7613e séance – matin 
CS/12224

Chypre: le Conseil de sécurité demande aux parties de progresser davantage encore en faveur d’un règlement durable et renouvelle le mandat de la Force de l’ONU sur l’île

En adoptant à l’unanimité de ses membres la résolution 2263 (2016), le Conseil de sécurité a décidé, aujourd’hui, de proroger le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre jusqu’au 31 juillet 2016 et d’augmenter ses effectifs à 888 membres.  Saluant la « dynamique positive » que les dirigeants chypriotes grecs et les chypriotes turcs ont lancée récemment, il les a également engagés à saisir « avec détermination » l’occasion des négociations en cours afin de parvenir à un règlement global et durable de la situation. 

Les parties, félicitées par les membres du Conseil pour les progrès qu’elles ont accomplis jusqu’à présent, devront « redoubler d’efforts pour faire converger leurs points de vue sur les questions essentielles » et améliorer le climat des négociations, en adressant des « messages plus constructifs et plus cohérents ».  Aux termes de la présente résolution, le Conseil espère, en outre, qu’elles s’accorderont sur des mesures de confiance militaire et sur l’ouverture de points de passage, en vue de contribuer à « l’instauration d’un climat propice à un règlement ».

Enfin, les membres du Conseil demandent aux deux parties de continuer à mener d’urgence des consultations avec la Force sur la démarcation de la zone tampon, la partie chypriote turque et les forces turques devant également rétablir à Strovilia le statu quo militaire antérieur au 30 juin 2000.  Avant la mise aux voix du texte, le Président du Conseil, M. Luis Bermudez, de l’Uruguay, a informé les autres membres du Conseil que la présidence avait rencontré les représentants des deux parties qui ont confirmé « leurs positions bien connues » sur ce point de l’ordre du jour.

Plusieurs délégations, qui ont pris la parole après le vote, ont salué l’attachement des parties à la recherche  d’un règlement à Chypre.  Le représentant de l’Égypte, qui a souligné l’enjeu de premier plan que représente l’identification des personnes disparues, a, en particulier, exhorté les parties à se montrer « responsables » lors des négociations et à s’abstenir de tout acte incompatible avec la recherche d’une solution.

Son homologue de la Fédération de Russie a, pour sa part, pointé une « lacune grave » dans le texte, en expliquant que les auteurs de la résolution n’avaient pas souligné de manière évidente la présence d’un troisième acteur sur l’île, en l’occurrence, la Turquie.  « Ce pays, qui maintient une force militaire massive et pénètre l’espace aérien chypriote, n’adopte pas une attitude claire », a affirmé le délégué.

Le représentant du Royaume-Uni, l’un des coauteurs du texte, s’est dit « sensible » aux observations faites par la Fédération de Russie et assuré que l’élaboration du texte avait été guidée par un souci d’équilibre.  « Nous pensons que cette résolution est équilibrée », a-t-il soutenu, en faisant observer qu’elle s’appuyait sur le rapport du Secrétaire général, dont le Conseil est saisi aujourd’hui.  De son côté, le délégué des États-Unis a trouvé « regrettable » qu’un membre du Conseil ait décidé de « politiser un texte, adopté pourtant à l’unanimité ».  

LA SITUATION À CHYPRE

Rapport du Secrétaire général sur l’Opération des Nations Unies à Chypre (S/2016/11)

Rapport du Secrétaire général sur sa mission de bons offices à Chypre (S/2016/15)

Texte du projet de résolution (S/2016/82)

Le Conseil de sécurité,

      Accueillant avec satisfaction le rapport du Secrétaire général sur l’opération des Nations Unies à Chypre en date du 6 janvier 2016 (S/2016/11),

      Notant que le Gouvernement chypriote convient qu’en raison de la situation qui règne dans l’île, il est nécessaire d’y maintenir la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre au-delà du 31 janvier 2016,

      Notant également que le Secrétaire général compte faire le point de sa mission de bons offices dans son prochain rapport sur la question, se faisant l’écho de la ferme conviction du Secrétaire général selon laquelle c’est aux Chypriotes eux-mêmes qu’il incombe au premier chef de trouver une solution et réaffirmant le rôle de premier plan qui revient à l’Organisation des Nations Unies pour ce qui est d’aider les parties à parvenir à un règlement global et durable du conflit à Chypre et du problème de la division de l’île,

      Prenant note avec satisfaction des progrès notables des négociations, de la dynamique favorable qui s’est engagée et de la volonté exprimée par les dirigeants chypriotes grecs et chypriotes turcs de travailler sans relâche et dans la ferme intention d’obtenir des résultats en vue de parvenir à un règlement global dans les meilleurs délais, conformément aux engagements pris dans la Déclaration conjointe qu’ils ont adoptée le 11 février 2014, et se félicitant de l’appui prêté par le Conseiller spécial du Secrétaire général pour Chypre, Espen Barth Eide,

      Rappelant combien il importe à la communauté internationale que toutes les parties participent pleinement aux négociations, en faisant preuve de souplesse et d’un esprit constructif, notant que les négociations n’ont pas encore abouti à un règlement durable, global et juste fondé sur une fédération bicommunautaire et bizonale et sur l’égalité politique, comme le prévoient ses résolutions sur la question, engageant les parties à poursuivre de manière interdépendante, en redoublant d’efforts, les négociations de fond sur les questions essentielles non réglées, et soulignant que le statu quo n’est pas viable,

      Notant qu’il importe de progresser dans l’examen de mesures de confiance militaires et dans les échanges s’y rapportant, et demandant que davantage soit fait pour mettre en œuvre toutes les autres mesures de confiance ainsi que pour parvenir à un accord sur de nouvelles mesures propres à renforcer la confiance entre les communautés et pour les appliquer,

      Réaffirmant qu’il importe que les Chypriotes puissent continuer à traverser la Ligne verte et préconisant l’ouverture, d’un commun accord, d’autres points de passage,

      Convaincu des avantages nombreux et importants, notamment économiques, qu’aurait pour tous les Chypriotes un règlement global et durable de la question de Chypre, engageant vivement les deux parties et leurs dirigeants à contribuer à nourrir un discours public positif et les encourageant à exposer clairement aux deux communautés, suffisamment de temps avant l’organisation de tout référendum, les avantages d’un règlement et la nécessité à cette fin de faire preuve de davantage de souplesse et d’esprit de compromis,

      Soulignant l’importance, tant politique que financière, du rôle d’accompagnement que jouent la communauté internationale et, en particulier, toutes les parties disposées à prendre des mesures concrètes en vue d’encourager les dirigeants chypriotes grecs et chypriotes turcs à tirer pleinement parti des possibilités qui s’offrent actuellement à eux,

      Notant que le Secrétaire général juge que les conditions de sécurité sur l’île et le long de la Ligne verte demeurent stables et priant instamment toutes les parties de s’abstenir de commettre toute action, notamment la violation du statu quo militaire, qui soit de nature à accroître les tensions, à remettre en question les progrès accomplis ou à entamer la bonne volonté sur l’île,

      Rappelant que le Secrétaire général est fermement convaincu que la situation dans la zone tampon s’améliorerait si les deux parties acceptaient l’aide-mémoire de 1989 utilisé par l’Organisation des Nations Unies,

      Déplorant que les parties bloquent l’accès aux champs de mines qui subsistent dans la zone tampon, estimant que le déminage de Chypre doit se poursuivre, notant le danger que les mines continuent de poser à Chypre, notant également les propositions faites en matière de déminage et les discussions tenues à ce sujet et demandant instamment qu’un accord soit rapidement trouvé pour faciliter la reprise des opérations de déminage des champs de mines restants,

      Saluant les travaux du Comité des personnes disparues, soulignant qu’il importe que celui-ci intensifie ses activités et qu’il faut donc lui procurer toutes les informations dont il a besoin, sachant que près de la moitié des personnes disparues n’ont toujours pas été retrouvées et qu’environ 69 % doivent encore être identifiées, se félicitant des mesures prises pour permettre au Comité d’accéder aux 30 lieux d’inhumation présumés dans les zones militaires du nord de Chypre, préconisant qu’accès lui soit rapidement donné à toutes les zones pour lui permettre d’accomplir ses tâches et convaincu que ce processus favorisera la réconciliation des communautés,

      Convenant que la participation active des groupes de la société civile, y compris les associations de femmes, est essentielle au processus politique et peut contribuer à assurer la viabilité de tout règlement futur, rappelant que les femmes jouent un rôle décisif dans les processus de paix, se félicitant des efforts déployés, notamment par tous les organismes des Nations Unies présents sur l’île, pour promouvoir les contacts et les manifestations bicommunautaires et exhortant les deux parties à favoriser la participation active de la société civile, à encourager la coopération entre organismes à vocation économique et commerciale et à lever tous les obstacles à ces contacts,

      Soulignant qu’il lui faut adopter une approche rigoureuse et stratégique en matière de déploiement des opérations de maintien de la paix,

      Se félicitant que le Secrétaire général entende suivre de près toutes les activités de maintien de la paix de façon à en assurer l’efficacité et l’efficience, et notamment examiner au besoin celles de la Force, et notant qu’il importe, en prévision du règlement, de préparer des plans de transition assortis de recommandations sur les nouveaux aménagements qu’il pourrait être opportun d’apporter au mandat de la Force, à ses effectifs, à ses autres ressources et à son concept d’opération, compte tenu de l’évolution de la situation sur le terrain et des vues des parties,

      Remerciant la Représentante spéciale du Secrétaire général, Lisa Buttenheim, et la commandante de la Force, la générale de division Kristin Lund, des efforts qu’elles ont déployés et se félicitant que le Secrétaire général ait nommé Espen Barth Eide Conseiller spécial,

      S’associant au Secrétaire général pour exprimer sa gratitude au Gouvernement chypriote et au Gouvernement grec, qui ont versé des contributions volontaires pour le financement de la Force, et pour demander que d’autres pays et organisations versent également des contributions volontaires, et remerciant les États Membres qui fournissent du personnel à la Force,

      Appréciant et encourageant les efforts que l’Organisation des Nations Unies déploie, dans le cadre de toutes ses opérations de maintien de la paix, pour sensibiliser le personnel de maintien de la paix à la question de la prévention du VIH/sida et d’autres maladies transmissibles et à la lutte contre ces maladies,

      1.    Se félicite des progrès enregistrés à ce jour dans les négociations conduites par les dirigeants et des efforts que ne cessent de déployer ces derniers et leurs équipes de négociateurs en vue de parvenir à un règlement global et durable et engage les parties à saisir avec détermination l’occasion qui s’offre actuellement à elles d’obtenir un tel règlement;

      2.    Prend note des rapports du Secrétaire général (S/2016/11 et S/2016/15);

      3.    Rappelle sa résolution 2026 (2011) et demande aux deux dirigeants :

      a)    De redoubler d’efforts pour faire converger leurs points de vue sur les questions essentielles;

      b)    De continuer à travailler avec les commissions techniques afin d’améliorer la vie quotidienne des Chypriotes;

      c)    D’améliorer le climat général des négociations, notamment en insistant dans les messages publics sur les convergences et sur la voie à suivre, et en adressant des messages plus constructifs et plus cohérents;

      d)    D’accroître la participation de la société civile au processus, selon qu’il conviendra;

      4.    Demande instamment l’application de mesures de confiance et espère que de nouvelles mesures mutuellement acceptables seront arrêtées d’un commun accord et mises en oeuvre, y compris des mesures de confiance militaires et l’ouverture de points de passage, en vue de contribuer à l’instauration d’un climat propice à un règlement;

      5.    Se félicite de tous les efforts consentis pour donner suite aux demandes d’exhumation présentées par le Comité des personnes disparues, ainsi que l’appel à fournir des informations que les deux dirigeants ont lancé conjointement le 28 mai 2015, et demande à toutes les parties, au regard de la nécessité pour le Comité d’intensifier ses travaux, de lui octroyer plus rapidement un accès sans entrave à toutes les zones;

      6.    Réaffirme toutes ses résolutions sur Chypre, en particulier sa résolution 1251 (1999) du 29 juin 1999 et ses résolutions ultérieures;

      7.    Exprime son plein appui à la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre et décide d’en proroger le mandat jusqu’au 31 juillet 2016 et d’augmenter ses effectifs à 888 membres;

      8.    Demande aux deux parties de continuer à tenir d’urgence, dans le respect du mandat de la Force, des consultations avec celle-ci sur la démarcation de la zone tampon et sur l’aide-mémoire de l’Organisation des Nations Unies de 1989, en vue de parvenir rapidement à un accord sur les questions en suspens;

      9.    Demande à la partie chypriote turque et aux forces turques de rétablir à Strovilia le statu quo militaire antérieur au 30 juin 2000;

      10.   Demande aux deux parties de permettre aux démineurs d’accéder à la zone tampon et de faciliter la destruction des mines qui s’y trouvent encore, et exhorte les deux parties à étendre les opérations de déminage au-delà de la zone tampon;

      11.   Prie le Secrétaire général de lui rendre compte de l’application de la présente résolution, y compris de l’état d’avancement des plans d’action devant être élaborés en prévision du règlement, au plus tard le 8 juillet 2016 et de le tenir au courant de la situation en tant que de besoin;

      12.   Se félicite des efforts que déploie la Force pour donner effet à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général à l’égard de l’exploitation et des agressions sexuelles et pour veiller à ce que son personnel respecte strictement le code de conduite de l’Organisation des Nations Unies, prie le Secrétaire général de continuer à prendre toutes mesures nécessaires à cette fin et de l’en tenir informé, et demande instamment aux pays qui fournissent des contingents d’adopter des mesures de prévention appropriées, notamment d’organiser des séances de sensibilisation préalables au déploiement, et de prendre des mesures disciplinaires et autres pour amener les membres de leurs contingents qui se seraient rendus coupables de tels actes à en répondre pleinement;

      13.   Décide de rester saisi de la question.

 

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