Soixante-treizième session,
25e & 26e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4239

Éducation, eau, logement, santé mentale: la Troisième Commission s’intéresse à ces droits sous l’angle des personnes en mouvement et du rôle des États

Les cinq Rapporteurs spéciaux qui se sont entretenus, aujourd’hui, avec les délégations à la Troisième Commission ont cherché à identifier les moyens de promouvoir les droits de l’homme en faveur des personnes les plus vulnérables, notamment les migrants et les réfugiés, sous l’angle de l’éducation, du logement, de l’accès à l’eau ou encore de la santé mentale.  Ils se sont également interrogés sur l’action de la société civile, les prétentions du secteur privé et les capacités de l’État, en particulier dans la lutte contre la pauvreté extrême, en s’élevant le plus souvent contre la tendance visant à marginaliser le rôle régulateur de ce dernier.

Les prémisses de la privatisation sont basées sur des postulats fondamentalement différents de ceux qui sous-tendent le respect des droits de l’homme, a accusé M. Philip Alston, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté.  « Le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui a été fondamentalement transformé par l’expansion généralisée de politiques économiques néolibérales », l’objectif étant d’assurer une « présence minimale de l’État » dans la vie des citoyens, a-t-il regretté.

C’est aussi le constat du Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, M. Leo Heller, pour qui la mondialisation et la vague néolibérale ont souvent affaibli le rôle de l’État dans la fourniture et la régulation des services d’accès à l’eau et à l’assainissement.  L’idée d’une plus grande efficacité du secteur privé ou de sa plus grande aptitude à mobiliser des ressources financières, l’affirmation qu’il serait plus innovant, pourrait générer des profits plus importants, serait plus flexible et pourrait éviter les rigidités et l’inefficacité des bureaucraties gouvernementales ont été vigoureusement contestées par M. Alston, qui a dénoncé une énorme déconnection entre cette version idéalisée et les résultats de nombreuses études théoriques et empiriques sur le sujet.  Pour lui, les initiatives privées sont souvent plus coûteuses, moins efficaces et fournissent des services de qualité inférieure, tout cela en amassant des profits considérables.

L’affaiblissement du rôle régulateur ou moteur de l’État soulève en tout cas des questions quant à la possibilité d’une réglementation efficace des prestataires de services privés et des défis aux mécanismes de redevabilité, a ajouté M. Heller. 

Or, jugé fondamental par l’Espagne, ce principe de redevabilité est aussi l’un des principaux facteurs permettant d’assurer le bien-être économique d’un pays, a estimé la Fédération de Russie, alors que l’Union européenne lui accordait deux aspects, l’un correctif et l’autre préventif.  Mais si le principe est approprié, il est susceptible d’interprétations diverses, et donc d’abus, a mis en garde l’Afrique du Sud.

Le rôle de l’État était également présent dans la présentation de la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, Mme Koumbou Boly Barry, pour qui la mise en œuvre de celui-ci incombe aux gouvernements.  Mais comment s’en prendre à l’État quand cela n’est pas fait? a demandé l’Afrique du Sud.

Surtout comment assurer le suivi de l’éducation pour les migrants et les réfugiés, a enchaîné le Maroc, alors que l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture s’interrogeait sur les mesures que les gouvernements pourraient prendre pour intégrer l’éducation des réfugiés dans les plans et politiques d’éducation nationale.

Il a encore été beaucoup question des réfugiés et migrants dans les discussions de ce jour.  En matière d’éducation, la Convention relative au statut des réfugiés est claire et dispose expressément que les réfugiés doivent être traités sur le même pied d’égalité que les nationaux, au moins en ce qui concerne l’enseignement primaire, a insisté Mme Boly Barry.  Or, a-t-elle rappelé, seuls 61% des enfants réfugiés ont accès à l’enseignement primaire, contre une moyenne mondiale de 91%. 

Le Rapporteur spécial sur le droit qu’à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, M. Dainius Pūras, s’est, lui aussi, intéressé aux quelque 65,6 millions de personnes dans le monde qui ont été forcées de quitter leur domicile du fait des conflits, de diverses formes de violences, de catastrophes ou de la pauvreté.  Son rapport traite en effet à la fois du droit à la santé mentale des enfants et des familles en déplacement, et de la détention des personnes migrantes, une pratique que de nombreux pays ont adoptée comme stratégie par défaut pour réglementer la mobilité humaine.  M. Pūras a notamment dénoncé les atteintes à l’unité familiale dans le contexte de la mobilité humaine comme portant préjudice à la santé mentale et au bien-être des enfants et des adolescents en mouvement, avec des conséquences susceptibles de durer des années.

C’est surtout face à la « violation terrible des droits de l’homme » que constitue la question des sans-abri que la Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination dans ce contexte, Mme Leilani Farha, s’est élevée, qui a rappelé qu’un quart de la population urbaine mondiale, soit 870 millions de personnes, vit dans des logements inadéquats, dépourvus de services d’eau et d’assainissement.  La Rapporteuse spéciale a dit ne pas comprendre pourquoi, dans toujours plus de pays, les gouvernements avaient du mal à gérer la crise du logement et le faisaient de manière parcellaire plutôt qu’en adoptant une stratégie globale fondée sur les droits de l’homme. 

Enfin, huit délégations sont intervenues aujourd’hui dans le cadre de la discussion générale sur tous les aspects de la protection et la promotion des droits de l’homme, thème dont la Troisième Commission continuera l’examen lundi 22 octobre, à partir de 10 heures.  Experts et délégations dialogueront en particulier sur les droits des personnes handicapées ou atteintes d’albinisme, sur les libertés de religion ou de croyance ainsi que d’opinion et d’expression et sur les effets de la dette sur les droits de l’homme, notamment les droits économiques, sociaux et culturels. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Déclaration liminaire

Mme KOUMBOU BOLY BARRY, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, a présenté son rapport, consacré principalement au droit à l’éducation des réfugiés, une question « particulièrement pertinente dans le contexte actuel ».  Insistant sur le fait que plus de la moitié des 25,4 millions de réfugiés dans le monde ont moins de 18 ans, donc sont en âge d’aller à l’école et que la précarité de leur situation perdure pendant des décennies, la Rapporteuse spéciale a expliqué que l’éducation des réfugiés devait être envisagée à moyen et long terme pour permettre le développement pacifique et durable des pays hôtes, ainsi que la reconstruction des pays en proie aux conflits, grâce au retour de populations qualifiées et instruites. 

Seuls 61% des enfants réfugiés ont accès à l’enseignement primaire, contre une moyenne mondiale de 91% et les filles sont deux fois moins susceptibles de s’inscrire à l’école que leurs pairs masculins, a fait observer Mme Boly Barry.  Or, il y a là une responsabilité de l’État, d’autant que la Convention relative au statut des réfugiés dispose expressément qu’ils doivent être traités sur le même pied d’égalité que les nationaux, au moins en ce qui concerne l’enseignement primaire. 

Mme Boly Barry a rappelé que la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, de 2016, faisait de l’éducation un élément essentiel de la réponse à la crise de réfugiés.  Elle a d’ailleurs noté que la Déclaration appelait également à l’élaboration d’un pacte mondial sur les réfugiés, apportant son « soutien total » à ce dernier.

La Rapporteuse spéciale a ensuite présenté ses recommandations pour aider les États Membres dans leurs efforts visant à assurer une éducation inclusive de qualité aux réfugiés.  Elle a cité, entre autres, le fait d’anticiper et répondre aux différences culturelles et linguistiques de ces étudiants ou encore de mettre à leur disposition des formes d’éducation souples, telles que l’éducation accélérée, l’éducation non formelle, les rattrapages, les programmes de transition et de soutien linguistique intensif, et ce, afin de les aider à combler le fossé des années de scolarisation manquées ou à acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour s’adapter au système d’enseignement du pays d’accueil.

Répétant que la mise en œuvre du droit à l’éducation incombe aux États, la Rapporteuse spéciale a ajouté que ces derniers devaient aussi prendre les mesures nécessaires pour que les familles de réfugiés soient bien intégrées dans la communauté, notamment en accordant des permis de travail leur permettant de s’affranchir de la pauvreté.  Elle a demandé qu’une attention particulière soit accordée à l’accès des filles réfugiées à l’école.  En outre, les États devraient aussi prendre les mesures nécessaires pour qu’existe un nombre suffisant d’enseignants formés et motivés pour répondre efficacement aux situations des apprenants en situation de crise, ce qui suppose notamment un salaire adéquat et un soutien psychologique approprié.  Il serait d’ailleurs souhaitable que soient utilisés des enseignants de profession se trouvant parmi les réfugiés. 

Sur l’aspect financier, Mme Boly Barry a rappelé que les pays en développement étaient les principales victimes de la crise mondiale des réfugiés, et que ces derniers se retrouvaient souvent dans des endroits où les ressources étaient limitées.  « Il est pour cela essentiel que les donateurs, les agences d’aide et les organisations internationales planifient et financent de manière adéquate l’inclusion des réfugiés dans l’éducation » a-t-elle insisté.

La Rapporteuse spéciale a enfin rappelé que les apprenants des populations réfugiées souffraient souvent de cicatrices émotionnelles trop souvent ignorées ou traitées superficiellement dans les programmes éducatifs.  Elle a donc insisté sur le fait que les États devaient prendre des mesures appropriées pour intégrer une dimension psychosociale, ainsi que des valeurs de paix, de spiritualité, de confiance en soi, de tolérance et d’inclusion dans le noyau pédagogique. 

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec Mme Koumbou Boly Barry, le Qatar a dit accepter les recommandations de la Rapporteuse spéciale car elles accordent un intérêt particulier à la nécessité pour les jeunes filles réfugiées d’aller à l’école.  Les filles reçoivent « la part du lion de l’éducation » au Qatar, notamment celles vivant en situation de vulnérabilité.  Le Qatar a demandé à Mme Boly Barry de faire état des bonnes mesures prises par les États à cet égard. 

Le Royaume-Uni a rappelé qu’il travaillait en partenariats multilatéraux dans le domaine de l’éducation.  Il fournit notamment un appui important à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et apporte des mesures d’assistance dans le cadre du Programme 2030.  Il considère également qu’il faut 12 ans d’éducation au moins pour les garçons comme pour les filles et qu’une plus grande attention doit être accordée aux différentes formes de violence auxquelles sont confrontés les enfants.  Dans ce contexte, il a demandé comment améliorer l’accès et la qualité de l’éducation dans le monde. 

L’Union européenne a rappelé son ferme engagement à garantir le droit à l’éducation pour tous.  Face aux conflits qui durent dans le monde, il est essentiel de réfléchir à des solutions d’éducation à long terme pour répondre aux besoins des personnes déplacées.  À cette fin, l’Union européenne accorde des bourses pour permettre aux réfugiés d’aller dans des universités nationales et finance des solutions pour les jeunes en situation d’urgence.  L’Union européenne a souhaité savoir comment faire en sorte qu’il y ait suffisamment d’enseignants pour les situations d’urgence et a demandé des exemples de bonnes pratiques en la matière. 

L’Indonésie a estimé que l’éducation en situation d’urgence méritait une attention particulière et un financement supplémentaire de la communauté internationale.  Elle a toutefois reconnu que les États avaient de nombreux obstacles à surmonter en la matière, notamment pour réaliser l’objectif 4 de développement durable d’une éducation de qualité.  Elle a aussi demandé comment impliquer les réfugiés dans les mesures les concernant en lien avec l’éducation.  Enfin, elle a souhaité en savoir plus sur les avantages pour les jeunes d’Internet et des technologies de l’information et de la communication.  Cette question a également été posée par l’Estonie, qui estime par ailleurs que l’éducation est un des outils les plus efficaces pour la prévention des conflits et permettre la création de sociétés résilientes, et fournit à cette fin une éducation de qualité aux réfugiés, l’objectif étant d’intégrer les enfants de réfugiés dès leur arrivée dans le pays. 

Le Maroc a souhaité savoir quel système éducatif devrait être mis en place pour garantir un droit effectif à l’éducation pour les réfugiés.  Il aimerait également savoir comment garantir la reconnaissance de certificats d’éducation antérieurs dans un nouveau pays dans le cas des réfugiés et comment l’éducation peut permettre à ces personnes de s’intégrer dans la société. 

Cuba a souligné que, depuis le 1er janvier 1959, la garantie d’une éducation complète et gratuite est l’un des principaux engagements du Gouvernement.  Celui-ci a développé des efforts importants dans ce domaine, comme cela est reconnu par le système spécialisé des Nations Unies, mais il est limité par la politique criminelle de blocus imposée par les États-Unis. 

Le Portugal a rappelé qu’il avait mis en place une plateforme mondiale pour les étudiants syriens, laquelle a permis l’octroi de nombreuses bourses à ces jeunes.  Il a lancé un appel pour la création d’un mécanisme de réponse rapide dans ce domaine et a, lui aussi, demandé ce qui pourrait être fait pour soutenir l’inclusion des réfugiés dans les États d’accueil. 

La Hongrie a mis l’accent sur l’éducation des minorités et le droit de recevoir une éducation dans sa langue maternelle.  Le Gouvernement hongrois s’est engagé à promouvoir le droit des minorités à l’éducation et la législation en vigueur étend ses dispositions aux personnes qui appartiennent à l’une des 13 communautés hongroises.  Mais la Hongrie est préoccupée par la politique de l’Ukraine concernant les langues minoritaires, notamment par la loi qui limite les droits des minorités en matière d’utilisation de leur langue.  À cet égard, elle a demandé comment l’éducation pour les minorités peut contribuer à l’ensemble de la société.  L’Ukraine a dit accorder une grande place à l’éducation afin de garantir un développement pacifique et durable de ses jeunes.  Il a précisé qu’une réforme de l’éducation avait été entamée, en 2017, avec pour objectif une modification systémique afin de garantir le principe d’inclusivité, notamment des minorités nationales.

L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) est d’accord avec le rapport de la Rapporteuse spéciale sur les obstacles rencontrés par les migrants et les réfugiés en matière d’éducation.  Dans ce contexte, l’UNESCO a toujours travaillé sur la définition de normes pour que le droit à l’éducation soit une réalité pour ces populations, notamment à l’adoption de conventions nationales pour la reconnaissance des diplômes et qualifications.  Le mois prochain, l’UNESCO publiera son rapport de suivi sur l’éducation dans le monde, qui se penche notamment sur les questions d’éducation et de migrations.  L’UNESCO aimerait avoir l’opinion de la Rapporteuse spéciale sur les mesures que les gouvernements pourraient prendre pour intégrer l’éducation des réfugiés dans les plans et politiques d’éducation. 

Réponses

Dans ses réponses, Mme KOUMBOU BOLY BARRY a insisté sur la question de l’inclusion en accordant une attention particulière aux filles réfugiées.  Elle a suggéré la mise en place d’un budget spécifique pour l’éducation de celles-ci, qui ont besoin d’une protection supplémentaire.  Un autre élément, selon elle, est de former ces filles à s’auto-protéger en gérant leurs émotions.  La Rapporteuse spéciale a préconisé d’impliquer la famille, la communauté et les enseignants, lesquels doivent aussi être formés à une approche sexospécifique.  Mme Boly Barry a, de même, plaidé pour un budget et des mesures spécifiques en matière de santé, d’environnement scolaire et d’encadrement pédagogique au profit des enfants en situation de handicap. 

Pour garantir les réformes nécessaires au sein du système éducatif des pays d’accueil, elle a plaidé pour une planification qui intègre l’éducation des réfugiés par des politiques ayant pour cible les réfugiés.  Un budget et des mécanismes nationaux de prévention, de gestion et d’alerte précoce des conflits et des crises sont à intégrer dans cette approche. 

Mme Boly Barry a de nouveau insisté sur la formation des enseignants, notamment quant aux valeurs et à la psychologie des populations réfugiées.  Elle a cité le Burkina Faso comme un exemple de bonnes pratiques, notamment pour faire face à l’insuffisance du personnel enseignant et pour la préservation des langues et cultures des minorités au sein des réfugiés, à travers un système du « cotutorat », chaque enseignant burkinabé étant accompagné d’un enseignant issu du groupe des réfugiés.  C’est là, pour la Rapporteuse spéciale, un moyen d’intégrer directement les réfugiés dans le processus d’apprentissage. 

Enfin, Mme Boly Barry a mis en avant l’importance des données spécifiques aux populations réfugiées, qui permettent ensuite de mieux répondre à leurs besoins et de les aider à une meilleure intégration dans les sociétés d’accueil, sans pour autant ignorer leur particularité en vue d’un éventuel retour dans leur pays d’origine.

Déclaration liminaire

M. PHILIP ALSTON, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a présenté son rapport portant sur l’impact des politiques de privatisation des biens, de l’espace et des services publics sur la pleine jouissance de tous les droits de l’homme, particulièrement pour les personnes vivant dans la pauvreté. 

« Le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui a été fondamentalement transformé par l’expansion généralisée de politiques économiques néolibérales » a exposé le Rapporteur spécial.  Ainsi, a expliqué M. Alston, alors que la notion de néolibéralisme renvoie à une panoplie complexe de politiques, ses principes de base reposent sur un attachement profond à la diminution à la fois du rôle joué par les gouvernements et des ressources qui leur sont allouées, à la privatisation du plus grand nombre possible d’aspects de l’activité sociale et économique et à la réduction des impôts, l’objectif étant d’assurer une présence minimale de l’État dans la vie des citoyens.

Les prémisses de la privatisation sont basées sur des postulats fondamentalement différents de ceux sous-jacents au respect des droits de l’homme, tels que la dignité et l’égalité, a estimé M. Alston.  « Le profit est l’objectif prépondérant et toutes autres considérations telles que l’égalité et la non-discrimination sont automatiquement écartées » a-t-il encore noté.  « La régulation et autres contraintes sont vues comme des obstacles à l’efficacité, les titulaires de droits comme des clients et ceux qui sont pauvres, dans le besoin ou en difficulté sont marginalisés ».

Le Rapporteur spécial a déploré que, dans ce genre de système, il n’y ait pas de place pour la bienveillance, la compassion, les interactions sociales ou encore la solidarité.  Pour lui, la société civile a un rôle vital à jouer, rôle qu’elle ne peut remplir sans ressource ou autorité.  M. Alston s’est opposé à l’idée d’une plus grande efficacité du secteur privé ou de sa plus grande aptitude à mobiliser des ressources financières, à l’affirmation qu’il serait plus innovant, pourrait générer des profits plus importants, serait plus flexible et pourrait éviter les rigidités et l’inefficacité des bureaucraties gouvernementales.  Le rapport démontre au contraire une énorme déconnection entre cette version idéalisée et les résultats de nombreuses études théoriques et empiriques sur le sujet, a affirmé M. Alston, selon qui les initiatives privées sont souvent plus coûteuses, moins efficaces et fournissent des services de qualité inférieure, tout cela en amassant des profits considérables.

Le Rapporteur spécial a en outre regretté que les droits de l’homme soient rarement inscrits dans les accords de privatisation et s’est élevé contre l’affaiblissement de la démocratie qu’entraînent les privatisations en marginalisant le rôle des gouvernements, en décidant de l’allocation des biens et services publics, n’encourageant ainsi pas les citoyens à participer aux élections.  « Une tendance au désintérêt de la chose politique, particulièrement chez les personnes à faible revenu, est visible depuis maintenant plusieurs années et les politiques d’austérité connectées à la privatisation ont créé un terreau fertile à l’émergence d’hommes politiques populistes et antidroits de l’homme » a-t-il lancé en conclusion.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec M. Philip Alston, l’Union européenne a estimé que le rapport de celui-ci montrait clairement les efforts à faire face à l’extrême pauvreté et la complexité des réponses à apporter pour s’attaquer à ses causes profondes.  Pour l’Union européenne, la pauvreté est essentiellement liée à la discrimination et beaucoup de mesures restent à mettre en place pour éliminer ce fléau, en particulier pour les plus marginalisés.  Dans ce contexte, l’Union européenne aimerait que le Rapporteur spécial précise les bonnes pratiques rencontrées en lien avec la réalisation de l’objectif 1 de développement durable (l’élimination de la pauvreté).  Elle aimerait aussi savoir si des initiatives ciblant spécifiquement des personnes vivant dans l’extrême pauvreté avaient été couronnées de succès. 

L’Afrique du Sud a souligné la nécessité d’évaluer les effets de la privatisation sur les droits de l’homme et a remercié le Rapporteur spécial de s’être intéressé à cette question et à son suivi.  Si les organes des droits de l’homme n’agissent pas, comment faire en sorte que ce suivi ait lieu? s’est-elle interrogée.  Comment s’en prendre à l’État quand cela n’est pas fait?  L’Afrique du Sud aimerait aussi connaître l’opinion du Rapporteur spécial sur la responsabilité du secteur des affaires à la suite de violations des droits de l’homme.  L’Érythrée a dit apprécier le travail réalisé par le Rapporteur spécial et l’accent mis dans son rapport sur la privatisation.  Elle a dit appuyer de façon continue ses travaux. 

Réponses

Dans ses réponses, M. PHILIP ALSTON a tout d’abord réaffirmé le lien existant entre l’élimination de la pauvreté et la promotion des objectifs de développement durable et s’est dit préoccupé des modalités d’évaluation des programmes visant leur réalisation. 

Par ailleurs, le Rapporteur spécial a attiré l’attention sur le sort des filles et des enfants en général et a évoqué le dernier rapport 2018 de la Banque mondiale sur la pauvreté et la prospérité partagée intitulé: « compléter le puzzle de la pauvreté », en pointant du doigt la réalité à l’intérieur d’un ménage, où l’homme se taille la part du lion en matière de nourriture et autres ressources disponibles, contrairement aux femmes et aux enfants, particulièrement les filles.  Même s’il existe une prise de conscience, « nous ne faisons pas assez » en faveur de la protection des filles et des enfants, a-t-il fait observer. 

M. Alston a indiqué que, dans le cadre de ses visites sur le terrain, il s’est rendu compte que, malheureusement, « il y a plus de paroles que d’actions ».  Il a invité en outre les différents organes de suivi en matière des droits de l’homme à « faire beaucoup plus », une critique qu’il s’adresse également à « lui-même ».  Il a par ailleurs, évoqué la question de la réduction des impôts aux États-Unis, qu’il a qualifiée de « dramatique » et d’ « attaque » aux droits de l’homme.  Pour lui, la communauté des droits de l’homme et la société civile auraient dû se pencher sur cette question et travailler avec les autorités.

Déclaration liminaire

M. LEO HELLER, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, a indiqué que la diversité des acteurs jouant un rôle clef dans le secteur de l’eau et de l’assainissement remet en question le cadre traditionnel des droits de l’homme centré sur l’État.  En effet, a-t-il expliqué, ce cadre comporte des lacunes en matière de redevabilité.  En conséquence, lorsque le droit à l’eau et à l’assainissement est affecté, il n’est pas toujours aisé d’identifier les responsables, ni comment appliquer les sanctions et encore moins comment remédier à la situation.  C’est pourquoi son rapport porte, cette année, sur le principe de responsabilité dans le contexte de la réalisation des droits de l’homme à l’eau et à l’assainissement.

La mondialisation et la vague néolibérale ont souvent affaibli le rôle de l’État dans la fourniture et la régulation de l’eau et de l’assainissement des services, a fait observer M. Heller.  Cela soulève des questions quant à la possibilité d’une réglementation efficace des prestataires de services privés et des défis aux mécanismes de redevabilité, en particulier du fait que ces services sont fournis dans le cadre d’un système de monopole naturel, avec seulement un fournisseur pour un territoire donné.

Une autre caractéristique particulière à ce secteur est la présence de fournisseurs de services informels et non réglementés qui opèrent sans autorisation et qui, par conséquent, ne peuvent être tenus pour responsables, a poursuivi le Rapporteur spécial.  De même, dans le contexte de crises comme celle des migrants, il n’existe pas de cadre défini de responsabilité basé sur les droits de l’homme pour fournir des orientations et normes adéquates.  Conjuguée à l’urgence de la situation dans laquelle les acteurs opèrent, cette situation crée un fossé dans lequel personne n’est tenu pour responsable.

Compte tenu de ces observations, le Rapporteur spécial a dit avoir adopté dans son rapport une approche multidimensionnelle pour expliquer la notion de redevabilité dans le secteur de l’eau potable et de l’assainissement.  Celle-ci repose sur trois dimensions: la redevabilité et le rôle des responsables, l’explication et la justification et enfin les sanctions.

Pour M. Heller, la redevabilité est un principe fondamental et transversal des droits de l’homme.  Son objectif est d’aboutir à un équilibre dans la concentration des pouvoirs, afin de protéger les plus vulnérables.  Ces principes doivent servir de mécanismes pour identifier les acteurs étatiques et non étatiques redevables des décisions ou inactions qui affectent la jouissance des droits de l’homme en matière d’eau et d’assainissement.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec M. Leo Heller, l’Espagne s’est dite d’accord avec le Rapporteur spécial sur le caractère fondamental du principe de redevabilité.  L’Espagne, qui constate les défis auxquels sont confrontés les acteurs du secteur de l’eau, notamment dans la réalisation du droit à l’eau potable et à l’assainissement, a souhaité avoir des exemples de bonnes pratiques en matière d’accès à ces services de base pour les personnes vulnérables.  L’Allemagne, qui estime que chacun devrait avoir accès à l’eau potable et à l’assainissement, a reconnu que c’était encore loin d’être le cas.  Renforcer les capacités des fournisseurs de services d’eau doit être une priorité pour tous les États.  L’Allemagne demande, à cet égard, au Rapporteur spécial d’identifier les meilleures pratiques en la matière et aimerait savoir comment concevoir le droit à l’eau potable et à l’assainissement sur le plan légal.

L’Union européenne a estimé que, s’agissant du droit à l’eau potable et à l’assainissement, le principe de redevabilité a deux aspects, l’un correctif et l’autre préventif.  Rappelant qu’elle est l’un des principaux donateurs de la coopération internationale dans le monde, l’Union européenne a souhaité savoir comment mettre en place un système de redevabilité mutuel, comme cela est prévu dans la Déclaration de Paris.  Se félicitant que le rapport souligne le frein à la mise en œuvre du concept de redevabilité que représente la fragmentation dans le secteur de l’eau, la Suisse y a vu la justification de sa politique de promotion d’une gestion intégrée de l’eau.  Elle a demandé dans quelle mesure une gestion décentralisée de l’eau pourrait faciliter, ou compliquer, la mise en œuvre du principe de responsabilité.

L’Afrique du Sud s’est déclarée convaincue que l’eau, c’est la vie, et l’assainissement, la dignité.  Le principe de redevabilité est approprié car il met en avant l’importance des moyens mis en œuvre pour la réalisation des objectifs de développement durable et l’élimination de la pauvreté.  Dans le contexte de la justice transitionnelle, la redevabilité présente un potentiel d’interprétations diverses, et donc d’abus, a mis en garde l’Afrique du Sud, qui a demandé au Rapporteur spécial de livrer sa position sur ce que le principe de redevabilité représente par rapport au droit à l’eau potable et à l’assainissement pour les communautés pauvres.

L’État de Palestine a rappelé que, depuis l’occupation par Israël, les Palestiniens avaient subi des violations des droits de l’homme à grande échelle, notamment en matière d’accès à l’eau potable.  Israël utilise l’eau comme une arme contre les Palestiniens, a accusé la délégation, qui a fait observer qu’à Gaza et en Cisjordanie, de très nombreux Palestiniens n’avaient pas d’accès à l’eau alors qu’à quelques kilomètres d’eux, des Israéliens arrosent leur pelouse.  La délégation se félicite que le rapport souligne ces déséquilibres et mette l’accent sur la redevabilité.  Elle souhaiterait savoir quel mécanisme permettrait de mettre Israël devant ses responsabilités.  Israël a dit travailler avec ses partenaires de la région en vue d’élargir les ressources en eau disponibles au Moyen-Orient.  Israël a notamment un projet de « Grande mer Morte », qui doit créer de nouvelles sources dans la région et dont la Jordanie et les Palestiniens devraient bénéficier, tout comme Israël.  Les États-Unis, l’Union européenne, le Japon et d’autres pays ont déjà promis des fonds pour ce projet, a ajouté la délégation, qui a demandé au Rapporteur spécial s’il connaissait des projets semblables transfrontaliers.

El Salvador a, lui aussi, mis l’accent sur la redevabilité et a souhaité savoir quelles sont les déficiences en matière de responsabilité partagée.  Existe-t-il une jurisprudence en la matière, a-t-il, demandé.

Le Maroc a assuré avoir déployé des efforts considérables en matière d’accès à l’eau comme à l’assainissement, en tenant pour preuve le programme d’urgence 2018-2025 lancé pour répondre à ces défis.  En outre, le Conseiller ministériel de l’eau a lancé un programme pour accélérer les investissements dans le secteur et construire de nouveaux barrages.  Le Maroc a aussi mis en place un programme d’épuration des eaux usées et d’assainissement liquide en milieu urbain et rural.  Sur cette base, le Maroc souhaiterait avoir des exemples pratiques pour atteindre l’objectif 6 du Programme 2030.

La Fédération de Russie estime que la redevabilité est l’un des principaux facteurs permettant d’assurer le bien-être économique d’un pays.  En cas de conflit ou de situation d’urgence, ce sont souvent les structures civiles qui sont attaquées, notamment les stations d’épuration d’eau, et la population civile se retrouve en situation de vulnérabilité, a-t-elle constaté, avant de dénoncer les « agissements inhumains » de l’Ukraine, qui a fermé le canal de Crimée du nord, ce qui a eu des effets néfastes sur les personnes vulnérables.  Elle aimerait savoir quelles mesures, dans le cadre du droit international, pourraient être prises face à une telle violation.  L’Ukraine s’est étonnée de la « logique étrange » de la Fédération de Russie, qui occupe une part de son territoire et se plaint ensuite que l’Ukraine ne fournisse pas d’eau à l’occupant.  En tant que Puissance occupante, c’est la Fédération de Russie qui doit assumer la responsabilité de ce qui se passe sur le territoire qu’elle occupe, a fait observer l’Ukraine, qui demande au Rapporteur spécial d’en tenir compte. 

Réponses

Dans ses réponses, M. LEO HELLER a expliqué qu’il était difficile de savoir ce que « responsabilité » voulait dire.  Quels sont les acteurs responsables?  Comment ouvrir des espaces participatifs pour que les usagers fassent usage de ce droit? s’est-il interrogé.  Sur les principales barrières à la bonne application des mécanismes de redevabilité, le Rapporteur spécial a répondu à l’Espagne qu’il fallait voir la situation des gens qui vivent sans accès à l’eau et à l’assainissement, insistant sur le fait que les plus vulnérables étaient les plus touchés par l’absence de redevabilité.  Même quand les mécanismes pour porter plainte existent, ces populations n’ont pas de bons services, n’ont pas accès à ces mécanismes et n’ont pas de voie de recours pour montrer quels sont leurs besoins, surtout lorsque le fournisseur s’intéresse plus au profit qu’à tout autre chose, a-t-il expliqué.

À la Suisse, M. Heller a déclaré que, lorsque les services d’accès à l’eau et à l’assainissement étaient fournis par les autorités locales, le service était généralement meilleur et les besoins de toute la population, mieux pris en compte.  Lorsqu’il existe des fournisseurs locaux et nationaux dans le cadre d’une structure fédérale, il est plus difficile de savoir qui est responsable de quoi, a-t-il ajouté.

Au Moyen-Orient, la question de l’accès à l’eau et à l’assainissement ne peut pas être traitée séparément des autres, a estimé M. Heller, qui a suggéré qu’une visite sur place serait adéquate pour approfondir le sujet.  À la Fédération de Russie et à l’Ukraine, il a répondu qu’en situation de conflit, l’eau devrait continuer d’être fournie, et que, trop souvent en cas de guerre, les stations d’épurations étaient détruites et bombardées, ce qu’il a jugé « inacceptable ».

M. Heller a enfin mentionné un certain nombre de bonnes pratiques citées dans son rapport et qui, bien que localisées, pourraient sans doute être universalisées.  Il a cité l’exemple du Mexique où, depuis 2014, une ligne téléphonique anticorruption est ouverte 24 heures sur 24 pour protéger les donneurs d’alerte, ou encore au Burkina Faso, où il existe des discussions fréquentes en direct à la télévision durant lesquelles les gens peuvent poser des questions aux autorités concernant l’accès à l’eau et à l’assainissement.

Déclaration liminaire

Mme LEILANI FARHA, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination dans ce contexte, a présenté son rapport, consacré à la question du droit au logement des résidents d’implantations sauvages et de l’engagement pris par les États d’améliorer ces implantations à l’horizon 2030, après avoir rappelé qu’elle en avait présenté un autre au Conseil des droits de l’homme, en mars dernier, consacré à la mise en œuvre effective de stratégies de logement fondées sur les droits de l’homme.

Au cœur de ces rapports figure l’impératif du droit à la réhabilitation des logements informels, a expliqué Mme Fahra.  La Rapporteuse spéciale a estimé à un quart de la population urbaine mondiale, soit 870 millions, le nombre de personnes vivant dans des logements inadéquats, dépourvus de services d’eau et d’assainissement.  Pour Mme Fahra, ce phénomène est la plus répandue et la plus flagrante des violations des droits à la vie, à la sécurité, à la dignité et au logement dans le monde.  « Nous devons agir et nous devons agir urgemment! » a-t-elle tonné.

La Rapporteuse spéciale a fait état de la honte qu’elle a pu éprouver en visitant les bidonvilles du monde et les conditions dans lesquelles des enfants pouvaient vivre, ainsi que de son admiration pour la résilience et le courage des personnes vivant dans des logements informels.  Elle a dit avoir essayé de naviguer entre ses deux sentiments dans son rapport avec, d’un côté, des violations flagrantes des droits de l’homme et, de l’autre, l’appel au droit à la dignité et au logement décent.

Mme Fahra a conclu en rappelant ses différentes recommandations, notamment la nécessité d’inscrire dans la loi l’amélioration du logement, le droit des habitants de ces logements, et notamment des femmes, à participer aux aspects de cette amélioration, l’importance d’interdire dans la loi les mesures punitives et discriminatoires des logements informels, et l’accès à la justice pour les personnes impliquées.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec Mme Leilani Farha, le Maroc a constaté que les sans-abri étaient de plus en plus nombreux dans le monde, y compris dans les pays les plus riches, et que les prix des logements devenaient inabordables pour les plus pauvres, même si les gouvernements ont fait des promesses en matière de logements décents d’ici à 2030.  Dans ce contexte, le Maroc a souhaité savoir quel pourrait être le point de départ immédiat pour mettre en place des stratégies de logement fondées sur les droits de l’homme et sur l’objectif 11 de développement durable.  L’Afrique du Sud a estimé que tous les acteurs, y compris le secteur privé, devaient contribuer à l’objectif de logement convenable pour tous.  La Constitution sud-africaine garantit à chacun le droit à un logement décent, qui peut faire l’objet de recours en justice.  L’Afrique du Sud a demandé à la Rapporteuse spéciale d’expliquer dans quelle mesure le droit au logement est inaliénable pour tout être humain.

L’Union européenne a salué l’évaluation faite par Mme Fahra des installations informelles, constatant des éléments récurrents comme l’insécurité et l’absence d’accès aux services de base.  Elle a demandé des précisions quant à l’amélioration de la qualité de vie dans les camps et logements informels dans le monde.  L’Union européenne aimerait aussi connaitre les bonnes pratiques qui permettraient de mieux protéger les femmes et les filles qui courent davantage de risques dans ce type d’environnement.  L’Allemagne a noté que le droit à un logement convenable était lié à d’autres droits et que sa violation mettait en péril la réalisation même des objectifs de développement durable.  Elle a souhaité savoir quelles étaient les principales raisons des évictions et relocalisations des habitants des logements informels et demandé quelles meilleures pratiques pouvaient être signalées dans les programmes de mise à niveau.

La République de Corée a mis l’accent sur l’importance d’un cadre juridique pour garantir un logement convenable dans le cadre du Programme 2030.  La République de Corée, qui a consolidé sa politique du logement afin de réduire la charge que ce dernier représente pour sa population, souligne le rôle essentiel de l’État en matière de défense du droit au logement convenable.

La Fédération de Russie a observé que les questions liées au logement étaient interdisciplinaires et touchaient à des domaines examinés par d’autres Rapporteurs spéciaux et d’agences, comme Habitat.  Elle a donc invité la Rapporteuse spéciale à tenir compte de ce qui se passe ailleurs, avant de lui demander son avis sur les logements informels dans les pays recevant une aide humanitaire internationale. 

L’État de Palestine a estimé que le droit de rester dans sa communauté était constitutif du droit au logement convenable.  Or, chaque semaine, on annonce de nouveaux plans de colonisation israéliens, lesquels constituent des crimes de guerre à l’encontre des Palestiniens.  Étant donné ces projets, quelles mesures pourraient être prises pour protéger la population palestinienne et ses logements, s’est-il interrogé.

Réponses

Dans ses réponses, Mme LEILANI FARHA a dit ne pas comprendre pourquoi, dans toujours plus de pays, les gouvernements avaient du mal à gérer la crise du logement et le faisaient de manière parcellaire plutôt qu’en adoptant une stratégie globale fondée sur les droits de l’homme.  Pour elle, il est urgent de lutter contre le problème des sans-abri, dans lequel elle voit « une violation terrible des droits de l’homme ».  La cible 1 de l’objectif 11 de développement durable précise que tout le monde devrait avoir accès à un logement adéquat, a-t-elle rappelé.  « Si cela ne signifie pas aller vers l’élimination des sans–abri, je ne sais pas ce que ça veut dire » a-t-elle tonné.

La Rapporteuse spéciale a aussi insisté sur l’importance de la coopération internationale, « essentielle à tous les niveaux », et a précisé que le droit au développement n’était pas en concurrence et ne nécessitait pas une approche différente de celle du droit au logement.  Au contraire, ces droits sont complémentaires.  « Les droits que je défends sont des droits concrets facilement mis en œuvre lorsqu’il y a une volonté politique », a-t-elle insisté.

Face aux risques encourus par les femmes dans les logements informels et en l’absence de foyers d’accueil, Mme Fahra a jugé très important que les femmes soient consultées et qu’elles déterminent, elles-mêmes, quelles étaient les meilleures approches pour lutter contre les violences qu’elles rencontrent.

À la Fédération de Russie, la Rapporteuse spéciale a dit avoir l’intention de consacrer un rapport aux établissements informels dans le contexte de conflits et d’aide humanitaire et vouloir soulever la responsabilité des États à cet égard.  Le droit au logement convenable doit s’appliquer dans tous les contextes, on ne peut pas saper les droits de l’homme dans ces situations, a-t-elle encore insisté.

Concernant la Palestine, elle a expliqué ne pas pouvoir aller au-delà de son mandat, tout en ajoutant qu’elle suivait l’évolution de la situation, qu’elle avait soulevé la question de la démolition des logements et qu’elle continuerait de le faire.

À propos des expulsions, la Rapporteuse spéciale a noté qu’elles avaient lieu souvent dans le cas de personnes vivant sur des terres ayant une immobilière, lesquelles étaient ensuite vendues à des investisseurs pour obtenir des fonds.  Elle a déploré que, dans ces situations, on ne demande pas aux communautés leurs avis alors que, souvent, ces dernières ont des solutions ingénieuses à proposer pour maintenir les communautés concernées sur place.  « Mais il faudrait pour cela déjà les consulter », a-t-elle conclu.

Déclaration liminaire

M. DAINIUS PŪRAS, Rapporteur spécial sur le droit qu’à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a commencé par rappeler que la santé mentale est définie comme « l’état de bien-être dans lequel chaque individu réalise son propre potentiel, peut faire face au stress normal de la vie, peut travailler de manière productive et fructueuse, et peut apporter une contribution à sa communauté ».  Il a ensuite expliqué que son rapport traitait de la réalisation du droit à la santé mentale des personnes en mouvement ou vivant dans des communautés d’accueil.

Pour réaliser le droit de chacun à la santé mentale, y compris des personnes qui arrivent en tant que migrants ou réfugiés, les États doivent s’assurer qu’ils peuvent réaliser leur potentiel et sont capables de contribuer à leurs nouvelles communautés, a expliqué le Rapporteur spécial.  Si cela n’est pas fait, ou même si les actions sont prises dans le sens opposé, le droit à la santé mentale est alors gravement compromis.

Environ 65,6 millions de personnes dans le monde ont été forcées de quitter leur domicile du fait de la violence et de la guerre, de formes religieuses, ethniques, culturelles et autres, de persécutions, de la famine, de la pauvreté, des catastrophes environnementales, de la discrimination et d’autres formes de privations systémiques, a rappelé M. Pūras.  Alors que ce mouvement sans précédent de personnes est en cours, un autre phénomène, la montée de la « santé mentale de l’ombre », a atteint les programmes mondiaux de santé, de développement humain et des droits de l’homme.  À ses yeux, la principale leçon tirée de ces deux grands problèmes des temps modernes est que les politiques et pratiques qui sont discriminatoires et alimentées par des attitudes hostiles doivent être abandonnées.

De fait, a relevé M. Pūras, les dirigeants, les responsables politiques et autres personnes en position de force politique doivent être conscients que leurs actions et leurs paroles, quand elles ont une dimension xénophobe, contribuent à créer des environnements émotionnels et psychosociaux hostiles et érodent la qualité des relations humaines.  Le Rapporteur spécial a recommandé que tout soit fait pour mettre fin à ces discriminations et tendances xénophobes, afin de développer des communautés fortes où la qualité des relations humaines prévaut.

M. Pūras a précisé que son rapport développait deux thèmes principaux: le droit à la santé mentale des enfants et des familles en déplacement, et la détention des personnes migrantes, une pratique que de nombreux pays ont adoptée comme stratégie par défaut pour réglementer la mobilité humaine.  Le fait de nuire à l’unité familiale dans le contexte de la mobilité humaine est préjudiciable à la santé mentale et au bien-être des enfants et des adolescents en mouvement et génère des effets qui pourraient durer des années, voire des générations, a-t-il averti.

Selon lui, les lois et politiques qui institutionnalisent la séparation des enfants en mouvement de leurs familles ou compliquer la réunification des familles doivent être éliminées sans délai.  D’autre part, a-t-il souligné, la détention des migrants en tant que forme de dissuasion est inefficace et peut exacerber les problèmes de santé mentale existants qui persistent après la détention, affectant négativement la qualité de vie des personnes en mouvement.  De fait, a fait valoir M. Pūras, la détention des immigrants doit être progressivement abolie et la détention d’enfants et de migrants atteints de troubles psychosociaux, cognitifs ou intellectuels doit être immédiatement interdite.

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec M. Dainius Pūras, l’Afrique du Sud a estimé que l’État se devait de prendre les mesures législatives et autres afin de réaliser le droit à la santé mentale de manière non discriminatoire.  L’Afrique du Sud a, pour sa part, adopté un cadre de politique nationale visant à transformer les services de santé afin qu’ils soient abordables et complets, conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).  Elle a souhaité savoir si les personnes qui se déplacent avaient plus de problèmes mentaux que les autres.

Le Portugal a vu dans le droit à la santé mentale un élément central de la dignité humaine.  Au Portugal, les réfugiés et migrants disposent du même accès que les Portugais au service de santé national.  Le Portugal aimerait savoir comment le pacte mondial sur les réfugiés pourrait être utilisé par les États pour mettre en place des stratégies fondées sur l’être humain.

L’Union européenne a salué l’accent mis dans le rapport sur le droit à la santé mentale pour définir les réactions de la communauté internationale concernant les personnes en mouvement.  Le rapport lui paraît opportun, car il n’y a pas de discussions sur la santé mentale dans le domaine public.  L’Union européenne souhaiterait aussi savoir quelles mesures permettraient de réduire les risques pour la santé mentale des personnes qui se déplacent de la rhétorique hostile à leur encontre.  Dans le même sens, la Lituanie, qui estime que les fausses informations qui circulent sur les personnes qui se déplacent peuvent affecter leur santé mentale, s’est dite préoccupée en particulier par la santé mentale des enfants migrants et a demandé quelles autres mesures les États pourraient prendre pour assurer un meilleur environnement à ces derniers.

Le Bahreïn a réaffirmé son engagement en faveur de la santé mentale et notamment sa contribution à la stratégie du bien-être lancée par le Secrétaire général.  Il a demandé au Rapporteur spécial quelles mesures il préconisait pour mettre en place des démarches communautaires.  Le Maroc a dit avoir inclus des mesures pour la santé mentale et environnementale dans le cadre de la mise en œuvre du Programme 2030 lorsqu’il a fixé des lignes directrices en matière de santé pour les 15 prochaines années.  Dans la perspective du pacte mondial sur les migrations, le Maroc souhaite savoir si M. Pūras compte organiser une action parallèle pour attirer l’attention sur la question de la santé mentale des migrants.

La Colombie a rappelé que la région des Amériques était confrontée à une crise migratoire importante.  À cet égard, elle a soulevé la nécessité d’apporter une réponse globale en matière de santé mentale.  La Colombie souligne en outre l’accent mis dans le rapport sur le fait que les questions de santé mentale donnent la possibilité de refaçonner des services sociaux inclusifs et accessibles à tous.

La République islamique d’Iran a relevé que l’objectif 3 de développement durable -Santé et bien-être- soulignait l’importance d’une vie saine pour tous.  L’Iran offre à tous un accès aux installations sanitaires, mais les sanctions génocidaires imposées par les États-Unis visent sans discernement les personnes les plus fragiles.  En conséquence, l’Iran demande au Rapporteur spécial s’il est possible de faire une évaluation des incidences de ces mesures coercitives unilatérales sur les services de santé du pays, et notamment sur ceux traitant de la santé mentale.

Réponses

Dans ses réponses, M. DAINIUS PŪRAS a expliqué que les personnes en transit n’étaient pas plus enclines à souffrir de troubles mentaux que les autres mais que, bien sûr, celles souffrant de tortures ou violences sexuelles avaient besoin d’interventions spéciales de santé mentale.  Toutefois, il a dit ne pas recommander le recours à la médicalisation parce qu’elle pourrait accroître la stigmatisation de ces personnes.  Pour le Rapporteur spécial, il vaut mieux utiliser la créativité et les talents de ces personnes qui pourraient contribuer aux communautés des pays où elles arrivent.  M. Pūras a déploré qu’en cas de lois discriminatoires, ces bonnes politiques ne soient pas mises en œuvre et il ne soit pas permis au personnel de santé mentale de travailler correctement.  Il a de plus regretté que les discriminations soient doubles pour les personnes en déplacement.

M. Pūras a ensuite rendu hommage au Liban, qu’il a décrit comme « un bon exemple pour les pays réticents à accepter les migrants et les réfugiés ».  Le Liban, a-t-il ajouté, est un petit pays qui accueille des millions de personnes et qui « s’en tire assez bien », avec notamment un soutien psychosocial à ces populations déplacées, « ce qui est essentiel ».  Il a dit ne pas recommander la mise en place de systèmes parallèles, estimant que ce n’était pas une bonne idée sur le plan financier et que cela ne faisait que créer une discrimination supplémentaire, puisque l’on sépare les réfugiés du reste de la population.

Le Rapporteur spécial a expliqué que la question de la santé mentale des enfants en mouvement était une question difficile et a rappelé que son rapport, il y a trois ans, sur le droit à la santé des jeunes enfants mettait en avant l’importance des interventions psychosociales.  Il a déploré, dans certains pays, les enfants migrants soient séparés de leurs parents et mis en détention, qualifiant cette pratique d’« exemple classique d’intervention négative sur le développement des enfants ».  Ces pratiques doivent être abandonnées parce qu’elles privent les enfants de leur besoin fondamental, qui est celui de se sentir en sécurité et relation étroite avec leurs parents.

M. Pūras a insisté sur la nécessité de se mobiliser et de répondre à ces considérations essentielles.  Il faut se départir des approches sélectives, a-t-il encore ajouté, et ne pas traiter ces deux domaines en crise, le processus de migration et les problèmes de santé mentale, de manière séparée.  « Il ne peut y avoir d’approches sélectives quand les droits de l’homme sont concernés » a-t-il conclu.

Suite de la discussion générale

Mme GABRIELLA MICHAELIDOU (Chypre) a rappelé que 200 000 Chypriotes grecs étaient toujours déplacés et a dénoncé la « politique délibérée de colonisation » de la Turquie dans les zones occupées, avec l’installation de plus de 160 000 colons turcs.  Les personnes qui demeurent « enclavées » font face à des violations quotidiennes de leurs droits fondamentaux, tandis qu’églises et cimetières sont vandalisés, a accusé la représentante, pour qui ces pratiques constituent un traitement discriminatoire.  Les personnes disparues constituent une question humanitaire majeure, a-t-elle poursuivi, en accusant la Turquie de procéder à l’enlèvement délibéré de dépouilles.  Enfin, Mme Michaelidou a dénoncé une situation très préoccupante en Turquie, affirmant que ce pays connaissait « une marche arrière » sur la question des droits de l’homme.

Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a indiqué que la Grèce avait envoyé une invitation ouverte aux mécanismes internationaux des droits de l’homme, signe de sa volonté d’accroître sa coopération avec le système des Nations Unies.  Sur le plan national, elle met en œuvre une politique des droits de l’homme ouverte, transparente et cohérente, fondée sur les principes d’égalité, de diversité et de non-discrimination, comme en témoignent le Plan d’action national pour les droits de l’homme et les programmes sur l’égalité entre les sexes, sur l’autonomisation des femmes et l’éducation des migrants et sur les enfants réfugiés.   

En réponse à la crise des réfugiés, la Grèce est déterminée à continuer à se coordonner avec toutes les parties prenantes pertinentes, notamment pour partager le fardeau et traiter des causes à l’origine d’un phénomène sans précédent.  Elle a aussi récemment lancé d’importantes initiatives en matière juridique afin de parvenir à un traitement équitable et à la jouissance des droits de l’homme pour tous, telles que la reconnaissance de l’identité de genre et l’extension du droit à l’union civile et à l’adoption aux membres de la communauté LGBTI.

Par ailleurs, Mme Theofili a attiré l’attention sur « l’invasion militaire et l’occupation illégale de près de 37% du territoire de la République de Chypre » par la Turquie depuis 1974, pour déplorer le maintien de la situation, ainsi que les violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales du peuple de Chypre malgré des jugements de la Cour européenne des droits de l’homme et de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale.

M. YE MINN THEIN (Myanmar) a assuré que la protection et la promotion des droits fondamentaux constituaient la priorité de son gouvernement.  Celui-ci est prêt à travailler avec les pays et les organisations internationales, y compris les Nations Unies.  Le Myanmar souhaite toutefois que l’on adhère aux principes d’universalité, d’impartialité, d’objectivité, de non-sélectivité et de non-politisation lorsque l’on aborde les questions des droits l’homme.  À cet égard, le représentant a rappelé l’opposition du Myanmar aux résolutions spécifiques par pays et considère que l’Examen périodique universel est le bon mécanisme d’examen des situations de droits de l’homme.

Rappelant par ailleurs que le Myanmar est un pays multireligieux et multiethnique, M. Thein a affirmé que l’état de droit, la paix et la réconciliation nationale étaient essentiels pour garantir la promotion des droits de l’homme dans le pays.  Parmi les défis que rencontre le Myanmar, il a cité la situation sensible dans l’État rakhine, qui a mis « une pression énorme » sur le pays.  Pour le représentant, les actes terroristes et la violence, qui y ont sévi, ont provoqué une grave situation humanitaire, mais le Gouvernement a pris des mesures pour assurer le retour rapide des personnes déplacées.  M. Thein a affirmé, en conclusion, que son pays avait mis en œuvre 81 des 88 recommandations contenues dans le rapport final de la commission consultative sur l’État rakhine -la « Commission Annan »- ajoutant par ailleurs que la commission d’enquête mise en place par le Gouvernement poursuivait son travail.

Mme BEGALA (Cameroun) a souligné le rôle primordial de chacun des organes conventionnels dans la garantie des droits de l’homme, et leur apport individuel et collectif de cette entreprise.  C’est pourquoi le Cameroun est disposé à contribuer au renforcement et à l’amélioration du fonctionnement du système des organes conventionnels des droits de l’homme.  Pour ce faire, le Cameroun, qui est à jour de ses obligations redditionnelles au regard des sept conventions des droits de l’homme qu’il a ratifiées, poursuivra ses efforts visant à toujours soumettre, en temps et en heure, ses rapports périodiques, a affirmé la représentante.

M. IHOR YAREMENKO (Ukraine) a affirmé que son pays respectait ses engagements en matière de protection et de promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales.  Toutefois, a souligné le représentant, l’agression russe a entraîné une détérioration de la situation de ces droits, notamment en Crimée et à Sébastopol.  En 2014, a-t-il rappelé, le Gouvernement a invité une mission des Nations Unies à venir constater la situation sur le terrain.  À la suite de cette mission, les différents rapports présentés ont fait apparaître les crimes commis par la Russie en Crimée, a-t-il fait observer, avant de dénoncer l’absence de coopération de la Fédération de Russie avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et le non-respect de ses obligations en tant que Puissance occupante.  Condamnant les violations des droits civils, politiques et culturels, notamment ceux du peuple tatar, dans ces territoires occupés, le représentant a indiqué que l’Ukraine présenterait un projet de résolution sur la situation en Crimée et a appelé les États Membres à la soutenir.

Mme HIWOT TUFFA (Éthiopie) a souligné l’importance des valeurs et principes des droits de l’homme qui devraient être défendus par tous les États.  L’Éthiopie a, quant à elle, ratifié tous les instruments internationaux des droits de l’homme.  La représentante a ensuite précisé l’approche de son pays en matière de politique de développement et pour la réduction de la pauvreté.  Enfin, elle a évoqué les réformes menées en cours pour élargir les espaces de démocratie et de l’action civique, en vue d’assurer une plus grande participation, la transparence et la responsabilisation.

Mme PHUMLA ANDY MAKWABE (Afrique du Sud) a expliqué que son pays avait réalisé d’importants progrès pour permettre le bon fonctionnement des organes conventionnels.  À cet égard, la représentante s’est dite préoccupée par les responsabilités imposées aux organes de suivi, notamment en termes de charge de travail en lien avec les rapports.

Par ailleurs, tout en soutenant la nécessité d’utiliser au mieux les technologies numériques, l’Afrique du Sud est préoccupée face à la diffusion de discours haineux par ces moyens.  Le Gouvernement a pris des mesures pour incriminer ces discours de haine.  L’Afrique du Sud développe en outre son cadre institutionnel et juridique pour lutter contre toutes les formes de racisme, en particulier contre l’incitation à la haine raciale par le biais d’Internet et des réseaux sociaux.  Mais, en dépit des efforts déployés par les fournisseurs de services en ligne, il y a encore trop de discours de haine, a affirmé la représentante, qui a demandé aux États Membres et aux Nations Unies de mieux combattre le racisme et de prévoir, à cette fin, des protocoles supplémentaires aux conventions existantes.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, la Turquie a accusé le représentant de la Grèce de livrer une interprétation partielle de l’histoire.  Elle a voulu rappeler quelques « faits pour décrire la situation », notamment que les Chypriotes turcs faisaient face à des violations des droits de l’homme, et que beaucoup d’entre eux étaient déplacés.  Les Chypriotes turcs ont manifesté leur attachement aux négociations pour résoudre le problème, tandis que les mécanismes des Nations Unies sont manipulés par les Chypriotes grecs pour dépeindre de façon incorrecte la situation, a accusé le représentant.  Les accusations portées sont dès lors pour la Turquie de la « propagande politique » sans fondements.

Chypre a regretté l’insistance de la Turquie à vouloir s’opposer à la communauté internationale et à violer de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale au sujet de l’intégrité territoriale du pays.  Il s’agit là du résultat de leur occupation depuis 1974, a conclu la délégation. 

La Fédération de Russie a remercié les délégations qui avaient présenté leurs condoléances après le massacre commis la veille dans un lycée en Crimée, mais a souligné qu’il y avait erreur dans le nom: il s’agit bien de la République de Crimée, qui se trouve dans la Fédération de Russie.  La Russie s’acquitte de toutes ses obligations en matière de droits de l’homme et ceux-ci s’appliquent à tous les sujets, y compris à Sébastopol.  « Nous faisons un suivi de la situation des droits de l’homme y compris en Crimée », a ajouté le représentant, qui a appelé l’Ukraine à corriger la situation des droits de l’homme dans son pays.  Quant à l’initiative des autorités de Kiev pour intervenir à l’Assemblée générale et présenter une « résolution totalement politisée » sur la Crimée, la Fédération de Russie l’a qualifiée d’acte « inamical » et a appelé les États à voter contre.

L’Ukraine a répété que la Fédération de Russie était la Puissance occupante dans le territoire ukrainien de la République autonome de Crimée et dans la région du Donbass.  La délégation russe continue de vivre dans une « réalité parallèle », a déclaré le représentant de l’Ukraine, estimant que cette situation était vraisemblablement liée à la propagande des médias russes.  Lorsqu’un pays se livre à une telle agression, il ne peut pas avouer qu’il l’a fait, a-t-il ajouté, observant qu’aucune autre délégation dans cette salle ne pouvait prétendre que l’Ukraine ne souffre pas de l’occupation russe.

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