soixante-douzième session,
26e séance – matin
AG/J/3560

La Sixième Commission achève l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international

La Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, a achevé aujourd'hui l’examen thématique complet du rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa soixante-neuvième session, entamé le 23 octobre dernier.

Les délégations ont fini de se prononcer sur les chapitres consacrés aux normes impératives du droit international général (jus cogens), à la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, ainsi qu’à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Elles ont encore exprimé des opinions divergentes sur l’approche des rapporteurs spéciaux, allant parfois jusqu’à remettre en question la pertinence des sujets à l’étude.

Par exemple, les États-Unis ont souligné l’intérêt intellectuel considérable de l’étude du jus cogens ainsi que son intérêt pratique pour mieux comprendre certains domaines du droit international, mais ils ont douté qu’il y ait suffisamment de pratique internationale sur des questions importantes, comme par exemple sur la façon dont une norme arrive au statut de jus cogens.  Israël a noté que si le concept existe depuis des siècles, le processus pour atteindre ce statut reste flou.  La Turquie a également émis des réserves quant au besoin de développer et de codifier le concept des normes impératives du droit jus cogens

L’Iran a déploré le silence de la CDI sur la question de savoir qui détermine l’identification du jus cogens.  Alors que la commission s’appuie sur la Convention de Vienne, son représentant a considéré que la Cour internationale de Justice (CIJ) est la seule autorité reconnue sur cette question.

Préoccupés par le manque de clarté sur le jus cogens, les Pays-Bas, rejoints par l’Allemagne, la République tchèque et l’Argentine, ont estimé que le droit international coutumier constitue la source la plus importante pour les normes de jus cogens.  

De nombreuses délégations ont appelé à la prudence.  Le seul point sur lequel elles sont d’accord est que « ces normes existent », a résumé le Royaume-Uni.  C’est pour cette raison que les travaux de la CDI sont susceptibles d’influencer la façon dont la communauté internationale des États règlemente sa propre conduite pour les années à venir, mais qu’ils risquent aussi de diviser les États. 

La question de savoir si la CDI devait dresser une liste indicative des normes ayant le statut de jus cogens a été beaucoup débattue.

L’Allemagne a ainsi mis en garde contre l’inclusion d’une liste énumérant les normes ayant été élevées au rang de jus cogens, ce qui ferait courir le risque d’établir un « statu quo » qui empêcherait les évolutions futures du jus cogens.  Les Pays-Bas ont préféré ne pas inclure la liste de normes car sa nature empêcherait l’émergence d’une pratique des États.  Israël a jugé cet exercice prématuré tant que le travail sur les critères et les implications de ces normes n’est pas achevé.  Selon l’Iran, la  pertinence d’élaborer une liste du jus cogens doit faire l’objet de plus amples consultations.  Établir une liste du jus cogens risquerait de ralentir son principe qui est par nature dynamique, a mis en garde la Thaïlande.  Enfin, le Japon a jugé important de clarifier le fait qu’une telle liste serait « illustrative et non pas exhaustive ».

Les délégations ont également discuté des dispositions générales qui sous-tendraient l’examen du thème « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État ».

La Turquie a indiqué ne pas voir clairement quelle partie de ce sujet relève du droit international et quelle partie est « politique ».  Israël s’est demandé s’il est nécessaire d’inscrire cette question à l’ordre du jour de la CDI « compte tenu de la réalité des États contemporains ».  Les États-Unis ont eux aussi émis des doutes sur l’intérêt des États pour ce travail, vu le faible nombre de pays qui ont ratifié la Convention de vienne de 1978 sur la succession des États en matière de traités et la Convention de Vienne de 1983 sur la succession d’États en matière de biens, archives et dettes d’État.  La Roumanie s’est montrée réticente au développement du droit sur ce sujet, alors que le Bélarus a invité la commission à poursuivre ses travaux sur ce point.

Par ailleurs, le sujet « Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés » a interpellé le Viet Nam, la Malaisie et le Liban.  Le Viet Nam, en particulier, a rappelé son expérience et les dommages importants et durables causés à l’environnement lors des conflits.  Le Liban a souhaité approfondir les questions relatives à la responsabilité et à l’obligation de réparer et aux conséquences humanitaires de l’impact sur l’environnement des conflits.

À ce sujet, la Thaïlande a jugé important de travailler avec les organisations ayant une expertise, comme le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

« J’ai le sentiment que la CDI est un organe très dynamique », s’est réjoui le Président de la Commission du droit international, M. Georg Nolte, à la fin de la séance.  « Contrairement à il y a 10 ans, le problème n’est plus de ne pas avoir suffisamment de questions à examiner, mais d’en avoir trop », a-t-il conclu.

La Sixième Commission se réunira jeudi 2 novembre, à 10 heures, pour examiner le rapport du Comité des relations avec le pays hôte.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Mme CARRIE McDOUGALL (Australie) a estimé que le projet de conclusion fournit un cadre utile pour identifier les normes impératives du droit international général (jus cogens) et leur contenu.  L’approche pratique de ces conclusions est nécessaire pour refléter la nature dynamique de la formation et du développement du jus cogens, ainsi que son acceptation et reconnaissance par les États.

La représentante a soutenu le principe d’exigence de la preuve pour savoir si une norme est acceptée et reconnue par le jus cogens.  Elle a noté que cette obligation est incluse dans, par exemple, le projet de conclusion 6(2) et dans les projets de conclusion 8(2) et 9.  Cependant, il y a de nombreuses insuffisances dans cette approche, particulièrement dans le cas où il n’y existe qu’une pratique limitée des États pour identifier le degré d’acceptation et de reconnaissance de cette norme spécifique par les États.

Étant donné le peu de certitude pour savoir si une norme a atteint le niveau de jus cogens, Mme McDougall s’est demandé si l’inclusion d’une liste illustrative de normes aussi impératives serait d’un quelconque bénéfice.  Elle a aussi posé la question de savoir si un consensus doit être trouvé sur ces questions.  En conclusion, elle a recommandé une approche prudente si la décision venait à être prise de développer une liste de normes de jus cogens.

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a souligné l’intérêt intellectuel considérable de l’étude du jus cogens ainsi que son intérêt pratique pour mieux comprendre, par exemple, certains domaines du droit international et en particulier les droits de l’homme.  Il a cependant rappelé avoir toujours des réserves, notamment sur un aspect méthodologique.  Il n’est en effet pas certain qu’il y ait suffisamment de pratique internationale sur des questions importantes, comme par exemple sur la façon dont une norme arrive au statut de jus cogens.  Après avoir rappelé que les critères d’identification des normes impératives devaient être basés sur l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, il a dit apprécier que le projet de conclusion reflète bien la définition de cet article.  Cependant, contrairement à ce qui est énoncé au paragraphe 2 du projet de conclusion 5, il n’a pas connaissance de normes impératives qui soient basées sur des principes généraux du droit.  Il a donc suggéré de supprimer ce paragraphe.  Concernant le projet de conclusion 9, il a dit que les décisions des juridictions internationales ne devraient pas être utilisées pour prouver l’acceptation ou la reconnaissance, par les États, de normes impératives.

Venant au chapitre intitulé « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État », M. Simonoff a salué l’effort visant à clarifier ce domaine du droit, mais a émis des doutes sur l’acceptation ou même l’intérêt des États pour ce travail, vu le faible nombre de pays qui ont ratifié la Convention de vienne de 1978 sur la succession des États en matière de traités et la Convention de Vienne de 1983 sur la succession d’États en matière de biens, archives et dettes d’État.  Vu en outre la complexité du sujet, qui nécessite un examen prudent et approfondi par les gouvernements, il a exhorté la commission à s’exprimer clairement lorsqu’elle pense codifier le droit existant, notamment s’il s’agit de développement progressif du droit.  Sur le projet d’article 3, il s’est demandé si les différents types d’accord, tels qu’ils y sont décrits, étaient bien compris ou établis dans la pratique des États.  Il a demandé d’examiner plus avant cette question.  En revanche, il a jugé correct que le paragraphe 4 dudit article reconnaisse l’importance centrale des principes reflétés dans les articles 34 à 36 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.

Le représentant a également commenté le chapitre « Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés » sur lequel il a exprimé trois préoccupations.  Il a émis des doutes quant à l’étendue de l’étude qui s’intéresse aux droits autres que le droit international humanitaire, alors que celui-ci constitue la lex specialis dans les situations de conflit armé.  Il a en outre estimé que la commission n’était pas le forum approprié pour examiner si certaines dispositions du droit international humanitaire reflètent le droit international coutumier.  Cette discussion exige un examen rigoureux de la pratique des États et de la doctrine, a-t-il affirmé.  Enfin, il a jugé inappropriés les termes impératifs utilisés dans certains projets de principe, qui dictent aux États ce qu’ils doivent faire, un langage qui ne doit être utilisé selon lui que pour des règles constitutives de lex lata.

M. JOSÉ LUIS FERNANDEZ VALONI (Argentine) a reconnu que les conclusions du deuxième rapport du Rapporteur spécial permettent d’avancer, en s’appuyant sur l’article 53 de la Convention de Vienne, sur la question de l’identification des critères des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il s’est dit en accord avec le rapport, qui estime que le droit international coutumier représente la manifestation la plus claire du jus cogens, qui se reflète dans la jurisprudence des tribunaux nationaux et internationaux.  Concernant l’acceptation et la reconnaissance des normes du jus cogens, il a déclaré, comme le Rapporteur, qu’elles doivent être fondées sur l’acceptation par les États, conformément à l’état actuel du droit international.  Cependant, a-t-il ajouté, la pratique des acteurs non étatiques, les traités, les résolutions de l’Assemblée générale et les décisions des tribunaux internationaux peuvent également contribuer à la reconnaissance et à l’acceptation de normes par certains États.  Il a invité la commission à prendre en compte les réserves des États sur cette question.

Par ailleurs, le représentant a estimé que le projet de conclusion 3, qui considère comme élément descriptif et non constitutif le fait que les normes du jus cogens renforcent les « valeurs fondamentales » de la communauté internationale, n’est pas un élément constitutif de l’identification du jus cogens en vertu de l’article 53 de la Convention de Vienne.  Citant un avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) et de la Cour européenne des droits de l’homme, il a toutefois plaidé pour que la notion de « valeur » soit effectivement considérée un élément constitutif.  L’identification des normes du jus cogens peut avoir un impact pratique important sur l’extradition, l’entraide judiciaire internationale et la pratique des États, a-t-il prévenu. 

Revenant sur les projets d’articles relatifs aux crimes contre l’humanité, il a observé qu’ils sont basés sur d’autres mécanismes internationaux tels que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), limitant d’autant les risques de contredire les accords de la communauté internationale.  Afin de remplir leurs obligations de prévention, d’enquête et de poursuites pour ces crimes, il a jugé fondamental le renforcement de la coopération entre les États.

M. PETER NAGY (Slovaquie) a déclaré avoir exprimé son intérêt de façon constante en ce qui concerne les normes impératives du droit international général (jus cogens).  Cela est dû à la grande importance du sujet, qui est aussi un sujet sensible pour la communauté internationale.  C’est pourquoi, les critères de leur identification, tels que reflétés dans le rapport, devraient faire l’objet d’une attention particulière.

Le représentant a fait part de sa préoccupation concernant le fait que l’acceptation et la reconnaissance jouent un rôle primordial.  À cet égard, il est vital de préciser que l’opinio juris cogentis doit être atteinte par la communauté internationale.  Il a exprimé des doutes sur les projets de conclusions 6 et 9 qui ne répondent pas à cette ambition.  Plutôt, ils laissent toute la place au doute sur la façon dont l’opinio doit être analysée.  En conséquence il a encouragé le rapporteur spécial à travailler de façon plus prudente sur, par exemple, la question de savoir si l’acceptation et la reconnaissance sont « nécessairement et seulement » liées au principe de la non-intangibilité, si oui ou non les États doivent l’exprimer de façon explicite ou s’il est suffisant pour les États de relier leur opinio à d’autres références, comme par exemple, les normes universelles.  De plus, le projet de conclusions emploie le terme « d’acceptation et de reconnaissance » de manière inséparable, ce qui entraîne un manque de clarté.  Le projet de conclusion 9 qui traite de la preuve de l’acceptation et de la reconnaissance ne nous éclaire pas sur ce point, a-t-il regretté.

Par ailleurs, la notion de communauté internationale des États comme un ensemble est aussi importante.  Le projet de conclusion 7 qui limite l’explication à « une large majorité d’États » laisse la question ouverte de savoir ce qui pourrait correspondre à la formule « dans son ensemble », a-t-il conclu.

M. STEFAN RACOVITA (Roumanie) a appuyé les projets de conclusions 4 à 9 sur les normes impératives du droit international général (jus cogens) présentés par le Rapporteur spécial qui, lui semble-t-il, sont fidèles aux normes internationales en vigueur.  Concernant la conclusion 4, il a approuvé l’approche à deux critères et estimé que la modification par une norme du jus cogens ne constitue pas en tant que telle un critère indépendant d’identification du jus cogens

À propos du projet de conclusion 5, le représentant a jugé que la source et l’identification du jus cogens devraient être traitées de façon indépendante et que les sources devraient être indiquées.  Pour lui, le projet de conclusion devrait être éliminé, alors que ses conclusions sont déjà couvertes par les projets de conclusions 4 et 7.  Concernant la reconnaissance du jus cogens, il a fait part de ses réserves sur la mention « large majorité d’États », estimant que les normes impératives reflètent des normes fondamentales partagées par une grande majorité d’États.  À cet égard, il s’est plutôt dit favorable à l’ajout de « très » à « large majorité », soit « très large majorité d’États ».  Il s’est en outre prononcé en faveur du maintien des projets de conclusions 8 et 9, invitant toutefois la CDI à approfondir ce sujet. 

Abordant la question de la succession d’États en matière de responsabilité d’État, M. Racovita a considéré qu’il n’existe pas de cadre normatif unique sur cette question, et que la pratique des États est limitée par la notion de cohérence.  Il faut évaluer la situation relative à la pratique des États pour en faire une règle générale, a-t-il poursuivi.  Il s’est montré réticent au développement du droit sur ce sujet, estimant qu’un projet de règle non contraignant pourrait être développé par la commission, sans plus.  Il faut tenir compte des règles subsidiaires à cet effet, sans élaborer de convention sur cette question, a-t-il ajouté. 

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a estimé que la question de l’environnement est de plus en plus importante.  Il a jugé que les recommandations du groupe de travail sont très utiles, et que cette question doit être traitée en lien avec le droit international et le droit de la mer.  

Selon Mme LISELOT EGMOND (Pays-Bas), les débats concernant les normes impératives du droit international général (jus cogens) ont montré que de nombreux éléments demeurent contestés, alors que leur clarification est essentielle pour arriver à des conclusions constructives à ce sujet.  Elle a partagé la préoccupation de la France concernant le manque de clarté sur le jus cogens.  Elle a estimé que le droit international coutumier constitue la base la plus importante pour les règles de jus cogens et hésité à dire que le jus cogens dérive des principes généraux et des dispositions des traités.  Les principes généraux n’ont pas le caractère non dérogatoire des règles de jus cogens et de nombreux traités manquent d’application universelle, a-t-elle expliqué.  Le caractère universel d’un traité est plus souvent l’exception que la norme.

Mme Egmond a appuyé « un test à deux volets » à cet égard: d’abord la reconnaissance de l’opinio juris, puis celle de l’opinio juris congentis.  Elle s’est posé la question de savoir si les normes de jus cogens protègent ou reflètent des valeurs fondamentales.  Ce qui compte, a-t-elle insisté, c’est que la norme en question soit acceptée et reconnue par la communauté internationale et qu’aucune dérogation à ce sujet n’est envisageable.  Par ailleurs, elle a préféré ne pas inclure la liste de normes ayant le statut de jus cogens, car sa nature empêcherait l’émergence d’une pratique des États.

Passant au chapitre sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, la représentante a estimé que les travaux devraient offrir un ensemble de principes et de directives qui se baserait sur le principe sous-tendant la responsabilité de l’État.  C’est un principe qui fait qu’il ne peut y avoir de disparition.  Le transfert ou non de droits devrait être examiné au cas par cas et devrait faire l’objet d’un accord, car les États successeurs sont généralement conscients de la nécessité de combler le vide.  Tout principe ou directive devrait être de caractère subsidiaire, a-t-elle déclaré.

Pour Mme BATZION BEN DAVID GERSTMAN (Israël), le travail de la commission devrait porter sur la définition et la codification des normes impératives du droit international général (jus cogens), qui sont une doctrine largement acceptée du droit international selon elle.  Elle a remarqué toutefois que si le concept existe depuis des siècles, le processus pour atteindre ce statut reste flou.  À la lumière de cette incertitude, il est important que la commission peaufine cet exercice avant de chercher à élargir la portée de ces normes en développant davantage les projets de conclusion existants ainsi que les commentaires qui y correspondent.

La représentante a réitéré sa position par rapport à la compilation d’une liste, illustrative ou exhaustive, des normes du jus cogens.  Elle a jugé cet exercice prématuré tant que le travail sur les critères et les implications de ces normes n’est pas achevé.  Cela risque même de créer plus de confusion et de débats, au lieu de contribuer à les clarifier et à un consensus, s’est-elle inquiétée.  Alors que les projets de conclusion présentés par le Rapporteur spécial constituent une bonne base pour la suite des discussions, il existe des divergences notables entre les principes et la terminologie utilisés dans ces projets par rapport à ceux qui existent dans le contexte du travail sur l’identification dans le droit international coutumier. 

Mme Gerstman a ensuite demandé des clarifications sur la distinction entre les critères pour le jus cogens tels que stipulés dans le projet de conclusion 4, et les éléments descriptifs qui figurent dans le projet 3.  Dans l’état actuel, ces deux projets de conclusion ouvrent la porte aux débats sur la signification du projet 3, a-t-elle averti.  Elle s’est aussi demandé s’il était judicieux d’inclure des éléments descriptifs, qui ne sont pas de nature normative et dont les ramifications juridiques ne sont pas claires, dans des conclusions de nature juridique.  Par contre, Israël soutient la distinction qui est faite dans le projet de conclusion 5 entre les sources de droit qui peuvent servir de base aux normes jus cogens, comme le droit international coutumier, et les sources qui ne peuvent que refléter de telles normes, comme le droit des traités.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité des États, la représentante a demandé s’il est nécessaire d’inclure cette question à l’ordre du jour de la commission compte tenu de la réalité des États contemporains.  Notant que ce projet est encore à l’état embryonnaire, elle a estimé qu’il est encore trop tôt pour se prononcer sur sa forme définitive.  Dans tous les cas, sa forme définitive aurait, pour sa délégation, un caractère subsidiaire aux accords passés entre États dans le contexte d’une succession spécifique.

Concernant les normes impératives du droit international général, Mme ELAHEH MOUSAVI-NEJAD (Iran) a déploré le silence du rapport de la commission sur la question de savoir qui détermine l’identification du jus cogens.  Alors que la commission s’appuie sur la Convention de Vienne, elle a fait remarquer que la Cour internationale de Justice (CIJ) est la seule autorité reconnue sur cette question en vertu de l’article 66(a) de la Convention.  En outre, la CIJ considère que cet article n’a pas valeur de droit international coutumier et de nombreux États ont émis des réserves sur cet article.  Concernant le critère pour l’identification qui se réfère aux éléments qui devraient être présents pour qu’une règle soit qualifiée de norme de jus cogens, elle a estimé que le principe d’intangibilité ne peut être considéré comme un critère, étant une conséquence de l’émergence du jus cogens.  Elle a apprécié le changement de nom du sujet, qui est dérivé de la Convention de Vienne.

D’après la représentante, la pertinence d’élaborer une liste du jus cogens doit faire l’objet de plus amples consultations.  Toutefois, si une liste doit être rédigée, elle a appelé à la priorisation de l’article 52 de la Convention de Vienne sur le droit des traités relatif à l’interdiction de la menace ou de l’utilisation de la force.  Elle a considéré qu’en cas de contradictions entre les obligations des États en vertu de la Charte des Nations Unies et du jus cogens, ce dernier doit prévaloir.  Elle s’est déclarée en accord avec la règle de l’acceptation et de la reconnaissance par une « large majorité des États » représentant les principales formes de civilisation et les principaux systèmes juridiques du monde. 

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme Mousavi-Nejad a jugé que, devant la faible pratique des États sur cette question, la conclusion voulant que la règle de non-succession ait changé est « peu convaincante ».  De plus, elle a estimé qu’un accord entre États doit avoir priorité sur des règles subsidiaires générales sur la succession.  Enfin, elle a estimé que l’adoption de projets d’articles sur cette question n’est pas appropriée pour le moment. 

M. SUN THATHONG (Thaïlande) a reconnu l’importance du jus cogens et la grande sensibilité du sujet.  Saluant la mention du jus cogens dans l’article 53 de la Convention de Vienne, qui en donne la définition la plus communément utilisée aujourd’hui, il a cependant estimé que l’interprétation de cette définition devrait se calquer sur celle des articles 31 et 32 de la Convention de Vienne.  Cette approche permettrait que l’objet et le but de la Convention de Vienne soient pleinement pris en considération par l’analyse du Rapporteur spécial.  En outre, il a estimé qu’établir une liste du jus cogens risquerait de ralentir son principe qui est par nature dynamique.

Le représentant a déclaré que l’alinéa 3 du projet de conclusion 7, intitulé « la communauté internationale des États dans son ensemble », laisse entendre qu’une « large majorité d’États » est suffisante.  Il a rappelé que durant les débats sur la négociation de l’article 53 de la Convention de Vienne, il y avait eu des incertitudes concernant justement le terme « dans son ensemble ».  Il a estimé à cet égard que le texte susmentionné ne reflète pas ce que les négociateurs entendaient par « dans son ensemble » et que ce terme requiert plus de preuves concrètes et de pratique des États.  Selon lui, la Commission du droit international devrait continuer d’évaluer la pratique des États.

Concernant le chapitre dédié à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, M. Thathong a noté que les conflits armés ont un impact à long terme à la fois sur l’environnement et sur le bien-être et le développement des populations.  Il a dit suivre avec intérêt le développement du droit environnemental et du droit humanitaire.  Selon lui, il est important de travailler avec les organisations ayant une expertise, comme le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  Cette collaboration permettrait de mieux comprendre l’importance des conflits armés sur l’environnement, a-t-il conclu.

Pour M. RUSLAN VARONKOV (Bélarus), la question des normes impératives du droit international général est de plus en plus importante dans le cadre de l’interprétation des accords internationaux, alors que les normes du jus cogens sont parfois utilisées « à des fins intéressées ».  Il a considéré que le jus cogens devrait être analysé en conjonction avec le droit international, ajoutant que le droit international général doit être mieux défini.  S’agissant des critères définis à l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, il a noté que les normes semblent s’appliquer seulement aux États qui l’ont reconnu et n’ont pas de caractère universel.  Il a invité la commission à développer d’avantage la conclusion de la partie générale des commentaires afin d’en faciliter la mise en œuvre par les États.  Afin d’éviter le recours à une approche fondée sur les valeurs, il a souligné l’importance de tenir compte des éléments objectifs, y compris la teneur de ces normes.  « Il faut éviter des interprétations divergentes des normes jus cogens par les États pour que le caractère impératif des normes ne soit pas contesté », a-t-il ajouté.

Se référant au projet de conclusion 7, intitulé « Communauté internationale des États dans son ensemble », il a déclaré que la notion relative au rôle des États dans l’identification du jus cogens n’était pas suffisamment claire.  Souhaitant conserver l’approche de l’article 53 de la Convention de Vienne, le Rapporteur spécial a fait mention de la communauté internationale dans son ensemble pour dire qu’aucun État ne peut imposer de droit de veto à la reconnaissance d’une norme de jus cogens, a-t-il relevé.  Selon lui, la façon dont les États peuvent contester une norme n’est pas claire.  La différence entre le droit international général et le droit conventionnel n’est pas bien établie, a-t-il ajouté.  Il s’est dit en accord avec le projet de commentaire 9, selon lequel l’acceptation et la reconnaissance du jus cogens peuvent être reflétées dans des documents divers.  De plus, les paragraphes 3 et 4 devraient être précisés, selon lui, car ils ne reflètent pas nécessairement la reconnaissance par les États. 

Se tournant vers la succession d’États en matière de responsabilité d’État, M. Varonkov a estimé qu’il n’existe pas de présomption d’absence de succession.  Devant les difficultés d’établir une tendance dans ce domaine, il a invité la commission à poursuivre ses travaux.  Il convient de définir des catégories dans lesquelles le lien personnel avec l’État successeur ne s’appliquerait pas.  Enfin, il a recommandé de revoir certains des termes définis dans les projets d’articles, dont le projet d’article 2.

Mme KERSTIN PURSCHEL (Allemagne) a recommandé une approche prudente en ce qui concerne la pratique des États sur les critères de formation des normes impératives du droit international (jus cogens).  Elle a appuyé le projet de conclusion 5, à savoir que ce doit être le droit international coutumier, et non les traités ou d’autres sources, qui qualifie la base du jus cogens.  Toutefois, a-t-elle regretté, ceci n’est pas suffisamment reflété dans le projet de conclusion adopté provisoirement et devrait être clarifié dans sa formulation.

S’agissant des critères du jus cogens, la représentante a apprécié que l’acceptation et la reconnaissance par la communauté internationale des États en tant qu’ensemble ne soient pas négociables.  Elle a cependant incité à la plus grande prudence du fait des implications importantes des normes de jus cogens.  D’après elle, il n’est pas nécessaire que la Commission du droit international traite du jus cogens régional à cette étape du projet.  Enfin, elle a mis en garde contre l’inclusion d’une liste énumérant les normes ayant été élevées au rang de jus cogens, ce qui ferait courir le risque d’établir un « statu quo » qui empêcherait les évolutions futures du jus cogens.

Mme KRISTINA HORNÁCKOVÁ (République tchèque) a estimé que les normes impératives du droit international général (jus cogens) ne résultent que de l’assentiment d’un État et qu’elles sont identifiées par toute la communauté internationale des États comme normes impératives.  Elle a appuyé le projet de conclusion 5 selon lequel le droit international coutumier est « le fondement le plus commun » de la formation des normes de jus cogens du droit international.  Elle a au contraire émis des doutes sur l’utilisation de dispositions d’un traité et des principes généraux de droit comme fondement des normes impératives du droit international général comme le prévoit aussi l’article.

La représentante a salué la décision de la commission d’inclure la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État dans son programme de travail.  C’est le moment, a-t-elle dit, d’examiner scrupuleusement l’ancien dogme selon lequel la responsabilité d’un acte illicite commis soit par, soit contre, l’État prédécesseur, ne peut plus être invoquée en cas de succession d’État.  Il est maintenant communément admis, a-t-elle rappelé, que la succession d’États n’entraîne pas nécessairement « une ardoise vierge » dans les relations juridiques internationales.  Elle a fait siennes les vues du Rapporteur spécial selon lesquelles le droit international contemporain n’exclut pas la succession en termes de droits et d’obligations secondaires découlant d’un acte internationalement illicite commis par l’État.  Elle a encouragé le Rapporteur à envisager une disposition générale pour intégrer cette thèse.  Ce serait, à son avis, un point de départ de l’exercice beaucoup plus complexe qui consistera à répondre à la question de savoir s’il y a des règles spécifiques du droit international qui permettent de soutenir cette thèse.

Mme Hornácková s’est par ailleurs déclarée satisfaite du projet d’article 1 sur la portée du projet de texte.  Elle a plaidé en faveur de l’harmonisation entre ce projet et les travaux précédents de la commission sur la succession d’États et la responsabilité de l’État, souhaitant que les mêmes définitions soient utilisées.  Elle a aussi jugé bonne la décision d’enlever la définition du terme « responsabilité internationale » dans le projet d’article 2.  En revanche, elle n’a pas été convaincue de la nécessité d’inclure les projets d’articles 3 (portée des accords relatifs à la succession d’États en matière de responsabilité) et 4 (déclaration unilatérale de l’État successeur).  Pour ce qui est des travaux futurs, elle a recommandé de structurer le projet autour des éléments de la responsabilité de l’État, comme le dédommagement, plutôt qu’en fonction de la nature de la succession.

La représentante a aussi abordé le chapitre relatif à la protection de l’environnement en lien avec les conflits armés en notant que la commission n’avait pas l’intention de contribuer au développement progressif du droit international ni de codifier celui-ci, et donc ne prévoyait à aucun stade d’élaborer un projet de texte qui serait juridiquement contraignant.  Elle a tenu toutefois à préciser que, si le besoin s’avérait d’amender les instruments juridiques existants, ce ne serait pas à la commission de le faire mais aux États parties à ces instruments. 

M. YOUSSEF HITTI (Liban) s’est réjoui de la tenue, en juin prochain à New York, de la première partie de la soixante-dixième session de la Commission du droit international (CDI) qui devrait renforcer l’interaction entre la Sixième Commission et la CDI.  « Il faut veiller à ce que la productivité de la commission ne soit pas mise à mal par un trop-plein de questions à traiter », a-t-il prévenu, en saluant les travaux de la CDI en général.

Intéressé par la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a réitéré sa position, à savoir qu’il faut approfondir les questions relatives à la responsabilité et à l’obligation de réparer; aux principes de proportionnalité et de précaution appliqués au contexte environnemental; aux conséquences humanitaires de l’impact sur l’environnement des conflits; à la protection de l’environnement dans les situations d’occupation. 

M. SEOUNG-HO SHIN (République de Corée) a jugé important que les travaux de la commission sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État soient cohérents.  S’agissant du projet d’article 1, il a appuyé la position de la commission d’exclure les questions de responsabilité internationale pour conséquences préjudiciables découlant d’actes qui ne sont pas interdits par le droit international.  Au sujet de l’article 2 sur l’utilisation des termes, il a noté la cohérence avec les deux Conventions de Vienne sur la succession. 

Le représentant a estimé que la priorité de la CDI devrait être de déterminer si des règles générales de succession des États existent bel et bien, notamment si les deux États sont différents.  Il a identifié deux approches possibles à cet égard, soit l’identification d’un cas où les obligations et les droits d’un État prédécesseur ont été reconnus, soit la recherche d’une règle générale pouvant s’appliquer à différents types de successions d’États.  Cependant, a-t-il reconnu, la catégorisation des États successeurs n’est pas une mince tâche.

M. RAMIS SEN (Turquie) a émis des réserves quant au besoin de développer et de codifier le concept des normes impératives du droit jus cogens.  Il a également privilégié une approche qui permette d’identifier ces normes à la place de l’option d’une liste illustrative.  Sa délégation encourage la commission à se mettre d’accord sur une méthodologie pour l’identification des normes jus cogens.  Il a ensuite réagi aux six projets de conclusion proposés par le Rapporteur spécial sur cette question et a recommandé d’éliminer ou de développer davantage le projet 6 qui, selon sa délégation, est redondant avec le projet 4 dans la mesure où il faut que la communauté internationale reconnaisse et accepte ces normes.  Il a en outre demandé que le deuxième paragraphe du projet de conclusion 7 soit éliminé pour préserver la clarté du premier paragraphe.

Pour ce qui est de la succession d’États en matière de responsabilité des États, le représentant a soulevé la complexité de cette question qui découle, selon lui, du fait qu’elle comprend deux volets qui ne sont pas encore réglés dans le contexte juridique et politique.  Il n’est pas clair, pour sa délégation, quelle partie de ce domaine tombe ou devrait tomber sous le coup du droit international et quelle partie est « politique ».  Par conséquent, il a estimé qu’il n’était pas judicieux de vouloir généraliser ou règlementer cette question d’une certaine façon.  Il en a voulu pour preuve les divergences théoriques entre les points de vue du Rapporteur spécial et de certaines délégations.

Pour M. STEPHEN H.SMITH (Royaume-Uni), les travaux de la commission sur les normes impératives du droit international général (jus cogens) devraient se concentrer sur la façon dont ces normes se forment et opèrent et sur leur effets juridiques.  La complexité et les controverses autour des normes jus cogens tiennent au processus de leur identification et à leur signification une fois qu’elles ont été identifiées.  En dépit de la vaste littérature sur ce sujet, le seul point d’accord, a-t-il reconnu, est que ces normes existent.  C’est pour cette raison que les travaux de la commission sont susceptibles d’influencer la manière dont la communauté internationale des États règlemente sa propre conduite pour les années à venir, mais qu’ils risquent aussi de diviser les États. 

Par conséquent, si le Royaume-Uni réaffirme son soutien au travail de la commission sur cette question, il l’invite à faire preuve de prudence, a poursuivi M. Smith.  Il a jugé le projet de conclusion 2 inutile, car il n’apporte pas de clarification ni l’assistance technique qui serait d’un intérêt pratique pour les États et les juristes.  En outre il n’établit pas de distinction claire entre les éléments descriptifs, d’un côté, et les critères de l’identification et leurs conséquences, de l’autre.  Il a également averti que le terme « valeurs fondamentales » risquait de diluer les éléments constitutifs du jus cogens, voire d’introduire un élément constitutif supplémentaire, ce qui rendrait la formation et l’identification de ces normes encore plus complexes.  Il a même estimé qu’un paragraphe descriptif comme le projet de conclusion 2 risquait de faire passer ce projet pratique « dans le territoire de la politique pure », au risque de perdre le consensus entre États sur les questions pratiques.

S’agissant du projet de conclusion 5, intitulé « normes du jus cogens en tant que normes du droit international général », le représentant a noté que la terminologie est puisée dans l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Analyser ces termes avec précision est un travail considérable, selon lui.  Par conséquent il a salué l’inclusion, dans le programme de travail à long terme de la commission, du point de l’ordre du jour relatif aux « principes généraux de droit ».  Commentant ensuite les projets de conclusion 5 et 6, il a jugé l’expression « communauté internationale des États dans son ensemble », qui est aussi reprise de l’article 53, difficile à capturer.  Toutefois, la remplacer par l’expression « dans sa grande majorité » ne rend pas service. 

Allant plus loin, M. Smith a pris le contrepied du Rapporteur spécial pour lequel l’article 53 de la Convention de Vienne doit être le point de départ de ce travail, affirmant que pour sa délégation le travail en substance sur cette question ne devrait pas se baser sur la définition qui figure dans l’article susmentionné.  Cette question devrait être traitée dans les limites fixées par l’article et être cohérente avec les règles qu’il contient.

Passant ensuite à la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. Smith a constaté qu’il existait très peu d’éléments en termes de pratique des États pour guider les travaux de la commission.  Les cas identifiés par le Rapporteur spécial sont très spécifiques à un contexte donné et sensibles, a-t-il noté, alors que ce sujet devrait être abordé dans une perspective historique, politique et culturelle, selon l’orateur.  Il a demandé à la commission de préciser clairement si elle établit des normes dans le cas de la lex lata ou dans le cas de la lex ferenda.  Pour sa délégation, « nous sommes dans le dernier cas ».

Enfin, sur la question de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a indiqué que la commission ne devrait pas chercher à modifier le droit des conflits armés.  Même si la définition de principes directeurs pourrait être utile, il ne pense pas que cela mérite de nouvelles dispositions de traité.  Le droit international est le lex specialis dans ce domaine, a-t-il conclu. 

Mme INTAN DIYANA AHAMAD (Malaisie) a salué l’inclusion de la question du jus cogens dans le programme de travail de la Commission du droit international.  Elle a noté que le projet de conclusion proposé par la Rapporteur spécial est basé sur les principes de l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  En ce qui concerne le projet de conclusion 5, une explication plus profonde de l’utilité de l’article 38(1) du statut de la Cour internationale de Justice pourrait servir de base pour déterminer les normes de jus cogens.  S’agissant du projet de conclusion 9, elle a souligné que le travail des experts et des universitaires n’est que secondaire dans l’identification du jus cogens en tant que norme de droit international.

Passant au sujet de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, la représentante a noté l’importance du sujet, en soulignant le rôle du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  Elle a récapitulé la position de sa délégation sur la portée du sujet, l’utilisation des termes, la méthodologie et les droits des populations autochtones.  « Nous attendons que des efforts soient faits pour combler les lacunes dans les projets de principe », a-t-elle déclaré.  Les éléments de protection tels qu’envisagés devraient fournir une analyse et une clarification concernant leur applicabilité et leur relation avec le droit international humanitaire, le droit pénal international, le droit de l’environnemental international, les droits de l’homme et le droit des traités. 

M. NGUYEN NAM DUONG (Viet Nam) a déclaré que les normes impératives du droit international général (jus cogens) sont reconnues par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 ainsi que dans les législations nationales de plusieurs États, y compris le Viet Nam, par le biais de la loi sur le droit des traités de 2016.  Il a encouragé la CDI à poursuivre ses travaux sur cette question.

Le représentant a souligné le manque de pratique des États sur la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État.  Parmi les éléments dont la commission doit tenir compte sur ce sujet, il a noté la responsabilité envers les organisations internationales, la responsabilité pour les actes qui ne sont pas interdits en vertu du droit international, et les cas où les États prédécesseur et successeur coexistent.  Devant le manque de pratique des États, le principe de non-succession doit être appliqué, selon lui.

Pour ce qui est de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, M. Nguyen a rappelé l’expérience de son pays, où des dommages importants et durables ont été causés à l’environnement lors de conflits.  Il s’est donc dit en accord avec la commission sur l’importance d’établir la responsabilité de l’État sur cette question, en complément des lois internationales existantes, notamment les Conventions de Genève.

Sur les normes impératives du droit international général (jus cogens), M. HECTOR ENRIWUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador) a estimé qu’il serait opportun de reporter l’examen du projet de conclusion 5 afin de parvenir à une position uniforme, étant donné les divergences d’opinions par rapport à la fonction des principes généraux de droit et afin de ne pas affecter l’universalité dans la formation du jus cogens.  Il a suggéré de remplacer le terme « attitude » des États par « conviction » dans le projet de conclusion 3.

Le représentant a jugé important le travail de codification et de développement progressif afin de clarifier les effets de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.  Il serait pertinent de prendre en compte les différentes formes de succession d’États afin d’apporter un meilleur éclairage sur leurs effets juridiques, en particulier en ce qui concerne le maintien ou la perte de la personnalité internationale des Etats affectés. D’après lui, l’expression « succession d’États », définie dans le projet d’article 2, n’identifie pas la forme licite qui sous-tend l’hypothèse de substitution d’un État par un autre, dans la responsabilité des relations internationales d’un territoire.  Or la modification territoriale de façon licite et pacifique revêt un caractère essentiel pour la succession d’États.

M. Celarie Landaverde a approuvé l’idée d’intégrer de nouvelles définitions au projet.  Quant aux projets d’articles 3 et 4, il a été d’avis qu’il faut en poursuivre l’examen.

Au chapitre de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a considéré qu’il faut abandonner la distinction entre conflits armés internationaux et conflits armés non internationaux puisque les conséquences sont irréversibles pour l’environnement dans les deux cas.  Considérant l’environnement comme un bien public, transnational et même universel, il a jugé préoccupant de ne considérer les attaques contre l’environnement que lorsque celui-ci est devenu un objectif militaire.

M. YUKI HIROTANI (Japon) a soutenu l’approche du Rapporteur spécial sur le sujet des normes impératives du droit international général (jus cogens) concernant les éléments de l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités en tant que base de critère pour l’identification du jus cogens.  Le Japon soutient aussi l’approche consistant à s’appuyer sur la pratique des États et sur les décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Cependant, il a souligné que le jus cogens est une norme de droit international général et pas un concept confiné dans le contexte du droit des traités.  Sa portée ne peut être limitée par le droit des traités, a-t-il déclaré.  Il est important de considérer les questions relatives à d’autres domaines du droit, telles que la responsabilité des États, concernant sa définition, ses critères et son contenu.

Pour ce qui est de la question de savoir si la Commission du droit international devrait concevoir une liste du jus cogens, le représentant a estimé que cette liste peut être très utile en pratique si elle inclue les fondements et preuves basés sur ce que la CIJ considère comme étant des normes ayant acquis le statut de jus cogens.  Cependant, a-t-il averti, il faut agir avec prudence dans la préparation de cette liste pour éviter les perceptions erronées.  Ainsi est-il important de clarifier le fait que cette liste est illustrative et non pas exhaustive.  À propos du jus cogens régional, le Japon est pleinement convaincu de la nécessité d’étudier un jus cogens qui ne soit pas universel.  La relation entre les normes de jus cogens internationales et les normes de jus cogens régionales doit être considérée en détail.

Passant à la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. Hirotani a rappelé les difficultés potentielles, eu égard au nombre limité de cas pertinents de pratique de l’État sur ce sujet.  Étudier la pratique des États sur ces questions est crucial selon lui.  Il a souligné que les projets d’articles 3 et 4 ont une structure complexe en raison du manque d’orientation claire en ce qui concerne les principes généraux de succession d’États en matière de responsabilité de l’État.  Si l’on en croit la théorie de la non-succession, les projets d’articles 3 et 4 devraient se concentrer sur les conditions exceptionnelles, là où les accords pourraient donner lieu à un transfert de responsabilité.  Il a souhaité une analyse plus approfondie sur cette question.  En outre, les sujets tels que la responsabilité des organisations internationales ainsi que la succession des gouvernements ne devraient pas être abordés pour éviter de surcharger l’examen en cours.

M. NECTON MHURA (Malawi) a salué le travail de la commission sur la codification et le développement progressif du droit international.  Revenant sur les projets d’articles sur les crimes contre l’humanité, il a exhorté la commission à approfondir son examen des droits des victimes à des réparations.  Il a noté à cet égard que de nombreux États pourraient avoir des difficultés à faire face au fardeau financier découlant de l’imposition de réparations. 

Concernant l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant s’est dit préoccupé par l’abandon par la commission de la procédure consistant à adopter ses décisions par consensus.  Devant les divisions entourant les exceptions aux immunités de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il a invité la commission à poursuivre son examen de ce sujet, sans le confondre avec la portée et l’application du principe de compétence universelle.  Notant que chaque tribunal possède des règles qui lui sont propres, il a douté de la pertinence d’ajouter l’administration de la preuve devant les juridictions internationales au programme de travail. 

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