8108e séance – matin
CS/13077

Le retour de l'Autorité palestinienne à Gaza ne doit pas échouer, sous peine de voir un autre conflit éclater, avertit le Coordonnateur spécial

Le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Nickolay Mladenov, a indiqué, ce matin, devant le Conseil de sécurité, que le processus de restauration du plein contrôle de l’Autorité palestinienne à Gaza ne devait pas échouer, sous peine de ruiner tout espoir en l’avenir et de voir un autre conflit dévastateur éclater. 

Le Coordonnateur spécial a en effet rappelé les espoirs élevés que place la population de Gaza dans un retour du gouvernement, car elle espère ainsi pouvoir sortir de la « misère abjecte » dans laquelle elle vivait sous la férule du Hamas.  La situation est explosive, a dit M. Mladenov en prévenant qu’un nouveau conflit pourrait être provoqué par le retour de l’anarchie, les actions inconscientes d’éléments extrémistes ou par « choix stratégique ».

« Ce cycle doit être évité à tout prix », a-t-il affirmé.  Alors que de nombreuses tentatives similaires ont échoué par le passé, M. Mladenov a évoqué la « longue route » vers une possible réconciliation palestinienne, ouverte par la signature de l’accord du Caire du 12 octobre entre le Fatah et le Hamas, sous la médiation de l’Égypte, sur le retour de l’Autorité palestinienne à Gaza. 

Le Coordonnateur spécial a insisté sur le développement positif que constitue, depuis, la prise de contrôle par l’Autorité palestinienne des points de passage vers Gaza, « un jalon important » à ses yeux.  Pour la première fois depuis 10 ans, le 18 novembre, le point de passage de Rafah a été placé sous le contrôle de l’Autorité, ce qui a mis fin à la taxe de passage illégale imposée par le Hamas depuis 2007, a-t-il dit. 

M. Mladenov a en outre indiqué que le comité palestinien chargé de la rationalisation et de l’intégration du secteur public à Gaza avait tenu sa première réunion le 2 novembre.  Dans l’intervalle, le transfert de responsabilités au sein des institutions publiques basées à Gaza se déroule lentement, a-t-il déclaré. 

Les Ministres de l’éducation, de la santé, des transports et de l’environnement se sont rendus à Gaza pour commencer à restaurer l’autorité du gouvernement, tandis que 150 enseignants employés par l’Autorité palestinienne ont repris leur travail pour la première fois depuis 2007.  Il a précisé que l’enregistrement de tous les employés de l’Autorité palestinienne à Gaza, commencé le 12 novembre, devait s’étaler sur une période de 10 jours, un processus qui se déroule de façon organisée.

Le Coordonnateur spécial a encouragé toutes les parties à tirer profit de la réunion du Caire, qui se tiendra demain, pour renforcer leur engagement en faveur d’une mise en œuvre graduelle de l’accord du Caire.  Il s’agit d’entretenir, par un suivi adéquat, l’élan positif constaté. 

Le Coordonnateur spécial a ensuite mentionné les développements qui le préoccupent, en premier lieu le fait que les habitants de Gaza n’ont pas encore vu d’amélioration dans leur vie quotidienne.  Le manque d’électricité est particulièrement dommageable, a-t-il dit, en précisant qu’il n’y avait pas d’électricité de 18 à 20 heures par jour.  Il n’y a plus de stocks pour près de 45% des médicaments et articles médicaux essentiels, a-t-il ajouté.

M. Mladenov a exhorté le Gouvernement palestinien à prendre tout de suite des décisions pour revenir sur les mesures qui ont alourdi le fardeau des Palestiniens, avant d’insister sur les 10,8 millions de dollars manquants sur les 25 millions demandés au titre de l’appel humanitaire de l’ONU de 2017 pour Gaza. 

La restauration de l’Autorité palestinienne à Gaza peut être appuyée de trois façons, a-t-il expliqué.  Premièrement, en atténuant immédiatement la situation humanitaire sur le terrain, en augmentant la production d’électricité pour revenir au niveau d’avant la crise, et en accélérant la mise en œuvre de projets qui ont des incidences directes sur la vie des Palestiniens.

En second lieu, il faut que l’Autorité palestinienne élabore un plan réaliste sur la manière dont elle entend, avec l’appui financier et technique de la communauté internationale, s’acquitter de ses responsabilités.  Troisièmement, « notre objectif commun demeure le retour de l’Autorité palestinienne à Gaza », a-t-il poursuivi. 

« Les questions difficiles, telles que la sécurité, le dépôt de toutes les armes sous le contrôle du gouvernement, l’état de droit, le fonctionnement du système judiciaire et la réforme de l’administration devront être réglées progressivement », a-t-il recommandé.

Le Coordonnateur spécial a salué le retour d’une pleine coordination sécuritaire entre Israël et l’Autorité palestinienne, avant de s’inquiéter de la découverte par les forces israéliennes d’un autre tunnel reliant Gaza à Israël.  Selon un porte-parole du Jihad islamique, ce tunnel devait être utilisé pour enlever des soldats israéliens, a dit M. Mladenov. 

« J’appelle la communauté internationale à joindre sa voix à celle de l’ONU dans la condamnation de ces tunnels et de ces déclarations inconscientes », a dit le Coordonnateur spécial pour qui de telles actions peuvent saper les perspectives de réconciliation intrapalestinienne. 

Passant à la question des colonies israéliennes, il a mentionné que les autorités israéliennes avaient approuvé les permis de construire d’au moins 418 unités de logement à Jérusalem-Est, dans les colonies de Gilo et Ramat Shlomo.  Il a aussi indiqué que, le 10 novembre, le Premier Ministre israélien avait promis d’engager 226 millions de dollars pour la construction d’infrastructures en Cisjordanie occupée. 

Ces colonies, illégales au regard du droit international, représentent un obstacle substantiel à la paix, a fait valoir M. Mladenov avant de dénoncer en plus les démolitions de 30 structures palestiniennes en Cisjordanie occupée.  Il a jugé très préoccupantes les menaces de démolition de structures qui ont été financées par des dons et qui servent d’école.

Le Coordonnateur spécial a ensuite évoqué la démission du Premier Ministre libanais Saad Hariri, « qui a choqué le Liban et la région ».  « Au moment où apparaissaient de nouvelles incertitudes, le peuple libanais s’est uni derrière l’appel du Président Aoun pour le retour d’Hariri », a-t-il relevé.  M. Mladenov a indiqué que son homologue, le Coordonnateur spécial de l’ONU pour le Liban, devrait s’exprimer devant le Conseil le 29 novembre prochain. 

En conclusion, M. Mladenov a déclaré qu’un changement véritable à Gaza, avec une Autorité palestinienne qui exerce un contrôle sécuritaire entier, pourrait restaurer la confiance dans la possibilité d’un accord de paix global.  « Toutes les factions palestiniennes doivent saisir cette occasion pour ouvrir un nouveau chapitre pour leur peuple. »

Prenant à son tour la parole, le représentant de l’Uruguay a estimé qu’en dépit des initiatives multilatérales et bilatérales entreprises ces dernières décennies, la communauté internationale était encore « très loin » de la solution des deux États, à laquelle il n’existe pourtant pas d’alternative.  Un an après l’adoption de la résolution 2334 (2016), force est de constater que les colonies de peuplement israéliennes se sont intensifiées, a-t-il remarqué.  L’Uruguay attend, le mois prochain, la présentation, sous la forme d’un document écrit, du rapport sur l’état de mise en œuvre de cette résolution. 

Cette demande a été relayée par son homologue de la Bolivie, qui a déploré que les « forces d’occupation israéliennes » aient récemment ordonné la démolition de structures et propriétés palestiniennes, avec pour conséquence l’expulsion et le déplacement de 300 civils.  Le délégué a également exhorté Israël à lever le blocus imposé à Gaza. 

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