Soixante et onzième session
3e séance – après-midi
CPSD/608

La Quatrième Commission entend  des pétitionnaires sur la Polynésie française, les Îles Falkland/ Malvinas, Gibraltar, la Nouvelle-Calédonie et les Îles Vierges américaines

La Quatrième Commission (questions politiques spéciales et de la décolonisation) a poursuivi, cet après-midi, son débat général sur la décolonisation, avant de commencer les auditions de représentants de territoires non autonomes et de pétitionnaires.  Elle a ainsi entendu les représentants de l’Espagne, le Président de la Polynésie française, le Ministre principal de Gibraltar, le porte-parole du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, ainsi que des pétitionnaires qui avaient demandé à s’exprimer sur la question de la Polynésie française, de Gibraltar, de la Nouvelle-Calédonie, des Îles Falkland/Malvinas et des Îles Vierges américaines.

Cette année, suite à la décision référendaire britannique de sortir de l’Union européenne, le représentant de l’Espagne a avancé une proposition de cosouveraineté espagnole et britannique sur Gibraltar.  Cette proposition permettrait aux habitants de Gibraltar de rester au sein de l’Union europeenne, de garder la nationalité britannique ou d’acquérir la nationalité espagnole, a expliqué le représentant.

Répondant à cette intervention, le Ministre principal de Gibraltar s’est étonné de la position du Ministre espagnol des affaires étrangères qui voyait dans le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne une occasion rare pour l’Espagne de faire respecter « son intégrité territoriale ».  Il a rappelé que deux référendums tenus en 1967 et 2002 ont permis au peuple de Gibraltar d’affirmer son attachement au Royaume-Uni, insistant que l’Espagne ne mettra jamais la main sur le Rocher.

Le Président de la Polynésie française a rappelé que ce territoire ne s’était jamais exprimé devant l’Assemblée générale de l’ONU depuis qu’elle a été réinscrite en 2013 sur la liste de l’ONU des territoires non autonomes.  Mettant l’accent sur quatre points, il a affirmé que le mouvement indépendantiste polynésien n’a jamais été majoritaire en Polynésie, que le fait nucléaire est reconnu par l’État français depuis 2010, que l’État français ne confisque pas les ressources naturelles de la Polynésie à son profit et que la Polynésie française est reconnue comme pays doté d’une large autonomie en tant que membre du Forum du Pacifique.  Il a exprimé son incompréhension sur cette réinscription de la Polynésie en 2013 sur la liste des territoires à décoloniser, en notant que 70% des électeurs ont constamment fait le choix de l’autonomie.  Dans ce contexte, il a jugé infondée l’utilité d’un arbitrage extérieur par l’ONU.

Ce à quoi a rétorqué un chercheur du « The Dependency Studies Projet », selon lequel « le colonialisme par consentement reste du colonialisme ».  Il a rappelé que la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes du Comité spécial de la décolonisation a été étayée par une évaluation de son niveau d’autonomie menée à l’aide d’indicateurs (SGI) qui peuvent déterminer la nature du statut politique des relations entre le territoire et la Puissance administrante.  L’analyse des dimensions constitutionnelle et politique, économique et sociale et militaire et stratégique montre, a expliqué le Chercheur, que le terme « autonomie » est appliqué à tort à la Polynésie française, dont le modèle pointe vers un arrangement de gouvernance dépendante modernisé au fil des ans, dans la forme et dans la nomenclature, mais certainement pas sur le fond.

D’autres intervenants ont par ailleurs dénoncé les conséquences des essais nucléaires français au cours des 30 dernières années en Polynésie française.  « Que l’État français reconnaisse le fait nucléaire et assume sa pleine responsabilité! » a lancé l’un des pétitionnaires.  Quant à la loi du 5 janvier 2010 qui vise à indemniser toute personne atteinte d’une des 18 maladies radio-induites listées par cette loi, elle a fait l’objet de nombreuses critiques, puisqu’à ce jour, semble-t-il, seuls trois dossiers ont abouti à des remboursements par la « Puissance administrante » pour un montant de 112 400 dollars.

Pour sa part, le Vice-Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a mis l’accent sur les avancées résultant des derniers comités des signataires de l’Accord de Nouméa, accord politique historique que les indépendantistes, les non-indépendantistes et le Gouvernement français ont signé le 5 mai 1998 et les litiges relatifs aux listes électorales.  Il a précisé que lors du Comité des signataires, du 4 février 2016, une discussion constructive entre les partenaires de l’Accord de Nouméa avait permis d’aboutir à des engagements clairs.  Les partenaires étaient ainsi convenus de déclarer comme « politiquement clos » le litige relatif aux inscriptions faites jusqu’en 2015 sur les listes électorales spéciales provinciales, sous réserve du strict respect des dispositions de la loi organique de 1999.  « Nous sommes entrés en 2016 dans une phase d’accélération de notre processus d’intégration régionale et internationale », a-t-il dit, avant de préciser que « cette dynamique, en cohérence totale avec le principe de souveraineté partagée consacrée par l’Accord de Nouméa, contribue directement à notre décolonisation ».

En fin de séance, le Royaume-Uni et l’Espagne ont exercé leurs droits de réponse sur la question de Gibraltar.

La Quatrième Commission poursuivra les auditions de pétitionnaires sur la question du Sahara occidental mercredi 5 octobre, à partir de 15 heures.

Déclaration

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) est revenu sur la question de « l’occupation illégale de Gibraltar » par le Royaume-Uni et le fait que cette île n’a jamais été cédée au Royaume-Uni.  Au fil des années, a-t-il dit, l’Espagne a invité le Royaume-Uni à respecter les différentes résolutions des Nations Unies, mais aujourd’hui il y a un véritable sentiment d’urgence.  Le 23 juin dernier, le peuple britannique a décidé par voie référendaire de quitter l’Union européenne (UE), ce qui entraînerait à terme également la sortie de Gibraltar de l’Union.  Parmi les nombreux effets possibles de cette nouvelle donne, le représentant a évoqué les problèmes avec l’Espagne, puisque l’économie du Rocher et l’économie de son pays sont intrinsèquement liées.

Par conséquent, le représentant a affirmé que l’Espagne invitait le Royaume-Uni à engager des négociations pour que les dispositions du Traité de l’Union européenne continuent à s’appliquer à Gibraltar.  Pour cela, il faudrait établir un lien politique entre Gibraltar et l’Espagne par le biais d’un régime de cosouveraineté entre l’Espagne et le Royaume-Uni sur Gibraltar.  Cette solution serait, de l’avis du représentant, avantageuse pour les habitants de Gibraltar et l’Espagne les invite à étudier cette offre.  « Il ne s’agit pas d’imposer quoi que ce soit à qui que soit », a précisé le représentant, qui encourage les habitants de Gibraltar à faire entendre leur voix.  L’Espagne ne renoncera jamais à un règlement définitif de la question de Gibraltar mais, en attendant, il serait possible de parvenir à un accord fondé sur quatre axes principaux, a-t-il expliqué.

Cet accord permettrait d’abord aux habitants de Gibraltar de conserver la nationalité britannique, tout en ayant la possibilité d’obtenir la nationalité espagnole; Gibraltar jouirait d’une large autonomie, qui s’inscrit parfaitement dans le système constitutionnel espagnol; le régime fiscal particulier à Gibraltar serait maintenu, et le mur séparant Gibraltar du reste de la péninsule ibérique serait démantelé.  L’Espagne et le Royaume-Uni se partageraient les compétences, notamment pour ce qui est du droit d’asile et du contrôle des frontières extérieures de Gibraltar. 

La proposition espagnole de cosouveraineté est fondée sur le bien-être de la zone, et en particulier celui des milliers de travailleurs espagnols qui travaillent à Gibraltar, a expliqué le représentant.  Elle permettrait de mettre fin à une controverse qui dure depuis 300 ans entre l’Espagne et le Royaume-Uni et de préserver la prospérité et la stabilité de Gibraltar.  En outre, son économie profiterait d’un libre accès au marché intérieur de l’UE et l’Espagne veillerait à ce que Gibraltar profite de cette ouverture.  Pour l’Espagne, ce serait également l’occasion de débloquer la législation communautaire qui est toujours en suspens.  Par ailleurs, cette offre s’accompagnerait d’un projet d’investissement pour mieux exploiter toutes ces possibilités, a ajouté le représentant. 

Mon pays n’entend pas imposer les termes de cette proposition et se limite à simplement faire des propositions à ce stade, qui seraient avantageuses pour toutes les parties concernées, a conclu le représentant.

DÉCLARATIONS DES REPRÉSENTANTS DE TERRITOIRES NON AUTONOMES ET DE PÉTITIONNAIRES SUR: ÎLES FALKLAND (MALVINAS), POLYNÉSIE FRANÇAISE, GIBRALTAR, NOUVELLE-CALÉDONIE, ÎLES VIERGES AMÉRICAINES ET SAHARA OCCIDENTAL

Polynésie française

M. EDOUARD FRITCH, Président de la Polynésie française, a déclaré que la Polynésie française ne s’est jamais exprimée devant l’Assemblée générale de l’ONU depuis qu’elle a été réinscrite en 2013 sur la liste de l’ONU des territoires non autonomes.  Mettant l’accent sur quatre points, il a affirmé que le mouvement indépendantiste polynésien n’a jamais été majoritaire en Polynésie, que le fait nucléaire est reconnu par l’État français depuis 2010, que l’État français ne confisque pas les ressources naturelles de la Polynésie à son profit et que la Polynésie française est reconnue comme pays doté d’une large autonomie en tant que membre du Forum du Pacifique.

M. Fritch a estimé que les Polynésiens n’ont jamais exprimé le moindre désir de se séparer de la République française au cours de ces 40 dernières années.  « Certes, le président du parti indépendantiste fut Président de la Polynésie française à cinq reprises, entre 2004 et 2013, dans une période de forte instabilité politique », a-t-il indiqué.

En ce qui concerne le fait nucléaire, il a dit que les indépendantistes polynésiens n’ont pas le monopole de cette préoccupation, précisant que la France versait annuellement, depuis 1996, une rente nucléaire de 180 millions de dollars US, soit près de 15% de son budget annuel.  « Le 23 février 2016, le Président François Hollande, lors de sa visite en Polynésie française, a reconnu devant les Polynésiens que les expérimentations nucléaires ont causé des dommages sanitaires, environnementaux et économiques qu’il importe de réparer », a-t-il ajouté.

Pour ce qui est de l’exploitation des ressources naturelles de la Polynésie au profit de la France, il a indiqué avoir demandé à ce que le statut d’autonomie soit amendé pour être plus précis s’agissant du droit d’exploration et d’exploitation des ressources naturelles du sol, du sous-sol jusque dans la zone économique exclusive.  Il a jugé infondées les craintes des indépendantistes sur les ressources naturelles de la Polynésie et jugé inutile d’ajouter un paragraphe sur cette question au projet de résolution sur la Polynésie.

Enfin, il a estimé que l’adhésion de la Polynésie au Forum des îles du Pacifique est la preuve que les 16 États qui composent cette organisation, accueillent la Polynésie comme leur égal.  Il a précisé que l’État français n’a pas cherché à entraver la liberté diplomatique du territoire.

En conclusion, il a exprimé son incompréhension sur cette réinscription de la Polynésie en 2013 sur la liste des territoires à décoloniser, en notant que 70% des électeurs ont constamment fait le choix de l’autonomie.  Dans ce contexte, il a jugé infondée l’utilité d’un arbitrage extérieur par l’ONU.  Il a ajouté que les autonomistes, conscients de l’étroitesse de leur territoire de 4 000 km2 pour 280 º000 habitants, ont une approche et une vision réalistes de leur pays face à l’interdépendance des nations et à la mondialisation des échanges.  « Les Polynésiens ne sont ni opprimés, ni citoyens de seconde zone et ont les mêmes droits fondamentaux que tous les citoyens français », a-t-il dit.  « Si la France était encore un État colonial ou avait un comportement colonial vis-à-vis d’une de ses collectivités d’outre-mer, je pense que cela se saurait sur la scène internationale » a-t-il conclu.

M. OSCAR MANUTAHI TEMARU, Président fondateur de Tavini huiraatira no te ao Mä’ohi et maire de Faaa, a attiré l’attention de la Quatrième Commission sur le fait qu’il y a moins d’un mois, son organisation avait lancé une pétition appelant à réaffirmer le soutien de son peuple à la notion de souveraineté totale sur ses propres ressources, et à appuyer la résolution adoptée le 27 juin 2016 par le Comité spécial de la décolonisation.  Il s’est félicité de pouvoir annoncer qu’environ 40% des électeurs des dernières élections territoriales en date, qui remontent à 2013, ont signé cette pétition.  « Chaque jour, des centaines de nouvelles signatures nous parviennent et d’ici à la présentation de cette résolution à l’Assemblée générale, nous sommes confiants que ce pourcentage aura atteint 60% », a ajouté M. Temaru.

Questions réponses

Le représentant du Vanuatu a demandé des précisions sur l’évolution politique de la Polynésie depuis sa réinscription en 2013 sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser.

Le représentant du Venezuela a demandé à M. Oscar Temaru des précisions sur la situation politique de la Polynésie depuis 2013.

Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a rappelé l’importance des travaux de cette Commission qui permet aux États Membres de mieux comprendre les situations pour mieux traiter les questions d’autodétermination.  Dans le contexte de la mise en œuvre des objectifs de développement durable, il a demandé comment le Gouvernement polynésien travaillait avec la Puissance administrante pour réaliser ses objectifs.  Il a demandé à M. Oscar Temaru s’il était en accord avec la position du Gouvernement actuel de la Polynésie qui souhaite voir retirer la Polynésie de la liste des territoires non autonomes à décoloniser.

Répondant aux questions des délégations, M. FRITSCH, Président du Gouvernement de la Polynésie, a expliqué la volonté du Gouvernement polynésien d’être retiré de la liste des territoires non autonomes à décoloniser.  Il a justifié cette demande par le fait que la Polynésie disposait d’une large autonomie.  « Nous avons même le pouvoir de conclure des accords avec des États, pour ce qui concerne la gestion de questions locales », a-t-il encore précisé. 

Répondant aux questions des délégations, M. Oscar Temaru, maire de la Ville de Faa’a /Tahiti, a expliqué que son mouvement avait recueilli 50 000 signatures pour soutenir la dernière résolution adoptée par le Comité spécial de la décolonisation, ce qui représente 25% de la population.  Il a rappelé que la Polynésie a été retirée de la liste des territoires à décoloniser par le Gouvernement français en 1947 sans consultation du peuple polynésien.  

M. ANTONY GÉROS, membre du Conseil de la ville de Paea à Tahiti, a estimé que les municipalités créent une division au sein du Gouvernement local.  Par le biais de ces municipalités, des décisions sont prises par la Puissance administrante qui s’immisce dans le principe de libre administration des collectivités locales.

Mme JUSTINE TEURA, membre du Conseil de la ville de Tumaraa, a estimé que la politique coloniale imposée par la France en matière d’immigration entravait le développement économique de la Polynésie française.  Elle a rappelé que les citoyens français, mais aussi européens, pouvaient y entrer et s’y installer à leur guise.  De plus, chacun peut voter et faire taire notre voix, a-t-elle affirmé, ajoutant qu’un Français et un Européen étaient autorisés à voter après six mois de résidence.  Établissant un lien direct entre les questions d’emploi et d’immigration, elle a affirmé que, selon le recensement de 2012, 33 400 personnes non originaires de la Polynésie française s’y étaient installées.  Seuls 7,5% de ces immigrants sont sans emploi contre 22,6% de la population résidente, a-t-elle affirmé.  Elle a déploré le manque de latitude concernant la politique des visas pour se rendre en Polynésie française, ce qui a des conséquences pour l’économie locale.  La Puissance administrante a décidé que seuls les ressortissants des pays de l’Union européenne et de 54 autres pays pouvaient se rendre en Polynésie française, a-t-elle déclaré.  Enfin, elle a insisté sur les difficultés que rencontrent les étrangers mariés à des personnes appartenant aux peuples autochtones ma’ohi, dans la mesure où il n’y a pas, dans le système français, de visa époux, mais seulement des permis de travail et de séjour.

M. PUARAI TAEREA, Président de l’ONG locale « Blue Djeuns no Ma’ohi Nui », a expliqué qu’il n’y avait pas de système de protection de l’emploi local et qu’aucune loi en ce sens n’était appliquée par le biais d’une législation locale.  En fait, les deux tentatives de changement de la législation locale qui auraient donné la priorité aux locaux ont été rejetées à deux reprises par la Puissance administrante, a-t-il dit.

Pour M. STEVE CHAILLOUX, Professeur de la langue tahitienne en Polynésie française, les langues autochtones sont le socle de l’identité autochtone et de leur histoire.  Elles sont au cœur d’un patrimoine précieux, mais au cours des 30 dernières années, la langue de la République est le français et le Tahitien n’est plus reconnu depuis 1992.  « Nous sommes devenus les otages d’un point de vue républicain étroit, et nous sommes relégués au statut de population artificielle. »  « Nous sommes le peuple maui », a-t-il revendiqué, en exigeant le droit d’utiliser les langues locales dans le secteur public et privé et reprochant à la France de toujours refuser de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires qu’elle a signée en 1999.

Mme MINARII CHANTAL GALENON, Présidente de l’ONG « Vahine Piri Rava », a invoqué les paroles de Nelson Mandela selon lequel « l’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde ».  Elle a accusé la Puissance administrante de contrôler le système éducatif en Polynésie française, en dépit du semblant de contrôle du Gouvernement local.  Avec la menace cachée d’arrêter le financement, la Puissance administrante s’immisce dans tous les aspects de la pédagogie.  La Polynésie française est traitée comme une autre zone administrative académique sous l’influence de Paris, alors même qu’elle est censée être autonome, a-t-elle précisé.  Dans la mesure où la France est la seule autorisée à délivrer des diplômes nationaux, les Polynésiens sont implicitement forcés de copier les programmes français et les résultats sont catastrophiques, puisque la Polynésie française est classée dernière dans le classement des territoires d’outremer en termes de développement humain.  En Polynésie française seul 54% des enfants sont bacheliers par rapport à 83% en France, et l’analphabétisme frappe 38 à 42% des jeunes, a-t-elle déploré.

Mme VALENTINA CROSS, Conseillère municipale de Teva-i-Uta de Tahiti, a affirmé que la Puissance administrante contrôlait l’économie et le secteur financier de Ma’ohi Nui en Polynésie française à travers ses entreprises multinationales comme Électricité de Tahiti (EDT),  qui détient le monopole de la production et de la distribution de l’électricité sur l’île.  Les élus locaux ne sont pas armés pour faire face à ces grandes multinationales qui imposent leurs règles, a-t-elle fait observer. 

En 2007, le Parlement local a décidé de faire face aux problèmes du monopole des entreprises multinationales et aux prix prohibitifs qu’elles imposent au peuple maohi nui, a-t-elle poursuivi; toutefois, en 2008, à Paris, le Code général des collectivités territoriales a imposé des obligations aux municipalités dans les domaines de la distribution d’eau, et de gestion des déchets, mais les ressources matérielles et financières allouées à cet effet sont insuffisantes.  

La violation de ces obligations est pourtant passible de sanctions pénales, a déclaré Mme Cross.  En raison de manque d’expertise et de ressources des municipalités ma’ohi nui, beaucoup d’entre elles ont été obligées de déléguer la mise en œuvre de ces services à des sociétés qui siègent sur le continent pour éviter les sanctions.  Celles-ci imposent leur propres prix extrêmement élevés, une fois encore, laissant les autorités locales impuissantes, a regretté Mme Cross.

M. STANLEY CROSS, Avocat à la retraite au barreau de Papeete, a déploré le fait que le système judiciaire de l’île soit contrôlé par la France.  Les problèmes persistent.  Premièrement, il y a l’accès inégal aux professions juridiques.  Tout juge maohi doit avoir pratiqué entre 10 et 15 ans en France avant de devenir juge sur le territoire.  Ce n’est pas étonnant, dans ces conditions, que sur les 42 juges affectés dans les tribunaux à Maohi Nui, seulement un Polynésien depuis 1958, a été affecté en 2016.  Deuxièmement, a-t-il dit, le libre accès aux services judiciaires prévoit que toutes les langues polynésiennes puissent être librement parlées et écrites dans les tribunaux.  Cependant, depuis 2001, les tentatives des assemblées locales d’offrir des services de traduction de toutes les langues polynésiennes ont échoué à cause de l’opposition de la Puissance administrante, a précisé M. Cross.  Troisièmement, aucune traduction n’est disponible dans les tribunaux du territoire, et, quatrièmement, si la loi organique votée en 2004 a prévu que le tribunal foncier commencerait son travail en 2017, il a fallu 13 ans pour le créer.  Le contrôle persistant du système judiciaire du territoire par la Puissance administrante contrevient à la Déclaration de décolonisation de 1960 et à la résolution 2625 qui stipule que tous les peuples ont le droit de déterminer, sans ingérence extérieure, leur statut politique et de poursuivre leur développement économique, social et culturel, a conclu l’intervenant.

Le représentant de l’Algérie a demandé des précisions sur la procédure en matière de questions et de réponses, en notant que lors des sessions précédentes chaque intervention était suivie de questions.  

Le Président de la Commission a indiqué que les délégations avaient la possibilité de poser des questions quand elles le souhaitaient 

Intervenant au nom de l’Assemblée corse, M. SEBASTIEN QUENOT, Directeur de Cabinet du Président de l’Assemblée de Corse, a remercié la Quatrième Commission pour avoir permis à son peuple d’être entendu pour la première fois à l’ONU.  Il a souligné que cette date était symbolique car elle marquait le soixante-treizième anniversaire de la libération de la Corse de l’occupation nazie le 4 octobre 1943.  Il s’est félicité que la Corse, la Kanaky et la Polynésie, qui avaient en commun un caractère insulaire, parlaient d’une même voix aujourd’hui.  « C’est notre confrontation au fait colonial, de la Méditerranée au Pacifique, qui nous rassemble aujourd’hui », a indiqué le représentant de l’Assemblée de Corse.  Il a rappelé que la France a souhaité déplacer ses expériences nucléaires en Corse après l’indépendance de l’Algérie en 1962, et que c’est seulement en raison de l’opposition des Corses que ces essais nucléaires ont finalement été conduits en Polynésie.  Il a rappelé que la Corse était une jeune République indépendante au cœur de l’Europe lorsqu’elle a été conquise en 1769 et que la Corse de Pascal Paoli avait des représentants démocratiquement élus, avait adopté une constitution, avait sa propre monnaie et son université.  Il a précisé que la France a acheté la Corse et a taxé ses exportations pour appauvrir l’île.  Il a ajouté que l’enseignement de la langue corse restait facultatif et que Michel Rocard, à l’époque Premier Ministre de la France, avait parlé à l’oppression devant l’Assemblée nationale, en 1988. 

Le représentant corse a été interrompu par le Président de la Commission qui a estimé qu’il n’abordait pas une question à l’ordre du jour

M. YVES CONROY, membre du parti politique « here ai’a » dont l’épouse a été victime des essais nucléaires, a rappelé que le premier essai nucléaire mené en Polynésie le 2 juillet 1966 a relâché dans la nature des taux de radiations 142 fois plus élevés que ceux mesurés dans la zone interdite de Tchernobyl.  Malgré les constatations catastrophiques, la France a conduit ses essais et entraîné 203 retombées radioactives sur les îles habitées.  C’est en connaissance de cause que la France a empoisonné l’ensemble du peuple polynésien et sa descendance, a-t-il affirmé, précisant que son épouse décédée en décembre 2004 a été victime des radiations liées aux essais nucléaires. 

Mme ELIANE TEVAHITUA, Présidente de l’ONG « Te vahine maohi no Manotahi », a dénoncé les essais nucléaires que la Puissance administrante a conduits pendant les 30 dernières années sur les atolls de Moruroa et Fangataufa en Polynésie française.  Les déchets radioactifs ont contaminé directement et indirectement la population des îles, et la pétitionnaire accuse la Puissance administrante d’avoir procédé à un véritable « génocide nucléaire incidieux » du peuple ma’ohi nui et de ses descendants.  Depuis la mise en place du registre du cancer en 1985, le Ministre de la santé du Gouvernement local élu fait état d’une augmentation des cas de cancers, notamment des cancers du sang et de la thyroïde.  Plus de 8 000 personnes ont été diagnostiquées avec des maladies radio-induites et uniquement sept patients polynésiens ont été indemnisés à ce stade par le Comité de compensation des victimes des tests nucléaires (CIVEN), qui a été mis en place par la Puissance administrante.

M. PATRICK GALENON a dénoncé les 193 essais nucléaires effectués en terre maohi.  « Que l’État français reconnaisse le fait nucléaire et assume sa pleine responsabilité! » a-t-il lancé.  La loi du 5 janvier 2010 vise à indemniser toute personne atteinte d’une des 18 maladies listées par cette loi: or, à ce jour, seuls trois dossiers ont abouti à des remboursements par la « Puissance administrante » pour un montant de 112 400 dollars, a déploré le pétitionnaire.  « Cette loi fourbe exige des victimes vulnérables qu’elles se justifient devant une Commission d’indemnisation qui a établi des critères d’éligibilité aussi irréalistes que changeants, alors qu’elle dispose depuis plus de 50 ans de toutes les réponses classées secret défense », a poursuivi M. Galenon, en s’élevant contre le fait que les victimes « indigènes » se trouvent dans l’impossibilité de constituer un dossier adapté pour être indemnisées.  Il a jugé « capital », en conclusion, de soutenir la résolution du 27 juin 2016 du Comité des 24.

M. JERRY GOODING a affirmé que l’histoire du nucléaire en Polynésie française est une série de mensonges.  La population de Mangaréva a été « massivement contaminée » dès le premier tir de 1966, a subi un taux de mortalité infantile inexpliqué entre 1966 et 1974 et, jusqu’à aujourd’hui, des familles entières sont gravement malades et presque toutes atteintes d’un dérèglement de la thyroïde, a assuré le pétitionnaire, en demandant que vérité et justice soient faites sur ce dossier « dramatique » du fait nucléaire en Polynésie.  M. Gooding a également demandé que le peuple polynésien puisse s’exprimer à ce sujet par un référendum local, tel qu’initié par l’Association 193, et que des études épidémiologiques soient réalisées.  Enfin il a plaidé pour la création d’une cellule qui accompagnerait les populations des cinq archipels de la Polynésie, victimes des essais nucléaires, afin de constituer le dossier de demande d’indemnisation de leurs membres décédés ou vivants.

M. MAXIME CHAN, président honoraire de l’Association Te Rau Atiati, a dénoncé les conséquences de 193 essais nucléaires menés en Polynésie depuis 1966, qui bouleverseront à jamais l’environnement de la Polynésie et a rappelé que 3 200 tonnes de matériels contaminés ont été déversés dans l’océan.  Il a expliqué que 147 explosions souterraines ont déstabilisé les structures souterraines de Mururoa, indiquant que certaines zones étaient impropres à toutes activités humaines en raison des taux de contamination.  Il a demandé la décontamination de tous les espaces contaminés.

M. AUGUSTE UEBE-CARLSON, Président of the association 193, a indiqué que les Polynésiens veulent connaître la vérité sur les essais nucléaires français.  Cinquante mille Polynésiens ont signé une pétition à cet effet, a-t-il expliqué, en exhortant les autorités à en tenir compte.  Il a insisté sur les conséquences dramatiques des 193 essais nucléaires conduits en Polynésie, notamment la fréquence de certaines maladies et le risque de voir Moruroa s’effondrer à tout moment.  Il a exhorté l’État français à assumer totalement ses responsabilités, « car ce que la France est aujourd’hui en terme de puissance nucléaire, elle le doit en grande partie à la Polynésie ».  Il a affirmé que le référendum qui avait pour objet la conduite des essais nucléaires français en Polynésie était manipulé.  Les Polynésiens sauront réécrire leur histoire si demain il y aura un référendum local en Polynésie, a-t-il conclu. 

M. RICHARD ARIIHAU TUHEIAVA, Membre élu de l’Assemblée de la Polynésie française, a axé son intervention sur la souveraineté de la Puissance administrante sur les ressources naturelles de la Polynésie française, surtout depuis le référendum de 1958.  À ce jour celle-ci impose le statu quo bilatéral entre Paris et Tahiti, qui préserve les intérêts financiers et stratégiques de la France sur le territoire.  Il a revendiqué la souveraineté permanente des Polynésiens sur les ressources naturelles de la Polynésie française pour leur permettre de développer une économie viable à long terme.

Le représentant des Palaos lui a posé une question sur le rapport du Secrétaire général sur les conséquences des essais nucléaires français, pour lequel le Comité des 24 a demandé au Secrétaire général de fournir une mise à jour régulière et plus de détails.

Le représentant du Venezuela, a rappelé que le Comité spécial des Vingt-Quatre avait adopté une disposition qui introduit un changement par lequel le Secrétaire général doit communiquer des informations mises à jour régulièrement sur les conséquences des essais nucléaires français en Polynésie française.  Il lui a demandé en quoi l’Assemblée de la Polynésie française compte participer aux mises à jour apportées par le Secrétaire général.

Le représentant de l’Algérie a également demandé des informations complémentaires sur la question des ressources naturelles du territoire, une question reprise aussi par le représentant des Palaos.

M. Tuheiava a indiqué que la plupart des informations figurant dans le rapport initial de deux pages sont périmées et incomplètes et que le peuple polynésien n’y a pas contribué.  En janvier 2010, le Parlement français a adopté une législation qui reconnaissait la nécessité d’indemniser les victimes des essais nucléaires en Polynésie française; cependant, la mise en œuvre de cette législation est un échec total, a-t-il estimé.  Dans le rapport actuel il n’est pas non plus fait référence au risque d’effondrement de l’atoll de Naururoa et de la menace de tsunami.  En 2014, a précisé le pétitionnaire, la Chambre de Polynésie française a demandé que la France reconnaisse la nature coloniale des essais nucléaires français, et M. Tuheiava a demandé un débat au sein du Comité spécial des Vingt-Quatre sur cette question, en collaboration avec l’Agence internationale de l’énergie atomique.  Pour ce qui est des ressources naturelles, il a précisé qu’il y avait cinq types de ressources: terrestres, du domaine public maritime, de la zone économique exclusive, des eaux profondes et de l’espace aérien, dont la plupart relèvent de la souveraineté de la Puissance administrante.  Ce sont les caisses du Trésor français qui en bénéficient et cela entrave le développement de la Polynésie française, a déploré M. Tuheiava.

M. MOETAI BROTHERSON, maire adjoint de la ville de Faa’a, a rappelé qu’en 2004, le Président polynésien participait pour la première fois au Forum des îles Pacifiques en tant que membre associé.  Depuis, il a clairement affirmé que la Polynésie française faisait partie de la famille du Pacifique, et devrait devenir membre à part entière dès lors qu’elle obtient une véritable autogouvernance.  Néanmoins, en 2011, le Ministre des affaires étrangères français de l’époque, M. Alain Juppé, est venu préciser à Auckland auprès du Forum que c’est bien la France, et non la Calédonie ou la Polynésie, qui possédait ces ressources naturelles dans le Pacifique Sud.  Depuis, le 17 mai 2013, lorsque la Polynésie française est revenue sur la liste des territoires non autonomes, la France n’a cessé de réaffirmer sa présence dans la région du Pacifique.  Il a indiqué que Mme Bareights, Ministre de l’outre-mer, avait déclaré que l’admission au Forum était le résultat de la seule volonté de la diplomatie française. 

Les représentants des États fédérés de Micronésie et de Cuba ont demandé si le changement de statut de la Polynésie française de membre associé à membre de plein droit du Forum des îles du Pacifique est lié à un changement de statut de la gouvernance française.

Répondant à ces questions, M. Brotherson a indiqué que le Gouvernement de Polynésie n’avait bénéficié d’aucune nouvelle compétence depuis 2004. 

M. CARLYLE G. CORBIN, Chercheur au Dependency Studies Project, a fait état de l’évaluation du niveau d’autonomie de la Polynésie française, qui a été menée à l’aide d’indicateurs (SGI) qui peuvent déterminer la nature du statut politique des relations entre le territoire et la Puissance administrante.  L’analyse des dimensions constitutionnelle et politique, économique et sociale et militaire et stratégique montre, a expliqué le chercheur, que le terme « autonomie » est appliqué à tort à la Polynésie française, dont le modèle pointe vers un arrangement de gouvernance dépendante modernisé au fil des ans, dans la forme et dans la nomenclature, mais certainement pas dans le fond.  Il reste une forme de contrôle unilatéral exercé par la Puissance administrante, et le territoire ne dispose que d’une forme d’autonomie déléguée qui peut être inversée à tout moment, a expliqué M. Corbin.  C’est la raison pour laquelle ce territoire a été réinscrit sur la liste des territoires non autonomes.  « Le colonialisme par consentement reste du colonialisme », a-t-il conclu.

Gibraltar

M. FABIAN PICARDO, Ministre en Chef de Gibraltar, a rappelé que Gibraltar est considérée comme un territoire non autonome depuis 70 ans.  Il a précisé que le Royaume-Uni avait proposé à l’Espagne de régler tous les aspects de Gibraltar devant la justice internationale le 11 octobre 1966, exhortant l’Espagne à respecter le choix de Gibraltar de ne pas devenir espagnol.  Il a fustigé la politique de sabotage économique de l’Espagne avant d’appeler ce pays à cesser de vouloir annexer Gibraltar.  Rappelant que l’Espagne avait cédé la souveraineté de Gibraltar au Royaume-Uni par le traité datant de 1713, le Ministre s’est étonné de la position du Ministre espagnol des affaires étrangères qui a estimé qu’il voyait dans le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne une occasion rare pour l’Espagne de faire respecter son intégrité territoriale.  Il a rappelé que deux référendum tenus en 1967 et 2002 avaient confirmé au peuple de Gibraltar d’affirmer son attachement indélébile au Royaume Uni.

M. RICHARD BUTTIGIEG, du Groupe pour l’autodétermination de Gibraltar, a posé la question suivante: Si le Royaume-Uni et Gibraltar ont une relation moderne non coloniale, qu’attend cette Commission pour rayer Gibraltar de la liste?  Il a demandé des consignes claires, car cette question est en souffrance depuis 10 ans.  « Cette Commission doit agir selon son mandat et envoyer une mission de visite à Gibraltar », a-t-il exigé.  Par son silence, la Commission encourage l’Espagne dans ses tentatives de récupérer la souveraineté sur le Rocher, a accusé le pétitionnaire.  « Même si la délégation espagnole a fait une déclaration qui semblait amicale », il a demandé à la Commission de regarder comment l’Espagne avait récemment traité sa région de Catalogne pour comprendre les raisons de Gibraltar de ne pas vouloir tomber sous sa souveraineté.

Nouvelle-Calédonie

M. JEAN-LOUIS D’ANGLEBERMES, Vice-Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, a mis l’accent sur les avancées résultant des derniers comités des signataires de l’Accord de Nouméa, accord politique historique que les indépendantistes, les non-indépendantistes et le Gouvernement français ont signé le 5 mai 1998, et les litiges relatifs aux listes électorales.  Il a précisé que lors du Comité des signataires, du 4 février 2016, une discussion constructive entre les partenaires de l’Accord de Nouméa avait permis d’aboutir à des engagements clairs.  Les partenaires étaient ainsi convenus de déclarer comme « politiquement clos » le litige relatif aux inscriptions faites jusqu’en 2015 sur les listes électorales spéciales provinciales sous réserve du strict respect des dispositions de la loi organique de 1999.

Il a salué la contribution des observateurs des Nations Unies aux travaux des commissions administratives spéciales chargées de déterminer les listes électorales, en se disant convaincu que cette association nouvelle de la Division de l’assistance électorale du Département des affaires politiques des Nations Unies contribuerait de manière décisive à la sincérité du futur scrutin.

Il a rappelé que, conformément à l’Accord de Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a la faculté institutionnelle de construire sa propre politique de relations extérieures.  « Nous sommes membres de nombreuses organisations intergouvernementales, notamment régionales, et nous entretenons des relations bilatérales intenses avec nos partenaires régionaux, notamment le Vanuatu et la Nouvelle-Zélande, a-t-il précisé.  Il a par ailleurs indiqué que, le 10 décembre 2015, les 16 États membres du Forum des Îles du Pacifique, l’unique Organisation politique de la région, avaient pris la décision historique d’accepter la candidature de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française au statut de membre à part entière de cette Organisation créée en 1971.  « Cette admission marque pour la Nouvelle-Calédonie la reconnaissance par l’ensemble des pays du Pacifique de sa pleine appartenance à la région, non plus uniquement sur le plan géographique, mais aussi sur le plan politique et économique », s’est félicité le Vice-Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

À son avis, cette adhésion devrait permettre à la Nouvelle-Calédonie de se mobiliser pour mieux faire entendre la voix de la région auprès de certains partenaires, dont l’Union européenne et la France.  En juillet 2017, dans le cadre de la présidence calédonienne de la prochaine Conférence ministérielle de la Communauté du Pacifique, la principale organisation technique de la zone, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie prévoit d’organiser, en partenariat avec la Commission européenne, le premier Sommet UE–Pacifique, a-t-il annoncé.  La Nouvelle-Calédonie contribuera ainsi à mobiliser les aides internationales en faveur de la préservation de l’environnement, notamment dans la lutte contre les changements climatiques et dans la gestion durable des océans, a ajouté le Vice-Président. 

« Comme vous le savez, notre gouvernement, en partenariat avec le Gouvernement français, a décidé en 2014, de la création du Parc naturel de la mer de Corail d’une superficie de 1,3 million de km².  Nous souhaitons doter cet espace maritime d’un haut niveau de protection », a-t-il précisé, affirmant que son gouvernement avait confié à un comité de gestion associant l’ensemble des parties prenantes le soin de rédiger le plan de gestion de ce parc, dans le cadre d’un processus participatif et de coconstruction.  Ce comité est composé des institutions calédoniennes, des instances coutumières, des associations environnementales et des professionnels de la mer, a-t-il dit.

Après avoir énuméré un certain nombre de projets conjoints avec des pays insulaires voisins visant à préserver les récifs et à gérer les grandes aires marines protégées, dont fait partie la Nouvelle-Calédonie, le Vice-Président a souligné la détermination de son gouvernement à prendre une part décisive dans l’élaboration d’une politique de gestion durable de l’océan Pacifique dans le but de le préserver pour les générations futures.  « Le renforcement de cet engagement international de notre pays que nous considérons comme emblématique de notre décolonisation doit se poursuivre », a-t-il dit.

Le Vice-Président a par ailleurs annoncé l’intention de la Nouvelle-Calédonie d’adhérer à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).  Cette candidature serait examinée en novembre lors du prochain sommet de l’OIF à Madagascar.  « Nous nous apprêtons par ailleurs à formaliser notre candidature au statut de membre associé de l’UNESCO et deviendrons dans les prochaines semaines membre du comité régional du Pacifique occidental de l’Organisation mondiale de la santé », a-t-il dit. 

« Nous sommes entrés en 2016 dans une phase d’accélération de notre processus d’intégration régionale et internationale », a indiqué en conclusion le Vice-Président, avant de préciser que « cette dynamique, en cohérence totale avec le principe de souveraineté partagée consacrée par l’Accord de Nouméa, contribue directement à notre décolonisation ».

Question des délégations

Répondant à une question du représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Vice-Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, a indiqué qu’il n’y avait pas de litige au sujet des listes électorales, mais qu’il y avait le risque qu’une grande partie des Kanaks ne puissent pas prendre part au référendum de 2018 parce qu’ils ne sont pas inscrits sur ces listes.  Il a aussi indiqué que la baisse du cours du nickel a eu comme effet de stimuler l’activité économique. 

M. GÉRARD POADJA, Vice-Président de la Commission des relations extérieures du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, a indiqué que la France est une chance pour une petite île océanienne de 300 000 habitants.  « C’est aussi une chance de pouvoir nous gouverner dans le respect de notre identité et de notre mémoire », a-t-il ajouté, avant d’estimer qu’accéder à l’indépendance serait une grave erreur.  « Il faudra aussi veiller à ce que le référendum de 2018 ne donne pas l’impression d’une victoire d’une Calédonie sur l’autre », a-t-il prévenu.

Îles Falkland/Malvinas

M. PETER HAMILTON, historien britannique, s’est dit préoccupé par le manque de progrès sur la question des Îles Falkland/Malvinas.  En tant qu’historien, il estime que la souveraineté britannique sur ces Îles est une « forme archaïque de colonialisme et une injustice historique ».  Il faut revenir à la source et aux recommandations qui accompagnaient la résolution initiale 1541 et la résolution 2065, pour trouver, à son avis, une solution à ce différend.  Le fond de la question est bien la souveraineté sur le territoire et le Comité spécial des Vingt-Quatre devrait demander un avis consultatif de la Cour internationale de Justice pour trancher, a-t-il estimé.

M. RUSSEL CHRISTOPHER, natif des Îles Vierges americaines, a demandé la fin de la colonisation des Îles Vierges.  Il a regretté que la Puissance coloniale continue d’ignorer la pertinence de la résolution 1514 de l'Assemblée générale.  « Nous connaissons une économie en déclin, un système de santé déplorable, un système éducatif en ruine et un environnement pollué en raison d’un système de gouvernance corrompu », a-t-il déclaré.

Mme MONIQUE S. MASON, descendante du Peuple autochtone YHWH, a dénoncé l’inaction de l’ONU pour protéger les descendants de la terre dans les Îles Vierges.  Elle a appelé l’Amérique et l’ONU à cesser les activités maléfiques et coloniales. 

M. JOSPEH LEE CALHOUN III, membre du peuple YHWH, a appelé à servir le fils de Dieu avec crainte, en rappelant que tout rassemblement des nations n’a comme objet que de détruire les enfants d’Israël. 

Droits de réponse

Réagissant à la déclaration du représentant de l’Espagne, le représentant du Royaume-Uni a expliqué que son pays revendiquait sa pleine souveraineté sur Gibraltar et que le peuple de Gibraltar jouit du droit à l’autodétermination.  « Nous ne conclurons aucun accord qui verrait le peuple de Gibraltar passer sous la souveraineté d’un autre État », a prévenu le représentant britannique.  Celui-ci a aussi précisé que son vote concernant la sortie de l’Union européenne ne changeait rien à son engagement indéfectible à accepter la volonté de Gibraltar en matière de souveraineté. 

La représentante de l’Espagne a déclaré que la décision de la Fédération internationale de football association (FIFA) acceptant Gibraltar comme un de ses membres est le fruit d’une décision d’un tribunal d’arbitrage sportif qui n’avait aucune conséquence sur le droit international concernant le statut politique de Gibraltar.    

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