Soixante-douzième session,
65e séance plénière – matin
AG/11986

L’Assemblée générale adopte sans consensus une résolution sur la coopération entre l’ONU et l’Organisation de la coopération islamique

L’Assemblée générale a adopté, aujourd’hui, par vote, une résolution sur la coopération entre l’ONU et l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et examiné un autre texte relatif à la poursuite de l’enquête sur la mort de Dag Hammarskjöld, ancien Secrétaire général de l’ONU, mort dans un accident d’avion en Zambie en 1961.

La résolution sur la coopération entre l’ONU et l’OCI, qui a été adoptée par 92 voix pour et les abstentions de l’Arménie, de l’Inde, d’Israël et de la Syrie, se félicite de l’engagement ferme de l’OCI en faveur de la lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme, et de la coopération entre les deux Organisations pour lutter contre l’intolérance et la stigmatisation qui visent certaines personnes en raison de leur religion ou de leurs croyances.  La résolution, qui a été présentée par la Côte d’Ivoire, se félicite également que l’ONU et l’OCI aient un but commun, celui de promouvoir et de faciliter le processus de paix au Moyen-Orient.

Israël a expliqué son abstention par le quatrième alinéa du préambule duquel se sont dissociés les États-Unis, le Canada et l’Australie.  Israël a vu « une nouvelle attaque contre lui » dans le Programme d’action de l’OCI pour 2025 dont l’Assemblée générale prend note.  L’Arménie y a relevé une position contraire à sa position sur le Nagorno-Karabakh. 

La Syrie a fustigé une OCI sous l’emprise de l’Arabie saoudite, sans oublier d’alerter sur le « tournant historique » que vit le monde avec la décision « unilatérale, sans aucune valeur juridique ni légale » des États-Unis de transférer leur Ambassade à Jérusalem.  La Syrie a dénoncé un « mépris flagrant » pour les Palestiniens et l’ensemble du monde arabe, jugeant qu’il est de « notre responsabilité historique » de contrer cette décision.   

L’Assemblée générale a aussi examiné un projet de résolution relatif à la poursuite de l’enquête sur les circonstances de la mort de Dag Hammarskjöld, présenté par la Suède.  Comme la résolution contient un petit programme qui a des incidences financières, son adoption aura lieu une fois que la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires aura examiné la question. 

Le texte engage tous les États Membres qui pourraient détenir des informations utiles à nommer, sans tarder, un responsable indépendant de haut niveau chargé de procéder à un examen interne ciblé des archives de leurs services de renseignement, de sécurité et de défense, afin de déterminer si elles contiennent des informations pertinentes.

L’Assemblée générale reprendra ses travaux demain jeudi 7 décembre, à partir de 10 heures, pour se prononcer sur les recommandations de sa Quatrième Commission chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation et de sa Sixième Commission chargée des questions juridiques.

ENQUÊTE SUR LES CONDITIONS ET LES CIRCONSTANCES DE LA MORT TRAGIQUE DE DAG HAMMARSKJÖLD ET DES PERSONNES QUI L’ACCOMPAGNAIENT

Présentation du projet de résolution (A/72/L.19)

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a remercié le juge Mohammed Othman et son équipe pour leur travail et tous les États Membres qui ont collaboré et contribué à l’enquête.  Depuis 2015, le juge, d’abord comme Président du Groupe d’experts indépendants et plus récemment comme l’Éminente Personnalité nommée par le Secrétaire général, a supervisé des progrès majeurs dans l’enquête.  Nous avons maintenant, a estimé la représentante, une occasion unique de jeter la lumière sur ce qui s’est passé à Ndola le 17 septembre 1961.

Le juge conclut dans son dernier rapport qu’il est plausible qu’une attaque ou une menace externe ait causé l’accident.  Cette conclusion, a dit la représentante, « altère l’équilibre des probabilités » et exige donc un suivi.

C’est la raison pour laquelle, la résolution prie le Secrétaire général de reconduire dans ses fonctions le juge Othman afin qu’il continue son travail.  Cette enquête approfondie bénéficierait « immensément » de la continuité, a argué la représentante, en se disant convaincue que personne n’est mieux placé que le juge Othman pour faire avancer cette question.

Le Secrétaire général est également prié de s’assurer que l’Organisation des Nations Unies examine ses propres documents et archives afin de lever le secret qui serait attaché aux informations concernant la mort de Dag Hammarskjöld et des personnes qui l’accompagnaient.  Ce travail est déjà en cours, a relevé la représentante qui a remercié le Secrétaire général pour sa célérité.

Dans son rapport, a-t-elle poursuivi, le juge Othman note aussi qu’il est probable que de nouvelles informations importantes n’aient pas encore été dévoilées.  Le juge en conclut que la charge de la preuve est passée aux États Membres qui doivent montrer qu’ils ont procédé à un examen exhaustif des documents et archives en leur possession, y compris ceux qui sont toujours classés « secret ».

En conséquence, la résolution engage tous les États Membres qui pourraient détenir des informations utiles à nommer, sans tarder, un responsable indépendant de haut niveau chargé de procéder à un examen interne ciblé des archives de leurs services de renseignement, de sécurité et de défense, afin de déterminer si elles contiennent des informations pertinentes.

La représentante a dit compter sur la pleine coopération de tous les États Membres, soulignant que c’est « notre responsabilité partagée » de faire éclater la vérité. 

Comme la résolution contient un petit programme qui a des incidences financières, son adoption aura lieu une fois que la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires aura examiné la question. 

Les Nations Unies et les États Membres doivent maintenant faire tout leur possible pour savoir ce qui est arrivé au vol SE-BDY, a conclu la représentante.  Nous le devons aux familles de ceux qui ont péri, il y a 56 ans, dont beaucoup regardent cette réunion dans diverses parties du monde.  Nous le devons aux Nations Unies en tant qu’organisation et à tous ceux, dans cette auguste Assemblée, qui s’efforcent de travailler dans l’esprit de Dag Hammarskjöld.  Comme l’a dit le Secrétaire général, Dag Hammarskjöld croyait non seulement dans les Nations Unies mais il a aussi convaincu tant d’autres d’y croire également.   

COOPÉRATION ENTRE L’ONU ET L’ORGANISATION DE LA COOPÉRATION ISLAMIQUE

Présentation du projet de résolution (A/72/L.10)

Le Président du Conseil des Ministres des affaires étrangères des pays membres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et du Groupe des pays membres de l’OCI à New York, M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUE (Côte d’Ivoire), a indiqué que, dans son préambule, le projet de résolution réaffirme les objectifs communs de l’OCI et de l’ONU en matière de prévention des conflits, d’instauration d’un climat de confiance, de maintien de la paix, de règlement des conflits, de relèvement après les conflits, de médiation et de diplomatie préventive, notamment dans des situations de conflit concernant des communautés musulmanes.

Le projet souligne que les deux organisations souhaitent renforcer leur coopération dans les domaines politique, économique, social, humanitaire, culturel et scientifique, ainsi que dans la recherche commune de solutions à des problèmes mondiaux, tels que ceux ayant trait à la paix et à la sécurité internationales, au désarmement, à l’autodétermination, à la promotion d’une culture de paix grâce au dialogue et à la coopération, à la décolonisation, aux droits fondamentaux de la personne, au développement socioéconomique, et à la lutte contre le terrorisme international.  Il se félicite des initiatives lancées en faveur du dialogue œcuménique par les deux Organisations et de la coopération qui existe entre l’OCI et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).

Dans son dispositif, le projet de résolution se félicite de l’engagement ferme de l’OCI en faveur de la lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme, que les deux Organisations aient un but commun, celui de promouvoir et de faciliter le processus de paix au Moyen-Orient, et de la coopération qu’ont établie les deux Organisations pour lutter contre l’intolérance et la stigmatisation qui visent certaines personnes en raison de leur religion ou de leurs croyances.

Aujourd’hui, a poursuivi M. Tanoh-Boutchoue, nous constatons l’importance et l’utilité croissantes de la coopération dynamique entre l’ONU et l’OCI.  Il est clair que, face à des conflits anciens et nouveaux, la coopération entre les deux Organisations revêt une importance stratégique.

Déclarations

M. PIERRE CHRISTOPHE CHATZISAVAS, de l’Union européenne, a encouragé l’intensification de la coopération entre l’ONU et l’OCI mais a souligné que le Programme d’action de l’OCI sur la question de Chypre est « incompatible » avec les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, entre autres.  Il a prié l’OCI de s’abstenir de faire adopter des résolutions qui ne correspondent pas aux dispositions de la Charte et au mandat des Nations Unies.

M. FAISAL NASSER M. ALHAKBANI (Arabie saoudite) a fait observer que l’OCI a déployé de gros efforts pour réaliser les objectifs de paix et de sécurité et qu’elle veut défendre une bonne compréhension entre les religions et les cultures pour contrer l’idéologie extrémiste.  Il a plaidé pour le renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales.  La coopération entre l’ONU et l’OCI est importante pour promouvoir la tolérance, pour lutter plus efficacement contre le terrorisme et les discours de haine et faire prévaloir les valeurs communes de l’humanité.  Les défis de la sécurité, de l’environnement ou de la culture exigent de tous les États Membres une coopération renforcée, a insisté le représentant.  L’OCI, a-t-il rappelé, compte 57 États de tous les continents.  « C’est la voix commune du monde musulman. »  Ces États veulent lutter contre les conflits et les prévenir, défendre les droits des Palestiniens, arrêter les violations contre la minorité des Rohingya.

M. AMMAR AL ARSAN (République arabe syrienne) a indiqué qu’en sa qualité d’État fondateur des Nations Unies et de l’OCI, créée en 1969 au lendemain d’un incendie prémédité contre la mosquée Al-Aqsa, la Syrie a toujours entretenu des relations amicales et fraternelles avec les membres de l’OCI.  Le représentant a d’ailleurs exprimé sa gratitude aux pays qui se sont montrés solidaires dès les premiers jours du conflit dans son pays.  Mais il a critiqué le fonctionnement de l’OCI qui ploie sous les pressions du pays hôte.  Il a dénoncé la résolution « illégale » adoptée lors d’une réunion extraordinaire en Arabie saoudite, décidant de suspendre la participation de la Syrie à l’OCI.  Le représentant a aussi dénoncé le fait que la présidence de l’OCI ait publié, en avril 2017, un communiqué pour se féliciter de l’agression militaire contre la Syrie.  Ce communiqué, a-t-il révélé, a été publié sans consultation préalable avec les autres États de l’OCI.  Quelle déontologie peut justifier que l’on se félicite d’une agression militaire? s’est indigné le représentant, accusant certains États de l’OCI d’avoir facilité le passage, l’entraînement et l’armement des combattants en Syrie.  L’Arabie saoudite s’efforce de propager la pensée wahhabite extrémiste auprès des jeunes du monde entier, portant ainsi gravement atteinte à l’image même de la religion musulmane.

Le représentant a fustigé la « coalition arabe » qui contribue à la destruction du Yémen et qui a introduit, parmi d’autres plaies, le fléau du choléra, transformant le Moyen-Orient en un théâtre de guerre, à cause de la détermination de l’Arabie saoudite de détourner, à son profit exclusif, le mandat de l’OCI.  Nous vivons aujourd’hui un tournant historique, a prévenu le représentant, qui a pris note de la décision « unilatérale, sans aucune valeur juridique ni légale » des États-Unis de transférer leur ambassade à Jérusalem.  Cette décision reflète un « mépris flagrant » pour les Palestiniens et l’ensemble du monde arabe, a tranché le représentant, jugeant qu’il est de « notre responsabilité historique » de contrer cette décision.  Il faut appuyer les droits et les intérêts des Palestiniens musulmans, juifs et chrétiens, sans distinction aucune.  Il faut « laver la religion musulmane » qui a été trop longtemps travestie par des décisions « iniques », a-t-il conclu, en annonçant son opposition au projet de résolution.  

Mme HUSNIYYA MAMMADOVA (Azerbaïdjan) a rappelé le rôle important de l’OCI dans la promotion d’une culture de paix aux niveaux régional et international et a estimé qu’en raison de sa vaste portée géographique, il est évident qu’elle doit coopérer étroitement avec l’ONU.  Certains pays de l’OCI sont dans des situations de conflit ou de postconflit ou sous occupation étrangère, a rappelé la représentante, ce qui représente une menace à la paix et à la sécurité internationales.  Par ses efforts diplomatiques et économiques, l’OCI a contribué à la paix et à la sécurité dans nombre de ces pays.  Elle soutient le processus de paix au Moyen-Orient et partage l’objectif commun de parvenir à des résultats.  La rhétorique antimusulmane est un grand sujet de préoccupation, a dit la représentante.  L’ONU et l’OCI doivent coopérer pour y répondre, car l’Azerbaïdjan considère que le dialogue interculturel et interreligieux est un outil essentiel de la paix.

Explications de vote

Israël aurait souhaité que le Programme d’action de l’OCI ne soit pas mentionné dans la résolution car « c’est une nouvelle attaque contre Israël ».  Compte tenu des relations solides avec certains membres de l’OCI, Israël s’est abstenu.

Les États-Unis ont voté pour la résolution mais se sont dissociés de l’alinéa 4 du préambule en raison de ses assertions « inacceptables » sur Israël.

Le Canada s’est dissocié du même alinéa car il s’oppose à toute résolution hostile à Israël.

L’Australie, qui a voté en faveur de cette « importante » résolution, a aussi critiqué la manière dont les mesures israéliennes y sont décrites.

En dépit d’une longue histoire d’amitié, de respect mutuel et de coopération avec les États de l’OCI, avec lesquels elle partage des valeurs ancestrales, l’Arménie a néanmoins regretté que la résolution ne soit ni crédible ni souhaitable car elle a été soumise à la plénière sans consultations préalables.  L’Arménie a aussi regretté la référence au Programme d’action de l’OCI, qui est contraire à sa position sur le Nagorno-Karabakh. 

Droits de réponse

L’Arabie saoudite a répondu aux déclarations de la Syrie, en dénonçant des « accusations sans fondement ».  La politique du régime syrien, qui n’hésite pas à agresser son propre peuple, se confirme avec ce refus de soutenir le projet de résolution.

Répondant à l’Arménie, l’Azerbaïdjan a rappelé l’objectif commun de l’ONU et l’OCI, qui est de promouvoir et de faciliter le processus de paix au Moyen-Orient.  L’Azerbaïdjan a jugé qu’il n’y a rien de surprenant dans les tentatives « absurdes » de l’Arménie de critiquer ces engagements.  Depuis le début du conflit, l’OCI a clairement dit, en se fondant sur les résolutions du Conseil de sécurité, que les actions de l’Arménie sur le territoire de l’Azerbaïdjan sont condamnables.  La création du Groupe de contact de l’OCI est donc très importante pour forcer l’Arménie à cesser son agression et son occupation illégale du territoire azerbaïdjanais.

Nous voyons comme toujours la tendance à abuser des réunions pour faire de la propagande, a taclé l’Arménie.  L’Azerbaïdjan, a-t-elle dit, continue de violer les accords, en refusant les observateurs chargés de contrôler le cessez-le-feu.

Une falsification de la vérité, a tranché l’Azerbaïdjan qui a vu à quel point l’Arménie est loin d’un règlement pacifique du conflit.

L’Azerbaïdjan déforme la vérité, a répondu l’Arménie, voyant une tentative de « tromper » la communauté internationale et de dissimuler le nettoyage ethnique qui a eu lieu entre 1989 et 1991.  L’Arménie a rappelé qu’elle a toujours plaidé pour un mécanisme indépendant dont l’Azerbaïdjan refuse la création.

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