7573e séance – matin
CS/12149

Face à la radicalisation, le Conseil de sécurité exhorte les États Membres à renforcer la participation des jeunes aux processus de prise de décisions

Constatant que le mouvement de radicalisation touchant particulièrement les jeunes constitue une menace pour la stabilité et le développement, le Conseil de sécurité a exhorté, ce matin, les États Membres à examiner les moyens d’accroître leur « représentation inclusive » aux niveaux local, national, régional et international.

Par la résolution 2250 (2015), présentée par la Jordanie et adoptée à l’unanimité de ses 15 membres, le Conseil a également exhorté les États Membres à mettre en place des « mécanismes internes » associant « véritablement » les jeunes aux processus de paix et au règlement des différends.

Avant l’adoption de la résolution, la représentante de la Jordanie, Mme Dina Kawar, a déclaré que ce texte –« pionner » sur le thème de la jeunesse, de la paix et de la sécurité– couronnait les efforts déployés par le Prince Hussein de Jordanie et s’inscrivait dans la continuité d’une série de discussions publiques sur la lutte contre l’extrémisme violent, et de la tenue, en août dernier à Amman, du Forum mondial sur les jeunes, la paix et la sécurité.

« Ce que nous souhaitons, c’est s’assurer que les jeunes reçoivent l’attention dont ils ont besoin au moment où le monde entier est devenu le théâtre d’un nombre croissant de situations négatives », a expliqué la représentante.

Dans le préambule de la résolution, le Conseil se dit conscient que le monde n’a jamais compté autant de jeunes et que ceux-ci constituent souvent la majorité de la population des pays touchés par des conflits armés, y compris parmi les personnes déplacées et les réfugiés.

Inquiet de constater que, dans une « société-monde », les terroristes et leurs partisans utilisent de plus en plus l’Internet pour recruter des jeunes, le Conseil de sécurité engage donc les États Membres à arrêter des stratégies de nature à permettre de faire pièce au discours de l’extrémisme violent, à s’attaquer aux conditions qui en sont le terreau, et à promouvoir l’inclusion et la cohésion sociales.

Les États Membres sont en outre exhortés à créer un « environnement porteur » dans lequel les jeunes « de tous horizons » ont leur place et bénéficient de l’appui nécessaire pour mener des activités de prévention de la violence et favoriser cette même cohésion sociale.

Le Conseil demande également « à tous les acteurs compétents » d’envisager la mise en place de « dispositifs visant la promotion d’une culture de paix, de la tolérance et du dialogue interculturel et interreligieux », qui donnent une place aux jeunes et les dissuadent de prendre part à des actes violents, terroristes ou xénophobes.

Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies est, quant à lui, prié de réaliser une étude sur l’apport des jeunes aux processus de paix et au règlement des conflits afin de recommander des mesures d’ordre local, national, régional et international efficaces, et d’en présenter les résultats au Conseil de sécurité et de les mettre à la disposition de tous les États Membres de l’ONU.

*S/2015/(2250)

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Texte du projet de résolution S/2015/935

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1889 (2009), 1960 (2010), 2106 (2013), 2122 (2013) et 2242 (2015) sur les femmes et la paix et la sécurité, et toutes les déclarations de son président s’y rapportant, ses résolutions 2178 (2014) et 2195 (2014) relatives à la lutte contre le terrorisme et la déclaration de son président S/PRST/2015/11 et les déclarations S/PRST/2012/29 et S/PRST/2015/2 de son président sur la consolidation de la paix après un conflit,

Rappelant ses résolutions 1265 (1999) et 1894 (2009) sur le sort des enfants en temps de conflit armé,

Ayant à l’esprit les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et le fait que celle-ci lui confie la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,

Notant que dans la présente résolution, le terme jeunesse s’entend de toute personne âgée de 18 à 29 ans, et notant également que la définition du terme peut varier d’une pays à l’autre et à l’échelle internationale, y compris celle qui résulte des résolution A/RES/50/81 et A/RES/56/117 de l’Assemblée générale,

Conscient que le monde n’a jamais compté autant de jeunes et que ceux-ci constituent souvent la majorité de la population des pays touchés par des conflits armés,

Constatant avec préoccupation que, dans la population civile, les jeunes représentent une forte proportion des personnes, réfugiées et déplacées notamment, qui subissent les effets des conflits armés, et que le fait qu’ils soient privés d’accès à l’éducation et de perspectives économiques est fortement préjudiciable à l’instauration durable de la paix et à la réconciliation,

Conscient que les jeunes apportent un concours appréciable et utile au maintien et à la promotion de la paix et de la sécurité,

Affirmant que les jeunes peuvent jouer un rôle important dans la prévention et le règlement des conflits et, singulièrement, pour ce qui est de la pérennisation, de la capacité d’intégration et de la réussite des activités de maintien et de consolidation de la paix,

Considérant que les jeunes devraient prendre une part active à l’instauration d’une paix durable et œuvrer à la justice et la réconciliation, et que l’importance démographique de la jeunesse actuelle offre une occasion exceptionnelle d’instaurer durablement la paix et la prospérité économique, si tant est que des politiques inclusives soient en place,

Constatant que l’adhésion à la violence et à l’extrémisme violent qui découle d’un mouvement de radicalisation touchant particulièrement les jeunes constitue une menace pour la stabilité et le développement, et a souvent pour effet de compromettre la consolidation de la paix et d’alimenter le conflit, et soulignant qu’il importe de supprimer les causes et les facteurs de radicalisation des jeunes qui conduisent à la violence et à l’extrémisme violent et, dans certains cas, au passage à l’acte terroriste,

S’inquiétant que, étant donné une société-monde, les terroristes et leurs partisans utilisent de plus en plus les technologies de l’information et de la communication, dont Internet, pour recruter des jeunes et les inciter à perpétrer des actes terroristes ainsi que pour financer, planifier et préparer leurs activités, et soulignant que les États Membres doivent agir dans un esprit de coopération pour empêcher les terroristes de tirer parti de la technologie, des moyens de communication et d’autres ressources à des fins d’incitation à la commission d’actes de terrorisme, et ce dans le respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de toutes autres obligations dérivant du droit international,

Notant que les jeunes peuvent en outre servir d’exemple pour ce qui est de prévenir et de combattre l’extrémisme violent, lequel conduit parfois au terrorisme et alimente les conflits, empêche le développement socioéconomique et nourrit l’insécurité régionale et internationale,

Notant également que le Secrétaire général met actuellement la dernière main à un plan d’action pour la prévention de l’extrémisme violent qui place la participation, l’esprit d’initiative et la responsabilisation des jeunes au cœur des stratégies et politiques de l’Organisation des Nations Unies,

Prenant acte du Programme d’action mondial pour la jeunesse, des Principes directeurs sur la participation des jeunes à la consolidation de la paix, du Forum mondial sur la jeunesse, la paix et la sécurité d’août 2015, de la Déclaration des jeunes sur la jeunesse, la paix et la sécurité adoptée à Amman, du Sommet mondial de la jeunesse contre l’extrémisme violent, tenu en septembre 2015, et du Programme d’action contre l’extrémisme violent et pour la promotion de la paix, et considérant qu’ils jouent un rôle en jetant les bases de la participation de tous les jeunes et de leur contribution à la consolidation de la paix dans les situations de conflit ou d’après conflit,

Prenant note de ce que les gouvernements et les organisations régionales et internationales font pour mobiliser les jeunes au service de la consolidation et de la pérennisation de la paix,

Invitant les États Membres à envisager d’arrêter une approche du développement inclusif commune aux différents organismes des Nations Unies essentielle pour prévenir tout conflit et asseoir durablement la stabilité et la paix, et soulignant à cet égard combien il importe d’identifier et s’attaquer à l’exclusion politique, économique, sociale, culturelle et religieuse et à l’intolérance, ainsi qu’à l’extrémisme violent, qui peuvent faire le lit du terrorisme comme autant de facteurs de conflit,

Considérant que la protection des jeunes pendant et après un conflit et leur participation au processus de paix peuvent contribuer grandement au maintien et à la promotion de la paix et de la sécurité internationales, et convaincu que la protection des civils, y compris les jeunes en temps de conflit armé, doit figurer en bonne place dans toute stratégie globale tendant à régler des conflits et à bâtir la paix,

Notant les dispositions pertinentes du Statut de Rome de la Cour pénale internationale,

Participation

1.    Exhorte les États Membres à examiner les moyens d’accroître la représentation inclusive des jeunes à tous les niveaux dans les instances de décision des institutions et dispositifs locaux, nationaux, régionaux et internationaux de prévention, et de règlement des conflits, y compris ceux qui luttent contre l’extrémisme violent, qui peut faire le lit du terrorisme et à envisager s’il y a lieu de mettre en place des mécanismes internes associant véritablement les jeunes aux processus de paix et au règlement des différends;

2.    Demande à tous les acteurs concernés, y compris lorsqu’ils négocient ou mettent en œuvre des accords de paix, d’y associer les jeunes et de tenir compte de leurs vues selon qu’il convient, sachant que la marginalisation de la jeunesse est préjudiciable à l’établissement d’une paix durable dans toutes les sociétés, y compris en considérant des aspects spécifiques comme :

a)    Les besoins des jeunes en cas de rapatriement et de réinstallation et pendant les périodes de relèvement, de réintégration et de reconstruction après les conflits;

b)    Des mesures venant appuyer les initiatives de paix locales de jeunes et les processus autochtones de règlement des différends, qui associent les jeunes aux mécanismes de mise en œuvre des accords de paix;

c)    Des mesures donnant aux jeunes des responsabilités dans la consolidation de la paix et le règlement des conflits;

3.    Souligne qu’il importe que les missions du Conseil de sécurité tiennent compte des considérations relatives à la jeunesse, y compris, le cas échéant, en consultant des organisations de jeunesse locales et internationales;

Protection

4.    Demande à toutes les parties à un conflit armé de respecter scrupuleusement les obligations que leur fait le droit international en matière de protection des civils, y compris des jeunes, notamment celles qui découlent des Conventions de Genève de 1949 et de leurs protocoles additionnels de 1977;

5.    Engage les États à s’acquitter des obligations résultant pour eux de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et de Protocole de 1967 se rapportant à ladite Convention, de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979 et de son protocole facultatif de 1999 et de la Convention relative aux droits des personnes handicapées;

6.    Engage également les États Membres à s’acquitter de l’obligation à eux faite en la matière de mettre fin à l’impunité et les invite à mener des enquêtes et à exercer des poursuites contre quiconque est responsable de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et d’autres crimes odieux sur la personne de civils, y compris les jeunes, notant que la lutte contre l’impunité des crimes internationaux les plus graves s’est renforcée à la faveur de l’action et de l’exercice de poursuites contre ces crimes de la part de la Cour pénale internationale, des tribunaux spéciaux et mixtes et des chambres spécialisées de tribunaux internes;

7.    Demande à toutes les parties à des conflits armés de prendre les mesures nécessaires pour protéger les civils, y compris les jeunes, contre toutes les formes de violence sexuelle ou sexiste;

8     Réaffirme que les États doivent respecter et défendre les droits de l’homme de toute personne, y compris les jeunes à l’intérieur de leur territoire et relevant de leur juridiction comme le prescrit le droit international applicable et réaffirme qu’il incombe au premier chef à chaque État de protéger sa population contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité;

9.    Exhorte les États Membres à envisager, dans le respect du droit international, des mesures particulières propres à protéger les civils, y compris les jeunes, dans les situations de conflit armé et d’après conflit;

Prévention

10.   Exhorte les États Membres à créer un environnement porteur dans lequel les jeunes de tous horizons aient leur place et bénéficient de l’appui nécessaire pour mener des activités de prévention de la violence et favoriser la cohésion sociale;

11.   Souligne qu’il importe de concevoir des politiques pour la jeunesse qui viennent renforcer les activités de consolidation de la paix et notamment favoriser le développement économique et social, appuyer les projets de développement de l’économie locale et offrir aux jeunes des perspectives d’emploi et de formation technique, en stimulant l’éducation, l’esprit d’entreprise et l’engagement politique constructif de la jeunesse;

12.   Demande instamment aux États Membres d’agir, s’il y a lieu, en faveur d’une éducation pour la paix de qualité, qui donne aux jeunes les moyens de participer de façon constructive à la vie de la société civile et aux activités politiques inclusives;

13.   Demande à tous les acteurs compétents d’envisager la mise en place de dispositifs de promotion d’une culture de paix, de la tolérance et du dialogue interculturel et interreligieux, qui donnent une place aux jeunes et les dissuadent de prendre part à des actes violents, terroristes ou xénophobes, et de pratiquer toute forme de discrimination;

Partenariats

14.   Exhorte les États Membres à accroître, autant que nécessaire, leur appui politique, financier, technique et logistique, compte tenu des besoins des jeunes et de leur participation aux efforts de paix entrepris dans les situations de conflit et d’après conflit, y compris par les entités, fonds et programmes des Nations Unies, notamment le Bureau d’appui à la consolidation de la paix, le Fonds pour la consolidation de la paix, le Programme des Nations Unies pour le développement, le Fonds des Nations Unies pour la population et ONU-Femmes, et par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et les autres organismes compétents, ainsi que par les acteurs régionaux et internationaux;

15.   Souligne le rôle crucial que joue la Commission de consolidation de la paix dans la lutte contre les causes et les facteurs de radicalisation des jeunes qui conduisent à l’extrémisme violent et, dans certains cas, au passage à l’acte terroriste, en faisant figurer dans ses avis et recommandations sur les stratégies de consolidation de la paix des mesures consistant à associer véritablement les jeunes aux activités qui se déroulent pendant et après les conflits armés;

16.   Engage les États Membres à se rapprocher des communautés locales et des acteurs non gouvernementaux pour arrêter des stratégies de nature à permettre de faire pièce au discours de l’extrémisme violent susceptible d’inciter à des actes terroristes, à s’attaquer aux conditions qui sont le terreau de l’extrémisme violent, qui sont propres à faire le lit du terrorisme, et notamment en responsabilisant les jeunes, les familles, les femmes et les dignitaires du monde de la religion, de la culture et de l’éducation et tous autres groupes concernés de la société civile et à se donner des approches spécialement adaptées pour faire obstacle à tout recrutement dans ce type d’extrémisme violent et promouvoir l’inclusion et la cohésion sociales;

17.   Engage tous ceux qui participent à la planification des opérations de désarmement, démobilisation et réintégration à prendre en considération les besoins des jeunes touchés par les conflits armés, y compris d’aspects spécifiques comme :

a)    Une offre d’emploi pour les jeunes tenant compte des réalités et de la problématique hommes-femmes, des politiques du travail inclusives, des plans d’action nationaux pour l’emploi des jeunes établis en partenariat avec le secteur privé, conçus en concertation avec les jeunes et prenant en considération le fait que l’éducation, l’emploi et la formation sont indissociables pour ce qui est de prévenir la marginalisation des jeunes;

b)    Des cursus éducatifs adaptés et conçus de façon à promouvoir une culture de paix, le but étant de doter les jeunes de capacités et de compétences répondant aux besoins du marché du travail;

c)    Un appui permettant aux organisations dirigées par des jeunes et à celles qui se consacrent à la consolidation de la paix d’agir comme partenaires dans les programmes pour l’emploi des jeunes et l’esprit d’entreprise;

18.   Prend acte de sa volonté d’examiner les conséquences que les mesures décidées au titre de l’Article 41 de la Charte des Nations Unies pourraient avoir pour la population, y compris les jeunes, chaque fois qu’il adopte de telles mesures;

Prochaines étapes

19.   Invite les entités des Nations Unies, les rapporteurs, envoyés spéciaux et représentants du Secrétaire général, y compris l’Envoyé spécial pour les enfants et l’Envoyé spécial pour les jeunes réfugiés, à mieux coordonner leurs actions dans la concertation s’agissant des besoins des jeunes en temps et au lendemain de conflit;

20.   Prie le Secrétaire général de réaliser une étude sur l’apport des jeunes aux processus de paix et au règlement des conflits afin de recommander des mesures d’ordre local, national, régional et international efficaces, et de mettre les résultats de cette étude à sa disposition et à celle de tous les États Membres de l’Organisation des Nations Unies;

21.   Prie également le Secrétaire général de mentionner, dans les rapports qu’il établit au sujet des questions dont le Conseil est saisi, les mesures prises en application de la présente résolution, y compris des informations sur les jeunes en temps de conflit armé et l’existence de mesures intéressant la prévention de conflit, les partenariats, la participation, la protection, le désengagement et la réinsertion des jeunes sous l’emprise de la présente résolution;

22.   Décide de rester activement saisi de la question.

 

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