une paix « crédible, stable et durable » en Syrie.  Les criminels, dont Daech et Al-Qaida, doivent savoir qu’ils sont « surveillés, suivis et identifiés ». 

Le Ministre a appelé tous les États à appuyer la mise en place d’un mécanisme international indépendant et impartial pour collecter, analyser et préserver les informations sur les crimes graves en prévision des processus judiciaires. 

Une nouvelle fois, a-t-il dit, les Pays-Bas demandent que l’on saisisse la Cour pénale internationale (CPI) de la situation en Syrie.  Il nous revient de rétablir la crédibilité de ce Conseil.  Il nous revient de veiller à un processus politique négocié dans lequel sont représentés tous les Syriens et les autres acteurs pertinents.  Il nous revient, a conclu le Ministre, de mettre fin à l’agonie du peuple syrien et de lui redonner dignité et humanité.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a fait une déclaration commune pour son pays et la Suède qui portait sur trois points: l’état de la mise en œuvre de la résolution 2401 (2018), les mesures nécessaires pour améliorer la situation humanitaire, et la responsabilité des parties dans la mise en œuvre de la résolution.  Il a déploré le non-respect de la résolution, tout en assurant faire tout ce qui est en son pouvoir pour permettre sa pleine application partout en Syrie. 

Il a cité à cet égard les livraisons partielles qui ont pu avoir lieu, ce qui est un mieux par rapport à l’impasse totale des mois précédents, attribuant ce succès à la mise en œuvre de la résolution.  Le représentant a dit apprécier les efforts constants des Nations Unies pour faciliter les pourparlers entre les parties dans la Ghouta orientale, dans le but de parvenir à un cessez-le-feu.  Il s’est dit particulièrement préoccupé par l’offensive militaire du Gouvernement qui se poursuit sur cette région ainsi que sur Deraa et Edleb, avant de s’inquiéter aussi du pilonnage de Damas à partir de la Ghouta orientale. 

Pour les deux délégations, la mise en œuvre de la résolution 2401 (2018) est la seule voie pour améliorer la situation humanitaire.  Leur représentant a souligné cinq points qui concernent la protection des civils. 

Le premier est que toutes les évacuations doivent se faire sur une base volontaire.  Le deuxième est que toutes les négociations sur l’évacuation des civils doivent inclure des représentants de civils.  Le troisième est que les convois d’aide humanitaire doivent pouvoir toujours entrer dans la Ghouta orientale, au bénéfice de ceux qui ont décidé d’y rester, une fois par semaine comme le prévoit la résolution 2401 (2018). 

Le quatrième point est un appel à cesser les violations et abus des droits de l’homme, ce qui exige une protection renforcée de la part des Nations Unies dans les abris de la région dès que les conditions de sécurité le permettront, ainsi qu’une autorisation de la part des autorités syriennes.  Comme cinquième point, le représentant a attiré l’attention sur le nombre croissant et la situation des personnes déplacées se trouvant dans les abris, appelant l’ONU à améliorer leurs conditions de vie, notamment en déployant davantage de personnel sur le terrain.

Enfin, les deux délégations ont rappelé aux membres du Conseil de sécurité, et en particulier à ceux qui ont le plus d’influence, leur responsabilité commune de travailler avec les autorités syriennes à la mise en œuvre de la résolution 2401 (2018), dans le respect du droit international humanitaire. 

Il a dit attendre des garants d’Astana –la Fédération de Russie, la République islamique d’Iran et la Turquie– qu’ils progressent dans la réalisation de leurs engagements.  Il a aussi exprimé le plein engagement des deux délégations à continuer de suivre de près la mise en œuvre de la résolution dans les rapports mensuels présentés au Conseil.

« Siège, famine, capitulation, voilà le rythme effroyable de la guerre en Syrie », a déclaré Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis).  L’ironie terrible du moment actuel doit être reconnue, car au cours des 30 jours qui ont suivi l’exigence de l’imposition du cessez-le-feu, les bombardements n’ont fait que s’intensifier. 

L’histoire ne sera pas tendre lorsque sera venu le moment de juger l’action de ce conseil, a-t-elle dénoncé, pointant notamment le fait que 1 700 personnes aient été tuées, et des écoles bombardées.  « Avons-nous tort lorsque nous montrons du doigt les forces russes qui opèrent aux côtés des forces d’Assad, la Russie qui a pris tout son temps pour négocier la résolution? » a-t-elle lancé.

La représentante a ensuite rapporté qu’au cours des négociations, « nos amis russes » quittaient constamment la salle pour discuter avec « leurs amis syriens », soit « pour les informer du contenu des négociations ou pour prendre note des instructions de Damas », a-t-elle supposé. 

Elle a aussi accusé la Fédération de Russie d’avoir négocié de manière « cynique » un cessez-le-feu qu’elle a immédiatement bafoué et d’avoir de surcroît l’« audace » d’affirmer qu’elle est le seul État à le respecte.

La déléguée a rappelé que l’instauration du cessez-le-feu mandaté par la résolution 2401 (2018) visait à faciliter l’accès humanitaire.  Cependant, a-t-elle dénoncé, les « bombes russes et syriennes » ont continuer d’empêcher l’acheminement de l’aide, et c’est uniquement lorsqu’un territoire tombe aux mains du régime d’Assad que l’aide peut enfin être acheminée.  Elle a aussi déploré le fait que les groupes armés, qui ont salué l’adoption de la résolution, soient qualifiés de terroristes par la Russie.

« Siège, famine et capitulation, le cycle se poursuit, la population de la Ghouta orientale se rend, mais les déclarations de mauvaise foi de la Russie ne nous empêcheront pas de faire part au monde de son rôle dans le bombardement. »

Si on était à la hauteur de nos responsabilités, a-t-elle poursuivi, on adopterait une résolution qui condamnerait ce qui se passe actuellement dans la Ghouta orientale, on dénoncerait les tentatives de la Russie, ainsi que les actions du régime d’Assad qui a notamment retiré les articles médicaux des convois humanitaires.

Un Conseil responsable exprimerait son indignation devant le fait qu’au moins 1 700 civils ont été tués lors d’une campagne militaire lancée alors qu’un cessez-le–feu avait été exigé.  Mais il ne peut le faire car la Russie fera tout pour protéger Bashar Al-Assad.  « C’est une farce, un moment de honte qui appelle à réfléchir à ce qui se produit lorsque nous ne faisons pas preuve d’unité », s’est-elle exclamée.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a fait le constat que la résolution 2401 (2018) n’avait pas été mise en œuvre, et que la situation humanitaire en Syrie s’était aggravée.  Il a noté que ces dernières semaines, les combats, loin de s’arrêter, ont redoublé d’intensité avec une offensive terrestre du régime, appuyé par ses alliés, la Fédération de Russie et la République islamique d’Iran.  Il a estimé que cette offensive fut planifiée et s’est déroulée de manière implacable, répétant la stratégie de terreur et de négociations parallèles utilisées à Alep pour obtenir la reddition des combattants et le déplacement forcé des populations civiles. 

Le représentant a accusé le régime et ses soutiens d’avoir bombardé des écoles et des hôpitaux et tué plus de 1 700 civils, parmi lesquels plus de 300 enfants.  Il a dénoncé le fait qu’aucun convoi humanitaire n’a été autorisé à entrer dans la Ghouta orientale depuis le 15 mars.  Au contraire, les bombardements ont forcé les populations civiles, environ 80 000 personnes, à fuir.  M. Delattre a dénoncé ces transferts de civils de la Ghouta orientale qui font partie intégrante de la stratégie militaire de la part du régime syrien pour faire capituler l’opposition.  Et les civils en sont les premières victimes, a-t-il indiqué. 

Pour la France, les déplacements forcés de population sont susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre.  M. Delattre a déclaré que les preuves de ces crimes seraient collectées, préservées et utilisées, comme cela fut mentionné au cours de la réunion en formule Arria du Conseil sur la Syrie avec le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. 

Pour protéger les populations, la France estime que l’urgence absolue est de protéger ceux qui peuvent encore l’être.  Étant donné que la cessation des hostilités de 30 jours exigée par la résolution 2401 (2018) n’a pas encore commencé, cette résolution reste donc pertinente et offre encore un cadre important à l’action commune de la communauté internationale.  Il est, de ce fait, indispensable et urgent que des convois humanitaires atteignent quotidiennement, et dans des conditions de sécurité suffisantes, la Ghouta orientale. 

Il faut aussi que les civils restés sur place dans la Ghouta orientale aient droit à une assistance humanitaire d’urgence et une protection.  L’aide doit leur parvenir là où ils se trouvent et, pour ce faire, l’ONU et ses partenaires humanitaires internationaux et locaux doivent pouvoir travailler en toute sécurité sur place, afin d’être en mesure d’évaluer les besoins des populations. 

Par ailleurs, la France appelle à l’aide aux populations déplacées.  Pour cela, il faut que l’ONU soit en mesure de renforcer son soutien aux déplacés qui ont fui la Ghouta orientale, notamment ceux qui se retrouvent dans les camps administrés par le régime.  Cela implique une augmentation du nombre de personnels internationaux sur place. 

La France déplore également la situation préoccupante qui prévaut à Afrin, où plus de 180 000 personnes auraient été déplacées.  M. Delattre a noté que la poursuite des combats à Afrin avait contraint les Forces démocratiques syriennes à arrêter leurs opérations contre Daech, dont la menace n’a pourtant pas disparu. 

Pour la France, les préoccupations légitimes de la Turquie sur la sécurité de sa frontière ne peuvent nullement justifier une implantation militaire durable dans la profondeur du territoire syrien.  M. Delattre a insisté sur le besoin de faire cesser les combats, appelant aussi à appuyer les efforts de l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, en ce sens, et plus généralement son engagement pour relancer le processus de Genève, et obtenir une solution politique durable qui soit conforme à la résolution 2254 (2015), seule voie qui permettra de mettre un terme à la crise syrienne, a-t-il assuré. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a appuyé les appels de ses homologues de la France et des États-Unis, disant qu’elle s’abstiendrait de faire, à son tour, le catalogue des horreurs « diaboliques ».  Selon elle, « le terme diabolique est fort, mais il n’en existe aucun autre pour décrire la situation sur le terrain ».  La représentante a ensuite accusé le régime d’Assad et « ceux qui l’appuient » d’avoir violé la résolution 2401 et foulé au pied l’autorité du Conseil du sécurité.

Elle s’est préoccupée du fait que depuis le 11 mars, des milliers de personnes ont quitté la Ghouta orientale pour des abris de fortune, avertissant que sans contrôle, ni aide, ces personnes vulnérables risquent d’endurer encore des abus de la part des autorités.  En outre, les secouristes et le personnel médical disent être directement pris pour cible par les autorités syriennes.  Les 100 000 civils qui se trouvent encore dans la Ghouta orientale, manquant de tout, savent pertinemment comment les civils d’Alep ont été punis en décembre 2016, a-t-elle noté.

Dans ce contexte, la représentante a appelé l’ONU à agir pour venir en aide aux personnes qui se trouvent dans les abris de fortune.  Elle a, en outre, accusé le régime syrien d’empêcher les agences humanitaires de fournir une aide aux nécessiteux et a exhorté la Russie à user de son influence pour remédier à cette situation.  Le fait est que le niveau d’accès humanitaire ne fait que s’abaisser, alors que la situation continue d’empirer, s’est-elle alarmée.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a insisté sur la mise en œuvre de toutes les résolutions du Conseil de sécurité ayant pour objectif de résoudre la crise humanitaire en Syrie.  Il faut à tout prix préserver toutes les modalités d’accès humanitaire, y compris l’assistance transfrontalière qui est indispensable pour apporter de l’aide à des millions de gens en Syrie.  De ce fait, mettre en œuvre la résolution 2401 (2018) est une responsabilité collective, et chaque membre du Conseil de sécurité devrait jouer un rôle important.

Pour le Kazakhstan, il est urgent de se focaliser sur l’assistance humanitaire sur le long terme, en œuvrant pour assurer un accès humanitaire sûr pour l’ONU et d’autres agences humanitaires, et assurer également l’évacuation des blessés.  Le représentant a salué l’accroissement des convois humanitaires dans les zones assiégées en Syrie au cours du présent mois, en comparaison avec les précédents mois. 

Il a fait observer que même si les déplacements de population ne sont pas de nature positive, au vu de la situation qui a cours en Syrie, ces déplacements peuvent être perçus comme une solution à la crise.  Il a ajouté qu’aucune solution ne peut être trouvée sans que des conditions de sécurité soient mises en place pour les déplacés dans leur lieu de chute.  

Le représentant a indiqué qu’au cours de la prochaine étape des pourparlers qui auront lieu au mois de mai à Astana, le Kazakhstan entend insister, entre autres, sur le respect des accords préalablement agréés.  Il a salué les efforts de l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, pour son rôle dans les négociations de Genève et pour les mesures qu’il a prises pour établir le dialogue entre les parties.  Il a souhaité que les obstacles qui bloquent les pourparlers de Genève soient surmontés. 

Il a également encouragé le dialogue entre le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Mark Lowcock, et la Syrie, souhaitant que le haut fonctionnaire onusien puisse se rendre dans le pays de manière régulière dans le futur.  Il a appelé à des visites d’évaluation de l’ONU dans les zones de conflit notamment, invitant aussi les autorités syriennes à coopérer avec les Nations Unies et les principales organisations humanitaires afin de faciliter la distribution de l’aide et atténuer de ce fait les souffrances. 

Il a enfin déclaré que la crise en Syrie ne peut se résoudre que par un processus politique inclusif, mené par des acteurs syriens, en vertu du Communiqué de Genève du 30 juin 2012, des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et des documents pertinents du Groupe international de soutien pour la Syrie. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a regretté que la résolution 2401 (2018) ne soit pas toujours mise en œuvre.  Il a salué des progrès limités en matière de distribution de l’aide humanitaire, et il a dit que le Pérou continuerait de défendre la protection de civils partout où il y a des conflits.  Il a déclaré être préoccupé au vu du nombre des déplacés autour de Damas, invitant à adopter des mesures pour que les citoyens syriens puissent retourner chez eux quand les conditions de sécurité le permettront. 

Il a souligné que la responsabilité de protection des civils doit être au–dessus des intérêts politiques et militaires, saluant en outre l’action des travailleurs humanitaires sur le terrain.  Le Pérou a aussi plaidé pour la poursuite des pourparlers de paix entre les parties syriennes. 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a réclamé une action coordonnée de la part de l’ensemble des parties prenantes pour assurer la pleine mise en œuvre de la résolution 2401.  Il a constaté que le conflit s’était apaisé dans certaines zones du pays, « ce qui ne signifie pas pour autant que les mesures prises aient suffi », a-t-il tempéré.  Le représentant a appelé à renforcer la volonté politique, afin de permettre au peuple syrien de jouir de la cessation des combats et d’avoir accès aux services de base.  Pour ce faire, il appelé les parties prenantes à exercer des pressions au plus haut niveau.  Le représentant a d’ailleurs exhorté les garants d’Astana à jouer leur rôle pour assurer la mise en œuvre de la résolution 2401, jugeant par ailleurs capital de permettre à l’aide humanitaire d’atteindre tous les Syriens qui sont dans le besoin.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a déploré les victimes civiles en Syrie et appelé à la mise en œuvre de la résolution 2401 (2018), afin de permettre, entre autres, l’évacuation des civils, dont certains sont blessés.  Il a salué la mission de l’ONU qui s’est rendue à Raqqa la semaine dernière, avant de souligner la nécessité du déminage pour un retour en sécurité des déplacés.  Le représentant a aussi salué les efforts humanitaires en cours en Syrie, ainsi que les actions de l’ONU et de la Fédération de Russie pour l’assistance aux populations de la Ghouta orientale.  Il a rendu hommage au travail des humanitaires qui risquent leur vie pour venir en aide aux nécessiteux. 

Pour la Bolivie, il ne faut pas perdre l’élan de Sotchi car c’est une initiative qui vient renforcer le processus de Genève.  Le représentant a plaidé pour l’application rapide de la Déclaration de Sotchi, ainsi que des accords d’Astana qui ont notamment établi les zones de désescalade.  C’est au peuple syrien qu’il revient de trancher en toute souveraineté en ce qui concerne son avenir, a—t-il souligné, précisant que la solution au conflit ne peut passer que par un processus politique inclusif. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a constaté que la situation reste difficile dans de nombreuses régions de la Syrie, et a assuré que la Fédération de Russie prenait des mesures pour la normaliser, dans le respect de la résolution 2401 (2018).  « Cela peut ne pas plaire à tout le monde, mais la Russie est le seul membre du Conseil à prendre des mesures concrètes pour appliquer ladite résolution », a-t-il affirmé. 

Près de 120 000 personnes, toutes volontaires, a-t-il insisté, ont quitté la Ghouta orientale disant à quel point il était difficile de vivre sous le joug des extrémistes.  La Russie organise la distribution de repas chauds et d’eau et a fourni, hier, une aide à une centaine de civils, dont 42 enfants. 

Le 24 mars, suite à un accord avec le Centre pour la réconciliation et les belligérants, un passage a pu être créé dans plusieurs endroits, des chemins que les familles et membres de plusieurs groupes ont pu emprunter pour se rendre à Edleb.  D’autres ont choisi de rester pour profiter de l’amnistie présidentielle. 

« On parle de torture, mais c’est un mensonge car la sécurité est garantie par les autorités, le Centre pour la réconciliation et le Croissant-Rouge arabe syrien », a poursuivi le représentant de la Russie.  Il a pointé certains membres du Conseil qui préfèrent, a-t-il affirmé, passer leur temps à faire des discours enflammés, « sans doute pour cacher le fait qu’ils ne peuvent pas mettre en œuvre la résolution 2401 (2018) ». 

Entre-temps, a-t-il déploré, les troupes extrémistes à Douma ont fait exploser quatre mines, tuant six civils, et un quartier de Damas a été pilonné.  En tout, une centaine de personnes ont été tuées par des mines à Damas et chaque jour, les rebelles démontrent de quelle manière ils sont prêts à honorer le cessez-le-feu, a-t-il ironisé.

Le représentant a ensuite souhaité connaître l’origine des données contenues dans le rapport sur les décès parmi les civils.  « On cite le Haut-Commissaire aux droits de l’homme, mais il ne dispose pas de personnel sur le terrain, les Casques blancs sont une partie intéressée, pourquoi donc n’y a-t-il pas de données provenant des autorités syriennes? » a-t-il notamment voulu savoir. 

Le délégué a également souhaité obtenir des informations sur les retours de personnes déplacées dans l’ensemble du pays et a appelé à ce que le personnel de l’ONU soit déployé pour constater l’efficacité de l’aide humanitaire.

Il a par ailleurs déploré que les bailleurs de fonds ne semblent pas être intéressés pour rétablir la normalité dans les zones contrôlées par le Gouvernement, prétendant qu’il faut accorder la priorité aux zones rebelles.  Une telle position viole le principe de neutralité de l’aide humanitaire, s’est-il alarmé. 

S’adressant directement au Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, il a souhaité que les prochains rapports mettent aussi l’accent sur la reconstruction, s’interrogeant par ailleurs sur l’utilité de parler de la situation humanitaire sans consulter les autorités syriennes. 

Le délégué s’est en outre inquiété d’informations circulant sur l’échange de services sexuels contre une aide humanitaire et s’est interrogé sur l’absence de cet incident dans le rapport.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a regretté que le Conseil se réunisse alors que la résolution 2401 (2018) n’a pas été mise en œuvre sur le terrain.  Elle a invité les parties au conflit à respecter leurs obligations en matière de protection des civils, tout en souhaitant que les victimes du conflit aient accès à la justice, et dans l’immédiat, à l’aide humanitaire qui doit être strictement contrôlée par l’ONU.  Toute négociation sur les évacuations doit aussi se faire en tenant compte de l’avis des civils, a-t-elle suggéré. 

La représentante a salué de légers progrès en matière d’accès humanitaire en ce mois de mars.  Elle a invité la Fédération de Russie et la Turquie à honorer leurs obligations en tant que garants du processus d’Astana.  Elle a souligné qu’il faut parvenir à un accord politique sur la transition politique, en vertu de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

La Pologne appelle aussi à l’unité du Conseil en ce qui concerne la résolution 2401 (2018), appelant tous ceux qui ont de l’influence sur le terrain à prendre des mesures pour que les hostilités cessent en Syrie. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a constaté que « l’armistice de 30 jours » prévu par la résolution était « dépassé », de même qu’il a noté la recrudescence des violences, y compris des bombardements et attaques aériennes dans des zones résidentielles, qu’il a attribués à « toutes les parties ».  Ces faits ont empêché de protéger les civils et de livrer l’assistance humanitaire dans la sécurité, a constaté le représentant, pour qui la prolongation du conflit ne servirait qu’à aggraver encore la situation humanitaire et aurait un impact de plus en plus lourd sur les pays voisins qui accueillent des réfugiés. 

Rappelant que la priorité absolue était d’apaiser les souffrances du peuple syrien, « seul perdant », la délégation a demandé aux puissances qui ont de l’influence sur les acteurs du conflit de redoubler d’efforts.  Il a noté que le Conseil de sécurité n’avait pas été en mesure d’atteindre l’objectif recherché par l’adoption de la résolution 2401 (2018) et conclu en affirmant que son pays appuierait toute nouvelle initiative de paix, tout en rendant un hommage appuyé au Coordonnateur des secours d’urgence. 

M. THÉODORE DAH (Côte d’Ivoire) a appelé à protéger les populations en Syrie, ainsi que le personnel humanitaire.  Plus d’un mois après l’adoption à l’unanimité de la résolution 2401 (2018), il a constaté « à son grand regret » que ce texte n’a pas connu la mise en œuvre escomptée. 

Il a noté en effet que la cessation des hostilités en vue de permettre l’acheminement, en sécurité et sans entrave, de l’aide humanitaire et des services connexes, de même que l’évacuation sanitaire des personnes gravement malades et des blessés, n’était toujours pas effective, « en dépit de nos efforts communs », a-t-il précisé. 

Le représentant a regretté les conditions extrêmement difficiles dans lesquelles vivent des milliers de civils contraints à l’exil.  Il a appelé à nouveau à la mise en œuvre effective de la résolution 2401 (2018) et exhorté le Conseil à surmonter ses divergences et à faire preuve d’unité à cet égard. 

Il a espéré que la deuxième Conférence internationale de soutien à l’avenir de la Syrie et de la région, prévue à Bruxelles les 24 et 25 avril 2018, à l’initiative de l’Union européenne, aboutira à des engagements d’augmentation de l’aide humanitaire et de l’appui au développement. 

Enfin, il a invité les parties à privilégier la voie du dialogue politique et à reprendre les pourparlers de paix dans la cadre du Processus de Genève.

M. WU HAITAO (Chine) a invité toutes les parties au conflit en Syrie à placer l’intérêt des populations au-dessus de toutes les autres considérations.  Il a salué les évacuations de civils, souhaitant que la mise en œuvre de la résolution 2401 (2018) se poursuive.  La Chine salue le processus d’Astana et souhaite que la réunion à venir soit la base de la poursuite du processus de Genève que dirige l’Envoyé spécial Staffan de Mistura, a-t-il ajouté, avant d’appeler le Conseil de sécurité à rester uni sur la question syrienne et à parler d’une seule voix. 

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a indiqué vouloir faire quelques remarques après la déclaration commune de son collègue du Koweït faite au nom des deux pays.  Il a rappelé que le Conseil avait adopté la résolution 2401 (2018) par consensus il y a un mois en réaction à l’horrible situation humanitaire en Syrie, avant de se réjouir d’entendre aujourd’hui un même engagement pour la mise en œuvre de ce texte. 

Il a dit comprendre qu’il y avait un accord au sein du Conseil sur plusieurs questions cruciales, citant tout d’abord la déception commune liée au manque d’application de la résolution.  Celle-ci reste applicable à toutes les parties qui sont obligées de s’y conformer, a-t-il rappelé. 

Le représentant a également noté la préoccupation commune par rapport à la poursuite des hostilités dans le pays, en particulier l’offensive militaire dans la Ghouta orientale.  Il a plaidé pour le départ volontaire de ceux qui veulent quitter cette zone, et pour que ces personnes aient des abris sûrs et aussi le droit de retourner chez eux par la suite.  En même temps, les convois humanitaires doivent continuer à apporter une aide à ceux qui choisissent de rester, a-t-il rappelé. 

Les efforts visant à renforcer la protection des civils doivent être renforcés par l’ONU et ses partenaires, tant dans la Ghouta orientale que pour ceux qui quittent les abris collectifs, a-t-il ajouté.  Il a insisté pour que la prévention de la violence sexiste et sexuelle fasse partie intégrante de ces efforts. 

Le représentant a souhaité entendre l’avis du Secrétaire général adjoint sur des mesures supplémentaires que l’ONU pourrait prendre pour améliorer la protection des civils qui restent ou qui quittent la Ghouta orientale.  « Le Conseil et l’ONU peuvent-ils faire mieux par rapport à ce qui s’est passé à Alep ou Homs en tirant parti des leçons apprises? »

Rappelant que la résolution 2401 (2018) s’applique partout en Syrie, le représentant a fait part de ses préoccupations concernant l’opération menée par la Turquie à Afrin et les déclarations de la Turquie sur l’extension de ses opérations militaires au nord au-delà d’Afrin. 

Il s’est également inquiété de la protection des civils qui quittent Afrin et des conditions difficiles que rencontrent ceux qui y vivent.  Il a donc lancé un appel aux parties et en particulier à la Turquie pour que soit assurées la protection des civils, la fourniture de l’aide humanitaire à travers les frontières et les lignes de démarcation, ainsi que la liberté de mouvement des personnes déplacées.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a dit avoir vérifié la liste des membres du Conseil et constaté que seuls deux États actuellement membres disposaient d’ambassades à Damas.  Les déclarations de ces deux membres résultent d’évaluations objectives et ce sont les seuls qui soient vraiment informés de la situation dans le pays, a-t-il affirmé. 

Le représentant a ensuite déclaré qu’il avait « de bonnes nouvelles » à donner, ajoutant: « l’heure de libérer la Ghouta orientale est venue », avant de poursuivre en affirmant que de même seraient libérés, « le Golan, Afrin et Edleb » car, en tant qu’État, « nous rejetons toute puissance d’occupation sur notre territoire ». 

Ces victoires n’auraient pu être obtenues sans les sacrifices de l’armée syrienne appuyée par le peuple syrien et nos alliés, a poursuivi M. Ja’afari, qui a dénoncé une « guerre terroriste mondiale » menée par « l’Arabie saoudite, le Qatar, Israël, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ». 

Les souffrances des Syriens sont le résultat des pratiques armées des groupes terroristes, menées à l’encontre des civils, a poursuivi le représentant, qui a fait état de « milliers de témoignages » de la part des personnes qui ont pu quitter la Ghouta orientale. 

Il a accusé les « groupes terroristes » d’avoir utilisé les civils comme boucliers humains et d’avoir pris le contrôle de l’assistance humanitaire pour la distribuer à leurs partisans ou la vendre sur des marchés, ainsi que d’avoir pilonné les passages sûrs ouverts par le Gouvernement.

M. Ja’afari a ensuite dénoncé un « état d’hystérie » au Conseil de sécurité ces dernières semaines, alors que le Gouvernement syrien cherchait à exercer son droit souverain et à combattre les terroristes, mettant ainsi, selon le représentant, en œuvre les résolutions du Conseil. 

Pour M. Ja’afari, les « États qui appuient les terroristes » n’ont fait que chercher à prolonger les souffrances de la population afin d’obtenir la chute du Gouvernement syrien.  « Leur plan a échoué », a-t-il affirmé, échoué à présenter des groupes takfiristes comme une opposition modérée. 

« La Ghouta orientale ne s’est pas effondrée, elle a été libérée, comme avait été libéré l’est d’Alep », a encore affirmé le représentant, pour qui « c’est le terrorisme qui s’est effondré ».  « Oui, cette journée doit être une journée de honte, pour ceux qui, au fil des ans, ont parrainé le terrorisme pour tenter de renverser le Gouvernement par la force au profit de groupes takfiristes, et qui ont imposé des souffrances indicibles au peuple syrien », a encore lancé le représentant. 

Le Conseil de sécurité a organisé « 49 séances formelles pour se pencher sur la situation humanitaire en Syrie, sans compter les réunions informelles », a recensé le représentant, qui a estimé que tous les rapports et briefings avaient été « dénués de tout professionnalisme », ne tenant aucun compte des attaques menées par la coalition internationale contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de son pays.  « Après 49 rapports, des centaines de briefings et des milliers d’heures de réunions, certains refusent encore de reconnaître que la crise humanitaire en Syrie est le résultat d’un investissement dans le terrorisme », a encore accusé le représentant. 

M. Ja’afari s’en est ensuite pris au Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaire et aux rapports du Secrétaire général.  Il a notamment fait observer que M. Mark Lowcock avait parlé de l’attaque sur le marché de Kashkul, ciblé par un missile, sans préciser qui avait tiré celui-ci. 

Il l’a aussi accusé de n’avoir pas fait état du rôle du Gouvernement syrien dans l’approvisionnement des centres collectifs « qui accueillent quelque 150 000 déplacés ».  Si le Gouvernement n’a pas de rôle à ajouter, pourquoi nous demandez-vous de vous aider, a-t-il demandé avant d’affirmer que son gouvernement avait assuré la distribution durant la semaine écoulée de 4 000 tonnes de vivres aux civils qui quittaient la Ghouta orientale. 

Le représentant a en outre dénoncé le fait que le rapport du Secrétaire général consacre « neuf paragraphes » aux souffrances des civils dans la Ghouta orientale du fait des attaques des forces gouvernementales mais « une seule phrase » à la situation à Damas même, où des tirs venus de la Ghouta orientale ont aussi fait des victimes.  En outre, « qui a forcé 150 000 personnes à quitter Afrin et sa région, sinon l’agression turque », a-t-il ajouté. 

« Nous espérons que les Nations Unies ne répéteront pas dans la Ghouta orientale l’attitude qui a été la leur ailleurs », a poursuivi M. Ja’afari, qui les a accusées de n’avoir pas apporté d’aide dans les zones « libérées ». 

Enfin, le représentant a accusé « certains pays » de fabriquer de faux éléments de preuve en vue notamment de lancer de nouvelles accusations d’utilisation d’armes chimiques dans la Ghouta orientale, dénonçant par avance une « comédie ».

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