Trentième session extraordinaire,
Tables rondes 2 & 3 – matin & après-midi
AG/11775

Session extraordinaire de l’Assemblée générale: deux tables rondes examinent les questions relatives aux « drogues et criminalité » et « drogues et droits de l’homme »

L’Assemblée générale a poursuivi aujourd’hui les travaux de sa trentième session extraordinaire consacrée au problème mondial de la drogue, qui se tient à New York du 19 au 21 avril 2016.

Deux tables rondes interactives de haut niveau ont été organisées aujourd’hui, parallèlement au débat général, avec la participation des délégations et des représentants de la société civile.

Les thèmes débattus ont été les suivants: « Réduction de l’offre et mesures connexes; mesures de lutte contre la criminalité liée aux drogues; lutte contre le blanchiment d’argent et promotion de la coopération judiciaire (drogues et crime) » et « Questions transversales: drogues et droits de l’homme, jeunes, femmes, enfants et collectivités ».

L’Assemblée a adopté hier le document final intitulé: « Notre engagement commun à aborder et combattre efficacement le problème mondial de la drogue ».

Deux autres débats consacrés aux questions relatives aux nouveaux défis et au développement alternatif se tiendront demain matin et après-midi, avant la cérémonie de clôture.

SESSION EXTRAORDINAIRE SUR LE PROBLÈME MONDIAL DE LA DROGUE

Table ronde 2 multipartite interactive

« Réduction de l’offre et mesures connexes; mesures de lutte contre la criminalité liée aux drogues; lutte contre le blanchiment d’argent et promotion de la coopération judiciaire (drogues et crime) »

Le Coprésident de la table ronde, M. TAYEB LOUH, Ministre de la justice de l’Algérie, s’est attendu à ce que les intervenants abordent un certain nombre de défis comme les moyens de limiter la consommation croissante des nouvelles substances psychotropes, de rendre responsables les unités chargées des enquêtes et de mettre en commun les expériences et les pratiques optimales.  Il a également estimé qu’il fallait réfléchir à la question des paradis fiscaux utilisés pour le blanchiment d’argent.

Le Ministre des affaires étrangères et de l’intégration régionale du Ghana, Mme HANNA SERWAA TETTEH, a plaidé pour le renforcement des capacités nationales dans la lutte contre les activités criminelles.  Les agents de police doivent travailler au plus près des activités locales et le principe de la proportionnalité doit être encouragé.  Quant aux stratégies de réduction de l’offre, elles doivent s’accompagner de mesures anticorruption.  Il faut étoffer la collaboration internationale et bilatérale avec les pays voisins et les homologues régionaux, notamment dans le cadre de la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine, pour mieux cibler la détection de fonds en transit et mettre un terme à la prolifération des nouvelles substances psychotropes et des précurseurs.  La Ministre s’est prononcée en faveur d’un système d’alerte précoce aux côtés d’autres agences africaines.

Le Ministre d’État des affaires étrangères du Japon, M. SEIJI KIHARA, a expliqué que le trafic des stupéfiants est l’une des formes traditionnelles de criminalité organisée et qu’il porte atteinte aux activités économiques légales et entrave la croissance.  D’après lui, le lien croissant avec le terrorisme déstabilise encore plus l’équilibre international.  Pour sa part, le Japon pénalise le commerce et la consommation des drogues et prône une application stricte des lois, même pour les consommateurs, afin d’assurer la dissuasion.  La consommation de cannabis et d’amphétamines y a ainsi été réduite à 1% et 0,5% respectivement.  Depuis plus de 10 ans, le Japon est venu en aide à l’Afghanistan pour réduire la production d’opiacés, malgré l’implication croissante des Taliban dans la culture de pavot, en proposant aux agriculteurs pauvres des cultures alternatives, comme les roses.  

Le Secrétaire d’État adjoint aux affaires étrangères des États-Unis, M. WILLIAM BROWNFIELD, a estimé qu’il fallait distinguer les victimes et les grands trafiquants.  Arrêter seulement les « mules » n’est pas la solution.  Il a encouragé les traitements médicaux et la réhabilitation.  D’après lui, il faut permettre aux forces de l’ordre de se concentrer sur les trafiquants violents et empêcher le recrutement de jeunes par des gangs violents.  On doit également avancer sur le front des cultures alternatives et élaborer des politiques intelligentes de lutte contre les drogues pour persuader les agriculteurs de réduire l’offre, a-t-il affirmé.  

Le Secrétaire général du Conseil national sur les drogues de l’Uruguay, M. MILTON ROMANI, a proposé d’équilibrer les activités de l’État et l’application des normes du droit international.  Il a évoqué un phénomène complexe, pluridimensionnel, qui implique aussi le trafic d’armes et la traite des personnes.  « Nous devons nous mettre dans la logique des marchés lorsque nous cherchons à contrôler les substances », a-t-il dit, proposant de s’atteler à toute la chaîne de production et de trafic, tout en accordant une attention particulière aux mineurs.  Le monde a besoin de stratégies non militaires pour réduire l’offre, en proposant des alternatives pour le développement social et économique.

Le blanchiment d’argent issu de la drogue est devenu une menace mondiale, s’est inquiété le Vice-Directeur du Département contre le blanchiment d’argent du Service fédéral de surveillance de la Fédération de Russie, M. KONSTANTIN GOBRUSENKO.  Selon lui, la communauté internationale doit accroître ses efforts pour identifier les sources de financement illicite.  Moins de 0,5% des profits de la drogue sont confisqués; l’argent sale s’infiltre presque dans son intégralité dans le système financier mondial, grâce à des formules sophistiquées sur Internet et de nouveaux moyens de paiement.  Il faut coordonner les activités des services de renseignements au niveau international et mener des études sur les flux financiers liés à la cocaïne, aux précurseurs et aux nouvelles substances psychotropes.

Le représentant de l’Organisation X-CONS de la Suède, M. PETER SÖDERLUND, a raconté son parcours de toxicomane qui l’a conduit à constituer un mouvement d’anciens toxicomanes, criminels et détenus pour promouvoir la prévention et la réinsertion, mais, a-t-il averti, les ressources manquent.  Les États Membres n’arriveront pas à leurs buts sans appuyer des organisations populaires comme la sienne qui possèdent une véritable expérience en la matière.

En tant que Secrétaire général adjoint aux affaires politiques de l’ONU, M. JEFFREY FELTMAN a dit bien connaître les connections qui existent entre le trafic des stupéfiants et le maintien de la paix et de la sécurité.  Inspiré par la philosophie qui sous-tend le Programme de développement durable à l’horizon 2030, il a demandé à tous d’adopter une démarche holistique.  Il ne faut plus parler uniquement de la réduction de l’offre et de la demande, mais mettre l’accent sur la pauvreté, le développement et les droits de l’homme.  Selon M. Feltman, « la meilleure politique de prévention est le Programme à l’horizon 2030 ».  Des secteurs entiers de certains gouvernements ont été saisis par les trafiquants de drogues, générant des milliards de dollars qui dépassent parfois les budgets de nombreux États.  Dans la mesure où une réponse trop militarisée contribuerait à la violence, il faut « minimiser les conséquences non recherchées » qui nuisent aux sociétés.

Le représentant du Panama a expliqué que son pays dispose d’une cellule indépendante de renseignements financiers.  La législation demande aux avocats de bien connaître leurs clients pour prévenir des activités illicites et lutte contre le mauvais usage des nouvelles technologies de l’information et des communications.  Quatre cents tonnes de drogues ont été saisies par les autorités ces dernières années, ce qui fait du Panama le troisième pays de la région avec les plus fortes saisies.  En outre, son pays a souscrit à 30 accords d’échange d’informations pour apporter plus de transparence à son système.  Le Nicaragua est au cœur de l’Amérique centrale or ce n’est pas un pays producteur, ni consommateur, mais de transit, a indiqué sa représentante.  Le Gouvernement a mis au point une stratégie de sécurité citoyenne et humaine qui intègre toutes les institutions nationales.  La peine de mort n’existe pas.  Pour sa part, le représentant de la Colombie a insisté sur « la lutte économique contre le trafic des stupéfiants et la corruption ».  Il a souhaité un suivi précis des fonds illicites et de leurs liens avec les biens acquis à l’étranger.

Pour le représentant du Pakistan, « parler des droits de l’homme peut prêter à confusion dans le régime de contrôle des drogues ».  Il a préconisé une bonne mise en œuvre des conventions et une démarche équilibrée, qui commence par la réduction de l’offre.  Au niveau national, les lois sont appliquées, les cultures d’opiacés éliminées, le transport et le stockage sont visés.  Le Pakistan a également gelé des millions de dollars appartenant à des trafiquants et démantelé 28 réseaux internationaux.  Le représentant de la Turquie a résumé l’expérience du pays en matière d’alerte précoce.  Une démarche proactive a été adoptée avec la création d’une banque de données relative à la saisie et au contrôle des drogues illicites.

La Mongolie est devenue un pays consommateur, en plus d’un pays de transit, a déploré sa représentante.  Le nombre de jeunes impliqués dans des crimes liés à la drogue a récemment doublé.  La Mongolie se concentre sur la lutte contre l’offre.  À cette fin, elle a révisé le Code pénal, tout en abolissant la peine de mort.  Les capacités de ses forces de l’ordre, notamment aux frontières, ont été renforcées.  Toutefois, ces forces manquent encore de compétences et de ressources pour mener des enquêtes.  L’Inde est un participant actif à l’initiative du Pacte de Paris depuis sa création, s’est félicité son représentant.  Il a souligné l’importance d’éliminer les précurseurs chimiques illicites et de réviser les réglementations y relatives.  L’Inde a organisé en novembre dernier, à New Delhi, un sommet sur la lutte contre le blanchiment d’argent.

Pour le représentant de l’Union européenne, la réduction de l’offre doit faire partie de toute politique de lutte contre les drogues, mais « la complexité des marchés doit être bien comprise ».  L’Union a essayé de développer une réponse globale à ce problème, en se concentrant sur l’héroïne, la cocaïne et les drogues synthétiques.  À cet égard, la coopération internationale, les politiques basées sur les renseignements et l’accent mis sur les résultats sont des principes clefs.  De plus, EUROPOL lutte contre tous les types de criminalité transnationale organisée.

Préoccupée par l’augmentation de la culture du cannabis dans sa région, la représentante du Nigéria s’est dite « opposée à toute tentative de légaliser le cannabis » dans d’autres pays.  Le Nigéria prévoit des programmes de développement alternatif et attache une grande importance aux contrôles aux frontières.  

En Indonésie, le trafic des drogues est un crime à haut risque et des mesures strictes contre les trafiquants, y compris dans les prisons, ont été adoptées, a assuré le représentant.  Il s’est inquiété du fait que nombre de pays ne disposent pas des cadres législatifs et réglementaires nécessaires pour lutter contre les substances psychotropes.  Pour sa part, le représentant de la Thaïlande a plaidé pour davantage de coopération internationale et exhorté les pays producteurs à prendre des mesures pour empêcher le détournement des précurseurs.  Quant au Tadjikistan, ce n’est pas un pays producteur, mais il est devenu un pays de transit sur ce qui est appelé « la trajectoire Nord », a signalé son représentant.  Une agence de contrôle des stupéfiants y est active depuis 1999, grâce à l’aide de l’ONU.  Le Gouvernement a déjà mis en œuvre quatre programmes nationaux de lutte qui ont permis des saisies importantes et de réduire la part des crimes liés à la drogue.

El Salvador dispose d’une stratégie de lutte contre les stupéfiants avec la participation de la société civile, mais doit faire face à un manque de moyens financiers, a regretté le représentant.  L’alcool et le tabac en tant que drogues licites posent aussi un problème de santé publique.  El Salvador ne produit pas de drogues, en est un faible consommateur, mais en subit les effets du transit.

L’Afghanistan est déterminé à lutter contre le phénomène de la drogue, a assuré le représentant.  Même s’il est vrai que le pays produit un nombre important d’opiacés, « nous ne voudrions pas être le seul coupable », a-t-il dit, en notant que plusieurs pays participent à ce processus.  En 2015, le Gouvernement a mis sur pied un nouveau plan d’action national intitulé « Arriver à un équilibre entre la culture, le trafic, la production et la toxicomanie ».  Il s’agit de réduire la culture du pavot, la production d’opium et la demande.  Face au défi de l’insécurité, l’Afghanistan manque de bailleurs de fonds pour appuyer sa lutte contre les stupéfiants, et notamment former un personnel spécialisé.  Il n’y a pas non plus suffisamment de coopération régionale.

La représentante de l’Italie a dit que son pays disposait d’un vaste éventail d’accords bilatéraux et de l’expérience régionale européenne.  Elle a proposé que les liens avec le terrorisme et la corruption fassent l’objet d’un examen approfondi.  Les mesures de réduction de la demande sont plus efficaces lorsqu’elles respectent les droits de l’homme, a-t-elle reconnu.  Elle a souhaité un mécanisme efficace d’examen de la Convention de Palerme.  Pour le représentant de l’Espagne, il faut confisquer les fonds, saisir les biens pour les consacrer par exemple à des programmes de traitement.  Il a souhaité une coopération très étroite des douanes et de la police.  Il a aussi établi une distinction entre la coopération juridique, dont les commissions rogatoires traditionnelles, et la coopération institutionnelle. 

La Zambie a signé un mémorandum d’accord avec des agences internationales pour améliorer les capacités de ses forces de l’ordre en matière de contrôle du flux des stupéfiants aux points d’entrée du pays, a indiqué la représentante de ce pays.  Elle lutte aussi contre la culture du cannabis dans les zones rurales.  En Israël, l’apparition de nouveaux produits de synthèse est contrée par des contrôles temporaires d’urgence, a expliqué la représentante de ce pays.  En outre, plusieurs mesures ont été prises pour lutter contre la vente de substances illicites sur Internet et saisir les recettes du crime lorsqu’une personne est reconnue coupable.  Par ailleurs, la réduction de l’offre est un pilier de la lutte contre les drogues, a affirmé le représentant de Singapour, en saluant le rôle des forces de l’ordre.  Singapour, qui applique la « tolérance zéro » en matière de contrôle des drogues, a pris des mesures anticorruption.

Au Mexique, la stratégie de réduction de l’offre se concentre sur l’élimination des cultures et le démantèlement des laboratoires, a dit le représentant.  Dans des zones caractérisées par la pauvreté, il faut créer des cultures alternatives.  S’il a réitéré l’importance des trois grandes conventions sur les drogues et des autres instruments pertinents, il a néanmoins estimé nécessaire la mise en place d’« un nouveau modèle de réduction de l’offre et de la disponibilité de nouvelles drogues », en se concentrant sur les groupes criminels responsables de la violence.

Pour le représentant de la Chine, la gestion des stratégies nationales doit s’intégrer dans les stratégies régionales et internationales.  Il faut accroître la coopération entre les forces de l’ordre pour réduire les plantations et la production de drogues et en coordonner la pénalisation.  À ce sujet, chaque pays doit déterminer la sanction des crimes considérés.  Il a appelé tous les pays, sur la base de l’intérêt mutuel, à surmonter leurs divergences, et à ne pas se servir de la peine de mort comme prétexte.  En outre, la Chine a déjà adapté la catégorisation de 116 nouvelles substances chimiques contrôlées et lutte contre la cybercriminalité.

« Nous devons renforcer le maintien de l’ordre et nos systèmes judiciaires respectifs, et remédier aux vulnérabilités qui ne font que renforcer la criminalité organisée, en améliorant les indicateurs d’impact », a conclu le représentant du Royaume-Uni.  Dans le cadre d’une approche globale équilibrée, il a appelé l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) à prendre des mesures pour aider les États Membres à respecter la proportionnalité des sanctions.

Table ronde 3 multipartite interactive

« Questions transversales: drogues et droits de l’homme, jeunes, femmes, enfants et collectivités »

La Vice-Présidente de Costa Rica, Mme ANA HELENA CHACÓN, a défendu l’idée selon laquelle la consommation de stupéfiants est une maladie devant être traitée et non un délit à punir.  C’est pourquoi, 60% du prix des drogues saisies servent à financer des projets de traitement des toxicomanes qui acceptent d’être traités dans son pays.  Le Gouvernement a aussi créé une institution sur le traitement de la dépendance à l’alcool et aux stupéfiants.  Cependant, le pays a besoin d’adopter d’autres démarches qui sont plus conformes aux droits de l’homme.  La priorité est d’accorder aux femmes incarcérées, surtout les plus vulnérables, la protection dont elles ont besoin.  Soixante-cinq pour cent des femmes emprisonnées le sont pour avoir commis des délits liés à la drogue, qui sont pourtant des infractions mineures.  En outre, on évite désormais d’incarcérer des enfants impliqués dans des délits liés au trafic de stupéfiants.

Le Ministre des services médicaux, de la santé publique et des sports de la Suède, M. GABRIEL WIKSTROM, a estimé que la peine de mort n’est pas la réponse appropriée au délit lié à la drogue et a regretté que cette session ait raté l’occasion de régler cette question

La Directrice adjointe du Conseil national des stupéfiants de l’Indonésie, Mme DYAH SETIA UTAMI, a affirmé que le nombre de toxicomanes dans son pays a fortement augmenté depuis 15 ans.  Le Gouvernement a pris des mesures visant à prévenir et traiter la dépendance et la consommation de stupéfiants, et à aider l’autonomisation et le traitement des toxicomanes.  Des centres de désintoxication ont été créés.  S’agissant des enfants, des lois ont été adoptées pour les préserver de la toxicomanie.  Il a affirmé qu’il fallait défendre les droits des victimes, surtout les femmes et les enfants.

La représentante du Réseau de l’Afrique de l’Ouest sur les politiques relatives aux drogues du Ghana, Mme ANNE MARIA GORETTI, a affirmé que les consommateurs de stupéfiants sont des êtres humains qui méritent d’être traités comme tels.  Elle s’est dite inquiète du fait que le droit à la vie des consommateurs de drogues était souvent violé.  La peine de mort prononcée contre les consommateurs de stupéfiants est une violation des droits de l’homme surtout en ce qui concerne les femmes toxicomanes.  Celles-ci sont souvent brutalisées par les forces de l’ordre, a dénoncé Mme Goretti, qui a par ailleurs défendu le droit des enfants à être protégés de la consommation de drogues.

Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme, M. ZEID RA’AD AL HUSSEIN, a affirmé que, certes, le document final de cette trentième session comprenait des références aux droits de l’homme, notamment en matière de soins de santé et d’aide aux consommateurs de stupéfiants, mais ne décrétait pas de façon explicite la dépénalisation de l’utilisation de stupéfiants.  Il aurait souhaité que le document final contienne une référence claire aux droits à la santé des consommateurs de drogues et aux conséquences de la pénalisation du délit lié à la drogue pour ceux qui recherchent des soins de santé.  Il aurait été également souhaitable que le document final adopte une terminologie claire sur la thérapie de substitution et l’utilisation de seringues, a-t-il précisé, regrettant l’absence de référence à la peine de mort pour les délits liés à la drogue.  Le document final n’a pas non plus traité des exécutions extrajudiciaires commises par les forces de l’ordre dans la lutte contre le trafic de drogues, et rien n’y est dit sur les obligations d’enquêter sur les abus des forces de l’ordre dans la lutte contre la drogue, a dénoncé le Haut-Commissaire.  Il a également déploré que le document ne traite pas des conséquences des incarcérations pour les délits liés aux stupéfiants, comme le chômage et l’absence de liberté de voyager, qui sont autant de violations des droits fondamentaux, y compris des enfants.  Le document final est ambigu sur les droits des peuples autochtones en matière d’utilisation de la médecine traditionnelle, a conclu M. Al Hussein.

La représentante du Mexique, Mme LORENZA CRUZ, a estimé qu’il faut trouver des peines appropriées pour les femmes impliquées dans les trafics de drogues.  Au Mexique, 6 femmes incarcérées sur 10 le sont pour des délits liés au trafic de drogues, et le Gouvernement travaille à des mesures visant à adapter les peines d’incarcération, notamment en des séances de rééducation, a-t-elle indiqué.  Elle a souhaité renforcer la coopération internationale dans la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques de lutte contre les stupéfiants.

Le délégué de l’Union européenne, M. DIDIER LENOIR, a affirmé que le respect des droits de l’homme est au cœur de la politique européenne de lutte contre le trafic de stupéfiants.  Il s’est dit opposé à la peine capitale pour les délits liés aux stupéfiants et a exhorté les États Membres à abolir la peine de mort.

La représentante des États-Unis, Mme KANA ENOMOTO, a souhaité la mise en place d’une démarche fondée sur une santé publique intégrée, sur la prise en compte des traitements et des soins disponibles et sur la réhabilitation des consommateurs de stupéfiants.  Il faut des mesures qui respectent les droits des enfants et qui prennent en compte le traumatisme psychologique lié à la consommation de drogues.  L’emprisonnement n’est pas la solution à ce problème.  Tous les toxicomanes doivent trouver une porte ouverte lorsqu’ils cherchent de l’aide, se prononçant pour une approche fondée sur la réhabilitation des toxicomanes. 

Le représentant de Singapour, M. KWANG HWEE HOW, a déclaré que son gouvernement avait adopté une démarche pratique, la priorité étant d’avoir un « Singapour sans drogue pour les jeunes ».  Cela passe par l’éducation, dont le message est toujours de dire « non à la drogue ».  Soixante-dix pour cent des jeunes singapouriens sont d’avis que la consommation est néfaste, a-t-il indiqué.  Le deuxième objectif concerne les familles.  Le Gouvernement se concentre sur l’aide aux familles dont le rôle est primordial dans la réhabilitation et la prévention des risques, a-t-il dit.

Le représentant de la Thaïlande a affirmé qu’un nombre incalculable de femmes sont emprisonnées pour des causes liées à la drogue.  Des mesures pour remédier à cette situation ont été prises dans son pays, notamment l’autonomisation des femmes incarcérées et des mesures contre la récidive.  Le représentant d’Israël a déclaré que les services et les soins reçus par les femmes et les enfants toxicomanes devraient être les mêmes que pour les autres.  Quarante pour cent des femmes et 50% des enfants toxicomanes ont pu achever leurs traitements contre la dépendance cette année en Israël.

La représentante de la Chine a affirmé que les droits de l’homme des toxicomanes sont respectés dans son pays, tout en estimant qu’il fallait préserver la société, en particulier les femmes et les enfants, des conséquences de la consommation et du trafic de drogues.  L’individu doit être au cœur des politiques et des stratégies de lutte contre le trafic de drogues.  La toxicomanie n’est pas seulement un problème de santé publique, mais aussi un problème social et sécuritaire.  De ce fait, elle ne peut être traitée uniquement du point de vue médical, il faut trouver des solutions équilibrées.  Pour ce qui est de la peine capitale, elle a estimé qu’il n’y avait pas d’obligation d’abolition.

Le représentant du Brésil a estimé que le document final aurait dû contenir une référence consacrée à la peine de mort.  Il aurait dû aussi tenir compte des droits sociaux de peuples autochtones et des personnes d’ascendance africaine au Brésil, a-t-il indiqué.

Le Ministre de la justice de l’Italie, M. ANDREA ORLANDO, a indiqué que la protection des droits de l’homme doit être intégrée dans la politique mondiale de lutte contre la drogue, une attention particulière devant être accordée aux femmes, aux enfants et aux personnes vulnérables sur le plan de la justice pénale.  Il a exhorté les États Membres à adopter un moratoire sur la peine capitale pour les délits liés à la drogue.

La représentante du Royaume-Uni a déclaré que son gouvernement garantissait l’accès à divers traitements gratuits aux toxicomanes et adoptait la règle de la proportionnalité dans le cadre des peines contre les délits liés à la toxicomanie.  Le représentant a demandé aux organes des Nations Unies d’aider les États Membres à mettre en place une législation conforme aux conventions internationales relatives au contrôle des drogues.  Il s’est dit opposé à la peine de mort pour les délits liés à la drogue et demandé aux organes des Nations Unies de rendre compte de cette situation.

Le représentant du Soudan, a déclaré que la politique de lutte contre la toxicomanie était couronnée de succès dans son pays malgré une « faible coopération internationale relative à cette question dans la région ».

La représentante de l’Argentine a dénoncé le gaspillage de ressources dans la lutte mondiale de la drogue depuis des décennies.  Elle a préconisé l’harmonisation des justices pénales des pays et l’orientation des ressources vers le développement.  La stratégie doit se reposer sur le renforcement des systèmes de santé, et non le système pénal et carcéral.  Elle a dénoncé les pays qui appliquent la peine de mort pour les délits liés à la drogue et estimé que si l’on veut vraiment s’attaquer au trafic de drogues, il faut aussi s’attaquer au blanchiment d’argent et à la fuite des capitaux. 

Le représentant du Portugal a estimé que le dénominateur commun de la lutte contre la drogue est le respect des droits de l’homme, y compris ceux des consommateurs de stupéfiants.  Cela requiert la mise en place d’une justice pénale qui n’applique pas l’incarcération sur les délits mineurs relatifs à la drogue.  Les États ne doivent pas hésiter à appliquer une politique de lutte contre la drogue qui repose sur le respect des droits de l’homme, a-t-il dit.

La représentante d’El Salvador a déclaré que son gouvernement porte son attention sur la protection des jeunes contre le fléau de la drogue.  Le Ministère de l’éducation a lancé un programme de lutte contre la consommation d’alcool et de la drogue et un autre programme vise à renforcer le rôle de la famille dans la protection des jeunes et des enfants contre l’emprise des groupes criminels.

Le représentant de la société civile indonésienne, a affirmé que la peine de mort n’arrête ni la toxicomanie ni le trafic de drogues. 

Le représentant de la Malaisie a fait état des améliorations des services de traitement offerts aux toxicomanes incarcérés dans son pays.  Ces services sont également accessibles aux femmes emprisonnées pour des délits liés à la drogue, ainsi qu’aux enfants en sorte qu’ils puissent poursuivre leur scolarité.  Il a précisé que les visites des inspecteurs des droits de l’homme étaient bien reçues en Malaisie.

La représentante de l’Afrique du Sud a précisé que la loi sud-africaine sur la lutte contre la drogue comporte tous les points contenus dans le document final, même si elle a été adoptée des années avant celui-ci.  Le Gouvernement s’apprête à adopter une stratégie de lutte contre la consommation d’alcool, a-t-elle indiqué, estimant toutefois que le défi est d’atteindre les nombreux jeunes consommateurs de drogues pour qu’ils puissent suivre un traitement.

La représentante de l’Uruguay a estimé que les politiques et stratégies nationales de lutte contre la drogue doivent reposer sur le respect des droits de l’homme.  Il est temps de trouver un équilibre entre le respect des droits de l’homme et l’approche restrictive dans la lutte contre les stupéfiants, cette dernière éloignant les toxicomanes des services de santé et de traitement sans tarir le trafic de drogues.  Toute la politique du Gouvernement de lutte contre le trafic repose sur le respect des droits de l’homme, a-t-elle précisé.   

La représentante de l’Équateur a dénoncé les méfaits des politiques restrictives de lutte contre la drogue adoptées dans les années 80.  Elle s’est dite opposée à la peine de mort infligée aux délits liés aux stupéfiants.

Le représentant du Koweït a déclaré que son gouvernement a adopté une série de mesures visant à protéger la société contre les conséquences de la consommation et du trafic de la drogue, notamment la réhabilitation des toxicomanes. 

La représentante de l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) a demandé aux gouvernements d’accorder les soins nécessaires aux toxicomanes et de prendre des mesures spécifiques pour protéger les enfants et les jeunes de l’emprise des réseaux de trafiquants et criminels liés à la drogue

Le représentant de l’Australie s’est dit déçu que le document final ne fasse pas mention de la peine capitale.  Il a exhorté les États qui pratiquent cette mesure à adopter un moratoire, tout en admettant qu’il s’agissait d’une question épineuse et que les divergences étaient fortes en la matière.  Il a prêché la patience et la persistance.

Le représentant du Centre international pour les droits de l’homme s’est prononcé pour des enquêtes indépendantes pour constater si tous les États respectent effectivement les droits de l’homme.

La représentante de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a affirmé que le droit à la santé doit s’appliquer à tous sans aucune distinction, y compris les consommateurs de stupéfiants.  Ceux-ci ont le droit de recevoir tous les traitements correspondant à leur état, comme tout autre être humain, a-t-elle dit.

Le représentant du Bénin a réitéré la position de son gouvernement contre la peine de mort.  Il a exhorté les États à adopter des peines alternatives.

Le représentant de l’Indonésie a dit que la gravité de la menace des drogues ne peut pas être sous-estimée.  Son gouvernement veillera à ce que les erreurs judiciaires ne se produisent concernant l’application de la peine de mort.

Le représentant de la Fédération de Russie a déclaré que la réponse à la dépendance aux stupéfiants doit refléter les trois conventions internationales de contrôle des drogues. 

Le représentant de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a affirmé que des résultats positifs peuvent être obtenus par la prévention dans la lutte contre la toxicomanie.  Cela exige notamment des professionnels de santé qualifiés et un accès garanti aux traitements.  Il faut par ailleurs éviter le recours aux centres de réhabilitation obligatoire, a dit le représentant, pour qui l’incarcération des toxicomanes est contre-productive.  Des mesures alternatives devraient être envisagées, a-t-il dit, se prononçant pour un moratoire sur les exécutions capitales.

Après avoir constaté des divergences sur la question des droits de l’homme durant la table ronde, M. YVAN ŠIMONOVIĆ, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, a estimé que « nous sommes sur la bonne voie même si le chemin à parcourir est encore long avant le prochain examen en 2017 ».

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