7820e séance – matin  
CS/12601

Conseil de sécurité: le « désespoir socioéconomique » des Palestiniens rend urgent le retour à des négociations de fond, affirme le Coordonnateur pour le processus de paix

Face à la détérioration continue de la situation en Cisjordanie et aux défis chroniques qui se posent à Gaza, et alors que les « voix de l’extrémisme » s’élèvent de tous côtés contre l’espoir de la solution des deux États, le Coordonnateur spécial du processus de paix au Moyen-Orient a lancé aujourd’hui un appel à toutes les parties prenantes pour qu’elles résistent aux promoteurs d’un « programme axé sur la haine » qui menace de prolonger le conflit israélo-palestinien.

« Une déclaration soigneusement rédigée ou un discours bien préparé n’inverseront pas la trajectoire actuelle, a expliqué M. Nickolay Mladenov, venu présenter la situation au cours du mois écoulé.  Sensibilisant le Conseil de sécurité au « désespoir socioéconomique » des Palestiniens, le Coordonnateur spécial a affirmé que ce à quoi les gens aspirent, c’est une action concrète pour renouer la confiance et créer les conditions d’un retour à des négociations de fond, en se concentrant sur les changements positifs sur le terrain et un engagement avec le reste de la région.

Les populations israélienne et palestinienne, a plaidé le Coordonnateur spécial, ont besoin du soutien de la communauté internationale pour réaffirmer le consensus sur le fait que la solution des deux États est le seul moyen de répondre légitimement aux aspirations nationales des deux peuples et d’identifier clairement les obstacles à la paix: « colonies, occupation des terres, violences et incitation à la violence ».  Pour cela, a insisté le Coordonnateur spécial, il faudra des « dirigeants courageux » qui, ensemble, définissent une stratégie claire pour la paix et la sécurité.

C’est en effet un tableau sinistre qu’a dressé M. Mladenov de la situation en Cisjordanie, où le désespoir socioéconomique est exacerbé par le « fardeau de l’occupation » et la fragilité des institutions démocratiques.  « Combien de fois avons-nous dit dans cette salle que nous devons surmonter l’obstructionnisme, les faux départs et les affirmations perpétuelles selon lesquelles l’heure de l’action n’a pas encore sonné? », a lancé le haut fonctionnaire.

Cette « sombre réalité » est tout particulièrement visible dans les camps de réfugiés palestiniens, qui sont, selon M. Mladenov, emblématiques de l’échec à parvenir à une solution politique viable pour mettre fin au conflit et aux souffrances palestiniennes.

Comme lui, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Stephen O’Brien, s’est alarmé du rythme auquel se poursuivent les démolitions des habitations palestiniennes dans la zone C et à Jérusalem-Est, soit plus de 80 rien qu’au cours du mois écoulé, en raison de l’absence de permis de construire, qui sont « presque impossibles à obtenir ».  « Ces destructions et confiscations ont d’ores et déjà doublé par rapport à 2015 », a souligné M. O’Brien, qui a insisté sur les conditions de vie « de plus en plus difficiles » des Bédouins déplacés.

Ces expulsions, a constaté M. O’Brien, ont tendance à se faire au profit de nouvelles colonies israéliennes ou de l’expansion des colonies existantes.  « La semaine dernière, malgré une forte opposition, la soi-disant “loi sur la légalisation” a obtenu un vote préliminaire à la Knesset », a prévenu le Coordonnateur spécial.  « S’il venait à être adopté, ce texte autoriserait une expansion des colonies illégales et des avant-postes sur les terres privées palestiniennes.  Sa ratification constituerait une violation du droit international et, selon le Procureur général d’Israël lui-même, serait inconstitutionnelle. »

Et aujourd’hui même, a renchéri M. Nickolay Mladenov, le Comité local de planification a décidé de donner le feu vert à la construction de 500 nouveaux logements dans la colonie de Ramat Shlomo, empiétant davantage sur le quartier de Beit Hanina, à Jérusalem-Est. 

« Si la tendance économique et sociale continue de se détériorer, le potentiel d’une aggravation de la situation en Cisjordanie ne cessera de croître », a prévenu le haut fonctionnaire.  En outre, l’Autorité palestinienne, a-t-il fait observer, fait face à des difficultés fiscales considérables alors que l’assistance internationale a chuté de 30%, dans un contexte où l’Autorité dépend d’Israël pour ses recettes douanières.

Dans la bande de Gaza, la situation est tout aussi préoccupante, le Coordonnateur des secours d’urgence, M. O’Brien, faisant observer que 70% de la population dépend de l’aide alimentaire.  Toutefois, a-t-il ajouté, Israël fait obstacle à l’acheminement de celle-ci en imposant des restrictions à l’entrée de certains produits à Gaza, qui pèsent aussi lourdement sur la reconstruction.  Cette reconstruction est dans l’impasse depuis près de six mois, alors que 60 000 personnes sont toujours privées de maisons.

Le Secrétaire général adjoint et le Coordonnateur spécial ont demandé de concert à Israël de lever le blocus imposé à Gaza, même si M. Mladenov a considéré comme légitimes les préoccupations sécuritaires d’Israël.  M. O’Brien s’est dit pour sa part reconnaissant à l’Égypte d’avoir consenti à ouvrir davantage encore le point de passage de Rafah.

Le représentant de l’Uruguay a exhorté le Conseil de sécurité à s’entendre « de toute urgence » sur les moyens de mettre fin au conflit israélo-palestinien, jugeant préoccupant que le Quatuor reconnaisse dans son rapport que si la tendance actuelle se poursuit, la solution de deux États perdrait « toute viabilité ».  C’est une solution à laquelle le Conseil doit réaffirmer son soutien, pour permettre à la Palestine de devenir un « État libre et souverain, avec Jérusalem-Est comme capitale, dans des frontières sûres et reconnues », a ajouté son homologue du Venezuela.

Au Liban, le Coordonnateur spécial a fait part de progrès en vue de la formation d’un gouvernement sous la direction du Premier Ministre Saad Hariri, deux semaines après l’élection du Président de la République, M. Michel Aoun.  « Espérons que cette dynamique positive se traduira par une réactivation complète des institutions, y compris par la tenue d’élections législatives d’ici à mai 2017 », a-t-il ajouté.

Si la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) n’a eu à signaler que peu de violations de part et d’autre de la Ligne bleue au cours du mois écoulé, le Coordonnateur spécial s’est dit en revanche préoccupé par la situation précaire dans le Golan syrien, qui porte atteinte à l’Accord de 1974 sur le désengagement des forces et met « clairement en péril » le cessez-le-feu entre Israël et la République arabe syrienne.

« J’exhorte les deux parties à maintenir le contact avec la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) et à s’abstenir de toute action susceptible d’aggraver la situation et l’environnement régional déjà instable », a conclu M. Mladenov.

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