Soixante et onzième session,
Manifestation de haut niveau sur l’éducation
AG/11925

Assemblée générale: « le droit à l’éducation pour tous », facteur crucial pour la réalisation du développement durable

« L’éducation ne peut attendre. »  C’est ce que n’ont cessé de marteler, aujourd’hui, les participants à une manifestation de haut niveau de l’Assemblée générale relative à la Campagne pour la réalisation des objectifs de développement durable sur l’éducation.  Que ce soit en temps de conflit, face à la pauvreté ou à la crise mondiale des réfugiés, ou encore pour assurer l’autonomisation des femmes, les délégations n’ont cessé de rappeler que le « droit à l’éducation pour tous » est crucial pour la réalisation du développement durable.

Au cours d’une journée de travaux structurés sous forme d’une série de dialogues interactifs, les participants se sont attachés à identifier des mesures pouvant concourir à la réalisation du quatrième des 17 objectifs de développement durable, celui qui vise à « assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ».

« À travers l’éducation, on prépare le cœur et l’esprit des jeunes à façonner un monde plus juste et plus prospère pour eux-mêmes et pour les générations à venir », a notamment déclaré la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, indiquant qu’à l’heure actuelle, environ 264 millions d’enfants, adolescents et jeunes ne sont pas scolarisés dans le monde et que 758 millions d’adultes ne sont pas éduqués. 

Pourtant, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), prolonger de deux ans les années d’études dans la tranche de la population de plus de 15 ans, permettrait d’extirper environ 60 millions de personnes de la pauvreté.  De même, en assurant une éducation primaire et secondaire universelle, ce sont même 420 millions de personnes qui pourraient sortir de la pauvreté dans le monde. 

De nombreux orateurs ont toutefois appelé à ne pas perdre de vue l’importance de tabler sur une éducation de bonne qualité, à l’instar de la Rapporteure spéciale des Nations Unies sur le droit à l’éducation, Mme Koumba Boly Barry, qui s’est inquiétée du fait que de nombreux enfants sortent de l’école primaire sans pouvoir bien lire, écrire ou résoudre de simples opérations d’arithmétique.

Or, une éducation de qualité passe par un financement adéquat, et les délégations ont noté qu’à l’heure actuelle, le déficit mondial du financement de l’éducation est estimé globalement à 39 milliards de dollars.  La Vice-Ministre de l’éducation de la Norvège a souligné que la mobilisation de ressources nationales consacrées à l’éducation revêt donc la plus grande importance.  Cependant, le Vice-Ministre de l’éducation du Botswana, a indiqué que même si son gouvernement consacre 25% de son budget national à l’éducation, « une exception mondiale », le manque de fonds demeure une réalité pour son pays.  Le représentant de l’Éthiopie a de son côté chiffré à 3 millions de dollars le déficit dans son pays.

L’ancien Ministre de l’éducation de la République de Corée, M. Ju-Ho Lee, s’est en revanche enorgueilli du succès de la politique éducative de son pays qu’il a imputé à l’ampleur de la mobilisation nationale.  Il a notamment expliqué que les investissements dans le secteur éducatif, dont les dépenses sont passées de 13% en 1971 à 20% en 2010, soit 5% du produit intérieur brut (PIB), avaient permis de réduire le taux de pauvreté du pays.  Il a également cité l’implication du secteur privé dans le financement de l’éducation. 

En République dominicaine, la part du PIB consacrée à l’éducation est passée de 2 à 4%.  Le Gouvernement offre même des repas quotidiens aux élèves et a lancé un vaste programme de construction d’écoles afin que l’ensemble des enfants du pays soient scolarisés, y compris les jeunes filles.

En la matière, Mme Irina Bokova, Directrice générale de l’UNESCO, a précisé que sur les 264 millions d’enfants qui ne vont pas à l’école dans le monde, la majorité est constituée de filles.  En outre, parmi les plus de 750 millions d’adultes qui n’ont pas bénéficié d’éducation, les deux tiers sont des femmes. 

« L’éducation des jeunes filles doit être améliorée, et cela passe par des mesures simples comme la construction de toilettes pour des jeunes filles, ou encore l’abolition de pratiques comme celle privilégiant la scolarisation des garçons à celle des filles », a-t-elle plaidé. 

En plus des filles et femmes qui sont marginalisées, les personnes souffrant d’un handicap sont souvent laissées de côté, a déploré M. Saul Mwame, jeune homme de Tanzanie qui a fondé l’organisation « Building Africa’s future foundation ».  « Le handicap n’est pas une barrière à l’éducation », a-t-il martelé tout en expliquant que sa fondation se consacre à sensibiliser les parents sur l’importance d’éduquer tous leurs enfants.   

De nombreux représentants, y compris le Président de l’Assemblée générale, M. Peter Thomson, ont de leur côté mis l’accent sur le fait qu’une bonne éducation passe également par de bons enseignants, et appelé à investir dans les enseignants afin de leur donner les outils dont ils ont besoin pour façonner les prochaines générations de penseurs critiques et créatifs.  Une tâche de longue haleine quand l’on sait que 69 millions de nouveaux enseignants sont nécessaires dans le monde entier pour atteindre les objectifs de développement durable sur l’éducation.  Pour pallier ce manque, l’une des solutions serait de faire fond sur l’innovation.

Mme Bokova a en effet affirmé que les technologies de l’information et des communications (TIC) pourraient constituer un module de formation pour les enseignants.  L’utilisation de la technologie peut renforcer l’éducation à distance, aider à identifier des approches pour apporter l’éducation aux plus pauvres, a de son côté suggéré Mme Amina J. Mohammed.  La révolution numérique doit aussi être une révolution de l’enseignement, a-t-elle argué. 

Aux Philippines, a renchéri sa déléguée, le Gouvernement fournit déjà des ordinateurs dans les régions isolées du pays afin de mettre en pratique l’enseignement à distance, un principe déjà mis en œuvre par M. Shai Reshel, Président et fondateur de l’Université des peuples, qui fournit des cours en ligne afin de compenser le déficit de fonds qui fait obstacle à la création d’universités classiques.

Mme Helena Barroco, Conseillère diplomatique de l’ancien Président portugais, M. Jorge Sampaio, a de son côté présenté un projet innovant mis en place par ce dernier et qui permet d’offrir des bourses à des étudiants syriens grâce à des dons venant de particuliers.  L’objectif du programme est de mobiliser la plupart des institutions universitaires du monde afin que chaque étudiant, où qu’il se trouve, contribue un dollar à la cause de ses pairs réfugiés ou vivant en situation de vulnérabilité.

L’un des débats de ce jour était justement consacré à la question de « l’éducation dans les situations vulnérables et humanitaires ».  En effet, 35% des enfants non scolarisés dans le monde vivent dans les zones touchées par les conflits qui, de même que les catastrophes naturelles et les pandémies, peuvent laisser des générations entières déplacées, traumatisées et sans accès à l’éducation.

« C’est parce que j’ai pu bénéficier d’une éducation de qualité en tant que réfugié que je peux aujourd’hui témoigner devant vous », a relevé M. Dor Akech Achiek, ancien réfugié sud-soudanais qui travaille désormais au sein de l’organisation Settlement Services International d’Australie.  

M. Omar Abdi, Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) a toutefois averti que le système humanitaire international n’arrive pas toujours à garantir une éducation aux enfants victimes de conflit, s’inquiétant de surcroit du fait que les financements actuels sont en baisse alors même que la demande est en hausse.  « L’éducation est parfois carrément ignorée par les donateurs qui préfèrent soutenir des programmes d’urgence », a-t-il regretté, avant que sa collègue, Mme Yasmine Sherif, ne présente l’initiative « L’éducation ne peut pas attendre », un fonds mondial qui vise à ce que l’éducation d’aucun enfant ou jeune ne soit délaissée en cas de crise.  Lancée lors du Sommet mondial sur l’action humanitaire de 2016 à Istanbul, cette initiative cible un financement de 3,85 milliards de dollars pour les cinq prochaines années.

Le Conseiller à l’éducation au Directeur des opérations du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), M. Geoffrey Loane, a en outre fait observer qu’en plus de ces fonds, il importe également de veiller à ce que les enseignants soient outillés pour discuter des situations de crise et de conflits avec les apprenants.

Le représentant de la République de Corée a par ailleurs parlé du Groupe des Amis de l’éducation à la citoyenneté mondiale qui entend donner un sens d’appartenance à l’humanité aux jeunes.  « La citoyenneté mondiale est un nouveau paradigme qui peut également servir de paravent à la montée de l’extrémisme violent en prônant le dialogue et la tolérance », a expliqué le délégué de la République de Corée. 

Le Président de l’Assemblée générale a également parlé de l’importance d’éduquer les jeunes sur le bien-fondé du Programme de développement durable à l’horizon 2030, afin qu’ils deviennent les catalyseurs du changement en vue de la réalisation des objectifs de développement durable.  Il a de ce fait invité tous les gouvernements à intégrer les objectifs de développement durable dans les programmes scolaires et universitaires à travers le monde, un vœu partagé par plusieurs orateurs. 

Il a aussi parlé du rôle de l’Envoyé spécial des Nations Unies pour l’éducation mondiale, l’ancien Premier Ministre britannique, M. Gordon Brown.

Cette réunion était la dernière d’une série d’évènements spéciaux organisés par le Bureau du Président de l’Assemblée générale pour promouvoir la réalisation des objectifs de développement durable.  Il intervient après ceux qui ont porté sur la paix durable, l’action en faveur du climat, le financement et l’innovation.  

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